Archives par mot-clé : Luis Buñuel

LES FILMS LES PLUS POÉTIQUES – The Best Poetic Movies

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CINÉMA & POÉSIE

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The Best Poetic Movies
LES FILMS LES PLUS POÉTIQUES
DU MONDE

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1
ANDREÏ ROUBLEV
Андрей Рублёв

1969
Andreï Tarkovski
Avec Anatoli Solonitsyne, Ivan Lapikov, Nikolaï Grinko, Nikolaï Sergueïev

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2
AU HASARD BALTHAZAR

1966
Robert Bresson
Avec Anne Wiazemsky,  Pierre Klossowski

*

3
UN CHIEN ANDALOU

1929
Luis Buñuel
Pierre Batcheff, Simone Mareuil

*

4
UN CONDAMNÉ A MORT S’EST ÉCHAPPÉ

1956
Robert Bresson
Avec François Leterrier

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5
LES AILES DU DÉSIR
Der Himmel über Berlin
1987
Wim Wenders
Avec
Bruno Ganz, Solveig Dommartin, Otto Sander, Peter Falk

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METROPOLIS
1927
Fritz Lang
Avec Alfred Abel, Brigitte Helm, Gustav Fröhlich, Rudolf Klein-Jogge

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LE MÉPRIS
1963
Jean-Luc Godard
Avec Brigitte Bardot, Michel Piccoli, Jack Palance, Fritz Lang

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LE SEPTIÈME SCEAU
1957
Ingmar Bergman
Avec Max von Sydow, Gunnar Björnstrand, Bengt Ekerot, Nils Poppe

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ONCLE BOONMEE
Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures
ลุงบุญมีระลึกชาติ

2010
Apichatpong Weerasethakul

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PARIS, TEXAS
1984
Wim Wenders
Avec Harry Dean Stanton, Nastassja Kinski, Dean Stockwell

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KWAÏDAN
怪談
1964
Masaki Kobayashi

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LA BELLE ET LA BÊTE
1946
Jean Cocteau
Avec Jean Marais, Josette Day

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LIMITE
1902
 Mário Peixoto
Avec Olga Breno, Taciana Rei, Raul Schnoor

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LES CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE
雨月物語
1953
Kenji Mizoguchi

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PEAU D’ÂNE
1970
Jaques Demy
Avec Catherine Deneuve, Delphine Seyrig, Jacques Perrin, Jean Marais, Micheline Presle

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LE SALON DE MUSIQUE
Jalsaghar
1958
Satyajit Ray

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IN THE MOOD FOR LOVE
花樣年華
2000
Wong Kar-Wei
Avec Tony Leung, Maggie Cheung

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LES FRAISES SAUVAGES
Smultronstället
1957
Ingmar Bergman
Avec Victor Sjöström, Bibi Andersson, Ingrid Thulin

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APRÈS LA PLUIE
雨 あがる
1999
Takashi Koizumi
Avec Akira Terao

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THÉRÈSE
1987
Alain Cavalier
Avec Catherine Mouchet

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LE SAMOURAÏ
1967
Jean-Pierre Melville
Avec Alain Delon, François Périer, Nathalie Delon, Cathy Rosier

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HANA-BI
はなび
1997
Takeshi Kitano
Avec Beat Takeshi, Kayoko Kishimoto, Ren Osugi, Susumu Terajima

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L’ÂGE D’OR
1930
Luis Buñuel
Avec Gaston Modot, Lya Lys

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YOYO
1965
Pierre Étaix
Avec Pierre Étaix, Claudine Auger, Luce Klein

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IN WEITER FERNE, SO NAH
Si loin, si proche !
1997
Wim Wenders
Avec Otto Sander, Bruno Ganz, Nastassja Kinski

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PICKPOCKET
1959
Robert Bresson
Avec Martin La Salle, Marika Green, Jean Pelegri

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MESHES OF THE AFTERNOON
1943
Maya Deren et Alexander Hammid

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ERASERHEAD
1977
David Lynch
Avec Jack Nance, Charlotte Stewart, Jeanne Bates, Jack Fisk


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LES VACANCES DE MONSIEUR HULOT
1951
Jacques Tati

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FINIS TERRAE
1929
Jean Epstein

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L’ENFANCE D’IVAN
Иваново детство
1962
Andreï Tarkovski
Avec Vladimir Bogomolov, Mikhaïl Papava

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2046
2004
Wong Kar-Wai
Avec Tony Leung Chiu-wai, Zhang Ziyi, Gong Li, Maggie Cheung

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HOLY MOTORS
2012
Leos Carax
Avec Denis Lavant, Édith Scob, Eva Mendes, Michel Piccoli, Kylie Minogue

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KORIDORIUS
Corridor
1995
Sharunas Bartas

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Сталкер
STALKER
1979
Andreï Tarkoski
Avec Alexandre Kaïdanovski, Anatoli Solonitsyne, Nikolaï Grinko

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SAYAT NOVA
La Couleur de la grenade 
Tsvet granata
1969
Sergueï Paradjanov
Avec Sofiko Tchiaoureli

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POST TENEBRAS LUX
2012
Carlos Reygadas

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ONLY LOVERS LEFT ALIVE
2014
Jim jarmush
Avec Tom Hiddleston, Tilda Swinton, Mia Wasikowska, Anton Yelchin, John Hurt

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L’AN 01
1973
Jacques Doillon
(réalisation avec Alain Resnais et Jean Rouch)
Avec Daniel Auteuil, Josiane Balasko, François Béranger, Isabelle de Botton,
Romain Bouteille, Gérard Depardieu, Cabu, Antoine Carillon, François Cavanna, Professeur Choron, Christian Clavier ,Coluche…

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NOSTALGHIA
1983
Andreï Tarkovski
Avec Oleg Yankovski, Domiziana Giordano, Erland Josephson

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DOGVILLE
2003
Lars von Trier
Avec Nicole Kidman, Stellan Skarsgård, Harriet Andersson, Lauren Bacall

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TOUKI BOUKI
1973
Djibril Diop Mambety

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LES PARAPLUIES DE CHERBOURG
1964
Jacques Demy
Avec Catherine Deneuve, Nino Castelnuovo, Anne Vernon

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THEMROC
1973
Claude Faraldo
Avec Michel Piccoli, Béatrice Romand, Jeanne Herviale, Marilù Tolo, Francesca Romana Coluzzi, Romain Bouteille, Coluche, Patrick Dewaere, François Dyrek, Michel Fortin, Henri Guybet, Miou-Miou

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KONTROLL
2003
Nimród Antal
Avec Sándor Csányi, Zoltán Mucsi

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Солярис
SOLARIS
1972
Andreï Tarkovski
Avec Natalia Bondartchouk, Donatas Banionis

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THE WIND WILL CARRY US
باد ما را خواهد برد
Le vent nous emportera
1999
Abbas Kiarostami

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LE JOURNAL D’UN CURÉ DE CAMPAGNE
1951
Robert Bresson
Avec Claude Laydu, Adrien Borel, Rachel Berendt

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LE SACRIFICE
OFFRET
1986
Andreï Tarkovski
Avec Erland Josephson, Susan Fleetwood, Valérie Mairesse, Allan Edwall

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A LA VERTICALE DE L’ÉTÉ
Mùa hè chiều thẳng đứng
2000
Trần Anh Hùng

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LE CUIRASSE POTEMKINE
 Броненосец «Потёмкин
1925
Sergueï Eisenstein

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LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT
1967
Jacques Demy
Avec Catherine Deneuve, Françoise Dorléac, Jacques Perrin, Gene Kelly, Danielle Darrieux

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BERLIN – SYMPHONIE D’UNE GRANDE VILLE
1927
Walther Ruttmann

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LE VOYAGE DANS LA LUNE
1902
Georges Méliès

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LES AMANTS DU PONT NEUF
1991
Leos Carax
Avec Juliette Binoche, Denis Lavant, Klaus Michael Grüber, Marie Trintignant

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LA TÊTE EN FRICHE
2010
Jean Becker

Gérard Depardieu, Gisèle Casadesus, Claire Maurier, Jacqueline Chazes, Maurane, François-Xavier Demaison, Anne Le Guernec, Jacqueline Chazes, Amandine Chauveau, Jacqueline Chazes, Sophie Guillemin, Florian Yven,Patrick Bouchitey, Régis Laspalès, Jean-François Stévenin

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LES FILMS POÉTIQUES

SUSANA La Perverses ou LA SEDUCTION DU DEMON (Buñuel)

Luis Buñuel

Susana la perverse Susana, demonio y carne
1951
LA SEDUCTION DU DEMON

Susana la perverse-Susana demonio y carne- Luis Bunuel Artgitato « Le serpent alors innocent, mais qui devait dans la suite devenir si odieux, comme si nuisible à notre nature, devait servir en son temps à nous rendre la séduction du démon plus odieuse ; et les autres qualités de cet animal étaient propres à nous figurer le juste supplice de cet esprit arrogant, atterré par la main de Dieu, et devenu si rampant par son orgueil. » (Bossuet, De la concupiscence)

 

Des premières images, les premiers plans sont les plus beaux du film. La musique de Raul Lavista gronde littéralement d’inquiétude lancinante en perdant la caméra dans les nuages. La caméra monte, monte. La pluie tombe alors. L’orage zèbre la nuit. Des lumières d’un édifice imposant. Plan sur la pancarte qui remplit l’écran : « REFORMATORIO DEL ESTADO », Maison de Correction d’Etat. Le déluge peut commencer.

« Alors le Seigneur fit tomber sur Sodome et Gomorrhe une pluie de soufre et de feu, venant du Seigneur, du ciel. » (Genèse)

Des cellules de la maison de redressement sont dans le noir.

Des dames descendent avec une fille leur criant : « Soyez maudites ! » Elle crache, donne des coups de poings et des coups de pieds, elle  éructe comme un diablotin.

Le cas de Susanna s’aggrave ; « depuis deux ans, son état ne fait que s’empirer. » Elle a passé une partie de sa jeunesse dans cette institution. Elle est entre deux âges. Presqu’une femme.
Nous sommes dans le cœur du film. Le bien et le mal. Le Diable et Dieu. Mais ce qui est le plus intéressant, c’est que cette Susana que l’on emprisonne dans un cachot insalubre pour quinze jour afin de la calmer n’invoque ni Satan ni le Diable, mais Dieu.

Malgré son allure démoniaque, sa beauté rayonne. Elle illumine.

Elle reste terrorisée par une chauve-souris, des rats, une araignée., comme une fillette qui découvrirait pour la première fois la prison. La première personne qu’elle implore est Dieu : « Dieu ! Faites-moi sortir ! Je veux sortir… » Et c’est la croix qui illumine alors le centre du cachot.

Le Diable n’est pas là. Et Susana n’est pas effrayée par cette apparition qui la calme immédiatement. La musique s’adoucit de suite. Nous n’entendons plus l’orage.

Elle semble avoir perdu la raison. « Elle n’est pas plus heureuse en jouissant des plaisirs que ses sens lui offrent : au contraire elle s’appauvrit dans cette recherche, puisqu’en poursuivant le plaisir elle perd la raison. Le plaisir est un sentiment qui nous transporte, qui nous enivre, qui nous saisit indépendamment de la raison, et nous entraîne malgré ses lois. » (Bossuet, Sermon pour Madame de La Vallière, 4 juin 1675)

Susana continue dans le même registre. Elle ressemble alors à une sainte perdue dans ses prières. L’hystérique du début n’est plus du tout la même, mais le Dieu invoqué prend des couleurs moins évidentes : « Seigneur. Tu m’as fait comme je suis. Comme les scorpions, comme les rats… » Ce n’est donc pas le Seigneur qu’elle invoque : « Dieu des prisons, aie pitié de moi. Fais tomber les barreaux, les murs. Laisse-mois sentir l’air, le soleil. J’ai autant de droits qu’un serpent…ou que cette araignée ! … Dieu, accorde-moi un miracle si tu peux !…Sors-moi de là ! »

Déchaînée, les barreaux cèdent. Elle s’en servira d’échelle. Un rire diabolique sort de sa bouche.  Dehors le déluge continue au rythme de la musique qui s’accélère. Les orages rayent la toile. Elle tombe, rampe, glisse, comme un serpent dans la tourmente.

Cette partie est la plus ambigüe. Sa libération est un miracle en soi. Même si elle invoque le « Dieu des prisons », c’est la croix qui s’inscrit et c’est Dieu qu’elle invoque et qui semble répondre à sa prière.

« Au terme des mille ans, Satan déchaîné, s’évadera de sa prison pour séduire les nations aux quatre coins de la terre. » (L’Apoclypse de Jean, XX)

Le plan suivant présentera l’hacienda, sous les eaux et sous l’orage, de Don Guadalupe. Luis Buñuel nous la montre comme un havre de paix. Un havre que le malin cherchera à conquérir.

La jument préféré du maître des liuex est en train de mettre bas. La naissance se passe mal. Le poulain n’y résistera pas et le pronostic vital de la jument est engagé. La mort de cet animal innocent marque l’approche des forces diaboliques.

Les propos tournent dans le grand salon autour de superstitions, notamment de la part de la servante Felisa. Susana qui arrive détrempée, s’évanouie au seuil de la maison. Elle est accueillie par charité chrétienne. Dona Carmen, la femme de Don Guadalupe écoute la fausse histoire de Susana et la prend sous sa protection.

Susana cherchera à séduire les hommes qui lui permettront de rester dans l’hacienda. Jesus, le contremaître, qui lui tourne autour, apprendra vite qu’elle est recherchée par les autorités et cherchera à en tirer parti. Dans l’hacienda, c’est le mal qui triomphe, Susana prend possession des âmes et c’est le fils, doux et obéissant, étudiant invétéré, qui se retrouve dans une chambre avec des barreaux.

La fumée des batailles du cœur commence à se répandre. Elle se dissipera bientôt…mais pour mieux découvrir le lugubre spectacle des ruines.

En attendant, Susana séduira ensuite le fils et le père. La cellule familiale se décomposera tout au long du film, créant des jalousies, des rancœurs et des haines. Elle jouera constamment sur son image de jeune fille chaste et prude. Et ne découvre largement ses épaules que pour passer à l’offensive de la séduction, avec un geste de sa main dans ses cheveux.

Tout redeviendra plus calme avec l’arrivée des autorités conduite par Jesus, récemment licencié après avoir été surpris, par Don Guadalupe, avec Susana. Il était temps.

« Mais un feu descendit du ciel et les dévora. Le Diable, leur séducteur, fut jeté dans l’étang de feu et de soufre, auprès de la Bête et du faux prophète ; ils y seront tourmentés jour et nuit, pour les siècles des siècles. » (L’Apocalypse de Jean)

Le foyer se recomposera aussitôt. Le fils retrouvera sa gentillesse naturelle et le père son fauteuil de maître incontesté de l’hacienda. Dès le départ de Susana, nous apprendrons aussi que la jument que Don Guadalupe devait abattre, est, désormais, totalement guérie.

« Je vis alors un grand trône blanc et Celui qui siégeait dessus…Je vis alors un ciel nouveau et une terre nouvelle, puisque le premier ciel et la première terre s’en étaient allés… » (L’Apocalypse de Jean)

Jacky Lavauzelle

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LES PERSONNAGES

Fernando Soler (Don Guadalupe, le père) Matilde Palou (Dona Carmen, la mère) Luis López Somoza (Alberto, le fils)

Rosita Quintana (Susana) Víctor Manuel Mendoza (Jesus, l’intendant) María Gentil Arcos (Felisa, la servante-chef)