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LA TRAVERSÉE PAR LA MER DU NORD – OS LUSIADAS VI-57 – LES LUSIADES – Luís de Camões -Ali chegado, ou fosse caso ou manha

*

Ferdinand de Portugal traduction Jacky Lavauzelle

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OS LUSIADAS CAMOES CANTO VI
CANTO SEXTO

Os Lusiadas Les Lusiades
OS LUSIADAS VI-57 LES LUSIADES VI-57

*
LITTERATURE PORTUGAISE

Ferdinand de Portugal Os Lusiadas Traduction Jacky Lavauzelle Les Lusiades de Luis de Camoes

literatura português
Luis de Camões
[1525-1580]
Tradução – Traduction
Jacky Lavauzelle
texto bilingue

Traduction Jacky Lavauzelle

*



« Ali chegado, ou fosse caso ou manha,
« Là, Magriço, sans que nous sachions les raisons profondes,
Sem passar se deteve muitos dias:
S’est arrêté pendant plusieurs jours :…


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MARIANA – Poème d’Alfred Tennyson – LA MOUCHE BLEUE

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Dante Gabriel Rossetti, The Day Dream, 1880, Londres, Victoria and Albert Museum                                                                (source: http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Dante_Gabriel_Rossetti_-_The_Day_Dream_-_Google_Art_Project.jpg)

 

 

LITTERATURE ANGLAISE
POESIE ANGLAISE
EPOQUE VICTORIENNE


Alfred Tennyson par Julia Margaret Cameron

Alfred Tennyson

6 août 1809 – 6 octobre 1892 

 

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TRADUCTION JACKY LAVAUZELLE
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MARIANA
LA MOUCHE BLEUE

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John Everett Millais, Mariana,1851

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« Mariana in the Moated Grange »
(Shakespeare, Measure for Measure)
(William Shakespeare, Mesure pour mesure)

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With blackest moss the flower-plots
D’une mousse si noire, les parcelles de fleurs
Were thickly crusted, one and all:
Se recouvraient comme d’une croûte épaisse :
The rusted nails fell from the knots
Les clous rouillés tombaient des nœuds
That held the pear to the gable-wall.
Qui retenaient l’ensemble contre le mur de la baie.
The broken sheds look’d sad and strange:
Les remises délabrées semblaient si tristes et étranges,
Unlifted was the clinking latch;
Que fermait un vieux verrou cliquetant ;
Weeded and worn the ancient thatch
Fatiguée et usée l’ancienne chaume recouvrait
Upon the lonely moated grange.
La grange solitaire des douves.
She only said, « My life is dreary,
Elle dit seulement : « Ma vie est triste,
He cometh not, » she said;
Il ne vient pas « , dit-elle ;
She said, « I am aweary, aweary,
Elle dit : « Je suis inquiète, si inquiète,
I would that I were dead! »
Je voudrais être morte ! « 

*

Her tears fell with the dews at even;
Ses larmes tombèrent dans la rosée du soir ;
Her tears fell ere the dews were dried;
Ses larmes coulèrent avant que les rosées ne sèchent ;
She could not look on the sweet heaven,
Elle ne pouvait plus regarder le doux ciel,
Either at morn or eventide.
Ni le matin ni le soir.
After the flitting of the bats,
Après le battement d’ailes des chauves-souris,
When thickest dark did trance the sky,
Quand l’obscurité la plus épaisse enveloppe tout à fait le ciel,
She drew her casement-curtain by,
Elle tira son rideau à battants,
And glanced athwart the glooming flats.
Et jeta un coup d’œil à travers les appartements sombres.
She only said, « The night is dreary,
Elle dit seulement : « La nuit est triste,
He cometh not, » she said;
Il ne vient pas « , dit-elle ;
She said, « I am aweary, aweary,
Elle dit : « Je suis inquiète, si inquiète,
I would that I were dead! »
Je voudrais être morte ! « 

*

Upon the middle of the night,
Au cœur de la nuit,
Waking she heard the night-fowl crow:
En se réveillant, elle entendit le chant des oiseaux de nuit :
The cock sung out an hour ere light:
Le coq chanta une heure avant la première lueur :
From the dark fen the oxen’s low
De la sombre tourbière, le mugissement des bœufs
Came to her: without hope of change,
Parvint jusqu’à elle : sans espoir de changement,
In sleep she seem’d to walk forlorn,
Dans le sommeil, elle semblait marcher désespérée,
Till cold winds woke the gray-eyed morn
Jusqu’à ce que des vents froids réveillent le matin aux yeux gris
About the lonely moated grange.
Près de la grange solitaire des douves.
She only said, « The day is dreary,
Elle dit seulement : « La journée est triste,
He cometh not, » she said;
Il ne vient pas « , dit-elle ;
She said, « I am aweary, aweary,
Elle dit : « Je suis inquiète, si inquiète,
I would that I were dead! »
Je voudrais être morte ! « 

*

About a stone-cast from the wall
À un jet de pierre du mur
A sluice with blacken’d waters slept,
  Une écluse aux eaux noircies dormait,
 And o’er it many, round and small,
Et tout au-dessus, rondes et petites,
The cluster’d marish-mosses crept.
  Les mousses marécageuses en grappes glissaient.
Hard by a poplar shook alway,
 Tout à côté, un peuplier toujours s’agitait,
  All silver-green with gnarled bark:
Tout vert argenté avec son écorce noueuse :
  For leagues no other tree did mark
Sur des lieux, aucun autre arbre ne marquait
The level waste, the rounding gray.
  La vaste étendue, le gris environnant.
 She only said, « My life is dreary,
Elle dit seulement : « Ma vie est triste,
He cometh not, » she said;
Il ne vient pas « , dit-elle ;
She said, « I am aweary, aweary,
Elle dit : « Je suis inquiète, si inquiète,
I would that I were dead! »
Je voudrais être morte !

*

And ever when the moon was low,
Et quand la lune fut basse,
And the shrill winds were up and away,
  Et que les vents aigus vinrent de si haut et d’ailleurs,
 In the white curtain, to and fro,
Dans le rideau blanc, de long en large,
 She saw the gusty shadow sway.
Elle vit l’ombre en rafale se balancer.
But when the moon was very low
  Mais quand la lune fut au plus bas
  And wild winds bound within their cell,
Et que les vents sauvages furent engouffrés dans leur cellule,
The shadow of the poplar fell
  L’ombre du peuplier tomba
Upon her bed, across her brow.
  Sur son lit, sur son front.
She only said, « The night is dreary,
Elle dit seulement : « La nuit est triste,
He cometh not, » she said;
Il ne vient pas « , dit-elle ;
She said, « I am aweary, aweary,
Elle dit : « Je suis inquiète, si inquiète,
I would that I were dead! »
Je voudrais être morte ! « 

*

All day within the dreamy house,
Toute la journée dans la maison de rêve,
    The doors upon their hinges creak’d;
Les portes sur leurs gonds grinçaient à l’envi ;
The blue fly sung in the pane; the mouse
  La mouche bleue chantait sur la vitre ; la souris
Behind the mouldering wainscot shriek’d,
  Derrière le lambris s’époumonait,
 Or from the crevice peer’d about.
Ou espionnait de la crevasse où elle se trouvait.
Old faces glimmer’d thro’ the doors
  De vieux visages scintillaient à travers les portes,
Old footsteps trod the upper floors,
  De vieux pas foulaient les étages du dessus,
  Old voices called her from without.
De vieilles voix l’appelaient de l’extérieur.
She only said, « My life is dreary,
Elle dit seulement : « Ma vie est triste,
He cometh not, » she said;
Il ne vient pas « , dit-elle ;
She said, « I am aweary, aweary,
Elle dit : « Je suis inquiète, si inquiète,
I would that I were dead! »
Je voudrais être morte ! « 

*

The sparrow’s chirrup on the roof,
Plus le gazouillement du moineau sur le toit,
 « The slow clock ticking, and the sound
Le tic-tac lent de l’horloge et le son
  Which to the wooing wind aloof
Que le vent produisait au loin
The poplar made, did all confound
  A travers le peuplier, se confondaient
Her sense; but most she loathed the hour
  Dans tous les sens, plus elle maudissait l’heure
When the thick-moted sunbeam lay
  Où le rayon du soleil gisait
  Athwart the chambers, and the day
A travers les chambres et maudissait le jour
Was sloping toward his western bower.

 Qui inondait la tonnelle, celle qui se trouve vers le soleil couchant.
Then said she, « I am very dreary,

Puis elle dit : « Je suis si triste,
He will not come, » she said;
Il ne viendra pas, » dit-elle ;
She wept, « I am aweary, aweary,

Elle pleura, « Je suis inquiète, si inquiète,
Oh God, that I were dead! »

Ô Dieu, comme je voudrais être morte ! « 



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JALOUSIE – Poème de Marina Tsvétaïeva – Марина Ивановна Цветаева- 1926 – ПОПЫТКА РЕВНОСТИ

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LITTÉRATURE RUSSE
POÉSIE RUSSE
Русская литература

Русская поэзия


TRADUCTION JACKY LAVAUZELLE


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Marina Tsvétaïeva – photo de Pierre Choumoff ( Пётр Ива́нович Шу́мов )

Marina Ivanovna Tsvetaïeva
Марина Ивановна Цветаева

poétesse russe
русская поэтесса
Moscou 26 septembre 1892 – Ielabouga 31 août 1941
26 сентября 1892, Москва — 31 августа 1941, Елабуга

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JALOUSIE
1926
ПОПЫТКА РЕВНОСТИ
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Haynes King, Jalousie et flirt, Jealousy and Flirtation, 1874, Victoria and Albert Museum, Londres

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ПОПЫТКА РЕВНОСТИ

Как живётся вам с другою, —
Comment vis-tu avec cet autre –
Проще ведь? — Удар весла! —
N’est-ce pas plus facile ? – Coup de rames ! -…

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19 ноября 1924
19 novembre 1924

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Marina Tsvétaïeva – Marina Tsvetaeva – en 1924

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Poésie de Marina Tsvétaïéva
Поэзия Марины Чветаевой

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LE TAUREAU D’AIRAIN – Pièce de Jacky Lavauzelle

*


LE TAUREAU D’AIRAIN



Théâtre de Jacky Lavauzelle

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Phalaris condamnant le sculpteur Perillus
Par Baldassarre Peruzzi.
Phalaris – Tyran d’Agrigente en Sicile

Le supplice du taureau d’airain ou taureau de Phalaris

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LE TAUREAU D’AIRAIN
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Pièce de Théâtre

*


Premier Tableau

Le Chœur
Nous sommes en Moirie, pays sombre et lugubre où règnent trois princesses – je les appellerai plutôt sorcières, mais ce n’est que mon avis, après tout…

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Second Tableau

PHALARIS
Ce sera notre dieu désormais. J’ai eu une illumination en me rasant. Kemoch m’est apparu…Et il m’a parlé…
Gaihris lève les yeux au ciel quand Phalaris se tourne.
Une illumination, te dis-je. Une lumière blanche et des musiques sérielles et électroacoustiques … La synthèse impossible entre Stockhausen, Berio, Boulez et Dalbavie… J’étais un ange dans les mains de Dieu.

**

Troisième Tableau

PERILLUS
C’est vrai, l’amitié est chose bien peu présente dans notre pays, on ne parle que de loyauté ! La loyauté c’est pour les chiens ! La loyauté c’est pour les mafieux et les véreux ! Pour les tyrans ! Mon chien m’est fidèle et loyal, mais je ne le mange pas dès qu’il me désobéit !

**

Quatrième Tableau

PHALARIS
Qui s’emballe.
Ben, c’est que moi, le chaudron ça m’excite, Altesse et depuis que vous en parlez, Altesse, j’ai l’eau à la bouche et j’entends des gargouillis dans mon ventre, Altesse…c’est plus fort que moi…Ah ! cette idée du chaudron….Vous me dites qu’ils me laisseraient les conjoints…Si je pouvais les croquer tous…

**

Cinquième Tableau

ATROPOS
Et moi, couper ! Tout le monde à peur de moi ! tous s’écartent et chacun pense que sa dernière heure est arrivée ! Je les vois tremblant, bavant, écumant…Leurs épaules s’affaissent…ils rougissent…bégaient … suent à grosses gouttes…Je sens de la peur dès que je passe…des fragrances horribles de l’angoisse…même les lumières à mon passage s’affadissent. J’ai même vu des ampoules éclater en mille morceaux !

**

Sixième Tableau

PERILLUS
…du volume…du volume et encore du volume ! Ma création doit symboliser la culture Moirienne ! Notre puissance et notre effroi. C’est pour ça que tous nos voisins ont peur de nous ! Il y a un côté animal en chacun de nous. La Moirie est la réserve du monde ! Le paradis des cannibales ! On est pas accepté partout ! Quel monde indifférent à nos préoccupations et à notre manière de vivre !

**

Septième Tableau

PHALARIS
Comme tu y vas, Grand Argentier, la banqueroute ? C’est un peu fort quand même ! Nous avons des dépenses plus fortes que prévues…C’est sûr ! Des impondérables ? Aussi ! Mais…mais quand même, nous investissons pour notre avenir et pour le salut de nos âmes : nous nous mettons dans les bras de Kemoch !

**

Huitième Tableau

PERILLUS
Les traditions, les amis ! Les traditions ! N’oubliez jamais les traditions ! Nous vivons et mourons pour elles. Elles sont notre socle, notre terroir. Sans elles, nous ne sommes rien.

**

Neuvième Tableau

LACHÉSIS
Le pays s’enfonce un peu plus…En perdant Périllus, je me demande si nous n’avons pas perdu la partie ?

**

Dixième et dernier Tableau

PERILLUS
Regarde ! Sur les côtés ! Les orifices permettent de percevoir les gémissements du taureau…comme s’il s’agissait d’un vrai. Ce taureau permettra d’avoir avant le goût, l’odeur et les sons.

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Clotho, Lachèsis et Atropos
Tapisserie Flamande
Victoria and Albert Museum
Londres

 

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LE TAUREAU D’AIRAIN
Pièce de théâtre

Kubla Khan de SAMUEL TAYLOR COLERIDGE

***

Samuel Taylor Coleridge Traduction Jacky Lavauzelle

LITTERATURE ANGLAISE -English Literature – English poetry

SAMUEL TAYLOR COLERIDGE
Devon 21 octobre 1772 – Londres 25 juillet 1834

Traduction – Translation

TRADUCTION JACKY LAVAUZELLE

French and English text
texte bilingue français-anglais

 







Samuel Taylor Coleridge Traduction Jacky Lavauzelle

*****

Samuel Taylor Coleridge Traduction Jacky Lavauzelle

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SAMUEL TAYLOR COLERIDGE

 

KUBLA KHAN

 




IN Xanadu did Kubla Khan
À  Xanadu, Kubla Khan
A stately pleasure-dome decree:
Fit bâtir un majestueux dôme de plaisir :
Where Alph, the sacred river, ran
Où Alphée, la rivière sacrée, coulait
Through caverns measureless to man
A travers des cavernes sans mesure pour l’homme
Down to a sunless sea.
Pour se livrer à une mer sans soleil.
So twice five miles of fertile ground
Deux fois cinq miles de terrain fertile
With walls and towers were girdled round
Par des murs et par des tours furent entourés.

 




*

And there were gardens bright with sinuous rills
Ce fut des jardins lumineux où étincelaient de sinueux ruisseaux
 Where blossomed many an incense-bearing tree;
Où s’épanouissaient tant d’arbres porteurs d’encens ;
And here were forests ancient as the hills,
Des antiques forêts sur d’antiques collines,
Enfolding sunny spots of greenery.
Caressaient les verdures ensoleillées.




*

But oh! that deep romantic chasm which slanted
Mais oh ! Ce profond gouffre romantique profond dérivait
Down the green hill athwart a cedarn cover!
Au fond de la verte colline, à travers la canopée de cèdres !
A savage place! as holy and enchanted
Lieu sauvage ! Sacré et enchanté
As e’er beneath a waning moon was haunted
Que nulle lune décroissante ne fut jamais autant hantée
 By woman wailing for her demon-lover!
Par une femme pleurant son démoniaque amant !
And from this chasm, with ceaseless turmoil seething,
Et de ce gouffre, aux incessants tumultes,




As if this earth in fast thick pants were breathing,
Comme si cette terre respirait en souffles saccadés,
A mighty fountain momently was forced;
Une puissante fontaine par moment s’évadait ;
Amid whose swift half-intermitted burst
Au cœur de ces éclats à demi étouffés
Huge fragments vaulted like rebounding hail,
De monstrueux fragments éructaient comme la grêle




Or chaffy grain beneath the thresher’s flail:
Comme le grain sous le fléau de la batteuse :
And ‘mid these dancing rocks at once and ever
Et à mi-hauteur de ces roches dansantes
 It flung up momently the sacred river.
Se découvrait la rivière sacrée.
   Five miles meandering with a mazy motion
Sur cinq miles serpentait nonchalamment
Through wood and dale the sacred river ran,
Au cœur des forêts et du vallon, glissait la rivière sacrée,
Then reached the caverns measureless to man,
Pour se cacher dans les cavernes sans mesure pour l’homme,
And sank in tumult to a lifeless ocean:
Et se livrer ensuite à un océan sans vie :
And ‘mid this tumult Kubla heard from far
Et au milieu de ce tumulte, Kubla entendit de loin
Ancestral voices prophesying war!
Des voix ancestrales prophétisant la guerre !



*
The shadow of the dome of pleasure
L’ombre du dôme de plaisir
 Floated midway on the waves;
Flottait à mi-chemin sur les vagues ;
Where was heard the mingled measure
Où s’entendaient les mesures emmêlées
 From the fountain and the caves.
De la fontaine et des grottes.




  It was a miracle of rare device,
C’était une vision miraculeuse et rare,
A sunny pleasure-dome with caves of ice!
Un dôme de plaisir ensoleillé avec des grottes de glace !
A damsel with a dulcimer
Une jeune fille avec une cithare
In a vision once I saw:
Dans ma vision prit sa place :

*




It was an Abyssinian maid,
Une servante abyssinienne,
.And on her dulcimer she played,
Par sa cithare, la  musicienne,
Singing of Mount Abora.
Jouait un air du Mont Abora.
Could I revive within me
Pourrais-je retrouver en moi




Her symphony and song,
Sa symphonie et sa chanson,
To such a deep delight ‘twould win me
Car me gagna un tel plaisir fécond
That with music loud and long,
Par cet air puissant et profond,
  I would build that dome in air,
Que je construirais ce dôme dans l’air,
That sunny dome! those caves of ice!
Ce dôme ensoleillé ! Ces grottes de glace !
And all who heard should see them there,
Et tous ceux qui l’entendent devraient les voir là-bas,
And all should cry, Beware! Beware!




Et tous devrait pleurer, Attention ! Attention!
 His flashing eyes, his floating hair!
A ses yeux étincelants, à ses cheveux aériens !
Weave a circle round him thrice,
Tisse  un cercle tout autour de lui,
 And close your eyes with holy dread,
Et ferme les yeux pleins d’une sainte terreur,
For he on honey-dew hath fed,
Car il se nourrit de miel,
 And drunk the milk of Paradise.
Et boit le lait du Paradis.



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Samuel Taylor Coleridge Traduction Jacky Lavauzelle

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KUBLA KHAN
de
SAMUEL TAYLOR COLERIDGE

Samuel Taylor Coleridge Traduction Jacky Lavauzelle

Ao leitor AU LECTEUR MEMORIAS DE BRAS CUBAS MACHADO DE ASSIS

Ao leitor
Memórias Póstumas de Brás Cubas
Mémoires posthumes de Braz Cubas

La Poésie de Joaquim Maria Machado de Assis
Poema de Machado de Assis




Littérature Brésilienne
Literatura Brasileira

Joaquim Maria Machado de Assis
 Rio de Janeiro 1839 – 1908 Rio de Janeiro


joaquim-maria-machado-de-assis-artgitato




 

L’Œuvre de Machado de Assis

 Memórias Póstumas de Brás Cubas
Mémoires posthumes de Braz Cubas
Ao leitor
Au lecteur

Traduction Jacky Lavauzelle

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memorias-postumas-de-bras-cubas-memoires-posthumes-de-braz-cubas-artgitato-machado-de-assis

Ao leitor
Au lecteur

*


Que, no alto do principal de seus livros, confessasse Stendhal havel-o escripto para cem leitores, cousa é que admira e consterna.
Que, du haut de ses livres, Stendhal confesse avoir écrit pour une centaine de lecteurs, est chose admirable et consternante.
O que não admira, nem provavelmente consternará é se este outro livro não tiver os cem leitores de Stendhal, nem cincoenta, nem vinte, e quando muito, dez. Dez?
Il n’est ni surprenant, ni probablement consternant, de savoir que cet autre livre n’ait pas même une centaine des lecteurs de Stendhal, ou cinquante, voire vingt ou dix tout au plus. Dix?
Talvez cinco.
Peut-être cinq.
Trata-se, na verdade, de uma obra diffusa, na qual eu, Braz Cubas, se adoptei a fórma livre de um Steme, de um  Lamb, ou de um de Maistre, não sei se lhe metti algumas rabugens de pessimismo.
Ceci est en fait une œuvre diffuse, dans laquelle moi, Braz Cubas, ai adopté la forme libre d’un Sterne, d’un Charles Lamb, ou d’un Xavier de Maistre, non sans y avoir immiscer un certain pessimisme acariâtre.
Póde ser.
Peut-être.
Obra de finado.
Une dernière œuvre.
Escrevi-a com a penna da galhofa e a tinta da melancholia;
Je l’ai écrite avec une plume espiègle et une encre mélancolique ;
e não é difficil antever o que poderá sair desse connubio.
et il n’est pas difficile de prévoir ce qui peut sortir de cette umbroglio.
Accresce que a gente grave achará no livro umas apparencias de puro romance, ao passo que a gente frivola não achará nelle o seu romance usual;
Je pense que les gens sérieux trouveront à ce livre une pure apparence de roman, alors que les gens frivoles ne trouveront pas la structure du roman habituel ;
e eil-o ahi fica privado da estima dos graves e do amor dos frivolos, que são as duas columnas máximas da opinião.
et ainsi je me trouve privé de l’estime des lecteurs sérieux et de la bienveillance des frivoles, qui sont les deux piliers de l’opinion.

*

Mas eu ainda espero angariar as sympathias da opinião, e o meio eíficaz para isso é fugir a um prólogo explicito e longo.
Mais je continue d’espérer pouvoir recueillir la sympathie de l’opinion ; et le moyen pour être efficace c’est de nous éviter un prologue trop explicite et trop long.
O melhor prologo é o que contém menos cousas, ou o que as diz de um geito obscuro e truncado.
Le meilleur prologue est celui qui contient le moins de choses, ou qui le dit de manière obscure et tronquée.
Conseguintemente, evito contar o processo extraordinário que empreguei na composição destas Memórias, trabalhadas cá no outro século.
Aussi, vais-je me dispenser des procédés extraordinaires utilisés dans la composition des mémoires, composés dans un autre siècle.
Seria curioso, mas nimiamente extenso, e aliás desnecessário ao entendimento da obra.
Ce serait curieux, mais assurément trop vaste, et tout-à-fait inutile à la compréhension de l’œuvre.
A obra em si mesma é tudo :
Mon travail est tout :
se te agradar, fino leitor, pago-me da tarefa;
si il te convient, fin lecteur, paye-moi de ma tâche ;
se te não agradar, pago-te com um piparote, e adeus.
si il te déplaît, je te paierai d’un soufflet et adieu !
*

Laurence Sterne
écrivain anglais
1713  Irlande – 1768 Londres
laurence-sterne-par-sir-joshua-reynolds

Laurence Sterne par Sir Joshua Reynolds

*

Charles Lamb
Poète anglais
Londres 1775 – Londres 1834

*

Xavier de Maistre
écrivain savoisien de langue française
Chambéry 1763 – Saint-Pétersbourg  1852

xavier-de-maistre

**

Ao leitor
AU LECTEUR
MEMORIAS DE BRAS CUBAS
MACHADO DE ASSIS

Le BATEAU IVRE ARTHUR RIMBAUD

Arthur Rimbaud bateau ivre Joseph Mallord William Turner Tempête de neige en mer 1842 Londres Tate BritainTempête de neige en mer (1842), Londres, Tate Britain.

POESIE FRANCAISE
LE BATEAU IVRE

Arthur Rimbaud poésies artgitato

ARTHUR RIMBAUD
1854-1891

 

Arthur Rimbaud Poésies Oeuvre Poèmes Poésie Artgitato

 

*

Œuvres d’Arthur RIMBAUD
 


LE BATEAU IVRE

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Le BATEAU IVRE

Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus guidé par les haleurs ;
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

J’étais insoucieux de tous les équipages,
Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,
Les Fleuves m’ont laissé descendre où je voulais.

Dans les clapotements furieux des marées,
Moi, l’autre hiver, plus sourd que les cerveaux d’enfants,
Je courus ! Et les Péninsules démarrées,
N’ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.

La tempête a béni mes éveils maritimes.
Plus léger qu’un bouchon j’ai dansé sur les flots
Qu’on appelle rouleurs éternels de victimes,
Dix nuits, sans regretter l’œil niais des falots.

Plus douce qu’aux enfants la chair des pommes sures,
L’eau verte pénétra ma coque de sapin
Et des taches de vins bleus et des vomissures
Me lava, dispersant gouvernail et grappin.

Et dès lors, je me suis baigné dans le poème
De la mer, infusé d’astres, et latescent,
Dévorant les azurs verts où, flottaison blême
Et ravie, un noyé pensif parfois descend,

Où, teignant tout à coup les bleuités, délires
Et rythmes lents sous les rutilements du jour,
Plus fortes que l’alcool, plus vastes que nos lyres,
Fermentent les rousseurs amères de l’amour.

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes,
Et les ressacs, et les courants, je sais le soir,
L’aube exaltée ainsi qu’un peuple de colombes,
Et j’ai vu quelquefois ce que l’homme a cru voir.

J’ai vu le soleil bas taché d’horreurs mystiques
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très antiques,
Les flots roulant au loin leurs frissons de volets ;

J’ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baisers montant aux yeux des mers avec lenteur,
La circulation des sèves inouïes
Et l’éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs.

J’ai suivi des mois pleins, pareille aux vacheries
Hystériques, la houle à l’assaut des récifs,
Sans songer que les pieds lumineux des Maries
Pussent forcer le muffle aux Océans poussifs ;

J’ai heurté, savez-vous ? d’incroyables Florides,
Mêlant aux fleurs des yeux de panthères, aux peaux
D’hommes, des arcs-en-ciel tendus comme des brides,
Sous l’horizon des mers, à de glauques troupeaux ;

J’ai vu fermenter les marais énormes, nasses
Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan,
Des écroulements d’eaux au milieu des bonaces,
Et les lointains vers les gouffres cataractant !

Glaciers, soleils d’argent, flots nacreux, cieux de braises.
Echouages hideux au fond des golfes bruns
Où les serpents géants dévorés des punaises
Choient des arbres tordus, avec de noirs parfums.

J’aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
Du flot bleu, ces poissons d’or, ces poissons chantants.
Des écumes de fleurs ont béni mes dérades
Et d’ineffables vents m’ont ailé par instants.

Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,
La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux
Montait vers moi ses fleurs d’ombre aux ventouses jaunes
Et je restais, ainsi qu’une femme à genoux,

Presqu’île, ballottant sur mes bords les querelles
Et les fientes d’oiseaux clabaudeurs aux yeux blonds,
Et je voguais, lorsqu’à travers mes liens frêles
Des noyés descendaient dormir, à reculons.

Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l’ouragan dans l’éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N’auraient pas repêché la carcasse ivre d’eau,

Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d’azur,

Qui courais taché de lunules électriques,
Plante folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les Juillets faisaient crouler à coups de triques
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs,

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l’Europe aux anciens parapets.

J’ai vu des archipels sidéraux ! Et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :
— Est-ce en ces nuits sans fonds que tu dors et t’exiles,
Million d’oiseaux d’or, ô future Vigueur ?

Mais, vrai, j’ai trop pleuré ! Les aubes sont navrantes,
Toute lune est atroce et tout soleil amer.
L’âcre amour m’a gonflé de torpeurs enivrantes.
Oh ! que ma quille éclate ! Oh ! que j’aille à la mer !

Si je désire une eau d’Europe, c’est la flache
Noire et froide où, vers le crépuscule embaumé,
Un enfant accroupi, plein de tristesse, lâche
Un bateau frêle comme un papillon de mai.

Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,
Enlever leur sillage aux porteurs de cotons,
Ni traverser l’orgueil des drapeaux et des flammes,
Ni nager sous les yeux horribles des pontons !

***************

Le BATEAU IVRE

Arthur Rimbaud Poésies
Arthur Rimbaud Poésies

CHANTS D’EXPERIENCE (1794)- Poèmes de William Blake – SONGS OF EXPERIENCE

 LITTERATURE ANGLAISE
Poésie anglaise – English poetry
Songs of Innocence and of Experience
William Blake


by Thomas Phillips, oil on canvas, 1807
by Thomas Phillips, oil on canvas, 1807


poèmes – poems
WILLIAM BLAKE
1757-1827

William Blake signature.svg

 

Chants d’Expérience

Songs of Experience

1794
Traduction Jacky Lavauzelle

Earth’s Answer
La Réponse de la Terre

*

London 
Londres

*

My Pretty Rose Tree
Mon Joli Rosier

*

Nurse’s Song
Chanson de Nourrice

*

The Angel 
L’Ange

*

The Chimney Sweeper
Le Ramoneur

*

The Clod and The Pebble
La Motte et le Caillou

*

The Garden of Love 
Le Jardin d’Amour

*

The Lily 
Le Lys

*

The Little Girl Lost 
La Petite Fille Perdue

*

The Sick Rose
La Rose malade

*

************************
Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO
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William Blake

LONDRES Poème de William BLAKE – LONDON (1794)

 LITTERATURE ANGLAISE
Poésie anglaise – English poetry
Songs of Innocence and of Experience
LONDRES William Blake LONDON


SONGS OF EXPERIENCE

by Thomas Phillips, oil on canvas, 1807
by Thomas Phillips, oil on canvas, 1807


William Blake

poèmes – poems
1794

WILLIAM BLAKE
1757-1827

William Blake signature.svg

 

LONDON

Londres

Traduction Jacky Lavauzelle

I wander thro’ each charter’d street,
Je me promène dans chaque rue chartrée,
Near where the charter’d Thames does flow.
Près d’où coule la Tamise chartrée.
And mark in every face I meet
Et sur chaque visage que je rencontre je remarque
Marks of weakness, marks of woe.
Des marques de faiblesse et des marques de malheur.

**

In every cry of every Man,
Dans chaque cri de chaque Homme,
In every Infant’s cry of fear,
Dans chaque cri de peur du nourrisson,
In every voice: in every ban,
Dans chaque voix : dans chaque interdiction,
The mind-forg’d manacles I hear.
Les menottes par l’esprit forgées j’entends.  

**

How the Chimney-sweepers cry
Comment le cri des Ramoneurs qui pleurent
Every blackning Church appalls,
Consterne chaque Eglise noircie,
And the hapless Soldiers sigh
Et le soupir des Soldats malheureux
Runs in blood down Palace walls.
Court en gerbe de sang sur les murs du Palais.   

**

But most thro’ midnight streets I hear
Mais surtout dans les rues à minuit, j’entends
How the youthful Harlots curse
Combien les jeunes Prostituées maudites
Blasts the new-born Infants tear,
Frappent les pleurs du Nouveau-Né,
And blights with plagues the Marriage hearse.
Et brûlent profondément le corbillard du Mariage.

 

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Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO
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Earth’s Answer Lost William Blake

LES FORBANS DE LA NUIT (Dassin) LA FUITE INFERNALE

Jules DASSIN
LES FORBANS DE LA NUIT
Night and the City
1950

LA FUITE INFERNALE

LES FORBANS DE LA NUIT Night and The City Jules Dassin Artgitato

Les Forbans de la nuit est une œuvre sur la fuite. « Qui fuis-tu ? » demande l’héroïne. Harry pense pourtant fuir pour sortir du pétrin dans lequel il s’enfonce un peu plus. « Tu ne peux pas passer ta vie à fuir » languit-elle. Mais depuis longtemps ils ne font plus de projets à deux. Il est déjà trop loin. Aux confins de la vie, à la frontière des turpitudes et de la mort. Il est là, sorte de Chaplin perdu dans les histoires nauséabondes, entre les deux rives, près du précipice.

Et quand Harry ne fuit plus, c’est qu’il est traqué, c’est qu’il se terre, ou qu’il est mort.

LES TEMPS ONT CHANGE
La fuite comme cette course vers la modernité que regarde Jules Dassin. Dans la ville, le spectacle de lutte en est l’illustration. Le fils Kristo (Herbert Lom) adepte d’une lutte revisitée et grand spectacle, la lutte moderne, celle qui l’oppose à son père, le grand Gregorius (Stanilaus Zbyszko), chantre de la beauté et de la grandeur de l’éternelle lutte classique gréco-romaine, celle que l’on pratique à Athènes.  « Comprends, dit le fils, que les temps ont changé. » A cela son père répond qu’ « on n’oublie pas la noble lutte. »

Harry est un homme mort de s’être brûlé les ailes dans sa courses effrénées. « Un homme mort » comme lui annonce son boss, Phil Nosseross (Francis L. Sullivan), dans le cabaret, dans un dernier coup de cymbales. Mort comme dans la descente de l’escalier qui suit et qui ouvre sur la rue et sur la voiture qui le frôle.

JE NE POUVAIS PAS SUIVRE
Sa compagne l’air hagard le suis des yeux et tente de le comprendre. Mais elle avouera : « je ne pouvais pas suivre. » Harry est l’homme des mauvais choix. Il prend toujours la mauvaise solution. Et il glisse peu à peu dans de terribles sables mouvants.

Les pirates qui opèrent sous nos yeux, roulent sur les vagues londoniennes des tripots et des cloaques interlopes de la banlieue. Tout est bon pour quelques billets, pour quelques pounds. Ils courent, fuient et mentent. La bonne affaire est pour maintenant. Night and the City, le titre original, marque bien la séparation entre les deux planètes, la Nuit, où les forbans fourbissent leurs armes et la City, la lumière et la respectabilité.

L’ENFER AUTOUR DANSE
La nuit est l’acteur principal du film de Jules Dassin. « Mais voici dans l’ombre  Qu’une ronde sombre  Se fait, L’enfer autour danse, Tous dans un silence Parfait. » (La Nuit, Alfred de Musset, Poésies posthumes) C’est l’enfer qui remplit les yeux d’Harry qui court sans voir que la seule pépite qui brille encore dans son quartier, Marie, Gene Tierney, est à ses côtés. Impassible Mary. Quasi biblique. Mary est une sainte, qui, à chaque fois renouvelle son attente. Elle a connu Harry autrefois bien différent. Mais Harry ne change plus. Elle qui a entendu ses plans et ses éclairs de génie « mille fois ».

HOW MUCH ?
Mais Mary espère encore et toujours d’un avenir à l’odeur de passé, Mary espère toujours au mariage. Elle pense pouvoir le sauver, mais, trop lourd de toutes ses fautes, ne pourra l’empêcher de rejoindre les abîmes.

Harry Fabian est un de ces petits forbans à l’imagination féconde et destructrice. Tous les plans sont plus troués que les précédents. La rencontre avec une ancienne légende de la lutte gréco-romaine est l’ultime plan qui devrait le mettre enfin dans la lumière, lui, le petit escroc sans envergure et décrédibilisé aux yeux de tous. How much ? La seule question qui vaille la peine pour Harry.

Jules Dassin joue sur le contraste de la ville où les gens vont à leurs occupations et de sa banlieue où les truands règlent leurs derniers comptes, de ses lumières et de ses ombres, de cette course effrénée à la mort pour une histoire de quelques billets. Et ce contraste entraîne le mouvement infini. Les pauses n’existent pas.

UNE NUIT DANS LA VILLE
La musique du générique de langoureuse devient calme. La nuit est là qui s’est faite avec quelques lumières éparses qui se mirent dans la Tamise. La musique se bloque sur une note pour devenir tranquillement inquiétante. Une voix claire, calme annonce : « une nuit dans une ville. Cette nuit, l’autre nuit, n’importe quelle nuit. La ville, Londres. » La musique devient stridente et extrêmement rapide comme une course poursuite. Un homme est seul dans la nuit, dans la ville, sur une place immense…

TU POUVAIS TOUT REUSSIR
…C’est Harry. La course qu’il commence finira par sa mort. Les rues se font plus étroites. Harry prend le temps, toutefois, de ramasser la fleur tombée de sa boutonnière. C’est un professionnel. La manière de remettre son costume avant de rentrer chez Marie le confirme.

Le sac à main qui s’offre sur la table de chevet devient une évidence. Surpris par Marie, Harry ne se dégonfle pas ; « je cherchais une cigarette. » Marie n’est pas dupe. Elle passe l’éponge. Elle seule voit quelque chose en lui. « Tu pouvais tout réussir. » Mais Harry s’est perdu.

UNE OCCASION UNIQUE !
Pour Harry, tout est « une occasion unique ! » Harry pense toujours à la dernière affaire. Après les bons paris, l’association juteuse dans un cynodrome. La dernière et tout redeviendra comma avant. Il s’occupera de Marie. Il sera dans le droit chemin. Enfin. C’est sans oublier ce qu’Aristote disait déjà dans l’Ethique à Nicomaque : « Les hommes s’imaginent qu’il est en leur pouvoir d’agir injustement, et que par suite il est facile d’être juste. Mais cela n’est pas exact …Il y a des êtres qui sont incapables de tirer profit d’aucune portion de ces biens, ce sont ceux qui sont irrémédiablement vicieux et à qui tout est nuisible. » (Trad. J. Tricot, V-13, Ed. J. Vrin) Harry est un de ceux-là. Tout ce qu’il touche se transforme en rien. Mais il y croit. Toujours.

JE VEUX ÊTRE QUELQU’UN
Il veut réellement réussir. Il le répète à l’envi : « je veux être quelqu’un. » Il veut montrer à tous que lui aussi peut être reconnu, apprécié, respecté.

« La ronde contente, En ris éclatante, Le prend ; Tout mort sans rancune Trouve au clair de lune Son rang. » (La Nuit, Alfred de Musset, Poésies posthumes)

Harry est pris dans sa ronde. Son rire éclatant d’hyène s’est éteint dans la nuit. Là, sur les quais de la Tamise. Lui aussi a retrouvé son rang. Celui du forban malheureux pour avoir trop voulu la lune et avoir trop cru en sa chance.

POUR LA PREMIERE FOIS, J’AI UN PLAN SANS FAILLE
Jusqu’à la fin, Harry croira à son étoile. « Harry Fabian n’a pas dit son dernier mot. » Il veut se donner afin que Mary puisse récupérer la rançon de 1000 livres. Il jouera jusqu’à la fin avec son âme et les sentiments de Mary. « Dis-lui où je suis, tu auras 1000 livres. Il faut bien que quelqu’un les touche. Pour la première fois, j’ai un plan sans faille

Mary sait alors qu’Harry est définitivement perdu. A jamais. Harry est mort Déjà !

Le « Reviens » de Mary n’y fera rien. L’aube se lève. Le jour enfin. La ville a perdu Harry qui désormais flotte dans la Tamise.

« Tout mort sans rancune Trouve au clair de lune Son rang. »

Jacky Lavauzelle

Les personnages
Harry Fabian (Richard Widmark) Mary Bristol (Gene Tierney) Helen Mosseross (Googie Withers)  Adam Dunne (Hugh Marlowe)  Phil Nosseross (Francis L. Sullivan) Kristo (Herbert Lom) Gregorius (Stanilaus Zbyszko) L’étrangleur (Mike Mazurki) Molly (Ada Reeve)