Quando nós vamos ambos, de mãos dadas, Quand nous allions tous deux, main dans la main, Colher nos vales lírios e boninas, Récolter dans les vallées marguerites et lis, E galgamos dum fôlego as colinas Nous grimpions les collines pour humer Dos rocios da noite inda orvalhadas; La rosée qui se déposait dans la nuit ;
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Ou, vendo o mar das ermas cumeadas Ou, en voyant la mer du haut des sommets décharnés Contemplamos as nuvens vespertinas, Nous contemplions les nuages du soir, Que parecem fantásticas ruínas Qui ressemblaient à des ruines fantastiques Ao longo, no horizonte, amontoadas: À l’horizon, blottis les uns contre les autres :
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Quantas vezes, de súbito, emudeces! Tant de fois, soudain, tu t’es tue ! Não sei que luz no teu olhar flutua; Sans que je sache quelle lumière flottait dans tes yeux ; Sinto tremer-te a mão e empalideces Je sentais ta main trembler et tu pâlissais ;
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O vento e o mar murmuram orações, Le vent et la mer murmuraient des prières, E a poesia das coisas se insinua Et la poésie des choses s’insinuait Lenta e amorosa em nossos corações. Lentement et amoureusement dans nos cœurs.
18 avril 1842 – Ponta Delgada (Les Açores)- 11 septembre 1891 Ponta Delgada 18 de abril de 1842 – Ponta Delgada, 11 de setembro de 1891
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Traduction Jacky Lavauzelle
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NIRVANA _______________________________________
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Viver assim: sem ciúmes, sem saudades, Vivre ainsi : sans jalousie, sans envie, Sem amor, sem anseios, sem carinhos, Sans amour, sans désir, sans affection, Livre de angústias e felicidades, Libre des angoisses et des félicités, Deixando pelo chão rosas e espinhos; Laissant roses et épines au sol ; * Poder viver em todas as idades; Être capable de vivre à tout âge ; Poder andar por todos os caminhos; Être capable de marcher dans tous les sens ; Indiferente ao bem e às falsidades, Indifférent au bien et au mensonge, Confundindo chacais e passarinhos; Confondre les chacals et les oiseaux; * Passear pela terra, e achar tristonho Se promener sur la terre et trouver triste Tudo que em torno se vê, nela espalhado; Tout ce est autour de vous, dispersé sur elle ; A vida olhar como através de um sonho; Regarder la vie comme à travers un rêve ;
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Chegar onde eu cheguei, subir à altura Atteindre le lieu où je suis, arriver à la hauteur Onde agora me encontro – é ter chegado Où je suis maintenant – c’est avoir trouvé Aos extremos da Paz e da Ventura! Les extrémités de la Paix et de la Fortune !
Sonho que sou um cavaleiro andante. Je rêve que je suis un chevalier errant. Por desertos, por sóis, por noite escura, À travers les déserts, les soleils, la nuit sombre ;
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DIALOGUE Diálogo
A cruz dizia á terra onde assentava, La croix a dit à la terre où elle reposait, Ao valle obscuro, ao monte aspero e mudo: À la vallée obscure, au mont rude et muet :
Viver assim: sem ciúmes, sem saudades, Vivre ainsi : sans jalousie, sans envie, Sem amor, sem anseios, sem carinhos, Sans amour, sans désir, sans affection,
Só! – Ao ermita sozinho na montanha Seul ! – Au solitaire ermite sur la montagne, Visita-o Deus e dá-lhe confiança: Dieu lui rend visite et lui donne sa confiance :
Em vão lutamos. Como névoa baça, Nous luttons en vain. Comme un brouillard terne, A incerteza das coisas nos envolve. L’incertitude des choses nous entoure.
Quando nós vamos ambos, de mãos dadas, Quand nous allions tous deux, main dans la main, Colher nos vales lírios e boninas, Récolter dans les vallées marguerites et lis,
Os que amei, onde estão? Idos, dispersos, Ceux que j’aimais, où sont-ils ? Disparus, dispersés, arrastados no giro dos tufões, entraînés par de violents typhons,
Constantin Sloutchevski Константин Константинович Случевский 26 juillet 1837, Saint-Pétersbourg – 25 septembre 1904, Saint-Pétersbourg 1837, Санкт-Петербург – 1904, Санкт-Петербург
Когда свет месяца бесстрастно озаряет Quand le clair de lune éclaire sans émotion la nuit Заснувший ночью мир и всё, что в нём живет, Le monde endormi et éclaire tout ce qui y vit, Порою кажется, что свет тот проникает Parfois, il semble que cette lumière vienne pénétrer К нам, в отошедший мир, как под могильный свод. Le monde disparu, comme sous une tombe voûtée.
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И мнится при луне, что мир наш — мир загробный, Et il semble, sous cette lune, que nous sommes dans l’au-delà, Что где-то, до того, когда-то жили мы, Dans un quelque part, où l’on vivait avant, Что мы — не мы, послед других существ, подобный Où se trouvent des êtres différents, des êtres vivaient enfermés Жильцам безвыходной, таинственной тюрьмы. Dans une prison mystérieuse et désespérée.
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И мы снуём по ней какими-то тенями, Et nous accourons comme des ombres, Чужды грядущему и прошлое забыв, Ignorant l’avenir et oubliant le passé, В дремоте тягостной, охваченные снами, Dans ce sombre sommeil, saisis par les rêves, Не жизнь, но право жить как будто сохранив… Comme si nous préservions, non la vie, mais le droit de vivre…
Constantin Sloutchevski Константин Константинович Случевский 26 juillet 1837, Saint-Pétersbourg – 25 septembre 1904, Saint-Pétersbourg 1837, Санкт-Петербург – 1904, Санкт-Петербург
Погас заката золотистый трепет… Le frisson doré est sorti du crépuscule … Звезда вечерняя глядит из облаков… L’étoile du soir regarde à travers les nuages … Лесной ручей усилил робкий лепет Un ruisseau forestier transporte un timide babillage И шёпот слышится от тёмных берегов! Et le murmure se fait entendre jusqu’aux rivages sombres !
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Недолго ждать, и станет ночь темнее, Dans peu de temps, la nuit s’assombrira, Зажжётся длинный ряд всех, всех её лампад, Toutes ses lampes s’allumeront, И мир заснёт… Предстань тогда скорее! Et le monde s’endormira … Alors venez donc ! Пусть мы безумные… Пускай лобзанья — яд! Soyons fous … Que les baisers soient du poison !
Constantin Sloutchevski Константин Константинович Случевский 26 juillet 1837, Saint-Pétersbourg – 25 septembre 1904, Saint-Pétersbourg 1837, Санкт-Петербург – 1904, Санкт-Петербург
LA CREATIVITE Да, трудно избежать для множества людей 1898
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Да, трудно избежать для множества людей Oui, qu’il est difficile à éviter pour beaucoup Влиянья творчеством отмеченных идей, L’influente créativité des idées célèbres, Влиянья Рудиных, Раскольниковых, Чацких, L’influence des Rudin, Raskolnikov, Chatsky, Обломовых! Гнетут!.. Не тот же ль гнет цепей, Oblomov ! Ils nous oppriment ! .. Non comme les chaînes oppriment, Но только умственных, совсем не тяжких, братских… Mais mentalement, légèrement, fraternellement … Художник выкроил из жизни силуэт; L’artiste sculpte une silhouette de la vie ; Он, собственно, ничто, его в природе нет! Il n’est rien, il n’est même pas dans la nature ! Но слабый человек, без долгих размышлений, Mais une personne faible, sans grande réflexion, Берет готовыми итоги чуждых мнений, S’accapare des opinions d’autrui, А мнениям своим нет места прорасти, — Sans que puissent germer ses propres opinions, – Как паутиною все затканы пути Comme une toile, tous les chemins sont scellés Простых, не ломаных, здоровых заключений, Par des conclusions simples,continues et saines, И над умом его — что день, то гуще тьма Et au-dessus de son esprit – chaque jour s’épaissit l’amas Созданий мощного, не своего ума… Des créations des puissants esprits, mais non son esprit …
Constantin Sloutchevski Константин Константинович Случевский 26 juillet 1837, Saint-Pétersbourg – 25 septembre 1904, Saint-Pétersbourg 1837, Санкт-Петербург – 1904, Санкт-Петербург
В пышном гробе меня разукрасили, Dans un magnifique cercueil où ils m’ont décoré, А уж я ли красой не цвела? N’ai-je jamais eu une plus grandiose beauté ? Восковыми свечами обставили, — Tour autour de moi tant de bougies, – Я и так бесконечно светла! Si infiniment brillant je suis !
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Медью темной глаза придавили мне, — Mes yeux noirs cuivrés m’écrasaient, – Чтобы глянуть они не могли; Qui ne pouvaient plus regarder ; Чтобы сердце во мне не забилося, Pour que mon cœur ne batte plus, Образочком его нагнели! Une icône a été déposée par-dessus !
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Чтоб случайно чего не сказала я, Alors pour que je ne puisse rien dire, Краткий срок положили — три дня! Ils m’ont mis ici pour peu de temps – trois jours ! И цветами могилу засыпали, Et ils ont rempli ma tombe de fleurs, И цветы придушили меня… Et les fleurs m’ensommeillent puissamment…
Constantin Sloutchevski Константин Константинович Случевский 26 juillet 1837, Saint-Pétersbourg – 25 septembre 1904, Saint-Pétersbourg 1837, Санкт-Петербург – 1904, Санкт-Петербург
Свевая пыль с цветов раскрытых, Balayant le pollen des fleurs découvertes, Семья полуночных ветров La famille unie des vents de minuit Несет, в пылинках, тьмой повитых, Porte, dans cette poussière, des brindilles, Рассаду будущих цветов! Elles-mêmes porteurs des futures fleurs !
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В работе робкой и безмолвной, Dans son œuvre timide et silencieuse, Людскому глазу не видна, Invisible à l’œil humain, Жизнь сыплет всюду горстью полной La vie lance partout par poignées Свои живые семена! Ses graines vivantes !
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Теряясь в каменных наростах Elles se perdent dans les excroissances Гробниц, дряхлеющих в гербах, Des dalles des tombes décrépites, Они плодятся на погостах Elles s’éparpillent dans le cimetière И у крестов, и на крестах. Autour des croix et sur les croix elles-mêmes.
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Кругом цветы!.. Цветам нет счета! Tout autour des fleurs ! .. Des fleurs par milliers ! И, мнится, сквозь движенья их Et, hésitantes, à travers ces frénétiques mouvements Стремятся к свету из-под гнета Luttant à la recherche de la lumière Былые силы душ людских. Les anciennes âmes humaines.
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Они идут свои печали Elles tentent de porter leurs peines На вешнем солнце осветить, Au soleil du printemps lumineux, Мечтать, о чем не домечтали, Rêver des choses qu’elles n’avaient jamais rêvé, Любить, как думали любить… Aimer, comme elles pensaient pouvoir aimer …
Constantin Sloutchevski Константин Константинович Случевский 26 juillet 1837, Saint-Pétersbourg – 25 septembre 1904, Saint-Pétersbourg 1837, Санкт-Петербург – 1904, Санкт-Петербург
Я лежу себе на гробовой плите, Je suis là, allongé sur une pierre tombale, Я смотрю, как ходят тучи в высоте, Je regarde les nuages planant là-haut, Как под ними быстро ласточки летят Comme sous eux volent rapidement les hirondelles И на солнце ярко крыльями блестят. Et au soleil, brillent leurs ailes. Я смотрю, как в ясном небе надо мной Dans ce ciel clair, comme au dessus de moi Обнимается зелёный клен с сосной, Un érable vert enlace fougueusement un pin, Как рисуется по дымке облаков Alors que se dessine sur une brume au loin Подвижной узор причудливых листов. Des motifs variés et changeants par l’agitation des feuilles. Я смотрю, как тени длинные растут, Je regarde les longues ombres s’allonger, Как по небу тихо сумерки плывут, Alors que le crépuscule couvre tranquillement le ciel Как летают, лбами стукаясь, жуки, Alors que volent, frappant leurs fronts contre les vents, les coléoptères, Расставляют в листьях сети пауки… Alors que s’affairent les araignées sur leurs toiles dans les feuilles …
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Слышу я, как под могильною плитой, J’entends des bruits sous une tombe, Кто-то ёжится, ворочает землёй, Quelqu’un grincer des dents, remuer la terre, Слышу я, как камень точат и скребут J’entends comme la pierre est griffée et grattée И меня чуть слышным голосом зовут: Et une petite voix soudain me parle : «Слушай, милый, я давно устал лежать! « Écoute, ma chère, je suis fatigué de dormir depuis tout ce temps ! Дай мне воздухом весенним подышать, Laisse-moi respirer l’air du printemps, Дай мне, милый мой, на белый свет взглянуть, Aide-moi, ma chère, que je regarde la blanche lumière, Дай расправить мне придавленную грудь. Laisse s’épanouir ma poitrine écrasée. В царстве мёртвых только тишь да темнота, Dans le royaume des morts, seuls le silence et les ténèbres, Корни крепкие, да гниль, да мокрота, Les racines fortes, la pourriture et les moisissures, Очи впавшие засыпаны песком, Les yeux enfoncés couverts de sable, Череп голый мой источен червяком, Mon crâne nu dévoré par les vers, Надоела мне безмолвная родня. Fatigué par le silence de mes proches. Ты не ляжешь ли, голубчик, за меня?» Allonge-toi, ma chère, auprès de moi ?«
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Я молчал и только слушал: под плитой Silencieux, j’écoutais attentivement : sous la dalle, Долго стукал костяною головой, La tête osseuse s’est heurtée pendant longtemps Долго корни грыз и землю скрёб мертвец, Pendant longtemps, rognant les racines, grattant le sol, Копошился и притихнул наконец. Après les mouvements frénétique, il se tut enfin. Я лежал себе на гробовой плите, Je me suis alors couché sur la pierre tombale, Я смотрел, как мчались тучи в высоте, A regarder les nuages planant là-haut, Как румяный день на небе догорал, Comme le jour rougi s’efface dans le ciel brûlé, Как на небо бледный месяц выплывал, Alors que la blanche lune flotte déjà dans le ciel, Как летели, лбами стукаясь, жуки, Alors que volent, frappant leurs fronts contre les vents, les coléoptères, Как на травы выползали светляки… Alors que les lucioles rampent sur l’herbe…
Constantin Sloutchevski Константин Константинович Случевский 26 juillet 1837, Saint-Pétersbourg – 25 septembre 1904, Saint-Pétersbourg 1837, Санкт-Петербург – 1904, Санкт-Петербург