« Entre este mar e o Tánais vive estranha « Entre cette mer et le fleuve Tanaïs* vivent des étranges Gente: Rutenos, Moseos e Livónios, Peuples : les Ruthènes**, les Moscovites et les Livoniens***,…
Блеща средь полей широких,
Il s’étale sur les larges prairies, Вон он льётся!.. Здравствуй, Дон!
Là, il coule ! .. Bonjour à toi, Don ! От сынов твоих далёких
Tes fils lointains…
LES JUGEMENTS DE Tolstoï
SUR LES POEMES DE POUCHKINE
Ayons donc pleine confiance dans le jugement du comte Tolstoï sur les poèmes de Pouchkine, son compatriote ! Croyons-le, encore, quand il nous parle d’écrivains allemands, anglais, et scandinaves : il a les mêmes droits que nous à se tromper sur eux. Mais ne nous trompons pas avec lui sur des œuvres françaises dont le vrai sens, forcément, lui échappe, comme il échappera toujours à quiconque n’a pas, dès l’enfance, l’habitude de penser et de sentir en français ! Je ne connais rien de plus ridicule que l’admiration des jeunes esthètes anglais ou allemands pour tel poète français. Verlaine, par exemple, ou Villiers de l’Isle-Adam. Ces poètes ne peuvent être compris qu’en France, et ceux qui les admirent à l’étranger les admirent sans pouvoir les comprendre. Mais il ne résulte pas de là, comme le croit le comte Tolstoï, qu’ils soient absolument incompréhensibles. Ils ne le sont que pour lui, comme pour nous Lermontof et Pouchkine. Ce sont des artistes : la valeur artistique de leurs œuvres résulte de l’harmonie de la forme et du fond : et si lettré que soit un lecteur russe, si parfaite que soit sa connaissance de la langue française, la forme de cette langue lui échappe toujours.
Léon Tolstoï Qu’est-ce que l’art ? Traduction par T. de Wyzewa. Perrin, 1918 pp. i-XII
Pouchkine en 1810, alors âgé de 11 ans.
Aquarelle de Serguei Gavrilovich Tchirikoff Сергей Гаврилович Чириков
(1776—1853)
1811
Pouchkine s’inscrit au lycée Tsarskoïe Selo
(25 km de Saint-Pétersbourg).
Царское Село
Porte le nom de Pouchkine
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1814
La famille Pouchkine emménage à Saint-Pétersbourg après la fin des Guerres napoléoniennes, en 1814.
Pouchkine a consacré son temps libre à la littérature et, en 1814, à quinze ans, il a déjà publié pour la première fois son poème « À un ami poète » dans la revue « Le Messager de l’Europe ». Ces vers, déclamés lors d’un examen de passage, lui valent l’admiration du poète Gavrila Derjavine.
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1811-1817
Amitié avec les futurs décembristes. L’Insurrection décabriste, ou insurrection décembriste, prendra la forme, une dizaine d’années plus tard environ, d’une tentative de coup d’État militaire (Saint-Pétersbourg, en décembre 1825) afin d’obtenir une constitution du Tsar Nicolas Ier.
«Твой и мой, — говорит Лафонтен —
« Tien et mien, — dit La fontaine — Расторгло узы всего мира». — Du monde a rompu le lien. » — Что до меня, я этому отнюдь не верю.
Quant à moi, je n’en crois rien. Что было бы, моя Климена,
Que serait ce, ma Climène, Если бы ты больше не была моей,
Si tu n’étais plus la mienne, Если б я больше не был твоим?
Si je n’étais plus le tien ?
(Texte en français par Pouchkine et publié en 1884)
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Rouslan et Ludmila
Parution en 1820
écrit à la façon d’un conte de fées épique
Par
Prosper Mérimée
« cet essai frisait la témérité«
« Il obtint un succès plus légitime et dont il n’avait pas à rougir, en publiant vers 1820 le poème de Rousslan et Lioudmila. C’est encore une imitation, mais plus habile et d’après un original d’une autorité moins contestable. Il s’inspira de l’Arioste et surtout de Voltaire, dont la langue et l’esprit lui étaient plus familiers. Comme ses maîtres, il est gai, gracieux, élégamment ironique. En faveur de l’imitation, les Aristarques du temps lui montrèrent quelque indulgence ; ils y virent une preuve de modestie digne d’encouragement ; ils eussent été impitoyables peut-être pour une œuvre originale. À Rome autrefois, on n’aurait osé écrire en latin qu’en s’abritant sous l’autorité d’un Grec. À Saint-Pétersbourg, les lettrés exigeaient qu’on copiât un type français ou allemand. Aujourd’hui ce qui nous paraît le plus à remarquer dans Rousslan et Lioudmila, c’est un essai d’emprunter aux croyances populaires de la Russie des ressorts moins usés que ceux de la mythologie grecque, hors lesquels en 1820 il n’y avait pas de salut. Alors cet essai frisait la témérité, tant était grande l’intolérance classique. »
Prosper Mérimée
Portraits historiques et littéraires
Michel Lévy frères
1874
« Nous en trouvons l’explication dans une lettre que Joukowsky lui adressait, à Michailowskoïe, en 1826 : « Tu n’es mêlé à aucune affaire, cela est vrai, mais on a trouvé tes poèmes dans les papiers de tous ceux qui ont agi ; c’est un mauvais moyen de rester en bons termes avec le gouvernement. » Ainsi, pour ne jamais avoir déserté le terrain littéraire et s’être tenu à l’écart de la politique proprement dite, Pouchkine n’en était pas moins un homme dangereux. Il l’était peut-être plus que ceux que l’on avait emprisonnés et envoyés en Sibérie, car son influence était occulte, impalpable et fuyante. S’il n’existait aucune preuve tangible de sa culpabilité, son nom se rattachait cependant indiscutablement au parti libéral et, par-là même, au parti révolutionnaire. Ses poèmes séditieux, souvent mordants et satiriques, passaient sous forme de manuscrits de mains en mains, beaucoup d’inculpés politiques, parmi lesquels se comptaient les plus grands noms de la Russie, avouaient aux juges avoir été fortement influencés par les œuvres de Pouchkine. Nicolas Ier s’en souvint toute sa vie. Il ne cessa d’exercer une surveillance étroite sur le poète et sur ses œuvres. Trop intelligent pour ne point reconnaître la valeur réelle de Pouchkine, il y mit assez de formes pour ne point frapper le s poète, tout en se méfiant de l’homme. Il ne l’exila point comme avait fait son père ; au contraire, il exigea sa présence constante dans la capitale d’où Pouchkine ne put que rarement s’échapper. De cette manière, aucun de ses faits et gestes ne restait inconnu à la police. D’autre part, l’Empereur le délivra dès 1826 du joug officiel de la censure et se constitua son seul et unique censeur. Cette décision, qui avait les apparences d’une grâce » exceptionnelle, n’était, au fond, qu’un suprême moyen de contrôle. »
Le duel et la mort de Pouchkine
Hélène Iswolsky
Revue des Deux Mondes
Tome 56
1920
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8 septembre 1826
Pouchkine rentre d’exil par ordre de Nicolas Ier
Il sera reçu par Nicolas Ier.
« Je terminerai par une pièce d’un tout autre caractère qui, de même que l’Antchar, a eu le malheur d’être prise par la censure pour un dithyrambe révolutionnaire. Aujourd’hui l’une et l’autre sont imprimées dans toutes les éditions récentes de Pouchkine. Elle est intitulée le Prophète. « Tourmenté d’une soif spirituelle, j’allais errant dans un sombre désert, et un séraphin à six ailes m’apparut à la croisée d’un sentier. De ses doigts légers comme un songe, il toucha mes prunelles ; mes prunelles s’ouvrirent voyantes comme celles d’un aiglon effarouché ; il toucha mes oreilles, elles se remplirent de bruits et de rumeurs, et je compris l’architecture des cieux et le vol des anges au-dessus des monts, et la voie des essaims d’animaux marins sous les ondes, et le travail souterrain de la plante qui germe. Et l’ange, se penchant vers ma bouche, m’arracha ma langue pécheresse, la diseuse de frivolités et de mensonges, et entre mes lèvres glacées sa main sanglante mit le dard du sage serpent. D’un glaive il fendit ma poitrine et en arracha mon cœur palpitant, et dans ma poitrine entrouverte il enfonça une braise ardente. Tel qu’un cadavre, j’étais gisant dans le désert, et la voix de Dieu m’appela : Lève-toi, prophète, vois, écoute, et parcourant et les mers et les terres, brûle par la Parole les cœurs des humains. »
Prosper Mérimée
Portraits historiques et littéraires
Michel Lévy frères
1874
1829
1er mai 1829 départ pour l’armée active dans le Caucase
Juin 1829 – Pouchkine à Tiflis – Tbilissi (actuellement capitale de la Géorgie)
27 juin 1829 – Pouchkine lors de la prise d’Erzurum.
En 1829, la ville d’Erzurum (aujourd’hui située en Turquie) tombe aux mains des russes qui l’abandonnèrent aussitôt.
1830
карантин – Quarantaine La Russie subit une épidémie de choléra pendant l’automne 1830
(3 mois d’isolement pour Pouchkine du 3 septembre 1830 et le 5 décembre 1830 à Boldino)
Il arrive dans sa propriété pour organiser les affaires immobilières, puis il reste par obligation de quarantaine imposée par les autorités. Cette période correspond à ce que l’on a appelé l’Automne de Boldino, une propriété familiale, (Бо́лдинская о́сень).
Cette période fut très intense pour le poète. Il y terminera Eugène Onéguine. Boldino se trouve à environ 600 kilomètres à l’est de Moscou, aujourd’hui dans l’oblast de Nijni Novgorod (Нижний Новгород).
Il écrira notamment le poème ci-dessous Румяный критик мой, librement renommé ici LA QUARANTAINE AU TEMPS DU CHOLÉRA.
LA PETITE MAISON DE KOLOMNA (La Petite Maison dans la Kolomna) Par Prosper Mérimée
« La Petite Maison dans la Kolomna et le Comte Nouline sont deux charmants petits tableaux du même genre, non moins gracieux que leur devancier. Sauf la forme des vers et le ton général de la composition, Pouchkine n’a rien dérobé à lord Byron. Ses caractères sont bien russes et pris sur la nature. La Petite Maison dans la Kolomna chante les tribulations d’une bonne veuve, mère d’une jolie fille, en quête d’une servante à tout faire. Il s’en présente une, grande, robuste, un peu gauche et maladroite, mais qui prend les gages qu’on lui offre. La fille de la maison est d’ailleurs fort empressée à la mettre au fait et l’aide de son mieux. Un jour, la veuve est prise, pendant la messe, d’un pressentiment que sa bonne fait quelque sottise dans le ménage : elle rentre en hâte, et la trouve devant un miroir en train de se raser. »
Prosper Mérimée
Portraits historiques et littéraires
Michel Lévy frères, 1874
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18 février 1831
mariage avec Natalia Gontcharova
Natalia Nikolaïevna Gontcharova Наталья Николаевна Гончарова
( – )
Natalia Gontcharova par Alexandre Brioullov Алекса́ндр Па́влович Брюлло́в
En 1831
Le 25 mai 1831, ils déménagement à Tsarskoïe Selo.
En octobre 1831, ils s’installent à Saint-Pétersbourg
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LE MARIAGE DE POUCHKINE
AVEC NATALIA
…Telle était la situation de Pouchkine à l’époque de son mariage, qui fut célébré à Moscou le 18 février 1831. Il avait trente-deux ans. Sa fiancée, Nathalie Nicolaievna Goncharowa, en avait dix-huit. Très épris de cette belle et jeune personne, Pouchkine ne restait pas moins sceptique au sujet de son bonheur. Ses fiançailles furent longues et pénibles et la famille Goncharoff ne témoignait que peu d’empressement pour le projet de cette union. Mme Goncharowa, mère, occupée surtout de la dot de sa fille, cherchait sans cesse querelle à son futur gendre. Quant à la jeune fille, elle se montrait aussi passive, aussi indifférente que Pouchkine était ardent et impatient.
« Quel cœur doit-elle donc avoir ? s’écriait Pouchkine ; il est armé d’une écorce plus dure que celle du chêne. » Jamais, dès ses premières rencontres avec Nathalie, Pouchkine ne se sentit aimé ou même apprécié par cette énigmatique et froide fiancée qui, en réponse à ses plus tendres épîtres, lui écrivait des lettres « grandes comme une carte de visite.» Le duel et la mort de Pouchkine Hélène Iswolsky
Revue des Deux Mondes
Tome 56
1920
Georges-Charles de Heeckeren d’Anthès
Beau-frère de Pouchkine
(mariage le 10 janvier 1837 avec la sœur de Natalia, Ekaterina Nikolaïevna Gontcharova Екатерина Николаевна Гончарова (1809 -1843)
Duel le 8 février 1837
Mort le 10 février 1837 à 37 ans
Le duel Pouchkine – d’Anthès
le 8 février au soir
par Alexey Avvakumovich Naumov
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LE DUEL ET LA MORT DE POUCHKINE
par
Hélène Iswolsky
Mais il y eut aussi un autre Pouchkine, celui des dernières années, un Pouchkine sombre et triste, déchiré par la vie. Bien avant de recevoir la blessure qui devait l’emporter, il avait été meurtri, frappé mortellement au point le plus sensible de sa libre conscience de poète ; le drame intime de Pouchkine, et c’est ici qu’il s’éloigne de Lensky, ne fut pas essentiellement un drame d’amour ; le mal était plus grave et plus cruel et se rattachait à toutes les fibres de son âme. Son génie, sa fière indépendance, étaient touchés autant et plus peut-être que son cœur. Cette histoire complexe et douloureuse des dernières années du grand poète ne fut jamais complètement déchiffrée ; ses biographes récents s’y sont attachés avec un intérêt croissant. M. Stchegoleff, qui a consacré à Pouchkine plusieurs volumes d’une grande probité historique et de la plus haute valeur, a étudié minutieusement les faits et les documents se rattachant à cette époque. Il a eu, notamment, le privilège de puiser dans les archives d’un Français, le très distingué conservateur du Musée des Arts décoratifs de Paris ; M. Louis Metmann est en effet l’arrière-petit-fils du gentilhomme alsacien, le baron Georges d’Anthès Heckeren, dont la main porta le coup meurtrier à Alexandre Pouchkine…. Le duel et la mort de Pouchkine Hélène Iswolsky
Revue des Deux Mondes
Tome 56
1920
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Natalia Gontcharova par Ivan Makarov
Ива́н Кузьми́ч Мака́ров
en 1849
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Georges de Heeckeren d’Anthès
Vers 1878
Peint par Carolus-Duran
D’Anthès prit le nom de Georges-Charles de Heeckeren, après accord du roi des Pays-Bas par lettre du
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Depuis le 6 février 1837
La tombe de Pouchkine se trouve dans le Monastère Sviatogorski ou Monastère Sviatogorski de la Dormition de la Vierge Marie
Святогорский Свято-Успенский монастырь Oblast de Pskov – Пско́вская о́бласть
(Proche de la Lettonie, de l’Estonie et de la Biélorussie.)
Le monastère a été fondé en 1569, sous ordre d’Ivan le Terrible.
LES JUGEMENTS DE Tolstoï
SUR LES POEMES DE POUCHKINE
Ayons donc pleine confiance dans le jugement du comte Tolstoï sur les poèmes de Pouchkine, son compatriote ! Croyons-le, encore, quand il nous parle d’écrivains allemands, anglais, et scandinaves : il a les mêmes droits que nous à se tromper sur eux. Mais ne nous trompons pas avec lui sur des œuvres françaises dont le vrai sens, forcément, lui échappe, comme il échappera toujours à quiconque n’a pas, dès l’enfance, l’habitude de penser et de sentir en français ! Je ne connais rien de plus ridicule que l’admiration des jeunes esthètes anglais ou allemands pour tel poète français. Verlaine, par exemple, ou Villiers de l’Isle-Adam. Ces poètes ne peuvent être compris qu’en France, et ceux qui les admirent à l’étranger les admirent sans pouvoir les comprendre. Mais il ne résulte pas de là, comme le croit le comte Tolstoï, qu’ils soient absolument incompréhensibles. Ils ne le sont que pour lui, comme pour nous Lermontof et Pouchkine. Ce sont des artistes : la valeur artistique de leurs œuvres résulte de l’harmonie de la forme et du fond : et si lettré que soit un lecteur russe, si parfaite que soit sa connaissance de la langue française, la forme de cette langue lui échappe toujours.
Léon Tolstoï Qu’est-ce que l’art ? Traduction par T. de Wyzewa. Perrin, 1918 pp. i-XII
L’Angélus
Jean-François Millet
1857-1859 Musée d’Orsay – Paris
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Then a priestess said, « Speak to us of Prayer. »
Puis une prêtresse demanda : « Parle-nous de la Prière. »
And he answered, saying:
Et il répondit en disant :
You pray in your distress and in your need; would that you might pray also in the fullness of your joy and in your days of abundance.
Vous priez dans votre détresse et dans votre besoin ; vous devriez prier aussi dans la plénitude de votre joie et pendant vos jours d’abondance.
For what is prayer but the expansion of yourself into the living ether?
Car qu’est-ce que la prière, sinon l’expansion de vous-même dans l’éther vivant ?
And if it is for your comfort to pour your darkness into space, it is also for your delight to pour forth the dawning of your heart.
Et si c’est pour votre réconfort que vous versez vos ténèbres dans l’espace, c’est aussi pour votre plaisir que vous répandez l’aube de votre cœur.
And if you cannot but weep when your soul summons you to prayer, she should spur you again and yet again, though weeping, until you shall come laughing.
Et si vous ne pouvez que pleurer quand votre âme vous convoque à la prière, elle devrait vous inciter encore et encore, malgré les pleurs, jusqu’à ce que vous puissiez rire.
When you pray you rise to meet in the air those who are praying at that very hour, and whom save in prayer you may not meet.
Quand vous priez, vous vous lèvez pour rencontrer dans les airs ceux qui prient dans le même instant, et qui, sauf dans la prière, vous n’auriez jamais rencontré.
Therefore let your visit to that temple invisible be for naught but ecstasy and sweet communion.
Que votre visite à ce temple invisible ne soit rien sinon une extase et une douce communion.
For if you should enter the temple for no other purpose than asking you shall not receive.
Car si vous devez entrer dans le temple avec un autre but que de demander, alors vous ne recevrez rien.
And if you should enter into it to humble yourself you shall not be lifted:
Et si vous y pénétrez pour vous humilier, vous ne serez point élevé ;
Or even if you should enter into it to beg for the good of others you shall not be heard.
Ou même si vous y entrez pour mendier pour le bien des autres, vous ne serez pas entendu.
It is enough that you enter the temple invisible.
Il suffit que vous entriez dans le temple invisible.
I cannot teach you how to pray in words.
Je ne peux vous apprendre à prier avec des mots.
God listens not to your words save when He Himself utters them through your lips.
Dieu n’écoute pas vos paroles, sauf quand Il les prononce à travers vos lèvres.
And I cannot teach you the prayer of the seas and the forests and the mountains.
Et je ne peux pas vous enseigner la prière des mers, des forêts et des montagnes.
But you who are born of the mountains and the forests and the seas can find their prayer in your heart,
Mais vous qui êtes nés des montagnes, des forêts et des mers, vous pouvez trouver leur prière dans votre cœur,
And if you but listen in the stillness of the night you shall hear them saying in silence,
Et si vous écoutez dans le calme de la nuit, vous les entendez dire en silence :
« Our God, who art our winged self, it is thy will in us that willeth. «Notre Dieu, qui es notre moi-ailé, c’est ta volonté en nous qui veut.
It is thy desire in us that desireth. C’est ton désir en nous qui désire.
It is thy urge in us that would turn our nights, which are thine, into days which are thine also. C’est ton envie en nous qui changera nos nuits qui sont les tiennes en jours qui sont aussi à toi.
We cannot ask thee for aught, for thou knowest our needs before they are born in us: Nous ne pouvons rien te demander, car tu connais nos besoins avant qu’ils ne soient nés en nous :
Thou art our need; and in giving us more of thyself thou givest us all. » Tu es notre besoin ; et en nous donnant plus de toi-même, tu nous donnes tout. »
The Prophet
Giving Khalil Gibran
Le Prophète V LE DON
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Saint Martin partageant son manteau Van Dyck, 1618 Église Saint-Martin, Zaventem, Belgique
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Giving Khalil Gibran
Then said a rich man, « Speak to us of Giving. »
Puis un homme riche demanda : « Parle-nous du Don. »
And he answered:
Et il répondit :
You give but little when you give of your possessions.
Vous donnez, mais vous donnez peu lorsque vous donnez de vos biens.
It is when you give of yourself that you truly give.
C’est quand vous donnez de vous-même que vous donnez vraiment !
For what are your possessions but things you keep and guard for fear you may need them tomorrow?
Que sont vos biens, sinon des choses que vous gardez, que vous conservez de peur d’en manquer demain ?
And tomorrow, what shall tomorrow bring to the over prudent dog burying bones in the trackless sand as he follows the pilgrims to the holy city?
Et demain ? Qu’apportera demain au chien prudent qui a enterré ses os dans le sable sans faire de traces, alors qu’il suit les pèlerins de la ville sainte ?
And what is fear of need but need itself?
Et qu’est-ce que la peur de la nécessité si ce n’est la nécessité elle-même ?
Is not dread of thirst when your well is full, thirst that is unquenchable?
N’est-ce pas redouter la soif quand votre puits est plein, cette soif n’est-elle pas inextinguible ?
There are those who give little of the much which they have – and they give it for recognition and their hidden desire makes their gifts unwholesome.
Il y a ceux qui donnent peu de bien de ce qu’ils ont – et ils le donnent pour de la reconnaissance et leur désir caché de faire des dons malsain.
And there are those who have little and give it all.
Et il y a ceux qui ont peu et qui donnent tout.
These are the believers in life and the bounty of life, and their coffer is never empty.
Ce sont des croyants dans la vie et dans la bonté de la vie, et leur coffre n’est jamais vide.
There are those who give with joy, and that joy is their reward.
Il y a ceux qui donnent avec joie, et cette joie est leur récompense.
And there are those who give with pain, and that pain is their baptism.
Et il y a ceux qui donnent avec douleur, et la douleur est leur baptême.
And there are those who give and know not pain in giving, nor do they seek joy, nor give with mindfulness of virtue;
Et il y a ceux qui donnent et n’ont pas de douleur à donner, ils ne recherchent pas la joie, ni ne donnent avec la pleine conscience de la vertu ;
They give as in yonder valley the myrtle breathes its fragrance into space.
Ils donnent comme le myrte dans ce vallon qui respire sa fragrance dans l’espace.
Through the hands of such as these God speaks, and from behind their eyes He smiles upon the earth.
Par les mains de ceux-là, c’est Dieu qui parle, et à travers leurs yeux Il sourit à la terre.
It is well to give when asked, but it is better to give unasked, through understanding;
Il est bon de donner quand on le demande, mais il est préférable de donner quand on ne demande rien, grâce à la compréhension;
And to the open-handed the search for one who shall receive is joy greater than giving
Et à la main ouverte, la recherche de celui qui reçoit est une joie plus grand que le don.
And is there aught you would withhold?
Et n’y a-t-il pas des choses à garder ?
All you have shall some day be given;
Tout ce que vous avez un jour doit être donné ;
Therefore give now, that the season of giving may be yours and not your inheritors’.
donnez donc maintenant que la saison des dons puisse être vôtre et non celle de vos héritiers.
You often say, « I would give, but only to the deserving. »
Vous dites souvent: «Je donnerais, mais seulement à ceux qui le méritent. »
The trees in your orchard say not so, nor the flocks in your pasture.
Les arbres dans votre verger ne disent pas cela, pas plus les troupeaux dans votre pâturage.
They give that they may live, for to withhold is to perish.
Ils donnent pour pouvoir vivre, retenir c’est périr.
Surely he who is worthy to receive his days and his nights is worthy of all else from you.
Certes, celui qui est digne de recevoir ses jours et ses nuits est digne de toute autre chose de vous.
And he who has deserved to drink from the ocean of life deserves to fill his cup from your little Stream.
Et celui qui a mérité de boire à l’océan de la vie mérite de remplir sa tasse à votre petit ruisseau.
And what desert greater shall there be than that which lies in the courage and the confidence, nay the charity, of receiving?
Et quel plus grand mérite y-a-il que celui qui se trouve dans le courage et la confiance, et même dans la charité, de recevoir ?
And who are you that men should rend their bosom and unveil their pride, that you may see their worth naked and their pride unabashed?
Et qui êtes-vous pour que des hommes dévoilent leur poitrine et leur fierté, que vous puissiez voir leur valeur à nu et leur fierté sans bornes ?
See first that you yourself deserve to be a giver, and an instrument of giving.
Faites que vous vous méritiez d’être un donneur, et un instrument du don.
For in truth it is life that gives unto life – while you, who deem yourself a giver, are but a witness.
Car en vérité, la vie donne à la vie – alors que vous, vous qui vous jugez un donneur, n’êtes qu’un témoin.
And you receivers – and you are all receivers – assume no weight of gratitude, lest you lay a yoke upon yourself and upon him who gives.
Et vous qui recevez- et qui recevez tout – ne ressentez pas un poids dans la gratitude, car vous vous posez un joug sur vous-même et sur celui qui donne.
Rather rise together with the giver on his gifts as on wings;
Grandissez-vous en même temps que le donneur avec ses dons comme avec des ailes ;
For to be over mindful of your debt, is to doubt his generosity who has the free-hearted earth for mother, and God for father.
Pour être trop conscient de votre dette, c’est mettre en doute sa générosité qui a la terre aimante pour mère, et Dieu pour père.