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CATULLE CATULUS XIII ad Fabullum A FABULLUS

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CATULLE CATULLUS XIII

litterarumLittérature Latine
Catulle

Poeticam Latinam

Traduction Jacky Lavauzelle

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CATULLE – CATULLUS
84 av J.-C. – 54 av J.-C.

POESIE XIII

A FABULLUS

 

ad Fabullum

***

Cenabis bene, mi Fabulle, apud me
Comme tu dîneras bien chez moi, mon cher Fabullus,
paucis, si tibi di favent, diebus,
Bientôt, si les dieux te sont favorables,
si tecum attuleris bonam atque magnam
Si tu apportes avec toi de bons et de nombreuses
cenam, non sine candida puella
Victuailles,  une belle et jolie fille
 et vino et sale et omnibus cachinnis.
et du vin et de l’esprit et des rires pour tous.
haec si, inquam, attuleris, venuste noster,
Arrive avec toutes ces choses, mon gracieux ami,
cenabis bene: nam tui Catulli
et nous mangerons bien : car en effet ton Catulle
plenus sacculus est aranearum.
A la bourse pleine de toiles d’araignées.
sed contra accipies meros amores
Mais son affection, elle, est pure
seu quid suavius elegantiusvest:
Et tu auras quelque chose de plus suave encore :
nam unguentum dabo, quod meae puellae
Des parfums, que ma jeune maîtresse,
donarunt Veneres Cupidinesque,
A eu en don de Venus et de Cupidon ;
quod tu cum olfacies, deos rogabis,
lorsque tu prendras une bouffée de ces fragrances, tu demanderas aux dieux,
otum ut te faciant, Fabulle, nasum.
Fabullus, de te rendre ton nez.

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CONTRE ASINUS

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Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO












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Catulle – Catullus
XIII

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LA CANAILLE & LES DELICATS
par Ferdinand Brunetière
1882

On a voulu faire de Catulle, sans arguments bien solides, un poète aristocratique, un poète du grand monde, comme de sa Lesbie, sur des inductions plutôt que sur des preuves, ce que Brantôme appelait « une grande et honnête dame. » Je persiste à ne pas croire, pour ma part, que Lesbie fût la célèbre Clodia, mais je crois que bon nombre des fréquentations de Catulle furent parmi la bohème littéraire de Rome. Au surplus, la conciliation n’est pas si difficile. Ce que nous savons, en effet, c’est que, lorsque l’adolescent de Vérone arriva de sa province dans la capitale, il y subsistait, sous le raffinement de quelques habitudes, sous l’étalage du luxe et sous l’apparence de la civilisation, un grand fonds d’antique brutalité romaine. Si nous en pouvions douter, nous rapprendrions au moins de certaines épigrammes de Catulle lui-même, plus grossières que mordantes, et dont l’outrageuse crudité passe tout. C’est bien fait à M. Rostand de nous les avoir traduites. On ne peut pas juger d’un poète en commençant par faire exception de toute une partie de son œuvre, qui peut-être est celle que les contemporains en ont presque le plus goûtée. Là où Catulle est bon, il va jusqu’à l’exquis, et c’est bien de lui que l’on peut dire aussi justement que de personne qu’il est alors le mets des délicats ; mais là où il est grossier, il l’est sans mesure, et c’est bien encore de lui que l’on peut dire qu’il est le charme de la canaille. Or, à Rome, en ce temps-là, dans le sens littéraire de l’un et l’autre mot, la canaille et les délicats, c’était presque tout un. On ne distinguait pas encore, selon le mot d’Horace, la plaisanterie spirituelle de l’insolente rusticité. La curiosité de l’intelligence, vivement éveillée, capable de goûter les finesses de l’alexandrinisme, était en avance, pour ainsi dire, sur la rudesse des mœurs et la vulgarité des habitudes mondaines. Quand on grattait ces soupeurs qui savaient apprécier les jolies bagatelles du poète, on retrouvait le paysan du Latium, qui s’égayait, au moment du vin, à faire le mouchoir. La raillerie, comme à la campagne, s’attaquait surtout aux défauts ou disgrâces physiques. Je sais bien que, jusque dans Horace, la grossièreté du vieux temps continuera de s’étaler, mais ce ne sera plus de la même manière naïvement impudente. Au temps de Catulle, la délicatesse n’avait pas encore passé de l’esprit dans les manières. Quand il s’élevait seulement un nuage sur les amours du poète et de sa Lesbie, le docte traducteur de Callimaque s’échappait en injures de corps de garde. Cette société très corrompue ne s’était pas encore assimilé la civilisation grecque. Elle s’essayait à la politesse, elle n’y touchait pas encore. Et sous son élégance toute superficielle, elle manquait étrangement de goût. — Il me paraît que, si l’on examinée quel moment de notre histoire la plupart de ces traits conviennent, on trouvera que c’est au XVIe siècle, dans le temps précis que le contact des mœurs italiennes opérait sur la cour des Valois le même effet qu’à Rome, sur les contemporains de César, le contact des mœurs de la Grèce.

Ferdinand Brunetière
Revue littéraire
À propos d’une traduction de Catulle
Revue des Deux Mondes
Troisième période
Tome 54 –  1882

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CATULLE CATULLUS XII CONTRE ASINUS

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CATULLE CATULLUS XII

litterarumLittérature Latine
Catulle

Poeticam Latinam

Traduction Jacky Lavauzelle

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CATULLE – CATULLUS
84 av J.-C. – 54 av J.-C.

POESIE XII

ASINUS

CONTRE ASINUS

 

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Marrucine Asini, manu sinistra
Asinus, toi le Marrucin*, à la main gauche
non belle uteris: in ioco atque vino
Si preste, frétillant gaiement sous les effets du vin
tollis lintea neglegentiorum.
Tu subtilises les mouchoirs des convives négligents.
Hoc salsum esse putas? Fugit te, inepte:
Trouves-tu cela plein d’esprit ? Quel sot tu fais !
 quamvis sordida res et invenusta est.
Quelle vilénie sordide !
Non credis mihi? Crede Pollioni
Tu ne me crois pas ? Alors crois Pollion,
 fratri, qui tua furta vel talento
Ton frère, que tes larcins, en talents,
mutari velit—est enim leporum
Tente d’effacer – connaisseur, lui aussi
differtus puer ac facetiarum.
Des farces et de la bonne humeur.
Quare aut hendecasyllabos trecentos
Alors maintenant, tu peux attendre trois cents
exspecta, aut mihi linteum remitte,
Billets de ma part, ou retourne-moi vite mon mouchoir,
quod me non movet aestimatione,
Nullement à cause du prix,
verum est mnemosynum mei sodalis.
Mais car il s’agit d’un cadeau de mes amis.
Nam sudaria Saetaba ex Hiberis
En fait, un mouchoir de Sétabis** en Hibérie
miserunt mihi muneri Fabullus
Envoyé par Fabullus
et Veranius; haec amem necesse est
et Veranius ; j’y tiens donc comme tout ce qui me vient
ut Veraniolum meum et Fabullum.
De Verannius et de Fabullus.

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* Marrucin

Les Marrucins est une tribu de l’Italie (Est) -Ce sont des descendants des Ausones et des Sabins : « Par ces Sabelli ou Samnites, il faut entendre ceux que l’on appelait Hirpini, qui touchaient la Pouille au nord, & la Lucanie à l’est. Tous ces peuples descendaient originairement des Ausones, qui depuis prirent le nom d’Osques, & ensuite celui de Sabins ; ceux-ci formèrent différentes peuplades, qui furent les Aurunces, les Fidicins, les Samnites, les Picentins, les Vestins, les Marrucins, les Pélignes, les Marses, les Eques, & les Herniques ; les Samnites produisirent les Trentaniens, les Lucaniens, les Campaniens, & les Hirpins ; enfin les Lucaniens donnèrent naissance aux Bruttiens. » (Louis de Jaucourt  L’Encyclopédie Première Edition 1751 – Tome 14)

** Sétabis

Sétabis ou Saetabis, aujourd’hui Xàtiva en Espagne, dans la Province de Valence.

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CONTRE ASINUS

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Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO












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Catulle – Catullus
XII

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LA CANAILLE & LES DELICATS
par Ferdinand Brunetière
1882

On a voulu faire de Catulle, sans arguments bien solides, un poète aristocratique, un poète du grand monde, comme de sa Lesbie, sur des inductions plutôt que sur des preuves, ce que Brantôme appelait « une grande et honnête dame. » Je persiste à ne pas croire, pour ma part, que Lesbie fût la célèbre Clodia, mais je crois que bon nombre des fréquentations de Catulle furent parmi la bohème littéraire de Rome. Au surplus, la conciliation n’est pas si difficile. Ce que nous savons, en effet, c’est que, lorsque l’adolescent de Vérone arriva de sa province dans la capitale, il y subsistait, sous le raffinement de quelques habitudes, sous l’étalage du luxe et sous l’apparence de la civilisation, un grand fonds d’antique brutalité romaine. Si nous en pouvions douter, nous rapprendrions au moins de certaines épigrammes de Catulle lui-même, plus grossières que mordantes, et dont l’outrageuse crudité passe tout. C’est bien fait à M. Rostand de nous les avoir traduites. On ne peut pas juger d’un poète en commençant par faire exception de toute une partie de son œuvre, qui peut-être est celle que les contemporains en ont presque le plus goûtée. Là où Catulle est bon, il va jusqu’à l’exquis, et c’est bien de lui que l’on peut dire aussi justement que de personne qu’il est alors le mets des délicats ; mais là où il est grossier, il l’est sans mesure, et c’est bien encore de lui que l’on peut dire qu’il est le charme de la canaille. Or, à Rome, en ce temps-là, dans le sens littéraire de l’un et l’autre mot, la canaille et les délicats, c’était presque tout un. On ne distinguait pas encore, selon le mot d’Horace, la plaisanterie spirituelle de l’insolente rusticité. La curiosité de l’intelligence, vivement éveillée, capable de goûter les finesses de l’alexandrinisme, était en avance, pour ainsi dire, sur la rudesse des mœurs et la vulgarité des habitudes mondaines. Quand on grattait ces soupeurs qui savaient apprécier les jolies bagatelles du poète, on retrouvait le paysan du Latium, qui s’égayait, au moment du vin, à faire le mouchoir. La raillerie, comme à la campagne, s’attaquait surtout aux défauts ou disgrâces physiques. Je sais bien que, jusque dans Horace, la grossièreté du vieux temps continuera de s’étaler, mais ce ne sera plus de la même manière naïvement impudente. Au temps de Catulle, la délicatesse n’avait pas encore passé de l’esprit dans les manières. Quand il s’élevait seulement un nuage sur les amours du poète et de sa Lesbie, le docte traducteur de Callimaque s’échappait en injures de corps de garde. Cette société très corrompue ne s’était pas encore assimilé la civilisation grecque. Elle s’essayait à la politesse, elle n’y touchait pas encore. Et sous son élégance toute superficielle, elle manquait étrangement de goût. — Il me paraît que, si l’on examinée quel moment de notre histoire la plupart de ces traits conviennent, on trouvera que c’est au XVIe siècle, dans le temps précis que le contact des mœurs italiennes opérait sur la cour des Valois le même effet qu’à Rome, sur les contemporains de César, le contact des mœurs de la Grèce.

Ferdinand Brunetière
Revue littéraire
À propos d’une traduction de Catulle
Revue des Deux Mondes
Troisième période
Tome 54 –  1882

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JEAN LOUIS VIVES – Juan Luis Vives BNE MADRID – 胡安·路易斯·比韦斯 – Жан Луи Вивес

Madrid – Мадрид – 马德里
BIBLIOTECA NACIONAL DE ESPAÑA
LA BIBLIOTHEQUE NATIONALE D’ESPAGNE
BNE MADRID
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Madrid Blason Artgitato  Madrid L'Ours & L'arbousier Artgitato La estatua del oso y del madroño

Photo
Jacky Lavauzelle

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Madrid Drapeau Artgitato



 BNE MADRID
BIBLOTECA NACIONAL DE ESPAÑA
LA BIBLIOTHEQUE NATIONALE D’ESPAGNE
– 西班牙国家图书馆
Национальная библиотека Испании




JUAN LUIS VIVES
JEAN LOUIS VIVES
胡安·路易斯·比韦斯
Жан Луи Вивес
1492-1540

BNE Biblioteca Nacional de España Biblitothèque Nationale d'Espagne Artgitato Madrid Luis Vivès


LES COMMENTAIRES DE JEAN LOUIS VIVES
SUR SAINT-AUGUSTIN

« Saint-Augustin : De la Cité de Dieu contenant le commencement et procez d’icelle cité avec une deffence de la Religion chrestienne contreles erreurs et medisances des Gentils, heretiques et autres ennemisde l’Eglise de Dieu, illustrée des commentaires de Jean Louis Vives de Valance, le tout fait francaïs par Gentian Hervet d’Orléans ; chanoine de Rheims, et enrichie de plusieurs annotations des histoires anciennes et modernes par François de Belleforest, Comingeois… »

Philippe Tamizey de Larroque
La bibliothèque de Mlle Gonin
Veuve Lamy, 1885 – pp. 5-37

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Jean-Louis Vivès
philosophe
, érudit, humaniste,
pédagogue hors de pair

Si la métaphore n’était un peu bien usée, on dirait que Valence est le séjour des muses. Aucune ville d’Espagne n’a mieux servi les études libérales ; aucune n’a mieux compris cette religion de l’art dont les dogmes sont éternels ; aucune n’est restée plus fidèle au culte des sciences et des lettres. L’université de Valence, plus heureuse que ses deux grandes rivales, Salamanque et Alcala de Hénarès, est encore vivante, toujours prospère, sinon aussi glorieuse que par le passé. Sa gloire consiste maintenant à glorifier les hommes de mérite qui l’ont illustrée. La grande salle des actes, garnie de bancs en amphithéâtre, est littéralement tapissée de portraits presque tous remarquables. La variété des costumes et des physionomies n’est pas le moindre attrait de cette belle galerie composée de professeurs de toutes les facultés, de religieux de tous les ordres, de docteurs séculiers et clercs, de prélats, de princes de l’église. Il n’y a pas une seule médiocrité parmi ces illustrations locales, proposées comme exemples aux étudiants. Au centre de la cour d’honneur, entre la bibliothèque et les collections de ce musée d’hommes illustres, se dresse la statue en marbre blanc du plus illustre de tous, Jean-Louis Vivès, philosophe, érudit, humaniste, pédagogue hors de pair, qui partagea avec Erasme et Budé le triumvirat du savoir dans le siècle de l’érudition, et brilla parmi les plus doctes par la profondeur des connaissances et la solidité du jugement. »

Revue des Deux Mondes tome 71, 1885
J.-M. Guardia
Une excursion aux îles Baléares
Valence

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VIVES ENTRE ERASME ET BUDEE

La contagion s’était manifestée de bonne heure : elle vint d’abord de l’Italie, C’est là en effet que les écrivains connus sous le nom d’humanistes, qui inaugurèrent en Espagne la renaissance des lettres, cherchèrent dès la fin du XVe siècle leurs inspirations. Antonio de Lebrixa est le représentant le plus remarquable de cette classe de penseurs et d’érudits. À leur approche, la vieille scolastique frémit. Le célèbre savant Louis Vivès raconte qu’à Valence, sa patrie, son vieux maître, dévoué à la routine de l’école, faisait déclamer ses élèves contre les novateurs ; lui-même avoue qu’il avait composé contre Antonio de Lebrixa des déclamations détestables et vivement applaudies. Des succès de ce genre ne pouvaient séduire un homme tel que Vivès, l’esprit le plus judicieux de son temps. De bonne heure il quitta l’Espagne, et profita si bien de son séjour dans les universités du nord, qu’il ne tarda point à prendre rang lui-même parmi les plus illustres humanistes ; il figura, malgré sa jeunesse, entre Érasme et Budée, dans ce glorieux triumvirat du XVIe siècle, où il brilla par le jugement autant que ses deux rivaux par l’éloquence et l’invention. Vivès devina mieux que nul autre le rôle souverain qui était réservé à l’érudition, c’est-à-dire au savoir joint à l’esprit de libre recherche. Il est un de ses écrits surtout qui atteste combien ce génie étendu et pénétrant comprenait l’état et les tendances de son époque : c’est le Traité des causes de la décadence des études, son chef-d’œuvre peut-être. Dès le début de sa carrière, il s’était fait connaître par son Commentaire sur la Cité de Dieu de saint Augustin. La préface de cette œuvre est un modèle de bon sens et de fine raillerie. On y voit mise à nu l’ignorance prétentieuse de la scolastique monacale ; les franciscains et les dominicains y sont vigoureusement raillés : on bat avec leurs propres armes ces infatigables ergoteurs, on les confond avec des citations empruntées à leurs propres ouvrages : jamais Érasme n’a porté de tels coups. Vivès aimait et vénérait comme un maître l’auteur de l’Éloge de la Folie ; nul plus que lui ne contribua à répandre ses écrits en Espagne. Cette propagande ne dura guère cependant. Les moines détestaient Érasme, ils abhorraient Vivès. Ce dernier était plus particulièrement l’objet de la haine des ordres mendiants, les dominicains et les franciscains, dont il avait démasqué la crasse ignorance et l’insatiable avidité. Vaincus un moment, les moines ressaisirent le sceptre de la scolastique et rentrèrent dans les chaires des universités. Quant aux jésuites, ils n’avaient pas attendu, pour mettre Érasme et Vivès hors de leurs bibliothèques, que le saint-office eût interdit la lecture de leurs écrits ; ils les rangeaient parmi les suspects : autores de sospechosa doctrina, dit le père Mariana dans une lettre inédite à don Gaspar de Quiroga, inquisiteur général et archevêque de Tolède.

La réforme et les réformateurs en Espagne
H.-M. Guardia
Revue des Deux Mondes T.28, 1860