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LE RÊVE – POEME DE ALMEIDA GARRETT – Quando Eu Sonhava

*

traduction Jacky Lavauzelle
LITTERATURE PORTUGAISE
literatura português

Os Lusiadas Traduction Jacky Lavauzelle Les Lusiades de Luis de Camoes

João Baptista da Silva Leitão
vicomte de Almeida Garrett 

Porto, 4 février 1799 – Lisbonne, 9 décembre 1854
Porto, 4 de fevereiro de 1799 – Lisboa, 9 de dezembro de 1854

Almeida Garrett par Pedro Augusto Guglielmi 

Portrait de Garrett, daté de 1843, avec les insignes de Commandeur de l’Ordre de Notre-Dame de la Conception de Vila Viçosa

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Traduction Jacky Lavauzelle

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LE RÊVE
Quando Eu Sonhava
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Recueil
« Les Feuilles mortes »
 ‘Folhas Caídas’
Livro primeiro
Recueil publié à Lisbonne en 1853

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Pierre Puvis de Chavannes, Le Rêve,1883, Paris, musée d’Orsay

**********

Quando eu sonhava, era assim
Quand je rêvais, c’était ainsi
  Que nos meus sonhos a via;
Que dans mes rêves je la vis ;
  E era assim que me fugia,
Et c’est ainsi que je m’enfuyais,
Apenas eu despertava,
  Seulement, en m’éveillant,
Essa imagem fugidia
  Cette image insaisissable
Que nunca pude alcançar.
  Je ne pouvais plus la saisir.
 Agora, que estou desperto,
Maintenant que je suis réveillé,
 Agora a vejo fixar…
Maintenant je la vois se fixer…
  Para quê? – Quando era vaga,
Pourquoi ? – Quand c’était vague,
Uma ideia, um pensamento,
  Une idée, une pensée,
Um raio de estrela incerto
  Un rayon d’étoile incertain
  No imenso firmamento,
Dans l’immense firmament,
Uma quimera, um vão sonho,
  Une chimère, un vain rêve,
Eu sonhava – mas vivia:
  Je rêvais – mais je vivais :
 Prazer não sabia o que era,
Le plaisir ne savait pas ce que c’était,
  Mas dor, não na conhecia …
Mais la douleur, je ne la connaissais pas…



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Passos Manuel, Almeida Garrett, Alexandre Herculano, José Estêvão de Magalhães nos Passos Perdidos, Assembleia da República Portuguesa.
L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Symbole-Artgitato-6.jpg.

POÉSIE DE ALMEIDA GARRETT

*

traduction Jacky Lavauzelle
LITTERATURE PORTUGAISE
literatura português

Os Lusiadas Traduction Jacky Lavauzelle Les Lusiades de Luis de Camoes

João Baptista da Silva Leitão
vicomte de Almeida Garrett 

Porto, 4 février 1799 – Lisbonne, 9 décembre 1854
Porto, 4 de fevereiro de 1799 – Lisboa, 9 de dezembro de 1854

Almeida Garrett par Pedro Augusto Guglielmi 

Portrait de Garrett, daté de 1843, avec les insignes de Commandeur de l’Ordre de Notre-Dame de la Conception de Vila Viçosa

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Traduction Jacky Lavauzelle

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LA POÉSIE DE ALMEIDA GARRETT
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Recueil
« Les Feuilles mortes »
‘Folhas Caídas’
Livro primeiro
Recueil publié à Lisbonne en 1853

LES CINQ SENS
Os Cinco Sentidos

São belas – bem o sei, essas estrelas,
Qu’elles sont belles ! je sais bien, ces étoiles,
Mil cores – divinais têm essas flores;
Aux mille couleurs et les divines couleurs de ces fleurs ;

Hans Makart, 1872-1879, collection Österreichische Galerie Belvedere,
Palais du Belvédère, Vienne

**

 Não te amo
JE NE T’AIME PAS

Não te amo, quero-te: o amar vem d’alma.
Je ne t’aime pas, je te veux ! l’amour vient de l’âme.
E eu n’alma – tenho a calma,
Et moi dans l’âme – quel calme,

Valentin Serov, La princesse Zénaïde Youssoupoff

Quando Eu Sonhava
LE RÊVE

Quando eu sonhava, era assim
Quand je rêvais, c’était ainsi
Que nos meus sonhos a via;
Que dans mes rêves je la vis ;

Pierre Puvis de Chavannes, Le Rêve,1883, Paris, musée d’Orsay

CET ENFER D’AIMER
Este Inferno de Amar

 Este inferno de amar – como eu amo! –
Cet enfer d’aimer – comme je l’aime ! –
  Quem mo pôs aqui n’alma… quem foi?
Qui m’a mis ça dans l’âme … qui  ?

Ramon Casas, Madeleine au moulin de la galette, 1892, musée de Montserrat

Recueil
« Les Feuilles mortes »
‘Folhas Caídas’
Livro segundo
Recueil publié à Lisbonne en 1853

ALLÉGEANCE
PREITO

É lei do tempo, Senhora,
C’est la loi du moment, Madame,
Que ninguém domine agora
Que personne ne domine maintenant

Ramon Casas, Jeune Décadente,1899, musée de Montserrat

BARCA BELA
LA BELLE BARQUE

Pescador da barca bela,
Pêcheur de la belle barque,
Onde vás pescar com ela,

Où pars-tu pêcher avec elle,

Le pêcheur, Charles Napier Hemy, 1888

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Passos Manuel, Almeida Garrett, Alexandre Herculano, José Estêvão de Magalhães nos Passos Perdidos, Assembleia da República Portuguesa.

Humildade Secreta -HUMILITE SECRETE – Poème de João da Cruz e Sousa (1900)

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Traduction Jacky Lavauzelle João da Cruz e Sousa

João da Cruz e Sousa Traduction Jacky Lavauzelle Literatura Brasileira




Traduction du Brésilien Jacky Lavauzelle
João da Cruz e Sousa


João da Cruz e Sousa
poète brésilien

Dante Negro – Cisne Negro




 Obra Poética 





 

João da Cruz e Sousa
Humildade Secreta
HUMILITE SECRETE

(Faróis – Phares – 1900)

 

Traduction Jacky Lavauzelle

 

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Traduction Jacky Lavauzelle
Vincent Van Gogh, Portrait d’Eugène Boch 1888,musée d’Orsay, Paris (détail)

**

Fico parado, em êxtase suspenso,
Je reste immobile, en suspens extatique,
  Às vezes, quando vou considerando
Parfois, quand je considère
Na humildade simpática, no brando
Dans une humble sympathie, dans le doux
 Mistério simples do teu ser imenso.
Et simple mystère l’immensité de ton être.

*

 Tudo o que aspiro, tudo quanto penso
Tout ce à quoi j’aspire, tout ce que je pense
D’estrelas que andam dentro em mim cantando,
Des étoiles qui marchent en moi en chantant,
Ah! tudo ao teu fenômeno vai dando
Ah ! tout apporte à ton phénomène
   Um céu de azul mais carregado e denso.
Un ciel de bleu plus lourd et plus dense.

*

 De onde não sei tanta simplicidade,
D’où je méconnais tant la simplicité,
Tanta secreta e límpida humildade
Tant la secrète et la claire humilité
Vem ao teu ser como os encantos raros.
Qui vient à ton être comme les charmes rares.

*

 Nos teus olhos tu alma transparece…
Dans tes yeux, ton âme apparaît…
E de tal sorte que o bom Deus parece
Et de telle manière que le bon Dieu semble
Viver sonhando nos teus olhos Claros.
Vivre en rêvant dans tes yeux clairs.

******

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Traduction Jacky Lavauzelle João da Cruz e Sousa

João da Cruz e Sousa Traduction Jacky Lavauzelle Literatura Brasileira

SUR LES CHEMINS NOIRS Critique Sylvain TESSON LA DIAGONALE DU LOUP DANS LA BERGERIE


SYLVAIN TESSON
SUR LES CHEMINS NOIRS Critique
Editions Gallimard -2016

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L’ANGELUS de JEAN-FRANÇOIS MILLET
1857-1859
Musée d’Orsay
Paris

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LA DIAGONALE DU LOUP
DANS LA BERGERIE

L’époque a changé.

UNE NATURE NEUVE ET SOLIDE
Le mouvement a toujours questionné l’homme. Ses origines aussi. Le plein se trouve parfois à partir du vide. Sylvain Tesson en disant que sa quête qui le conduit sur « un réseau de chemin campagnards ouverts sur le mystère, baignés de pur silence, miraculeusement vide »  ne rejoint-il pas le désir taoïste :  » Et vous croyez, dit Lao-tzeu, que cela se passe ainsi, de la main à la main ? Faire durer la vie suppose bien des choses. Êtes-vous capable de conserver votre intégrité physique, de ne pas la compromettre ? Saurez-vous toujours distinguer le favorable du funeste ? Saurez-vous vous arrêter, et vous abstenir, à la limite ? Pourrez-vous vous désintéresser d’autrui, pour vous concentrer en vous-même ? Arriverez-vous à garder votre esprit libre et recueilli ? Pourrez-vous revenir à l’état de votre première enfance ? Le nouveau né vagit jour et nuit sans s’enrouer, tant sa nature neuve est solide. Il ne lâche plus ce qu’il a saisi, tant sa volonté est concentrée. Il regarde longuement sans cligner des yeux, rien ne l’émouvant. Il marche sans but et s’arrête sans motif, allant spontanément, sans réflexion. Être indifférent et suivre la nature, voilà la formule pour faire durer sa vie.  » (Œuvre de Tchoang-tzeu Chap. 23. Retour a la nature – traduit par Léon Wieger publié en 1913)

Mais Sylvain Tesson marche avec un but : partir à travers notre ruralité en longeant les chemins de France du sud vers le nord.

LE TRAVAIL DE L’ITINERANCE
L’homme a un besoin de retour, d’origine. Aujourd’hui plus fortement encore. Comme d’autres périodes de l’histoire qui agit en un balancier perpétuel.
Pierro Marcello sur son dernier film Bella e Perduta évoque son Italie : « J’ai appris à regarder l’Italie tout en contemplant depuis les trains, redécouvrant ainsi sa beauté et sa ruine. J’ai longtemps voulu faire un film itinérant qui traverserait des provinces pour décrire l’Italie : belle, oui, mais perdue. Leopardi l’a décrite comme une femme qui pleurait la tête dans ses mains à cause du poids de son histoire, et du mal ancestral lié à sa beauté. »
Le projet de Sylvain Tesson ne semble pas différent. A l’origine, une chute. Une petite chute. Huit mètres qui entraîneront l’auteur à couper la France de la frontière italienne du Col de Tende jusqu’au bout du Cotentin.

Une verticale qui engendrera une diagonale.

Quelques secondes de chute qui amèneront du 24 août au 8 novembre, à une marche initiatique dans ce que les parisiens appellent la France Profonde. En un mot, la France où nos citadins s’emmerdent sans Wi-Fi, sans autoroutes et sans TGV à travers l’hyper-ruralité par les chemins de traverses, les chemins noirs.

Nous sommes loin de cette fin du XIXe et du début du XXe siècle où la vitesse était l’objet de toutes les attentions, les peurs et les admirations. L’électron, la voiture ou la locomotive : »Le mécanicien dit alors au charretier : — Nous n’avons tué qu’un cheval et cassé qu’un chariot ; mais si je t’avais écouté, nous serions tous morts, nous et les voyageurs. Allant à toute vitesse, nous avons rejeté le chariot sans ressentir de secousse ; tandis que si nous avions ralenti, nous aurions déraillé. »  (Léon Tolstoï La vitesse et la force Traduction par Ely Halpérine-Kaminsky . Contes et fables, Librairie Plon, 1888 (pp. 93-94).) Passons sur l’Homme Pressé de Paul Morand, Un Jeune Homme bien pressé de Labiche, …

UNE MARCHE TGV
Le livre de Sylvain Tesson est une narration en marche rapide, forcée ?,  à travers des paysages divers de notre France.
Six heures, sept heures par jour, parfois plus.
(Mince, je commence à rêver d’avion…, c’est pas bon signe)
Mais, malheureusement pour nous, nous n’avons donc jamais l’impression de profiter des lieux. De les déguster. De les sentir. De les humer. Plutôt de les ingurgiter. Quelques impressions. Quelques réflexions. Des départements, des régions passent en quelques lignes. Rapides. Sortes de LGV de la langue. « Nous passâmes des heures à ouvrir et à refermer des clôtures pour nous frayer passage dans les champs » nous dit Sylvain Tesson.
J’aurais aimé un chapitre entier sur ces clôtures bancales, rénovées, en bois, métallique, rouge et rouillée, verte et huilée. Quels champs ? Aucun champ ne se ressemble. Aucune herbe non plus. Il y a tant dans chaque motte de terre. Et quelle terre ? Calcaire, pierreuse, boulbène.  Il eût fallu cent pages sur une feuille et une feuille sur une nervure ou sur une teinte entre le vert et le rouge. Un silence entre les phrases. Se poser. Un moment, respirer. Mais les pas entraînent les pas. Les sept ou huit heures de marches sont là. Et ça gâche ! Terriblement !
Ce n’est pas un catalogue qu’il aurait fallu. Mais une visite des lumières de l’aurore, des teintes du crépuscules. Ressentir la rosée qui s’éteint et celle qui se pose. Que le froid du petit matin nous passe dans le dos relevant, un à un, chacun de nos poils réveillés.
Un bon repas ne peut et ne doit être mangé comme une salade dans un fast-food.

Ce n’est pas un catalogue… Peut-être quelques mots. Quelques vers suffisent à Lermontov pour ressentir ce que nous dit le chemin, ce que nous disent les vibrations d’une feuille ou d’une mousse : « Je me penche et longtemps j’écoute :  Je crois entendre sur la route  Le son qu’un pas léger produit… Non, ce n’est rien ! C’est dans la mousse
Le bruit d’une feuille que pousse,  Le vent parfumé de la nuit. » (Mikhaïl Lermontov, L’attente)

POUR LA LIBERTE DE SE TAILLER LE MAILLOT EN PLEINE RURALITE
« Traverser ces villages donnait l’impression de passer la revue des façades en berne…Les commerces florissants étaient des salons esthétiques. » Oui, la France profonde n’est pas que joie et gaieté. Nous le savons tous. L’exode-rural pour rejoindre les villes n’a pas été qu’un simple souhait de s’agglutiner dans des périphéries, mais le souhait de trouver du travail, souvent moins pénible, offrir un avenir différent à ses enfants. Et ceux qui restent n’ont-ils pas le droit de se faire le maillot ou un gommage de peau ?  Nos dames rurales doivent-elles garder la source noire ?
Doivent-ils rester nos ruraux devant leur ballon de blanc ou leur byrrh ?

Nous avons donc, tout au long du livre, cette impression de vitesse et, comme dans un train, nous voyons tout et nous ne voyons rien.
Sylvain est en marche et la continue.

LA CAMPAGNE OUI MAIS AVEC LA CULTURE DU MONDE
Parler de ces espaces qui luttent ou qui n’intéressent tout simplement pas la mondialisation en comparant des paysages au plaines mongoles, ou passer à raconter de « la Russie des forêts« .   Amener des quantités de référence et mélanger Pessoa, Béatrice von Rezzori, Bruegel, etc. Le monde dans ses bagages. Un peu comme celui qui voyage et souhaite retrouver son hamburger et son café, comme à la maison.

POURQUOI SE FATIGUER A NOUS FATIGUER
Le livre se termine en une petite centaine  de pages. Trop rapides. Ok il a rencontré des bobos et hippies hollandais, anglais, des allemands et des chasseurs gros et gras, bêtes et débiles.
Mais quand il semble être fatigué de sa route, et que Sylvain Tesson avoue « il y allait avoir beaucoup de ponts à passer dans les prochaines heures. » On le sens épuisé. Fallait pas ! Rien n’oblige !

C’est dommage. Les ponts c’est beau.
C’est symbolique. Et comme les barrières, ils sont tous différents. Ils font se rejoindre les hommes et les territoires… Il ne faut pas se forcer, ni se donner du mal. La France est belle quand elle se découvre humblement, dans le temps. Mais dans cette beauté, il y a de la solitude non désirée, de la misère, de la pauvreté, de l’isolement non désiré aussi. Pour certains, ça la rend plus désirable encore.

Le noir se couche sur les chemins. Les rocades et les ronds-points gagnent. Et les salons esthétiques aussi.

Et alors ?

J’ai dû me tromper d’histoire…

Jacky Lavauzelle

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SUR LES CHEMINS NOIRS CRITIQUE

 

 

ИСТИННА Пушкин LA VERITÉ Poème de Pouchkine de 1816

 ИСТИННА Пушкин – LA VERITE 1816 
Alexandre Pouchkine
русский поэт- Poète Russe
русская литература
Littérature Russe

poemes-de-alexandre-pouchkine-artgitatopushkin-alexander

ALEXANDRE POUCHKINE 1819
pushkin poems
стихотворение  – Poésie
 ИСТИННА Пушкин 

 

 

POUCHKINE – Пу́шкин
Алекса́ндр Серге́евич Пу́шкин
1799-1837

[создатель современного русского литературного языка]

TRADUCTION JACKY LAVAUZELLE

la-verite-pouchkine-artgitato-la-verite-jules-joseph_lefebvreLa Vérité
Jules Joseph Lefebvre
1870
Musée d’Orsay Paris

LA POESIE DE POUCHKINE

СТИХИ АЛЕКСАНДРА СЕРГЕЕВИЧА ПУШКИНА
ИСТИННА Пушкин 


LA VERITE
 1816

 

 РОЗА Пушкин 

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ИСТИННА POUCHKINE LA VERITE

Издавна мудрые искали
Les sages depuis longtemps recherchent
Забытых Истинны следов
Les pistes de la vérité oubliée
И долго, долго толковали
Depuis longtemps, longtemps, ils interprètent…

DISPONIBLE SUR AMAZON

Увидел Истинну на дне.
Vit au fond la vérité.

 

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LES JUGEMENTS DE Tolstoï
SUR LES POEMES DE POUCHKINE

Ayons donc pleine confiance dans le jugement du comte Tolstoï sur les poèmes de Pouchkine, son compatriote ! Croyons-le, encore, quand il nous parle d’écrivains allemands, anglais, et scandinaves : il a les mêmes droits que nous à se tromper sur eux. Mais ne nous trompons pas avec lui sur des œuvres françaises dont le vrai sens, forcément, lui échappe, comme il échappera toujours à quiconque n’a pas, dès l’enfance, l’habitude de penser et de sentir en français ! Je ne connais rien de plus ridicule que l’admiration des jeunes esthètes anglais ou allemands pour tel poète français. Verlaine, par exemple, ou Villiers de l’Isle-Adam. Ces poètes ne peuvent être compris qu’en France, et ceux qui les admirent à l’étranger les admirent sans pouvoir les comprendre. Mais il ne résulte pas de là, comme le croit le comte Tolstoï, qu’ils soient absolument incompréhensibles. Ils ne le sont que pour lui, comme pour nous Lermontof et Pouchkine. Ce sont des artistes : la valeur artistique de leurs œuvres résulte de l’harmonie de la forme et du fond : et si lettré que soit un lecteur russe, si parfaite que soit sa connaissance de la langue française, la forme de cette langue lui échappe toujours.

Léon Tolstoï
Qu’est-ce que l’art ?
Traduction par T. de Wyzewa.
 Perrin, 1918
pp. i-XII

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 ИСТИННА Пушкин 

PRAYER KHALIL GIBRAN SUR LA PRIERE The Prophet XXIII

prayer-khalil-gibran-the-prophet-la-priere-le-prophete-artgitato-jean-francois-millet-langelusPRAYER Khalil Gibran The Prophet
Sur La Prière

The Prophet XXIII
PRAYER KHALIL GIBRAN
Littérature Libanaise
Lebanese literature
le-prophete-khalil-gibran-fred-holland-day-1898Photographie de Fred Holland Day
1898



جبران خليل جبران
Gibran Khalil Gibran
1883–1931
le-prophete-khalil-gibran-the-prophete-n

Traduction Jacky Lavauzelle

 

THE PROPHET XXIII
 PRAYER
LA PRIERE
1923


*

prayer-khalil-gibran-the-prophet-la-priere-le-prophete-artgitato-jean-francois-millet-langelusL’Angélus
Jean-François Millet
1857-1859

Musée d’Orsay – Paris

*

Then a priestess said, « Speak to us of Prayer. »
Puis une prêtresse demanda : « Parle-nous de la Prière. »

And he answered, saying:
Et il répondit en disant :

You pray in your distress and in your need; would that you might pray also in the fullness of your joy and in your days of abundance.
Vous priez dans votre détresse et dans votre besoin ; vous devriez prier aussi dans la plénitude de votre joie et pendant vos jours d’abondance.

For what is prayer but the expansion of yourself into the living ether?
Car qu’est-ce que la prière, sinon l’expansion de vous-même dans l’éther vivant ?

And if it is for your comfort to pour your darkness into space, it is also for your delight to pour forth the dawning of your heart.
Et si c’est pour votre réconfort que vous versez vos ténèbres dans l’espace, c’est aussi pour votre plaisir que vous répandez l’aube de votre cœur.

And if you cannot but weep when your soul summons you to prayer, she should spur you again and yet again, though weeping, until you shall come laughing.
Et si vous ne pouvez que pleurer quand votre âme vous convoque à la prière, elle devrait vous inciter encore et encore, malgré les pleurs, jusqu’à ce que vous puissiez rire.

When you pray you rise to meet in the air those who are praying at that very hour, and whom save in prayer you may not meet.
Quand vous priez, vous vous lèvez pour rencontrer dans les airs ceux qui prient dans le même instant, et qui, sauf dans la prière, vous n’auriez jamais rencontré.

Therefore let your visit to that temple invisible be for naught but ecstasy and sweet communion.
Que votre visite à ce temple invisible ne soit rien sinon une extase et une douce communion.

For if you should enter the temple for no other purpose than asking you shall not receive.
Car si vous devez entrer dans le temple avec un autre but que de demander, alors vous ne recevrez rien.

And if you should enter into it to humble yourself you shall not be lifted:
Et si vous y pénétrez pour vous humilier, vous ne serez point élevé ;

Or even if you should enter into it to beg for the good of others you shall not be heard.
Ou même si vous y entrez pour mendier pour le bien des autres, vous ne serez pas entendu.

It is enough that you enter the temple invisible.
Il suffit que vous entriez dans le temple invisible.

I cannot teach you how to pray in words.
Je ne peux vous apprendre à prier avec des mots.

God listens not to your words save when He Himself utters them through your lips.
Dieu n’écoute pas vos paroles, sauf quand Il les prononce à travers vos lèvres.

And I cannot teach you the prayer of the seas and the forests and the mountains.
Et je ne peux pas vous enseigner la prière des mers, des forêts et des montagnes.

 But you who are born of the mountains and the forests and the seas can find their prayer in your heart,
Mais vous qui êtes nés des montagnes, des forêts et des mers, vous pouvez trouver leur prière dans votre cœur,

And if you but listen in the stillness of the night you shall hear them saying in silence,
Et si vous écoutez dans le calme de la nuit, vous les entendez dire en silence :

« Our God, who art our winged self, it is thy will in us that willeth.
«Notre Dieu, qui es notre moi-ailé, c’est ta volonté en nous qui veut.

It is thy desire in us that desireth.
C’est ton désir en nous qui désire.

It is thy urge in us that would turn our nights, which are thine, into days which are thine also.
C’est ton envie en nous qui changera nos nuits qui sont les tiennes en jours qui sont aussi à toi.

We cannot ask thee for aught, for thou knowest our needs before they are born in us:
Nous ne pouvons rien te demander, car tu connais nos besoins avant qu’ils ne soient nés en nous :

Thou art our need; and in giving us more of thyself thou givest us all. »
Tu es notre besoin ; et en nous donnant plus de toi-même, tu nous donnes tout. »

*

La Prière Le Prophète XXIII
Prayer Khalil Gibran

working citation The Prophet WORK KHALIL GIBRAN CITATION LE TRAVAIL

working citation
The Prophet

WORK Le Travail- Le Prophète VII
KHALIL GIBRAN
Littérature Libanaise
Lebanese literature
le-prophete-khalil-gibran-fred-holland-day-1898Photographie de Fred Holland Day
1898

 





جبران خليل جبران
Gibran Khalil Gibran
1883–1931
le-prophete-khalil-gibran-the-prophete-n

Traduction Jacky Lavauzelle

Working Citation

THE PROPHET VII
WORK
LE TRAVAIL
 

1923




working citation
The Prophet
Work
Khalil Gibran
Le Prophète VII
Le Travail

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the-prophet-khalil-gibran-le-prophete-artgitato-gustave-caillebotte-the-floor-planers-les-raboteurs-de-parquet

Gustave Caillebotte  The Floor Planers Les Raboteurs de parquet – 1875 – Musée d’Orsay – Paris

Working Citation

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WORK THE PROPHET

working citation

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Then a ploughman said, « Speak to us of Work. »
Puis le laboureur dit : « Parle-nous du Travail. »

And he answered, saying:
Et il répondit en disant :

You work that you may keep pace with the earth and the soul of the earth.
Vous travaillez pour pouvoir suivre le rythme avec la terre et avec  l’âme de la terre.

For to be idle is to become a stranger unto the seasons, and to step out of life’s procession, that marches in majesty and proud submission towards the infinite.
Être inactif c’est devenir un étranger aux saisons, et de s’éloigner de la procession de la vie, qui marche dans une soumission majestueuse et qui marche fière vers l’infini.

When you work you are a flute through whose heart the whispering of the hours turns to music.
Lorsque vous travaillez, vous êtes une flute à travers laquelle le cœur change en musique le chuchotement des heures .

Which of you would be a reed, dumb and silent, when all else sings together in unison?
Lequel d’entre vous serait un roseau, muet et silencieux, quand tout le reste chante à l’unisson ?

Always you have been told that work is a curse and labour a misfortune.
Toujours on vous a dit que le travail est une malédiction et le labeur un malheur.

But I say to you that when you work you fulfil a part of earth’s furthest dream, assigned to you when that dream was born,
Mais je vous dis que lorsque vous travaillez vous remplissez une partie d’un rêve lointain de la terre, à vous assigné lorsque ce rêve est né,

And in keeping yourself with labour you are in truth loving life,
Et c’est en vous gardant au travail que vous êtes dans l’aimable vérité de la vie,

And to love life through labour is to be intimate with life’s inmost secret.
Et à aimer la vie par le travail c’est devenir intime avec le secret le plus fondamental de la vie.

But if you in your pain call birth an affliction and the support of the flesh a curse written upon your brow, then I answer that naught but the sweat of your brow shall wash away that which is written.
Mais si vous voyez votre naissance, dans votre peine, telle une affliction et le poids de la chair telle une malédiction écrite sur votre front, alors je réponds que rien d’autre que la sueur de votre front ne pourra laver ce qui y est écrit.

You have been told also life is darkness, and in your weariness you echo what was said by the weary.
On vous a dit aussi : « la vie est obscurité« , et dans votre lassitude vous faites écho à ce qui a été dit par lassitude.

And I say that life is indeed darkness save when there is urge,
Et je dis que la vie est en effet obscurité, sauf quand il y a envie,

And all urge is blind save when there is knowledge,
Et toute envie est aveugle sauf quand il y a la connaissance,

And all knowledge is vain save when there is work,
Et toute connaissance est vaine sauf quand il y a du travail,

And all work is empty save when there is love;
Et tout le travail est vide, sauf quand il y a l’amour ;

And when you work with love you bind yourself to yourself, and to one another, and to God.
Et quand vous travaillez avec amour vous vous liez à vous-même et aux autres, et à Dieu.

And what is it to work with love?
Et que veut donc dire travailler avec amour ?

It is to weave the cloth with threads drawn from your heart, even as if your beloved were to wear that cloth.
C’est tisser la toile avec des fils tirés de votre cœur, comme si votre bien-aimé devait porter ce tissu.

It is to build a house with affection, even as if your beloved were to dwell in that house.
C’est de construire une maison avec affection, comme si votre bien-aimé devait habiter dans cette maison.

It is to sow seeds with tenderness and reap the harvest with joy, even as if your beloved were to eat the fruit.
C’est semer les graines avec tendresse et récolter la moisson avec joie, comme si votre bien-aimé devait en manger le fruit.

It is to charge all things you fashion with a breath of your own spirit,
C’est charger toutes les choses que vous réalisez avec un souffle de votre propre esprit,

And to know that all the blessed dead are standing about you and watching.
Et savoir que tous les morts bienheureux sont debout à vos côtés et vous regardent.

Often have I heard you say, as if speaking in sleep, « he who works in marble, and finds the shape of his own soul in the stone, is a nobler than he who ploughs the soil.
J’ai souvent entendu dire, comme si  vous parliez en dormant, « celui qui travaille dans le marbre, et trouve la forme de son âme dans la pierre, est un plus noble que celui qui laboure le sol.

And he who seizes the rainbow to lay it on a cloth in the likeness of man, is more than he who makes the sandals for our feet. »
Et celui qui saisit l’arc en ciel pour le poser sur un chiffon à la ressemblance de l’homme, est plus grand que celui qui réalise les sandales pour nos pieds. « 

But I say, not in sleep but in the over-wakefulness of noontide, that the wind speaks not more sweetly to the giant oaks than to the least of all the blades of grass;
Mais je dis, non pas en dormant, mais en étant totalement éveillé en plein midi, que le vent ne parle pas plus doucement aux chênes géants qu’au moindre brin d’herbe ;

And he alone is great who turns the voice of the wind into a song made sweeter by his own loving.
Et lui seul est grand celui qui a changé la voix du vent en une chanson plus douce par son propre amour.

Work is love made visible.
Le travail est l’amour devenu visible.

And if you cannot work with love but only with distaste, it is better that you should leave your work and sit at the gate of the temple and take alms of those who work with joy.
Et si vous ne pouvez pas travailler avec amour mais seulement avec dégoût, il est préférable que vous quittiez votre travail et que vous vous asseyiez à la porte du temple et receviez l’aumône de ceux qui travaillent avec joie.

For if you bake bread with indifference, you bake a bitter bread that feeds but half man’s hunger.
Car si vous faites cuire du pain avec indifférence, vous faites cuire un pain amer qui ne nourrit que la moitié de la faim d’un homme.

And if you grudge the crushing of the grapes, your grudge distils a poison in the wine.
Et si vous écrasez des raisins sans joie, votre rancune distille alors un poison dans le vin.

And if you sing though as angels, and love not the singing, you muffle man’s ears to the voices of the day and the voices of the night.
Et si vous chantez comme les anges, mais que vous n’aimiez pas le chant, vous voilez aux oreilles de l’homme les voix du jour et les voix de la nuit.

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The Prophet
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