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MONSIEUR BROTONNEAU (1914) LE BONHEUR COMME PERIL SOCIAL

Gaston Arman de Caillavet
& Robert de Flers

Monsieur Brotonneau (1914)
Le Bonheur comme péril social

La première de Monsieur Brotonneau, comédie en trois actes, a eu lieu au théâtre de la Porte-Saint-Martin, à la veille de la guerre de 1914, moins de trois mois avant l’attentat de Sarajevo. La reprise eu lieu après la guerre, en 1925, à la Comédie Française avec dans le rôle de Louise, une jeune première, Madeleine Renaud. « Mlle Madeleine Renaud, qui abordait pour la première fois un rôle important du répertoire moderne, a fait apprécier sa jeunesse, sa fraicheur et son ingénuité. » (Robert de Beauplan, La Petite Illustration, n°152) Cette pièce fut scénarisée pour le cinéma par Marcel Pagnol dans un film d’Alexander Esway, avec Raimu dans le rôle de Brotonneau et dans le rôle de Louise, une jeune première aussi, Josette Day. Et le film sortira un mois avant la seconde guerre mondiale…

Mr Brotonneau Robert de Flers et de Caillavet L'illustration n°152 (1)

IL Y A VINGT-ANS QUE CA N’A PAS BOUGE !

Brotonneaux symbolise l’homme intègre et aveugle. Intègre dans son rapport aux valeurs, à son travail, à ses principes. « Quant à M Brotonneau, à neuf heures, mais vous savez, pas de ces neuf heures comme il y en a tant, à neuf heures précises, à neuf heures craquant, pendant que ça sonne, il arrive et il s’installe là dans ce fauteuil, et il y a vingt-huit ans que ça n’a pas bougé… » Aveugle, il est totalement incapable de voir ce qui se passe tout à côté de lui ; ni avec sa femme, Thérèse, ni à son travail, avec Louise. Il est comptable et il comptabilise tout. C’est un métronome. Être juste avant tout, pourrait-être sa devise. La vie est un long et calme fleuve, entre les nombres, les chiffres des bilans et des livres de comptes. C’est un rouage indispensable, incontesté et respecté de la banque, ce que tout le monde reconnaît. Il vit pour son entreprise en laissant filer sa vie.

UN EVENEMENT TRES GRAVE !

La découverte de l’adultère de sa femme avec son amant va introduire un bug dans ses données rangées et si bien classées, dans cette mécanique trop bien huilée. Et ce hasard, inconcevable dans le déroulement linéaire de son existence, suite à une multitude de microéléments perturbateurs, va survenir et permettre la découverte d’une nouvelle terre, d’une audace sans nom, d’une émotion terrible et rassurante : le bonheur. « Depuis vingt-huit ans que j’appartiens à la maison Herrer, c’est la première fois que je ne suis pas arrivé à mon bureau à l’heure précise et j’espérais que cela n’arriverai jamais. Vous le pensez bien, messieurs, pour bouleverser ainsi mes habitudes, il a fallu un évènement très grave… » De cet énorme traumatisme, de ce chaos va émerger une nouvelle existence lumineuse, baignée dans une absolue sérénité. Calme, bonheur et volupté  deviendront aussitôt cette nouvelle hérésie insupportable à ceux qui les entourent.

Mr Brotonneau Robert de Flers et de Caillavet L'illustration n°152 (2)

 

 

LE BONHEUR ET RIEN D’AUTRE

La société aime l’ordre et la rigueur. Mais comment l’ordre bienheureux dans lequel vit Brotonneau peut-il donc faire peur et inquiéter la société ? Son  bonheur, peut-il devenir un poison puissant capable de renverser l’ordre établi et ce qu’il loge en son sein d’hypocrisie ? Le bonheur de Brotonneau est alors révolutionnaire. Lui seul ne s’en doute pas. Qu’ai-je fait de mal ? Semble-t-il susurrer. Paul Eluard disait qu’ «il ne faut pas de tout pour faire un monde ; il faut du bonheur et rien d’autre. » Ce bonheur est fondamentalement égoïste, il se suffit à lui-même. Il libère toutefois sa créativité et la satisfaction avec des choses modestes et non marchandes. Il dit le vrai et n’a pas besoin de subterfuges, de tromperies et de faux-semblants. La société n’y survivrait pas. Plus besoin de se cacher, de créer de coûteux stratagèmes. C’est l’épanouissement individuel. La reprise au pas de la société ne se fera pas attendre. Mr Brotonneau Robert de Flers et de Caillavet L'illustration n°152 (3)

UNE PARTIE DES BEAUTES DU MONDE

Le péché est dans l’acte vertueux de Monsieur Brotonneau. Il effraie les autres par sa passion partagée, qui le bannisse  de facto du paradis bourgeois. Il a péché non contre la Morale, mais contre la morale bourgeoise du groupe. Il a goûté aux joies de la pomme, en découvrant tout ce que l’amour pouvait lui apporter d’épanouissement. Il n’a pas plongé dans la luxure, il a découvert une partie de la vérité et de la grandeur du monde. C’est trop ! Beaucoup trop !

Brotonneau est donc littéralement anormal, en dehors des autres et de leurs habitudes. Il rond le pacte social des relations bien comprises. La puissance du groupe se retourne alors contre lui, avec violence et détermination. Il courbera l’échine si souvent courbée. Les habitudes reviendront dans un ciel sans espoir.

Reprenons le déroulé de la pièce en trois actes. Le premier acte se focalise sur les conséquences de l’adultère. Dans le second, le nouveau couple se découvre avec un amour à deux, suivi d’une relation à trois. Enfin, le dernier acte, la décomposition du couple et le retour inéluctable aux habitudes, aux rancœurs et aux haines. La boucle est bouclée et les bouches ne s’ouvriront que pour pleurer et crier.  

BIEN FAIRE SON TRAVAIL

 Le premier acte montre notre monsieur Brotonneau, caissier principal à la banque Herrer, ponctuel à la minute près, incapable de commettre la moindre faute et la plus petite erreur. Ces patrons le respectent pour cette autorité qu’il a acquise depuis des années. Il est respecté de tous et aimé en cachette par Louise, « pourvu qu’il ne soit pas malade…Vous avez été encore si bon pour moi…Oui…Oui…merci, monsieur Brotonneau, merci… »

Mr Brotonneau Robert de Flers et de Caillavet L'illustration n°152 (4)

Mais Brotonneau n’est pas heureux. Il vient de comprendre que sa femme couchait avec le baron de Berville, qui travaille dans le même bureau, sous ses ordres. Brotonneau fait la part des choses ; il reste digne et remercie même le baron pour son travail, mettant de côté les querelles privées. Le travail avant tout : « parce qu’il le méritait. On doit toujours féliciter les employés quand ils ont bien fait leur travail…C’est comme ça qu’on se les attache. »

DES ARMES ET UN CRI DE GUERRE

Même dans son analyse, Brotonneau reste froid et donne des circonstances atténuantes à sa femme : « je comprends parfaitement ce qui a séduit cette pauvre femme ! Elle est un peu vaniteuse, un peu snob, dans la mesure de ses moyens. Ainsi, dans notre maison, elle ne veut pas voir les gens qui habitent sur la cour. Un jour qu’elle m’attendait ici, en bas, je suis descendu avec M. de Berville. Je l’ai présenté. Nous l’avons invité à Dîner. Il est venu en habit, Mme Brotonneau a été étourdie. Il a parlé beaucoup, un peu bêtement comme tout le monde, mais il paraissait spirituel parce qu’il était en habit…Le lendemain, tout ça me revient peu à peu à la mémoire. Il a écrit pour remercier sur du papier avec ses armes et son cri de guerre. Moi, je n’en ai pas, qu’est-ce que j’en ferais ? »

VOUS AVEZ ETE SOUVENT AIME

Brotonneau ne peut accepter le divorce ni continuer de vivre avec sa femme sous le même toit. L’heure du choix est arrivé. « Je vais donner le choix à Madame Brotonneau…Je vais prier Madame Brotonneau de choisir entre vous et moi…Je sais que ça ne se fait pas, mais je veux le faire…Je ne me fais pas d’illusion. Il est probable que c’est vous qu’elle choisira…Vous avez été souvent aimé. Vous avez eu des histoires, des aventures, ça vous a donné l’allure de la séduction. Moi, je n’ai de prestige auprès de personne. Alors, je crois bien que c’est vous qu’elle suivra. C’est tout. Merci, Monsieur ! »

Mr Brotonneau Robert de Flers et de Caillavet L'illustration n°152 (5)

C’EST TOUT DE MÊME UNE HISTOIRE D’AMOUR !

Et Thérèse Brotonneau choisira l’amant plutôt que le mari. Et pendant ce temps, la belle et attentionnée Louise déclare sa flamme sans plus attendre. « Oui…quand vous marchiez, là, de long en large, la tête levée…avec des gestes si dignes…si nobles…je vous trouvais, il faut me le pardonner, monsieur Brotonneau, je vous trouvais beau…ça ne fait rien, monsieur être trompé, c’est tout de même une histoire d’amour…si vous aviez du chagrin, j’en aurais aussi… »

LE BEAU TEMPS POUR TOUJOURS

Nous retrouvons dans le second acte, Brotonneau et Louise en couple heureux, trois mois plus tard. Le bonheur est complet, les deux amants baignent dans la joie et la félicité. «J’y suis bien…vous avez fait un miracle…je suis content de tout. J’ai confiance dans tout…je ne prends plus jamais mon parapluie. Je crois toujours qu’il fera beau temps. Je vous assure, être aimé, c’est fantastique…Oui, c’est fantastique…J’ai retrouvé mes vingt ans…Moi aussi, j’ai retrouvé les miens. »

EN ETAT DE PECHE MORTEL

Mais revoilà, au milieu de ce bonheur impeccable, Thérèse. Une Thérèse « très fatiguée », au bout du rouleau. La belle histoire n’a duré qu’un temps. Elle veut revenir sur le choix de son compagnon de vie. Elle reconnaît que Brotonneau était la gentillesse même, et fait son mea culpa. « J’ai eu de grands torts envers toi, c’est vrai, je les reconnais…tous, tous…Veux-tu que je les énumère ? » La lune de miel a été de courte durée ; « depuis deux mois, c’est un enfer…Jamais d’histoires, jamais de scènes…lui est autoritaire, tatillon, entêté !…Il ne vous laisse pas parler. Il m’humilie tout le temps ; il ne me présente à personne et il passe ses soirées à me dire que nous sommes dans une situation fausse et que je le fais vivre en état de péché mortel…Ce matin, enfin, nous avons eu une querelle épouvantable. »

La rencontre entre Brotonneau et de Berville se passe mal, à la limite de la correction. Brotonneau ose un « Polisson ! Polisson ! » C’est dire s’il est hors de lui.

LA LOYAUTE VIS-A-VIS DE TOUT LE MONDE

Il va reprendre Thérèse sous sa protection en lui accordant de vivre sous le même toit, mais pas dans le même appartement. Brotonneau continue d’agir loyalement : « je tiens absolument à ce que tu restes. Je veux agir loyalement vis-à-vis de tout le monde. »

L’acte se termine dans cette atmosphère de grandeur d’âme, de loyauté, où Brotonneau « éprouve une satisfaction faite de sincérité et d’honnêteté… » ; Atmosphère que l’on retrouvera amplifiée dans le début du troisième et dernier acte. Nous nageons en plein bonheur. Ils s’estiment, se respectent et font attention les uns aux autres : « de bon cœur », « vous êtes vraiment gentille », « c’est que vous êtes très bienveillante pour moi », « mes compliments pour votre déjeuner », « je ne me méfie pas, j’ai confiance, je suis heureux et je n’ai peur de rien, parce que je vous aime ». Même la bonne rayonne, ravie de trouver une Thérèse moins acariâtre et plus sociable.

DEVENIR UN PERIL SOCIAL !

Mais William Herrer, un des patrons de la banque, avertit Brotonneau. Ça ne peut plus durer. Il ne peut continuer de vivre ouvertement avec deux femmes. Tout le monde a une maîtresse, c’est bien normal, mais vivre heureux avec sa femme et sa maîtresse, voilà que ça dépasse l’entendement bourgeois bienveillant. Brotonneau devient un véritable terroriste, « vous devenez une espèce de péril social. »

Brotonneau, bien entendu, ne voit pas le mal à se faire du bien et à le faire autour de lui ; il ne comprend plus rien, « Je nuis à la société parce que j’ai essayé de diminuer autour de moi la somme de peine et de souffrance ? ». Brotonneau vient de comprendre la force et l’importance des apparences sociales. Le monde est jaloux de lui, car Brotonneau vit en harmonie quelque chose que ce monde ne pourra jamais connaître. « Dans notre monde, un écart ne peut être toléré ! »

LES GENS NE VEULENT PAS QU’ON SOIT HEUREUX

Ce bonheur enlève un peu de la superbe perfection mathématique du Brotonneau du début. Il fait des erreurs comme tout le monde. Il s’est humanisé. Mais son orgueil de comptable perfectionniste en prend un coup. « Non…non…mais non, c’est impossible…Une erreur ?…moi ? …non… non… non… non… Voyons, non… »

Il faut désormais annoncer à Louise que cette communauté à trois ne peut plus perdurer. Louise comprend de suite cette pression sociale qui s’impose, qu’elle est de trop, « les gens ne veulent pas qu’on soit heureux. »

LA PRISON D’UNE VIE MONOTONE ET REGULIERE

Le constat de Brotonneau est défaitiste et désespéré : « Je n’aurais pas dû vous aimer… ou, au moins, j’aurais dû avoir la force de ne pas vous le dire. Un homme comme moi ne peut pas s’échapper de la vie monotone et régulière. » Il faut revenir dans le rang et la norme.

Il reste ce bonheur fugitif, partagé quelques journées. C’est peu et c’est déjà tellement. « Tout ce que j’ai eu de bonheur, au monde, m’est venu de vous. Alors, si vous avez du chagrin… un peu de chagrin, dites-vous ça…J’ai été bien contente… ici …bien contente… »

Voilà Brotonneau de nouveau seul avec Thérèse, comme avant. Le naturel revient vite au galop. A la fin de l’acte, Thérèse s’en prend violemment à la bonne et remontre sa nature autoritaire : « Vous pourriez faire attention, tout de même, à fermer votre porte. C’est toujours la même chose ! … Je vous prie de vous taire et de ne pas parler sur ce ton-là. » Revoilà un couple bourgeois ordinaire comme les autres aiment, fait de rancœur et de haine.

Le reste d’humanité est là. « L’orgue de  Barbarie se remet à jouer dans la cour l’air des ‘Petits paniers’ qu’il joua au second acte. Brotonneau, les yeux fixés devant lui, les mains appuyés sur les genoux, pleure silencieusement. Le rideau tombe lentement. »

Jacky Lavauzelle

 

Textes et photos dans la Petite Illustration n°152 du 7 juillet 1923

Edmond Sée UN AMI DE JEUNESSE : Une amitié étrangère

Edmond Sée
1875 – 1959




Un Ami de jeunesse




Drame
en un acte
Représenté pour la première fois
A la Comédie-Française

Le 14 décembre 1921

Edmond See Un Ami de jeunesse Artgitato Portrait Raphael

UNE AMITIE

ETRANGERE

Dans un Ami de jeunesse, Edmond Sée parle de l’être. Presque dans un sens philosophique. Des questions sur le temps qui passe, la véritable amitié, l’opportunisme, le mensonge et la sincérité, ce qui lie ensemble les êtres, sommes-nous le même à vingt ans et à quarante ans, ou un autre ?, Qu’est-ce qui fait notre identité ? … Rien que ça, mais un peu de tout ça.



 

 

Edmond See Un Ami de jeunesse Artgitato Roger Monteaux & de Féraudy 2

LE FEU DE L’AMITIE
Notre auteur lie l’amitié à la notion d’opportunité, voire l’opportunisme, et la pense à travers l’usure du temps. Chez Aristote, la philia participe pleinement à notre perfection et à notre satisfaction, en un mot au bonheur. Nos protagonistes ont ces images de bonheur dans les yeux. C’était si bien avant ! Mais l’amitié est moins liée à la personne qu’à ses activités, aux relations humaines. Nous ne sommes pas amis par nature. La vie commune de nos deux amis est constitutive de leur amitié. Aristote distingue ainsi la philia et l’homonia, relative à la vie commune. La philia qui en est issue ne se conjugue pas,  dans le temps, avec une longue absence. Elle ne peut croître que dans le temps présent. Comme un feu à besoin d’être alimenté. Nos deux amis vivaient dans ce que les grecs appelaient la prôtè philia, l’amitié première, et non dans la téleia philia, l’amitié achevée.

UN AGREABLE PARFUM DE PHILOSOPHIE
Une œuvre de réflexion. Les critiques de l’époque en sont convaincus, déjà. Alphonse Brisson remarque aussi que l’œuvre « exhale un agréable parfum de philosophie. Il ne s’agit point d’intrigue sentimentale, de querelle amoureuse…L’auteur trace deux portraits d’hommes, oppose plaisamment des âmes qui, tout d’abord pareilles, mais façonnées différemment par la vie sont arrivées à l’antagonisme complet. » La portée philosophique de cette pièce est aussi relevée par Paul Ginesty dans Le Petit Parisien : « ainsi en est-il pour Un Ami de jeunesse, dont on aimerait pouvoir parler plus longuement. Cet acte est riche en idées et en mots d’une philosophie bien humaine. »Edmond See Un Ami de jeunesse Artgitato Roger Monteaux & de Féraudy



DE L’HUMANITE DANS LA SIMPLICITE
Mais cette œuvre de réflexion n’est pas un bloc insipide et lourd. L’émotion est loin d’être absente. La force de l’œuvre est de nous plonger dans une amitié qui fut sincère. Charles Méré, dans l’Excelsior : «il y a plus d’humanité et de sens dans cette pièce si simple, si vraie, et qui, jamais, ne s’écarte du ton de la vie quotidienne, que dans beaucoup d’œuvres prétentieuses. » Robert Dieudonné, dans l’Œuvre : «rarement les auditeurs eurent l’impression d’entendre un dialogue d’un ton aussi juste, de voir vivre devant eux des personnages aussi humains, d’être touchés aux larmes par des sentiments aussi simples, mais aussi profonds. C’est un miracle de réaliser une situation si ordinaire et d’en tirer une telle émotion. »

LA TAVERNE, RUE SOUFFLOT
Deux êtres, jeunes, étudiants, avec une vie commune fusionnelle, indissociable. Des amis communs, des pensées communes et des projets identiques. Même si l’un faisait du droit et l’autre une licence ès lettres. Rien ne les oppose et la poésie cimente le tout. Des grands désirs et des propos enflammés au fond des tavernes parisiennes, rue Soufflot. Puis, les années passent.

HUMBLES ET DEVOUES
Edmond Sée nous installe confortablement, socialement, dans le bureau d’un sous-secrétaire d’Etat dans un des nombreux ministères de l’époque. C’est Le Blumel, joué lors de la première par Roger Monteaux, qui occupe les lieux. Une santé fragile toutefois. On ne peut pas tout avoir. Conscient d’une responsabilité importante, même si elle reste critiquée : « Enfin, par bonheur, nous sommes là, nous autres, humbles et dévoués sous-secrétaires d’Etat. Parce qu’on a beau médire de nous à chaque occasion et même contester souvent notre utilité… » Le Blumel est dans l’amour de soi. Il est son modèle, sa vitrine. Il est désormais son meilleur ami. Il n’a plus d’amis.

Une vingtaine d’années ont passé. Le Blumel est dans l’antichambre des Ministères que tous les sous-secrétaires attendent. Il a quarante ans. Il est fier d’un parcours aussi rapide et fulgurant.




DEUX INSEPARABLES, DEUX FRERES
Quand Le Blumel se rappelle de son amitié, il en a la larme à l’œil. L’espace d’un instant, le voici redevenu l’étudiant rêveur et idéaliste : «Tous les soirs, après les cours, on se retrouvait à l’heure des repas dans un petit café…Rue Soufflot…Je le revois encore…Oh ! Un petit café bien modeste, parce que, dans ce temps-là, on ne roulait pas sur l’or…ça ne fait rien, on vivait, gais, jeunes, insouciants !…On s’amusait…Et puis on travaillait, et pas seulement en vue des examens, non, pour soi-même… On écrivait, on faisait des vers !… Moi aussi… Je crois même qu’à ce moment-là j’ai publié un volume…Vous ne saviez pas ?…Parfaitement ! …Les Ondes sonores, ça s’appelait…Hein ! Quels titres ! Croyez-vous qu’il faut être jeune pour trouver un titre comme celui-là…Ah ! si mes collègues de la Chambre le savaient, et les journaux, qu’est-ce que je prendrais !…Enfin…Lambruche et moi, nous vivions comme deux inséparables, deux frères ; et ça a duré jusqu’au jour où le destin nous a forcés à suivre une route différente. » Puis, la descente en Haute-Garonne, le cabinet d’avocat de papa, le mariage, la politique, les élections réussies, la montée vers Paris, les premiers postes au cabinet d’un ministre.

SAISI, COURBE ET BROYE
Pour son ancien ami Lambruche, une vie différente l’attendait : le manque d’argent, une infirmité auditive, des enfants tyrans, un mariage avec la Lulu, et tout qui part en queue de poisson, « malheureusement, il y a la vie, et quand celle-là commence à vous saisir, à vous courber, à vous broyer sous elle ! », les petits boulots, la naissance de l’enfant, suivie de sa maladie, puis de sa mort, le piano-bar, les cafés concerts, la boisson, l’alcoolisme, les soirées à écrire des poèmes qui ne seront jamais lus, « je m’asseyais devant ma table et j’écrivais…sans arrêt…jusqu’au matin ! ».

LA DELIVRANCE DE L’ÂME
Mais malgré tous les maux de la terre qui s’abattent sur lui, Lambruche est resté le même, presque le même. Une âme d’écrivain bohème. Une espérance dans la beauté des vers. Une émotion. Une vie à fleur de peau. « C’est pendant cette période-là que j’ai fait mes plus beaux vers…tout mon poème : la Délivrance de l’âme ! »

UN BONHOMME A DRÔLE DE MINE
Lambruche n’a pas changé. Physiquement, il est détruit. Mais dans ses rêves, dans ses envies, il est toujours le même. Mais les autres voient cette masse informe et sans âge. Ainsi l’accueil par le domestique est sans appel : « quelqu’un de pas très…enfin…un drôle de bonhomme…avec un chapeau…et puis un cache-nez…l’air bizarre, autant dire… », il rejoint celui de Mme Le Blumel, « il n’est même pas très poli, entre parenthèses, c’est à peine s’il a touché le bord de son chapeau quand je suis passée…Et je suis de l’avis de Pierre, il a une drôle de mine…moi, il m’a presque fait peur. »

JE NE SUIS PAS MECHANT !
Mais il a quelque chose en lui qui fait encore plus peur : il dit ce qu’il pense. La vérité sort de sa bouche. Elle ne lui attire pas que des sympathies, loin de là ! Cette spontanéité est la source de ses malheurs. « Mais, moi…je suis comme ça ! …Je ne sais pas dissimuler, mentir…J’ai horreur des courbettes, de l’aplatissement. Tant pis, tant pis si ça me fait du tort ! (avec mélancolie) Oh ! ça m’en a déjà fait…et aux mieux aussi ! Je devrais me surveiller mieux, me dominer davantage. Ma pauvre petite femme me le répète assez souvent…Elle sait bien, elle, que je ne suis pas méchant…mais elle prétend que je le parais…et puis aigri ! …Et il y a peut-être aussi un peu de tout ça, tout de même ! C’est vrai, à force d’avoir lutté, souffert…on finit par rendre les autres responsables de ce qui vous arrive…et ils s’en aperçoivent…ils  vous en veulent…Et, alors…quelquefois, ça les décourage de vous faire du bien…(un long silence) Enfin ! si je t’ai dit des choses qui t’ont offusqué…ou blessé…il ne faut pas trop m’en garder rancune. »

QUAND TU CHERCHERAS UNE TRIBUNE PLUS NOBLE
Lambruche, l’exclu, veut, lui, pouvoir aider Le Blumel, mais autrement que par l’argent, bien sûr. C’est lui, le plus déshérité de la vie qui propose son aide au sous-secrétaire, il y a toujours quelque chose à donner afin d’aider l’autre, avec de réelles bonnes intentions :  « quand tu deviendras un homme comme les autres…un homme libre de penser, d’exprimer ses idées et que tu chercheras une autre tribune plus noble…Eh bien, ce jour-là, viens me trouver, viens nous trouver à la Revue…Nous y sommes au complet, et entre nous : mais ça ne fait rien, pour toi, on se serrera les coudes…on te fera une petite place, ou une grande…Celui qui a écrit les Ondes sonores ne sera jamais un étranger pour nous…On l’accueillera comme un enfant prodigue. »

QUELQUE CHOSE DE SOURNOIS
Avec la vérité, Lambruche sait que cette entrevue sera la dernière. Il observe les réactions de Le Blumel et il comprend. Il lui dit adieu. « Au commencement, oui, au début de notre rencontre, j’ai eu l’impression que tu m’accueillais sans déplaisir…avec sympathie…Et puis après…au fur et à mesure qu’on causait, peu à peu, il m’a semblé que quelque chose de sournois…de mauvais, d’hostile s’élevait entre nous, t’éloignait, te détachais de moi…que tu ressentais comme un malaise…une déception à m’écouter. » Le Blumel reste fourbe jusqu’à la fin. Il est trop différent de cet hurluberlu. Plus que cela, il peut lui nuire dans la progression fulgurante de sa carrière. Le « je vais tâcher de trouver quelque chose… » n’est fait que pour se donner une contenance. Le Blumel en fait son parti : il ne verra plus. Il n’a pas le cran d’en parler à Lambruche, mais à Dautier son collaborateur : « s’il revient…vous le recevrez…Mais après, sans me déranger. Vous entendez, sous aucun prétexte…Ah ! vous aviez raison, tout à l’heure, oui, les amis de jeunesse ! Dites que le ministre reçoit !… »

Edmond See Un Ami de jeunesse Artgitato Roger Monteaux & Fresnay

IL FAUT SORTIR LES ENFANTS DES MAINS DES FEMMES
Même la venue de Lambruche était intéressée pour notre sous-secrétaire. Le Blumel voulait faire de son fils un homme. « Il est bien jeune ! Pour elle il le sera toujours ! N’empêche que quand un gamin va sur ses sept ans ! …Sans compter que rien n’est mauvais pour lui comme l’oisiveté ; or, depuis quinze jours que son institutrice est malade et qu’il est livré à lui-même, la vie devient intenable. Heureusement que tout ça va changer…Parce qu’à un moment donné il faut sortir les enfants des mains des femmes, si l’on veut qu’ils deviennent des hommes à leur tour… » Et dans cette idée, afin d’élever son fils, de le rendre autonome, masculin, de n’être pas dérangé par les cris de son fils, il en arrive à penser à Lambruche en précepteur ! Pas pour faire un brin de discussion et parler du bon vieux temps …

Mais la pièce se lit sur le regard de Le Blumel qui se décompose au fil des révélations de Lambruche sur le cours de sa vie – « nerveusement », « gêné », « protestant », « très ennuyé », « contraint », « crispé », « vaincu ».

Les deux hommes se sont séparés. A jamais. Les amis ne se sont pas retrouvés. Même les souvenirs partagés ont volé en fumée. Il est loin le temps de la rue Soufflot. Il reste un livre de Le Blumel dans la bibliothèque de Lambruche. Les ondes sonores se sont perdues dans un recoin temporel.

Jacky Lavauzelle

 

Edmond Sée reste d’abord reconnu pour les critiques théâtrales qu’il a réalisées pendant une vingtaine d’années, de 1920 à 1940. L’Ami de jeunesse qui a été représenté en 1921 à la Comédie-Française n’est pas une première pour cet auteur habitué dans les pièces ramassées et courtes. Nous lui devons son excellent Théâtre français contemporain, paru en 1928.

 

Texte paru dans la Petite Illustration n°57
du 31 décembre 1921
Photos de Clair-Guyot pour la représentation à la Comédie-Française
Photo d’Edmond Sée par Harlingue
Composition affiche Artgitato

Pour la première les personnages étaient joués par :
M. de Féraudy (Lambruche)
Roger Monteaux (Le Blumel)
Madame de Chauveron (Mme Le Blumel)
M. Fresnay (Secrétaire de Le Blumel)
M. Chaize (un domestique)

Alfred CAPUS – Notre Jeunesse – Comédie en quatre actes – 1904

ALFRED CAPUS

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Jacky Lavauzelle*******

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Alfred CAPUS
NOTRE JEUNESSE
Comédie en quatre actes
Jouée pour la première fois en 1904
Au Théâtre de la Comédie-Française

VERS L’ÂGE  DE LA RESIGNATION

Jacky Lavauzelle Alfred Capus Notre jeunesse Artgitato Baigneurs sur la plage de Trouville Eugène-Louis BOUDIN

 Jules Lemaître dans La Revue des Deux-Mondes souligne sur Alfred Capus que ses « sujets préférés, c’est la chasse à l’argent, mais considérée surtout chez ceux qui n’en ont pas ; c’est très simplement le mal qu’on a à gagner sa propre vie ; c’est la difficulté des débuts pour beaucoup de jeunes gens dans une société tout « industrialisée » et où la concurrence devient de jour en jour plus dure…

LE MONDE DES PROFESSIONS PARASITES
M. Capus connaît très bien le monde des bizarres professions parasites créées par ces nouvelles conditions sociales, le monde des coulissiers, des hommes d’affaires, des agents de publicité…Et il ne connaît pas moins bien la vie de la petite bourgeoisie, parisienne et provinciale. »

Dans Notre Jeunesse, Alfred Capus nous installe dans la grande bourgeoisie en villégiature à Trouville.  Lucien, un des personnages centraux,  a une entreprise qui vient de son père, Monsieur Briant. Il l’a sauvée de la banqueroute. Lucien est placé entre deux fortes personnalités : son père et sa femme Hélène.

NOUS SOMMES A LA VEILLE DE TRES GRAVES EVENEMENTS Dans le premier acte, nous retrouvons un tableau qui pourrait être un tableau de l’économie d’aujourd’hui. Nous sommes à l’orée du XXe siècle. Il parle à son ami Jacques Chartier, un bourgeois rentier : « Tu ne comptes donc pour rien les préoccupations de toutes sortes, l’incertitude du lendemain, tous les risques, tous les dangers de ma situation ? Nous sommes en pleine crise industrielle et commerciale…Oui, oui, ces mots-là ne signifient pas grand’ chose pur toi qui est oisif, qui vit dans un monde d’insouciance et de fantaisie…Tu es un consommateur, je suis un producteur…Pourvu qu’on te fournisse le luxe et le confortable dont tu as besoin, tu es tranquille et tu dis que tout est pour le mieux…Mais, moi, je suis obligé de te les fournir, je ne suis pas aussi rassuré…Je sais par les temps qui court, l’entreprise la plus florissante peut se trouver ruinée du jour au lendemain, par suite d’une grève, d’une catastrophe quelconque ou simplement de la concurrence étrangère…Nous sommes à la veille des très graves événements. »

Alfred Capus Analyse Jacky Lavauzelle

LES GREVES A REPETITION
Les débuts de ce siècle sont, en effet, bouleversés par les mouvements sociaux d’une ampleur exceptionnelle. Sont touchés les usines Schneider au Creusot, les usines de Saône-et-Loire, la Compagnie des Mines de Houilles de Blanzy, la grève des tullistes de Calais…dans l’espoir d’une grève générale. La loi du 30 mars 1900 de Millerand, la réforme du droit du travail, la journée de onze heures, réglemente la durée légale du travail et ouvre la voie à dix ans de modifications sociales et législatives, dix heures par jour et un maximum de soixante heures par semaine avec la loi de 1904…

IL NE MANQUAIT PLUS QU’UNE GREVE !
Dans le troisième acte, Monsieur Briant, le père de Lucien, doit rentrer à cause des mouvements sociaux qui agitent son entreprise : « Partons donc tranquillement et le plus tôt possible. D’autant plus que dans le courrier de ce matin, je trouve d’assez mauvaises nouvelles de là-bas…Bruits de grève…réclamations…Ma présence est nécessaire. En tout cas, moi je pars. – (Lucien) Et je vous accompagne, comme vous pensez…Ah ! il ne manquait plus qu’une grève !… – (M. Briant) Ne nous dissimulons pas que nous l’aurons un jour ou l’autre. – (Lucien) Quelle existence ! Et quel avenir !»

LA LOI FATALE
Mais nous sommes dans cette accélération des fusions des entreprises, des absorptions des petites par les grandes, dans la création des gros groupes, les premiers trusts voient le jour ; dans l’acte II : « – (Serquy) Vous serez absorbés tôt ou tard…Voyez-vous, la petite industrie doit se fondre dans la grande. C’est la loi fatale. Vendez-moi votre maison, je vous garde comme gérants, votre fils et vous. Vous ne risquerez plus rien et vous aurez autant de bénéfices. – (Monsieur Briant) Vous appelez ça un ‘trust’ aujourd’hui, je crois ? »

SE FAIRE DES OPINIONS RASSURANTES
Entre l’inquiétude des affaires, de ce qui deviendra la mondialisation capitaliste, le rentier Chartier oppose la confiance : « Un grand homme a dit : « ce qui émeut les hommes, ce n’est point les choses, mais leur opinion sur les choses. » Je tâche donc de me faire le plus possible des opinions rassurantes. »

Nous sommes dans les années qui suivent les premiers grands scandales politico-financiers. La Libre Parole relève en 1892 la corruption liée au Canal de Panama. Suivront les nombreuses affaires retentissantes, la banqueroute du banquier Oustric en 1929 avec la démission du ministre de la Justice, l’affaire Hanau en 1925, l’affaire Stavisky…

UN CARACTERE DE JEUNESSE
Les deux hommes s’opposent dans les affaires, dans leurs émotions et dans leurs caractères. C’est Lucien qui le précise le mieux : « Tu as toujours ton humeur d’autrefois, ton caractère de jeunesse. C’est ce que je t’envie le plus. Il y a des êtres qui communiquent pour ainsi dire de la frivolité à tous les événements où ils se mêlent. Tu es un de ces êtres-là. Moi, au contraire, tout ce qui m’arrive devient immédiatement grave, presque tragique…Aucune de mes aventures de jeune homme n’a bien fini : aucune ne m’a laissé un souvenir joyeux. »

Lucien ne croit pas si bien dire. Lucienne Gilard, qui arrive du village d’Espeuille à proximité de Limoges, une enfant naturelle, n’est autre que sa fille qu’il a eu dans sa jeunesse. Energique, désintéressée, elle recherche, non pas son père auprès duquel elle n’espère rien, mais l’ami de son père : Jacques Chartier.

Alfred Capus Jacky Lavauzelle

DES MILITANTES PLUS NOMBREUSES
Elle est une figure de l’indépendance féminine de son époque. En ces années 1900, le rôle de la femme commence à être reconnu. Les avancées sont modestes, mais notables. Depuis le rôle joué par Louise Michel en 1871, la création de l’Association pour les droits des femmes en 1870, le journal la Fronde, le Conseil National des Femmes Françaises, les militantes sont de plus en plus nombreuses venues de tous les horizons de la société française.

UN PEU A LA FACON DES HOMMES
Ainsi Lucienne est une femme de son temps et cherche à ne dépendre de personne, à être l’égale des hommes : « Mon rêve eût été à ce moment-là de choisir une de ces professions comme il y en a aujourd’hui pour les femmes qui n’ont pas de fortune. Une de mes camarades de pension, par exemple, est employée dans une imprimerie ; une autre est à la comptabilité d’une maison de banque. Je pensais que je pourrais trouver, moi aussi, une situation analogue, où, à la condition de travailler, on est indépendante un peu à la façon des hommes. Ce rêve-là, je le réaliserai peut-être un jour, je l’espère. » (Acte III)

UNE ECLATANTE REPUTATION D’HEROÏSME ET DE BEAUTE
Bien entendu, Alfred Capus place son histoire et ces héros dans une opposition des générations. C’était mieux avant, quoique. « Si quelqu’un ose insinuer que nos ancêtres ne valaient pas mieux que nous, on le traite de cerveau débile ou de mauvais citoyen ; et il faut aujourd’hui, pour louer ses semblables, plus d’audace qu’autrefois pour les flétrir. Eh bien ! moi, Monsieur Briant, je ne sais pas si notre époque laissera dans l’histoire une éclatante réputation d’héroïsme et de beauté, mais je la trouve, malgré ses tares et ses vices, plus cordiale et plus habitable que la vôtre. Nous n’avons plus certaines vertus que vous aviez, mais nous avons une sensibilité que vous n’aviez pas ; et nous sommes plus émus que vous par la souffrance, l’inégalité et la misère. » (Chartier à Monsieur Briant, Acte IV)… Audace, héroïsme, souffrance, misère ; nous ne sommes qu’à quelques années du début de la seconde guerre mondiale…

L’ÂGE DE LA RESIGNATION
Les générations ne se raccorderont pas complétement, mais Lucienne retrouvera son père in-extremis. Et la dernière vision sera sa découverte de son grand-père en partance sur le seuil de la maison. Il est l’heure de partir. Hélène penchée auparavant lui susurrait : « Nous vivrons précieusement les quelques années de santé et de force qui nous restent, et alors nous arriverons avec moins d’angoisse à l’âge de la résignation. » (Acte IV)

Jacky Lavauzelle

Jacky Lavauzelle Artgitato