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PLAZA MAYOR BURGOS

PLAZA MAYOR BURGOS

BURGOS
布尔戈斯
ブルゴス
Бургос
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Photos Jacky Lavauzelle
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PLAZA MAYOR BURGOS

 

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Casa Consistorial de Burgos
1791
Fernando González de Lara

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Monumento – Monument
CARLOS III
Charles III d’Espagne

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« La place de Burgos, au milieu de laquelle s’élève une assez médiocre statue en bronze de Charles III, est grande et ne manque pas de caractère. Des maisons rouges, supportées par des piliers de granit bleuâtre, la ferment de tous côtés. Sous les arcades et sur la place, se tiennent toutes sortes de petits marchands et se promènent une infinité d’ânes, de mulets et de paysans pittoresques. Les guenilles castillanes se produisent là dans toute leur splendeur. « 
Théophile Gautier

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LA PLAZA MAYOR
VUE PAR THEOPHILE GAUTIER

La place de Burgos, au milieu de laquelle s’élève une assez médiocre statue en bronze de Charles III, est grande et ne manque pas de caractère. Des maisons rouges, supportées par des piliers de granit bleuâtre, la ferment de tous côtés. Sous les arcades et sur la place, se tiennent toutes sortes de petits marchands et se promènent une infinité d’ânes, de mulets et de paysans pittoresques. Les guenilles castillanes se produisent là dans toute leur splendeur. Le moindre mendiant est drapé noblement dans son manteau comme un empereur romain dans sa pourpre. Je ne saurais mieux comparer ces manteaux, pour la couleur et la substance, qu’à de grands morceaux d’amadou déchiquetés par le bord. Le manteau de don César de Bazan, dans la pièce de Ruy Blas, n’approche pas de ces triomphantes et glorieuses guenilles. Tout cela est si râpé, si sec, si inflammable, qu’on les trouve imprudents de fumer et de battre le briquet. Les petits enfants de six ou huit ans ont aussi leurs manteaux, qu’ils portent avec la plus ineffable gravité. Je ne puis me rappeler sans rire un pauvre petit diable qui n’avait plus qu’un collet qui lui couvrait à peine l’épaule, et qui se drapait dans les plis absents d’un air si comiquement piteux, qu’il eût déridé le spleen en personne. Les condamnés au presidio (travaux forcés) balayent la ville et enlèvent les immondices sans quitter les haillons qui les emmaillottent. Ces galériens en manteaux sont bien les plus étonnantes canailles que l’on puisse voir. À chaque coup de balai, ils vont s’asseoir ou se coucher sur le seuil des portes. Rien ne leur serait plus facile que de s’échapper, et, comme j’en fis l’objection, on me répondit qu’ils ne le faisaient pas par un effet de la bonté naturelle de leur caractère.

Théophile Gautier
Voyage en Espagne
Chapitre IV – Burgos
charpentier, 1859
pp. 25-42

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charles-iii-despage-carlos-iiiCarlos III retratado hacia 1765
Peinture de Carlos III vers 1765
1716-1788
Anton Raphael Mengs
1728-1779
Museo del Prado
Musée du Prado

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CHARLES III
par Charles de Mazade
1860

Ce n’est pas que tout fût facile. Cette politique réformatrice que les premiers Bourbons avaient portée au-delà des Pyrénées, et qui s’épanouissait sous Charles III, avait au contraire à vaincre de sourdes coalitions de haines et de méfiances. Le premier obstacle vint du clergé, qui se sentait menacé dans ses privilèges et dans ses excès de prépondérance. Qu’on se représente en effet un corps tout-puissant d’influence depuis deux cents ans, visant à une indépendance absolue même en matière civile, tenant le roi par les confesseurs, le peuple par le naïf et violent fanatisme de sa crédulité, dominant l’intelligence par l’inquisition, qui réduisait au silence toute voix s’élevant pour défendre l’état, — absorbant la fortune publique par la possession de bénéfices sans nombre, de domaines qui s’accroissaient toujours par les substitutions, restaient exempts de toute charge et n’étaient soumis qu’à sa seule juridiction. Il y avait encore au XVIIIe siècle plus de trois mille couvens. L’église était une armée de plus de deux cent mille personnes ; un cinquième du royaume se trouvait aliéné, immobilisé, soustrait à toute action de l’autorité publique. Cette masse vivant du pays et sur le pays ne s’y trompa point ; elle fut sourdement hostile à une dynastie venant de France et portant avec elle un certain sentiment des droits de la puissance civile. Elle eut particulièrement en haine Charles III, qui avait à Naples pour conseiller et pour ami le marquis Tanucci, cet esprit infesté de libéralisme. Aussi l’arrivée de Charles en Espagne fut-elle signalée par une sorte de conspiration insaisissable et active. On représentait la foi comme en péril ; les mœurs et tous les actes du prince étaient décriés dans les chuchotemens des conciliabules secrets et des correspondances. Les plus sinistres présages étaient habilement propagés. À Barbastro, on annonçait le renversement inévitable de la dynastie ; à Girone, l’apparition d’une comète fut représentée comme le signe de la mort prochaine du roi. Dans les provinces, on montrait Madrid prêt à s’enflammer, et à Madrid on grossissait complaisamment l’agitation des provinces. Cette conspiration atteignait jusqu’aux Indes, où s’étendait l’invisible action du clergé, surtout des jésuites, qui, en craignant le péril, s’y précipitaient avec un zèle dont ils furent bientôt récompensés.

La résistance venait d’ailleurs encore d’une certaine masse obscure et ignorante, du fanatisme de stagnation d’un peuple outré de voir changer ses habitudes par des actes qui étaient des améliorations, mais qui étaient aussi une atteinte portée à l’inviolabilité de son inertie héréditaire ; c’est ce qui faisait dire à Charles III : « Les Espagnols sont comme les enfans, qui pleurent quand on les lave. » Le fait est que le roi Charles voulait laver Madrid, et qu’il ne le put pas sans difficulté. Il trouva naturel de purger la ville de toutes les immondices qui en faisaient un foyer d’infection ; mais on lui objecta que, l’air de Madrid étant prodigieusement subtil à cause de la proximité du Guadarrama, cette infection même, en tempérant la subtilité de l’air, était une garantie de salubrité. On exhuma une consultation de médecins à l’appui de cette opinion. « Fort bien, répondit gaiement le roi ; maintenant qu’on me nettoie Madrid au plus vite, et au premier moment où je verrai vérifier ce que disent les médecins, j’y remédierai sans plus de retard en ordonnant qu’on jette tout par les fenêtres plus fort que jamais. » Il en fut de même quand il fallut éclairer la ville, où on ne pouvait se hasarder le soir. Un jour le roi eut l’idée de canaliser le Tage et de le rendre navigable. Une commission fut nommée : elle répondit que si Dieu, qui est tout-puissant, avait voulu rendre le Tage navigable, il le pouvait sans aucun doute, et que s’il ne l’avait pas fait, c’est que cela ne devait pas être.

Dans cette bizarre résistance, il y avait la haine de la nouveauté et il y avait aussi la haine des étrangers accourus en Espagne avec les Bourbons et associés à leur gouvernement. Cette haine se concentra surtout contre le marquis d’Esquilache, que Charles III avait amené de Naples et dont il avait fait son ministre des finances. Don Leopoldo de Gregorio, marquis d’Esquilache, de Valle Santorro et de Trentino, prince de Santa-Elia, était un Sicilien de parole exubérante, d’une prodigieuse activité d’esprit, nullement homme d’état, mais inventif et hardi dans le maniement des affaires. C’était, à vrai dire, un personnage curieux, lieutenant-général sans avoir jamais servi, qui avait fait de son fils encore au maillot un administrateur de la douane de Cadix, dont la femme, doña Pastora, était accusée de vendre les grâces, et qui à travers tout avait fait plus de bien que de mal par son zèle plein de ressources, par l’entrain avec lequel il s’appliquait à réorganiser les finances, à simplifier l’administration, à développer des institutions utiles et à faire vivre le peuple à bon marché. On lui en voulait peut-être moins du soin qu’il prenait de sa fortune que de son activité réformatrice et surtout de sa qualité d’étranger. C’était le vice irrémédiable qui attirait sur lui une effroyable impopularité.

Rassemblez maintenant ces quelques traits d’une situation compliquée, l’animosité batailleuse d’un clergé menacé dans sa domination, l’antipathie aveugle du peuple contre les nouveautés, l’aversion d’un certain instinct national irréconciliable pour tout ce qui est étranger ; vous aurez le secret d’un des plus étranges épisodes de ce moment du XVIIIe siècle espagnol, d’une de ces explosions subites où le peuple porte son impétuosité furieuse, et où se dissimulent souvent d’autres calculs, d’autres ambitions, qui n’attendent que le succès pour s’emparer des événemens et avouer leur complicité.

Une des plus merveilleuses fatuités de notre temps est de croire qu’il a tout inventé, même l’émeute. Nous avons vu de nos jours, il est vrai, pour ne point sortir de l’Espagne, des reines changer des cabinets, signer des constitutions sous l’étreinte de la sédition, le peuple armé parcourir les rues et demander la vie des ministres dont il commençait par brûler les maisons ; ce n’était, à tout prendre, que la reproduction de ce qui se passa un jour de l’année 1766, en plein règne de Charles III. On va voir comment. Au commencement du XVIIIe siècle, un des plus habiles conseillers de Philippe V, Macanaz, avait dit avec une clairvoyance prophétique : « Que le souverain ne permette pas à ses ministres de changer le costume national du peuple pour lui substituer quelque mode étrangère ! Ces dispositions seront reçues du public comme violentes et tendant à en finir avec le costume espagnol, et en irritant les esprits elles pousseront à des désordres difficiles à apaiser. » À quarante-quatre ans de distance, un ordre du roi interdisait l’usage des capes longues et des chapeaux à bords rabattus. Ce fut le prétexte qui fit jaillir la flamme de la sédition de ce foyer de mécontentemens que j’essayais de dépeindre. La lutte s’engagea le 23 mars 1766, le dimanche des Rameaux, entre des hommes de troupe chargés de faire exécuter l’ordre du roi et quelques bravaches du peuple qui affectaient de se promener enfoncés dans leur mante et le chapeau sur les yeux. Le sang coula, et Madrid fut aussitôt enflammé. En peu d’instans, l’émeute se grossit de tous les vagabonds qui parcouraient les rues en criant : Vive le roi ! vive l’Espagne ! meure Esquilache ! Le mot d’ordre était donné. Les insurgés coururent au palais du ministre, qu’ils pillèrent et qu’ils dévastèrent, jetant par les balcons tous les objets précieux. Ils auraient bien brûlé la maison ; mais on les arrêta avec le mot sacramentel : « respect à la propriété ! » C’était d’ailleurs la maison d’un Espagnol. Le soir, après cette singulière victoire, campés sur la place Mayor, ils se contentèrent de brûler l’effigie du ministre, qui avait été averti fort à propos, et qu’ils n’avaient pas trouvé. Ce n’était que le prologue.

La lutte se ranima plus ardente le lendemain. Les insurgés étaient exaltés de leur succès de la veille ; ils ramassèrent tout ce qu’ils purent trouver d’auxiliaires, de femmes et d’enfans, et ils marchèrent sur le palais, où ils furent arrêtés par le feu des gardes wallones, qui les tint à distance. Le tumulte d’ailleurs remplissait Madrid, que la multitude menaçait de livrer aux flammes. Jusque-là, le programme de l’insurrection était assez obscur, lorsque l’intervention d’un frère gilite, religieux à la mine ascétique et sévère, qui haranguait la foule dans les rues, servit à préciser le sens des réclamations populaires. On se mit à rédiger une pétition que le père Yecla, transformé en parlementaire, offrit de porter au roi. Cette pétition, qui invoquait la sainte Trinité et la vierge Marie, demandait impérieusement l’exil du marquis d’Esquilache et de sa famille ; l’exonération de tous les ministres étrangers et leur remplacement par des Espagnols, l’expulsion des gardes wallones, la liberté pour le peuple de se vêtir à sa fantaisie, et l’abaissement du prix des denrées. Ces conditions enfin, le roi devait venir les ratifier lui-même sur la place Mayor en présence du peuple.

Si ce mouvement n’eût été que le coup de tête de quelques fanatiques de la cape longue et du chapeau à larges bords, tout eût été bientôt fini ; mais ici se dévoilait le lien de la sédition avec l’état réel de l’Espagne. D’un côté, l’émeute du 23 mars n’était point évidemment l’œuvre du hasard ; elle avait son organisation et son mot d’ordre. « Il y a ici plus qu’il ne paraît ; ce qui compte le moins est la canaille, » disait un homme de la cour. L’argent était répandu à profusion dans les masses. Le caractère religieux se laissait voir dans l’émeute. On promenait un drapeau qu’on appelait l’étendard de la foi. Les insurgés blessés refusaient l’absolution sous prétexte que, mourant en martyrs, ils n’en avaient pas besoin. D’un autre côté, ce que demandait le peuple révolté trouvait de l’écho jusque dans les conseils du roi. Lorsque Charles, réunissant autour de lui les principaux personnages de sa cour, mettait en délibération ce qu’il y avait à faire de ces propositions portées par le père Yecla, deux opinions, on pourrait dire deux politiques éclataient aussitôt. Les uns, le marquis de Priego, qui était Français et colonel des gardes wallones, le comte de Gazzola, le duc d’Arcos, demandaient simplement que la sédition fût domptée par les armes. Le vieux marquis de Casa-Sarria au contraire, se jetant aux pieds du roi, déclara que si on devait agir par la rigueur, il déposerait aussitôt ses emplois et ses dignités. « Je suis d’avis, dit-il, qu’on donne satisfaction au peuple en tout ce qu’il demande, d’autant plus que ce qu’il demande est juste. » Le comte d’Ouate s’écriait à son tour que l’heure était venue de parler clairement, et que les plaintes populaires étaient fondées. Placé entre l’effusion du sang et la nécessité d’une transaction, Charles III céda. Il se présenta au balcon du palais, accordant tout ce qu’on lui demandait. Il eut même à écouter de nouveau les propositions populaires d’un autre personnage plus bizarre encore que le père Yecla : c’était un échappé des présides de Malaga, calesero de profession et l’un des plus ardens émeutiers. Puis les insurgés se répandirent dans Madrid, s’enivrant de leur triomphe et prolongeant pendant la nuit leurs démonstrations, tandis que Charles restait sérieux et triste.

Tout n’était pas fini encore. Le lendemain, la scène avait changé. Le roi était parti secrètement pour Aranjuez, et l’émeute retrouvait sa fureur, croyant voir dans ce départ un moyen d’éluder les promesses de la veille. Les insurgés reprirent les armes et campèrent dans la ville, prêts à se défendre. En même temps ils s’adressaient au président du conseil de Castille : c’était un évêque qui, au fond, voyait sans déplaisir cette insurrection du sentiment populaire, et qui ne demandait pas mieux que de la servir auprès du roi par un exposé nouveau des griefs du pays. Il rédigea un mémoire ridicule où il se plaignait, au nom du peuple, des impôts établis pour ouvrir des chemins, des mesures adoptées pour éclairer et assainir Madrid. Le roi se borna à renouveler la promesse d’exécuter les conditions qu’il avait acceptées, ajoutant qu’il ne rentrerait à Madrid que quand la paix serait rétablie. C’était assez ; l’effervescence populaire tomba, et les habitans de Madrid revinrent plus dévotement que jamais aux cérémonies de la semaine sainte, qui finit pour eux mieux qu’elle n’avait commencé. L’insurrection de la capitale n’était point isolée ; elle se liait à tout un ensemble de mouvemens qui éclataient à la fois à Saragosse, à Cuença, à Palencia, et même à Barcelone et dans le Guipuzcoa. Cette agitation tomba du même coup. Une mesure presque puérile en avait été le prétexte ; au fond, je l’ai dit, elle était l’expression incohérente de tous les mécontentemens d’ambitions ou d’intérêts ligués dans un effort de résistance à un mouvement de transformation, et c’est ce qui lui donne un sens politique dans ce XVIIIe siècle que M. Ferrer del Rio décrit d’un trait intelligent en ravivant les hommes et les événemens. Le pauvre marquis d’Esquilache, qui se plaignait fort dans son exil d’être abandonné, qui accusait assez plaisamment le peuple de Madrid d’ingratitude, paya pour tous dans cette échauffourée de 1766, ébauche de tant d’autres semblables ; la politique de Charles III resta debout.

Charles de Mazade
La Monarchie absolue en Espagne.
Les Trois Charles, les Habsbourg et les Bourbons dans la Péninsule
Revue des Deux Mondes
2e période, tome 28, 1860
pp. 704-728

VISITE DE BURGOS – 布尔戈斯 – ブルゴス- Бургос – visitar Burgos

BURGOS
布尔戈斯
ブルゴス
Бургос
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Photos Jacky Lavauzelle
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Visite de BURGOS

Visita a Burgos
Тур Бургос

  布尔戈斯之旅   
ブルゴスのツアー  

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Arco de Santa María 
Porte de Sainte Marie

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LA CATHEDRALE DE BURGOS
Cathédrale Sainte-Marie de Burgos
Catedral de Santa María de Burgos
布尔戈斯圣玛丽大教堂
ブルゴスの聖マリア大聖堂
Собор Святой Марии Бургос
1221

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« Nous sortîmes de la cathédrale éblouis, écrasés, soûls de chefs-d’œuvre et n’en pouvant plus d’admiration, et nous eûmes tout au plus la force de jeter un coup d’œil distrait sur l’arc de Fernand Gonzalès, essai d’architecture classique tenté, au commencement de la Renaissance, par Philippe de Bourgogne. « 
(Théophile Gautier – Voyage en Espagne-Chapitre V – Burgos
charpentier, 1859 – pp. 25-42)

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San Nicolás de Bari BURGOS
Saint Nicolas de Bari
Nicolas de Myre

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PLAZA MAYOR

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PUENTE DE SAN PABLO
PONT DE SAINT PAUL
L’EPOPEE DU CID
la Epopeya del Cid Campeador

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Paseo del Espolón

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Lettre de voyage
Honoré Beaugrand

Burgos
le 12 février 1889

J’écris ma dernière lettre d’Espagne, et sans vouloir entrer dans de longues considérations sur ce qui m’a le plus frappé, durant mon court voyage, je désire cependant dire un mot de deux ou trois traits bien saillants de la civilisation espagnole.

On fume toujours et partout, en Espagne ! On fume en chemin de fer, dans tous les wagons, sans exception ; au théâtre dans tous les entr’actes ; à table, entre chaque mets, qu’il y ait des femmes à la même table, ou qu’il n’y en ait pas, cela ne fait rien à la chose ; et un caballero perdrait son appétit s’il n’allumait pas une cigarette après sa soupe, après le poisson, après le rôti, après le gibier et après la salade. Au dessert, pour accentuer la chose il embouche un long cigare qu’il termine en prenant son café. Et la coutume est universelle. Je dois avouer que cela est bien un peu gênant, dans les hôtels, pour les dames du nord ; mais l’Espagnol avec son flegme imperturbable, que l’on pourrait assez facilement qualifier plus sévèrement, se dit probablement que les étrangers n’ont qu’à le laisser tranquille chez lui, en restant, de leur côté, tranquillement chez eux. D’ailleurs il faut dire que les hôtels sont généralement très mal tenus en Espagne, et que si, comme l’affirme avec soin le proverbe anglais, la propreté est une vertu divine, l’Espagnol n’a absolument rien de divin dans sa manière de tenir un hôtel pour la réception du public voyageur.

Les chemins de fer espagnols sont organisés comme les chemins de fer français, avec cette différence qu’ils circulent généralement avec une lenteur désespérante. Je ne désire pas, d’ailleurs, traiter cette question maintenant, car j’ai l’intention, à la fin de mon voyage, d’établir une comparaison entre les systèmes européen et américain, au triple point de vue des facilités, de la commodité et du coût relatif des voyages en Europe et en Amérique.

Je reprends la relation de mon voyage :

Quatre heures de chemin de fer nous conduisent à Burgos, qui est notre dernière étape en Espagne, et j’ai excédé de quatre jours la limite qu’avait fixée mon médecin, à Alger pour mon séjour dans la patrie du Cid. Heureusement que je ne m’en porte pas plus mal et que les traces de ma maladie disparaissent tous les jours.

Burgos, ville de 32,000 habitants, est au point de vue historique, une des cités les plus célèbres de l’Espagne. Elle a vu naître le Cid et fut la capitale de la monarchie castillane avant Tolède et Madrid. Déchue de son ancienne splendeur, cette ville est toujours remarquable par ses monuments.

La cathédrale de Burgos, fondée en 1221, par le roi Ferdinand-III-le-Saint, est un chef d’œuvre de l’art gothique merveilleusement sculpté. On admire surtout sa façade, véritable dentelle de pierre ; ses clochers hauts de 84 mètres et dominant majestueusement la ville de ses flèches et clochetons d’une légèreté extrême ; sa rose ; les richesses artistiques de l’intérieur ; de magnifiques vitraux, statues, mausolées, bas reliefs, tableaux de maître, etc. Parmi les autres monuments de Burgos, on doit citer : l’hôtel de ville, qui renferme les restes du Cid ; les églises San-Gil, San-Esteban, San-Nicolas, Santa-Agenda ; un arc de triomphe ; la porte Santa-Maria, etc.

Burgos, bâtie sur une colline et baignée par l’Arlanzon, ne jouit pas d’un climat fort agréable ; elle a néanmoins de jolies promenades, dont les plus fréquentées sont celles de l’Espolon et de l’Isla. On y voit aussi de fort beaux établissements charitables, quelques hôpitaux et un hospice d’enfants trouvés.

On peut faire d’intéressantes promenades à la Chartreuse de Miraflorès, au monastère de Santa-Maria-de-las-Huelgas, au couvent de San-Pedro-de-Cardena. Ce sont là, à peu de distance de la ville, des monuments remarquables au double point de vue artistique et historique.

Honoré Beaugrand
Lettres de voyages
TRENTE-ET-UNIÈME LETTRE
Presses de La Patrie, 1889
pp. 302-311

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SAINTE CASILDA

Théophile Gautier

À Burgos, dans un coin de l’église déserte,
Un tableau me surprit par son effet puissant :
Un ange, pâle et fier, d’un ciel fauve descend,
À sainte Casilda portant la palme verte.

Pour l’œuvre des bourreaux la vierge découverte
Montre sur sa poitrine, albâtre éblouissant,
À la place des seins, deux ronds couleur de sang,
Distillant un rubis par chaque veine ouverte.

Et les seins déjà morts, beaux lis coupés en fleurs,
Blancs comme les morceaux d’une Vénus de marbre,
Dans un bassin d’argent gisent au pied d’un arbre.

Mais la sainte en extase, oubliant sa douleur,
Comme aux bras d’un amant de volupté se pâme,
Car aux lèvres du Christ elle suspend son âme !

Théophile Gautier
España
Œuvres de Théophile Gautier
Poésies, Lemerre, 1890
Volume 2
p. 98

LA PLAZA MAYOR de MADRID – Пласа-Майор – 主廣場

Madrid – Мадрид – 马德里
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Madrid Blason Artgitato  Madrid L'Ours & L'arbousier Artgitato La estatua del oso y del madroño

Photos Jacky Lavauzelle
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Madrid Drapeau Artgitato


PLAZA MAYOR – Пласа-Майор
主廣場

Madrid La Plaza Mayor artgitato 1

Autodafé sur la Plaza Mayor de Madrid, Francisco Ricci 1683

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Casa de la Panaderia
La Maison de la Boulangerie
Fin XVIe siècle

Madrid La Plaza Mayor artgitato 4 Casa de la Panaderia Maison de la Boulangerie  Madrid La Plaza Mayor artgitato 2

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LA PLAZA MAYOR vue par
Théophile Gautier en 1865

« Ces courses royales, où l’on déploie toutes les ressources et toutes les recherches de la tauromachie, se donnent, non au cirque d’Alcala, mais dans la plaza Mayor ; c’est pour elles que les toreros réservent leurs plus beaux coups, et que les gentilshommes descendent dans l’arène.

Dans la plaza Mayor, où devaient avoir lieu les courses royales, fourmillait tout un monde de travailleurs. Les amphithéâtres s’élevaient à vue d’œil, et de grands bœufs labouraient paisiblement la terre dépavée, ne se doutant pas qu’ils préparaient l’arène où devaient succomber bientôt, après mille tortures, les plus vaillants de leurs frères cornus.
La plaza Mayor est ouverte par un coin. Pour rétablir la symétrie et augmenter le nombre des balcons, une maison de planches et de toiles se bâtissait comme par enchantement et comblait le vide.
Déjà sous les arcades s’agitaient les marchands de billets, demandant des sommes folles pour une place au premier rang.

Les travaux nécessaires pour changer en arène la plaza Mayor ou la place de la Constitution, car tel est son nom moderne, étaient presque achevés. Les toiles qui simulaient la façade de la fausse maison de charpente, destinée à compléter la symétrie architecturale, venaient de recevoir leur dernier clou, les tapissiers en avaient fini avec les tentures des balcons : — tout était prêt, excepté le ciel.
Chose rare en Espagne, de gros bancs de nuages s’entassaient à tous les coins de l’horizon et formaient de sinistres archipels ; les sommets extrêmes de la sierra de Guadarrama se couvraient d’une neige qui devait se changer en pluie dans la plaine. »

Théophile Gautier – Loin de Paris
Michel Lévy frères – 1865 -pp. 141-227
EN ESPAGNE  – LES COURSES ROYALES À MADRID

Madrid La Plaza Mayor artgitato 3

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L’ANCIENNE PLACE DE LA CONSTITUTION
&
LA PLACE DES COURSES DE TAUREAUX

De là vous pouvez gagner la plaza Mayor, aujourd’hui place de la Constitution ; de laquelle des constitutions ? On n’a jamais pu le savoir. On dit qu’il se donne quelquefois sur cette place des courses de taureaux, auxquelles prennent part les jeunes gens de l’aristocratie ; quand le taureau a éventré quelques chevaux et culbuté leurs cavaliers, je voudrais voir comment il regarde ce cheval de bronze et ce picador de bronze qui occupent le milieu de la place sous le nom de statue équestre de Philippe III. D’un côté de la place est la rue de Tolède, qui mène au vieux Madrid ; de l’autre est la calle Mayor, ou grand’rue. En la descendant, on rencontre la plazuela de la Villa, où l’on montre une tour qui fut la prison de François Ier et une maison qui fut celle de Ximénès. Plus loin, au coin de l’église Santa-Maria, est une ruelle qui fut le théâtre d’une tragédie sanglante. C’est là qu’Antonio Perez fit tuer Escovedo, qui avait découvert le secret de sa liaison avec la princesse d’Eboli, la maîtresse de Philippe II. Le palais de la princesse, sur la place qui est au bout de la ruelle, est aujourd’hui occupé par don Daniel Weisweiller, et est devenu une des maisons les plus hospitalières et les plus aimables de Madrid. »

John Lemoinne
Quelques Jours en Espagne
Revue des Deux Mondes, 2e période, tome 16, 1858 -pp. 423-445

Visite de Madrid – Visita a Madrid – Визит в Мадрид-观光马德里

Madrid – Мадрид – 马德里
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Madrid Blason Artgitato  Madrid L'Ours & L'arbousier Artgitato La estatua del oso y del madroño

Photos Jacky Lavauzelle
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Madrid Drapeau Artgitato


Visite de Madrid
Visita a Madrid
马德里 – 观光马德里
Визит в Мадрид

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BNE MADRID
 BIBLOTECA NACIONAL DE ESPAÑA
 LA BIBLIOTHEQUE NATIONALE D’ESPAGNE
 西班牙国家图书馆
Национальная библиотека Испании

BNE Biblioteca Nacional de España Biblitothèque Nationale d'Espagne Artgitato Madrid Antonio Machado (1)

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Le Musée du Prado
EL MUSEO DEL PRADO

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Statue de Francisco Goya devant le Musée du Prado
Estatua de Francisco Goya Museo del Prado
Statue of painter Francisco Goya, Museo del Prado
Статуя Франсиско Гойи Музей Прадо
戈雅普拉多博物馆雕像
Francisco Goya Artgitato Madrid Le Prado Museo del Prado (3)

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Le Jardin Botanique Royal
Real Jardín Botánico
皇家植物园
Королевские ботанические сады
Madrid Espagne Real Jardín Botánico Jardin Royal Botanique artgitato Tulipes Tulipanes

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El Palacio Real de Madrid
Le Palais Royal
马德里王宫
Королевский дворец в Мадриде
El Palacio Real de Madrid Le Palais Royal de Madrid Artgitato 00
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Plaza de la Armería
 Cathédrale de l’Almudena
 Catedral de la Almudena
Собор Альмудена
馬德里王家阿穆德納聖母主教座堂
 阿穆德納聖母主教座堂

Cathédrale de l'Almudena Catedral de la Almudena Artgitato Madrid (20)

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PARQUE DE EL RETIRO
MONUMENTO ALFONSO XII
 Monument à Alphonse XII
阿方索十二碑
Альфонсо XII памятник
Monumento Alfonso XII Monument Alphonse XII Parque de El Retiro Madrid Artgitato 406*

PARQUE DE EL RETIRO
Парк Ретиро
La Fuente del Ángel Caído
La Fontaine de l’Ange déchu
Monumento del Ángel Caído
Madrid Fuente del Ángel Caído Parque de El Retiro artgitato 1
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PARQUE DE EL RETIRO
MONUMENTO A MARTINEZ CAMPOS
 Monument à Martinez Campos
Памятник Мартинес Кампос
Martinez Campos Monumento Monument Parque de El Retiro Madrid Artgitato (4)
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PARQUE DE EL RETIRO
Парк Ретиро
PALACIO DE CRISTAL
Le Palais de Cristal
PALACIO DE CRISTAL Madrid Palais de Cristal Parque de El Retiro Artgitato 8*

PARQUE DE EL RETIRO
Palacio de Velázquez
Palais Vélasquez
宫贝拉斯克斯
Дворец Веласкеса

Palacio de Velázquez Velasquez Palace Palais de Vélasquez Madrid Artgitato 31

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PARQUE DE EL RETIRO
Parterre del Parque del Retiro
Parterre del Parque del Retiro Madrid Artgitato (13)*

EL PASEO DEL PRADO
Пасео дель Прадо
普拉多大道
Paseo del Prado Museo del Prado Velasquez artgitato 0

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PLAZA DE CIBELES
 Place de Cybèle
西贝莱斯广场
Площадь Пласа-де-Сибелес
Place de Cybèle PLAZA DE CIBELES artgitato (4)
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Le palais de Cybèle
 Palacio de Cibeles
Паласио-де-Сибелес
帕拉西奥一同庆祝
Place de Cybèle plaza de cibeles artgitato palais de Cybèle Palacio de Cibeles (11)
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Fuente de Neptuno Madrid
 Fontaine de Neptune
 Plaza Cánovas del Castillo
广场卡诺瓦斯卡斯蒂略
Фонтан Нептуна в Мадриде
海神喷泉马德里
Fuente de Neptuno Madrid Fontaine de Neptune Artgitato Plaza Canovas del Castillo 1
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Plaza de Antón Martín
 A LOS ABOGADOS DE ATOCHA
 AUX AVOCATS D’ATOCHA
 Matanza de Atocha de 1977
 LE MASSACRE DE 1977
A LOS ABOGADOS DE ATOCHA - plaza de Antón Martín - LE MASSACRE DU 24 JANVIER 1977 (3)

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Plaza de España
La Place d’Espagne
西班牙广场
Площадь Испании

Plaza de España Place d'Espagne Madrid Artgitato 000

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PLAZA DE ORIENTE
La place de l’Orient
Плаза-де-Ориенте
东方广场

Plaza de Oriente Place de l'orient Madrid Athaulf Ataulfo Roi des Visigoths

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PLAZA DE TIRSO DE MOLINA
Place de Tirso de Molina
Тирсо де Молина
迪爾索德莫利納
Plaza de Tirso de Molina Madrid Artgitato (10)

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PLAZA MAYOR
Пласа-Майор
主廣場
Madrid La Plaza Mayor artgitato 1*
PLAZA SANTA ANA MADRID
 Place sainte Anne de Madrid
将圣安妮马德里
площади Санта-Ана в Мадриде
Statue Estatua Federico García Lorca 
Statue – Estatua de Pedro Calderón de la Barca
Statue de Pedro Calderón de la Barca Estatua de Pedro Calderón de la Barca Plaza Santa Ana Place Sainte Anne Artgitato 1

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Plaza de Canalejas
广场卡纳莱哈斯
plaza de las Cuatro Calles
 (anteriormente)
 Place des quatre rues
Plaza de Canalejas Madrid Artgitato (1)
Casa Allende ou Tomás Allende

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Porte d’Alcalá
Puerta de Alcalá
阿尔卡拉门
Пуэрта-де-Алькала
Porte d'Alcalá Puerta de Alcalá Madrid Artgitato (4)
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Calle de Alcalá
 La Rue d’Alcala
阿尔卡拉街
Улица Алькала
La calle de Alcalá La Rue d'Alcala Madrid Artgitato 1*

La Place Colomb
 Plaza de Colón
哥伦布广场
Плаза-де-Колон
La Place Colomb Plaza de Colon Madrid Artgitato
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Jardines del Descubrimiento
 Jardin des Découvertes
Jardines del Descubrimiento
 Don Jorge Juan y Santacilia
 Monumento al Descubrimiento de América
 Monument à la Découverte de l’Amérique
Jardines del Descubrimiento - Jardin des découvertes - Madrid Artgitato (2)
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Eloy Gonzalo (Monumento)
贡萨洛埃洛伊
Элой Гонсало
El Héroe de Cascorro
 Plaza de Cascorro Eloy Gonzalo Plaza de Cascorro Madrid Artgitato (1)*

Puente de Toledo
Le Pont de Tolède
Толедо мост
托莱多桥

Puente de Toledo Madrid Pont de Tolède Artgitato

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La Puerta del Sol
Пуэрта-дель-Соль
太阳门
Puerta del Sol La Porte du Soleil Artgitato 1

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Temple d’Amon de Debod
 El Templo de Debod
Храм Амона Дебод
德波阿蒙神庙
Temple d'Amon de Debod Madrid artgitato (6)

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Parque del Oeste
Monumento a Sor Juana Inés de la Cruz
Juana Inés de Asbaje y Ramírez de Santillana
Sœur Juana Inés de la Cruz
姐姐胡安娜·伊内斯·德拉克鲁兹
Сестра Хуана Инес де ла Крус
Sœur Juana Inés de la Cruz Monumento a Sor Juana Inés de la Cruz Madrid Artgitato (3)*
Real Basílica
 de San Francisco el Grande MADRID
 Basilique de Saint-François-le-Grand
Сан – Франциско-эль-Гранде Базилика
旧金山昆内特拉格兰教堂
Basilica San Francisco el grande Basilique saint François Madrid Artgitato (20)
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Mercado de san Miguel
 Marché de saint-Michel
 Market of San Miguel
Рынок Сан – Мигель
圣米格尔市场
Mercado de san Miguel Marché de saint-Michel Market of San Miguel Artgitato Madrid (4)

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LA PUERTA DE TOLEDO
La Porte de Tolède
该普尔塔托莱多
Пуэрта-де-Толедо
LA PUERTA DE TOLEDO La Porte de Tolède Artgitato Madrid 1

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MADRID

Madrid, princesse des Espagnes,
Il court par tes mille campagnes
Bien des yeux bleus, bien des yeux noirs.
La blanche ville aux sérénades,
Il passe par tes promenades
Bien des petits pieds tous les soirs.

Madrid, quand les taureaux bondissent,
Bien des mains blanches applaudissent,
Bien des écharpes sont en jeux.
Par tes belles nuits étoilées,
Bien des señoras long-voilées
Descendent tes escaliers bleus.

Madrid, Madrid, moi, je me raille
De tes dames à fine taille
Qui chaussent l’escarpin étroit ;
Car j’en sais une par le monde
Que jamais ni brune ni blonde
N’ont valu le bout de son doigt !

J’en sais une, et certes la duègne
Qui la surveille et qui la peigne
N’ouvre sa fenêtre qu’à moi ;
Certes, qui veut qu’on le redresse
N’a qu’à l’approcher à la messe,
Fût-ce l’archevêque ou le roi.

Car c’est ma princesse andalouse !
Mon amoureuse ! ma jalouse !
Ma belle veuve au long réseau !
C’est un vrai démon ! c’est un ange !
Elle est jaune comme une orange,
Elle est vive comme un oiseau !

Oh ! quand sur ma bouche idolâtre
Elle se pâme, la folâtre,
Il faut voir, dans nos grands combats,
Ce corps si souple et si fragile,
Ainsi qu’une couleuvre agile,
Fuir et glisser entre mes bras !

Or, si d’aventure on s’enquête
Qui m’a valu telle conquête,
C’est l’allure de mon cheval,
Un compliment sur sa mantille,
Puis des bonbons à la vanille,
Par un beau soir de carnaval.

Alfred de Musset
Premières Poésies
1829-1835
Charpentier  1863
pp. 91-92

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LA PUERTA DEL SOL vue par Théophile Gautier

« Un séjour de plus d’un mois, fait, il y a six ans, dans la très-noble et très-héroïque cité de Madrid, nous avait suffisamment édifié sur les agréments de cette ville ; mais cette annonce magique : Corrida de toros de corte, avait pour nous une attraction irrésistible. »

Théophile Gautier – Loin de Paris
Michel Lévy frères – 1865 -pp. 141-227
EN ESPAGNE  – LES COURSES ROYALES À MADRID

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MADRID en 1847

«  »Ce qui distingue aujourd’hui Madrid en effet, et ce qui explique aussi sans doute les déceptions de beaucoup de voyageurs altérés de pittoresque, de couleur locale, c’est que la métropole de l’Espagne est tout-à-fait en voie de devenir une ville moderne, européenne. Plus on va, plus ce caractère se manifeste. Le passé est très vivant, très puissant encore, il est vrai, sur bien des points ; mais chaque jour il reçoit une nouvelle atteinte. Parcourez Madrid par un beau soleil, et vous apercevrez distinctement tous les signes de cet état de transition. À côté de quelques-uns de ces palais des grands d’Espagne, qui sont restés debout avec leurs écussons et leur apparence de grandeur seigneuriale, une multitude de constructions toutes modernes s’élèvent déjà : c’est le luxe brillant de notre temps auprès du luxe sévère et majestueux des vieux jours ; des rues nouvelles sont ouvertes, les anciennes sont agrandies, améliorées, rectifiées. Une circonstance a beaucoup servi à cette régénération matérielle, c’est la suppression des couvents, la mobilisation de ces propriétés devenues nationales. L’état a pu trouver parmi tant d’édifices religieux, dont l’existence ne s’accommodait plus avec les nécessités de notre époque, de convenables établissements publics. Le sénat tient ses séances à l’ancien couvent de Doña Maria d’Aragon ; c’est à la place du couvent de l’Esprit-Saint que doit être construit le palais du congrès. D’autres ont été simplement rasés ; on y a établi des marchés, on y a formé des places. Il en est enfin qui ont été livrés à l’industrie particulière et que l’industrie a utilisés à son profit. Ces changements ne donnent-ils pas un tout autre aspect à une ville ? Il est certain que Madrid possède en ce moment des quartiers qui s’embellissent chaque jour et qui peuvent rivaliser avec les quartiers les plus renommés des autres capitales : telle est la rue d’Alcala, qui s’étend du Prado à la porte du Soleil, et forme, avec la rue Mayor, qui lui succède, la principale artère de Madrid. Imaginez parallèlement à la rue d’Alcala la rue San-Geronimo, la belle et vaste rue d’Atocha, toutes deux conduisant au Prado, qui les couronne, et vous pourrez prendre une idée de la partie remarquable de la ville. Là est le mouvement, là est la vie ; c’est le beau côté de la médaille. Si vous voulez connaître le revers, vous n’avez qu’à aller fouiller un instant le quartier de Lavapiès, dont les pauvres maisons cachent des existences plus pauvres encore, et où la misère espagnole s’étale dans toute sa nudité… »

Charles de Mazade
Madrid et la société espagnole en 1847
Revue des Deux Mondes, Période Initiale
Tome 18, 1847 pp. 317-353

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LA VIE DE MADRID
par le duc de Saint-Simon
1858

« La vie de Madrid étoit de deux sortes pour les personnes sans occupation : celle des Espagnols et celle des étrangers, je dis étrangers établis en Espagne. Les Espagnols ne mangeoient point, paressoient chez eux, et avoient entre eux peu de commerce, encore moins avec les étrangers ; quelques conversations, par espèce de sociétés de cinq ou six chez l’un d’eux, mais à porte ouverte, s’il y venoit de hasard quelque autre. J’en ai trouvé quelquefois en faisant des visites. Ils demeuroient là trois heures ensemble à causer, presque jamais à jouer. On leur apportoit du chocolat, des biscuits, de la mousse de sucre, des eaux glacées, le tout à la main. Les dames espagnoles vivoient de même entre elles. Dans les beaux jours le cours étoit assez fréquenté dans la belle rue, qui conduit au Retiro, ou en bas sous des arbres entre quelques fontaines, le long du Mançanarez. Ils voyoient et rarement les étrangers en visite, et ne se mêloient point avec eux. À l’égard de ceux-ci, hommes et femmes mangeoient et vivoient à la française, en liberté, et se rassembloient fort entre eux en diverses maisons. La cour montroit quelquefois que cela n’étoit pas de son goût, et s’en lassa à la fin, parce qu’il n’en étoit autre chose. De paroisses ni d’office canonical, c’est ce qui ne se fréquentoit point ; mais des saluts, des processions, et la messe basse dans les couvents. On rencontre par les rues beaucoup moins de prêtres et de moines qu’à Paris, quoique Madrid soit plein de couvents des deux sexes. »

Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon
Mémoires du duc de Saint-Simon
Texte établi par Adolphe Chéruel, Hachette, 1858 -Tome 19, pp. 87-104

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LE POINT DE VUE DE
John Lemoinne
1858

« La ville de Madrid peut être appelée une ville neuve en géographie et en histoire ; elle ne fut faite capitale qu’en 1560, par la grâce de Philippe II. Depuis lors elle devint la résidence des rois et fut appelée la corte ; c’est sous ce nom qu’elle est désignée dans le langage officiel. Le roi Charles III, au souvenir duquel se rattachent tous les embellissemens de l’Espagne, fit beaucoup pour Madrid ; il lui donna des musées, des collèges, des hôpitaux, des promenades, mais il ne pouvait lui donner ce qui ne vient que du temps, c’est-à-dire une histoire, des traditions, des monumens consacrés par des souvenirs. La visite de Madrid est donc bientôt faite, et quand on a vu le palais, qui est un édifice moderne, et l’armeria, ou musée d’artillerie, c’est fini. Je ne parle pas du grand musée, qui, après Florence et Paris, est le plus riche du monde ; il demanderait des volumes, et du reste il en a fait faire. Les monumens qui dans toute vieille ville occupent le premier rang, les églises, n’offrent à Madrid aucun intérêt. Il ne reste plus au touriste qu’à se promener et à flâner, ce que nous allons faire, et comme le premier principe de la flânerie c’est le libre arbitre, nous marcherons un peu à l’aventure et sans grand respect de l’ordre. »

John Lemoinne
Quelques Jours en Espagne
Revue des Deux Mondes, 2e période, tome 16, 1858 -pp. 423-445

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