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TREN VIII – Jan Kochanowski -Poème Polonais -8ème LAMENTATION

Dzieło Jana Kochanowskiego
Œuvre de Jan Kochanowski
Work of Jan Kochanowski

Traduction – Texte Bilingue

Poésie Polonaise – Polish poetry
poezja polska

 

LITTERATURE POLONAISE

literatura polska

Jan Kochanowski
1530 – 1584

Traduction Jacky Lavauzelle


TRENY

LAMENTATIONS


TREN VIII – 8ème Lamentation

 

Wielkieś mi uczyniła pustki w domu moim, 
Tu m’as fait le vide dans ma maison,
Moja droga Orszulo, tym zniknieniem swoim! 
Ma chère Ursula, par ton absence.
Pełno nas, a jakoby nikogo nie było:
Nous
sommes pourtant plusieurs mais il n’y a pour autant personne :
Jedną maluczką duszą tak wiele ubyło.
Une âme seulement mais tellement de vide.
Tyś za wszytki mówiła, za wszytki śpiewała, 
Sur tout tu parlais
, surtout tu chantais.
Wszytkiś w domu kąciki zawżdy pobiegała. 
La maison dans chaque coin tu occupais.
Nie dopuściłaś nigdy matce się frasować 
Jamais tu ne faisais souffrir ta mère
Ani ojcu myśleniem zbytnim głowy psować, 
Ni ton père ne faisais enrager,
To tego, to owego wdzięcznie obłapiając
Gracieusement tu nous égayais
I onym swym uciesznym śmiechem zabawiając. 
Et ta bonne humeur se communiquait à tous
Teraz wszytko umilkło, szczere pustki w domu, 
Maintenant, tout cela n’est plus
; le vide est entrée dans la maison,
Nie masz zabawki, nie masz rozśmiać się nikomu. 
Les jeux sont finis, les rires se sont enfuis ;
Z każdego kąta żałość człowieka ujmuje,
Dans
tous les lieux le douleur est vive,
A serce swej pociechy darmo upatruje.
Et le cœur
attend de cicatriser.

 

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Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO
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Dzieło Jana Kochanowskiego
Œuvre de Jan Kochanowski
Work of Jan Kochanowski

Ku Musom Jan Kochanowski -Poème Polonais – Aux Muses

Dzieło Jana Kochanowskiego
Œuvre de Jan Kochanowski
Work of Jan Kochanowski

Traduction – Texte Bilingue

 

Poésie Polonaise – Polish poetry
poezja polska

 

LITTERATURE POLONAISE

literatura polska

Jan Kochanowski
1530 – 1584

Traduction Jacky Lavauzelle


Ku Musom

AUX MUSES

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Panny, ktore na wielkim Pannazie mieskacie,
Dames qui sur le grand Parnasse vivez,
A ippokrenska rosa wlosy swe maczacie,
D’une rosée d’hypocras trempez vos cheveux,
Jeslim sie wam zachowal jako zyw statecznie,
Si toute ma vie réclamées vous étiez,
Ani mam wolej z wam roztaczac sie wieczne.
Loin de vous éternelles je ne peux.
Jesli Krolow nie zgorze perel ani zlota,
Si les rois se gangrènent de perles et d’or,
  A milsza mi daleko niz pieniadze cnota,
plus agréable pour moi que l’argent reste la vertu,
Jesli nie chce, zebyscie komu pochlebiaty
Si vous ne voulez que par facilité
 Albo na mie u ludzi niewiedzcznych zekaly ;
Avec l’écriture des ignorants je ne me penche ;
Prosze, niech ze mna za raz me rymy nie gina,
S’il vous plaît, faites que pour une fois mes rimes ne périssent point,
 Ale kiedy ja umre, ony niechaj slyna.
Et qu’après ma mort, elles vivent encore.

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Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO


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Dzieło Jana Kochanowskiego
Œuvre de Jan Kochanowski
Work of Jan Kochanowski

 

OPAK Wacław Potocki Texte & Traduction du poème polonais – Dissonance

ARTGITATO
Opak Wacław Potocki

Wacław Potocki
Littérature Polonaise – Literatura Polska
Poezja Polska – Poésie Polonaise
Polski Poeta –  poète Polonais

 

Wacław Potocki
1621-1696

Opak Waclaw Potocki Texte et traduction Poème Artgitato Dissonance

 


OPAK

Dissonance

Przyjadę do szlachcica w przyjacielskiej sprawie.
Je me rends chez un noble pour une visite de courtoisie.
Prosi mię za stół, aż w kącie na ławie
Il me guide à une table, dans un coin un banc
Karty, szachy, warcaby, dalej widzę księgę
Des cartes, un jeu d’échecs, et un de dames, j’aperçois un livre
Bez końca, bez początku, której gdy dosięgę,
Sans fin ni commencement, où, si je m’y attarde,
Ledwiem mógł z starodawnej zrozumieć ramoty,
Je ne pourrais à peine comprendre ces anciennes paroles,
Że kiedysi świętych w niej bywały żywoty.
Où il est dit que des saints autrefois se mêlaient à leurs vies.
Miły Boże, pomyślę, tedy w jednej cenie
Mon bon Seigneur, je me demande quel prix
Krotofila i duszne u ludzi zbawienie?
Le divertissement et le spirituel ont dans le salut de l’homme?

*

 Anoż szlachcic, co wszyscy zową go porządnym,
Ainsi pour ce noble, que l’on croit décent,
Aleć się to da lepiej widzieć na dniu sądnym,
Oui, Il nous donnera une meilleure vue, le jour du jugement,
Gdzie jeżeli wytrącą marne życia zeszcie,
Où seront précipitées les misères de sa vie,
Wątpię, żeby się mu co mogło dostać w reszcie.
Je doute qu’il n’arrive à en conserver quelque chose. 

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Traduction jacky Lavauzelle
ARTGITATO
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Władysław Stanisław REYMONT – L’APOSTOLAT DU KNOUT : LA SAUVAGE ENERGIE DU DESESPOIR

Littérature Polonaise –
Literatura Polska

Władysław Stanisław REYMONT
1867-1925

L’APOSTOLAT DU KNOUT 

La Sauvage énergie
du désespoir

Wladyslaw-Stanislaw REYMONT - L'APOSTOLAT DU KNOUT Artgitato

L’apostolat qu’envoie l’église orthodoxe au pays de Chełm, à quelques kilomètres de l’actuelle frontière avec l’Ukraine, est un ministère de force et de sang. Un ministère ne portant pas en son sein l’amour du prochain, ni dans sa langue la compassion que l’on devrait attendre d’une religion, encore moins le désir de comprendre et d’aider. Celui-ci montre ses bottes, et fait entendre dans cet horizon fermé le son du fouet russe, le claquant du knout. Le poing plutôt que la main tendue.

IL FAUT DECATHOLICISER LA PODLACHIE

Il faut décatholiciser la Podlachie, récemment annexée par la Russie, en remplaçant le curé par le pope, un baptême par un autre, redonner des nouveaux sacrements orthodoxes, dans la douleur et le désespoir des familles. Cette russification de cette nouvelle province russe c’est l’enfance qu’a vécu Stanislas Reymont et c’est l’histoire qu’il conte avec dans la bouche le goût de l’amertume et de la peine, « afin que vous ayez un tableau plus complet de la vie  des Uniates avant l’Acte de tolérance. »


FAIRE DISPARAÎTRE LEUR RELIGION ET LEUR LANGUE

Nous sommes vers 1875, dans une des plus violentes répressions de ce siècle. Une oppression jusqu’au-boutiste, intransigeante, infernale. C’est un rouleau compresseur organisé qui s’abat sur de pauvres paysans démunis. Systématiquement. Ces polonais, décharnés, humiliés, oubliés ne pourront compter que sur leur solidarité et sur leur foi.

DES OMBRES MUETTES D’UNE INCONSOLABLE TRISTESSE

1875, sept ans après la naissance de Stanislas Reymont. Dans sa jeunesse, il subit cette domination russe dans une famille de douze enfants. Toute sa famille, sa mère et ses oncles, dont l’un d’entre eux fut condamné aux travaux forcés en Sibérie, prendra part à l’insurrection de  1863 contre la Russie. Et c’est dans une totale et profonde ferveur catholique que le jeune Stanislas sera élevé. Dans cet esprit de résistance, Stanislas vivra sa foi dans une Pologne rurale, russifiée, où il lui était interdit de parler sa langue natale, le polonais. Il aidera son père dans les offices religieux et devient l’organiste de sa paroisse. Il apprend la musique, le latin, les textes sacrés. Il étudie et regarde ces paysans et leur quotidien. Dans chacune de ses phrases, un énorme respect et une complice compassion devant la rudesse de ces vies ; « Les gens travaillent aux champs comme des ombres muettes. Nulle part d’appels joyeux, de rires ou de chansons. Une inconsolable tristesse enveloppe ces plaines infinies. »

LA DANSE DES KNOUTS

A travers ce combat, de la douleur et de la souffrance, à travers la perte de leur intégrité physique, « La moitié des gens y perdirent bras et jambes, mais pas un ne renia sa foi », mais toujours dans l’espérance de la foi. A chaque solution des catholiques polonais, un autre acharnement des nouveaux conquérants : «  alors ils trouvèrent autre chose. Ils nous défendirent de nourrir nos bestiaux. Et pendant une semaine, nuit et jour on n’entendit plus dans le village que des cris et des hurlements. Ces bêtes enrageaient de faim, rongeaient leurs râteliers, se jetaient contre les murs et finissaient par crever. Défense de leur porter un seau d’eau, une poignée de paille, sinon les knouts entraient en danse. » Et toujours cette dignité au-delà du supportable.

JUSQU’A L’OUBLI DES FORMES HUMAINES

L’âme noircit mais ne se perd pas, « leur âme s’enténébra comme une nuit d’hiver, et quand les derniers beuglements se furent tus dans le lointain, la chaumière ressemblait à une tombe déserte sur laquelle planerait le spectre du désespoir. La femme pleurait, inconsolable. L’homme accroupi devant la cheminée, se consumait de chagrin comme le misérable feu qu’il fixait d’un air hébété »

DANS L’ESPOIR D’UN AVENIR MEILLEUR

A chaque vague de répression, nous pensons que le groupe va imploser, que cette solidarité va s’effriter, que des miettes seront ramassées par des popes arrogants. « Eux, restaient là sans mouvement, anéantis sous le malheur. Des voisins vinrent jeter un coup d’œil, mais apercevant ces visages qui n’avaient plus forme humaine, ils s’enfuirent épouvantés. Enfin, tard dans la nuit, les cris de leurs enfants affamés les tirèrent de leur torpeur.» A chaque nouvel assaut, plus rude et violent que le précédent, la résistance humaine, déjà mise à rude épreuve, semble ne plus pouvoir tenir. Mêmes prostrés et disloqués,  ils tiennent. Tel un bout de bois arraché d’un vaisseau flottant, avec encore le nom du navire sur son côté. Une force plus grande, invisible, permet de supporter l’insupportable, de rester debout, et de continuer à vivre, sans se laisser glisser et s’abandonner. «Vous avez cependant résisté tant d’années – c’est vrai, mais Dieu seul sait ce que nous avons enduré. Tout ! C’est qu’on espérait toujours des temps meilleurs ».

UNE SEMENCE DE CROIX DANS UNE TERRE INCULTE

Mais si la force est invisible, elle est matérialisée partout, sur chaque flanc de colline, de nombreuses croix. La croix qui rappelle la foi, la résistance et toutes les peines subies, le sang versé. La croix qui rentre dans cette terre et qui parle d’un futur de combat. « Aux flancs dénudés et sablonneux des collines, les croix du cimetière ressemblent à des bataillons en déroute, qui tendraient vers les maisons leurs bras désespérés…- Là aussi je vois beaucoup de nouvelles croix, 

dis-je, en en montrant une fraîchement érigée et encore à peindre. – Eh ! Ils en ont tant mis que s’il fallait y faire attention on devrait toujours avoir la toque à la main… Je crus d’abord que c’était la tombe d’un suicidé, mais plus tard, au cours de mes pérégrinations, j’en vis d’autres semblables, à  travers les champs et les bois, sur des landes incultes. »

LES GENS GLISSENT, PÂLES ET DEFAITS

La présence de la mort plane constamment. Sans être une amie, elle reste familière. Elle ne les effraie pas. Toutefois, elle fait peser une lourde chape. Finie la joie. Finies les fêtes. « Le village ressemblait à un cimetière ; plus de chants, plus de danses, on ne savait même plus rire. Les gens glissaient comme des ombres, pâles, défaits, mortellement tristes, rongés de misère et de tristesse… Le village en deuil ne résonnait plus que de chants funèbres. Chaque soir on allumait des cierges, on récitait les prières des agonisants, et toute la nuit des supplications éplorées montaient vers des «étoiles… Tout le village, comme un seul homme, se jeta à travers la lisière que, des profondeurs obscures, une apparition terrible de spectres venaient à leur rencontre. C’étaient-elles ! Tordues jusqu’à terre, s’appuyant à des branches, presque nues, décharnées comme des squelettes… Les gens pleuraient devant cette détresse sans nom ; sur ces visages creusés par la souffrance, les larmes ruisselaient comme la pluie qui fouettait les arbres de la place. » 

LA VICTOIRE SUR LA MORT

C’est dans cette proximité avec les morts et la mort, que ces femmes semblent avoir passées cette retraite inimaginable, dans la forêt, seules avec leurs enfants, elles sont devenues telles des mortes, des squelettes ou des morts-vivants errants dans le plus profond du bois. La mort a dû passer à de nombreuses reprises sans les voir ou sans penser, un seul instant, qu’il puisse s’agir d’un semblant d’humain.

Mais au-delà de la souffrance, c’est une  inhumaine résistance  qui défie à chaque fois la mort aux portes de chaque chaumière. «Mais aussi radieuses que le soleil et le printemps, victorieuses comme la vie même ! Elles avaient vaincu la faim, la peur, l’abandon, le froid, les maladies ; elles avaient vaincu la mort et sauvé leurs enfants et voici qu’elles revenaient, ces grandes, ces saintes âmes, à leurs foyers, à leurs maisons, aux labeurs, aux luttes de chaque jour… Des semaines durant, je parcourus ces plaines voilées de mélancolie, où chaque village était depuis des années, une citadelle imprenable combattant de la sainte cause… Et je sentis aussi toute la grandiose horreur de ce martyrologe de vivants et de morts, martyrologe unique au monde, écrit avec le sang et les larmes d’un peuple…Toujours prêts à de nouvelles souffrances et à de nouveaux sacrifices pour la cause. »

 LE SOUFFLE D’AMERTUME DES CAMPAGNES

Le temps lui-même est de la partie. Sinistre, il est contre ces hommes, il les aspire, les use. Mais la pluie ne trouve que des rochers humains, des rocs. La continuité des flots et l’agression incessante des éléments, qu’il s’agisse de ce froid humide et glacial, ou de cette chaleur brulante et terrible de ces étés de feu, ne font que lustrer cette peau tannée et quasi-insensible de ces femmes et de ces hommes. « Un jour terne, pluvieux, passa sur les paupières flétries de la pauvre femme… Je compris alors pourquoi ces campagnes exhalent comme un souffle d’amertume, pourquoi des pleurs s’élèvent la nuit, aux croisements des chemins ; pourquoi le grondement des bois y est plus lugubre qu’ailleurs, le chant des oiseaux plus triste, le gémissement du vent plus déchirant ; et pourquoi, sous ce ciel toujours bas, les gens se font petits, silencieux, recueillis, cachant sous leurs paupières de furtives lueurs, pleins de force héroïque et têtue de l’endurance… 

UN CREPUSCULE VERDÂTRE
ENVELOPPAIT LA TERRE

Le jour tombait, un crépuscule verdâtre enveloppait la terre, dans le village des lumières s’allumaient… Chaque jour des pluies interminables tombaient, chaque jour des ouragans furibonds se déchaînaient sur le village, roulaient à travers champs et s’en allaient frapper la lisière du bois qui renvoyait des hurlements si farouches et des clameurs si poignantes que les gens croyaient entendre dans le sifflement de la tempête des plaintes de femmes, des pleurs d’enfants et des râles d’agonie… Le vent soufflait fort, la poussière dansait sur la route, le tonnerre grondait et le ciel, devenait de plus en plus noir…Mais l’orage tenait toujours bon. Le temps était si noir qu’il ne voyait pas plus loin que le bout de son nez. La forêt se couchait sous le vent, les coups de tonnerre partaient l’un après l’autre. Les gros sapins craquaient comme des allumettes et les éclairs déchiraient le ciel en deux. »

Jacky Lavauzelle

( trad. P Cazin ed Rombaldi)