Das edle Bild der Menschheit zu verhöhnen, Moquant la noble image de l’humanité, Im tiefsten Staube wälzte dich der Spott, Dans la poussière la plus infâme, la moquerie t’a roulée, Krieg führt der Witz auf ewig mit dem Schönen, Continuant son éternelle guerre contre le beau Er glaubt nicht an den Engel und den Gott, Ne croyant ni à l’ange ni à Dieu, Dem Herzen will er seine Schätze rauben, Au cœur, il veut lui voler ses idéaux, Den Wahn bekriegt er und verletzt den Glauben. Combattant l’illusion, il viole la foi.
*
Doch, wie du selbst, aus kindlichem Geschlechte, Mais, comme toi, d’une juvénile candeur, Selbst eine fromme Schäferin wie du, Simple et pieuse bergère comme toi, Reicht dir die Dichtkunst ihre Götterrechte, La poésie t’offre ses droits divins Schwingt sich mit dir den ewgen Sternen zu, Se porte avec toi vers les astres éternels, Mit einer Glorie hat sie dich umgeben, D’une scintillante gloire elle te couronne, Dich schuf das Herz, du wirst unsterblich leben. T’irradie le cœur, pour devenir immortelle.
*
Es liebt die Welt, das Strahlende zu schwärzen Il aime, ce monde, noircir ce qui illumine Und das Erhabne in den Staub zu ziehn, Et tirer le sublime dans la poussière, Doch fürchte nicht! Es gibt noch schöne Herzen, Mais n’aie pas peur ! Il y a encore de belles âmes, Die für das Hohe, Herrliche entglühn, Qui, pour ce qui est grand et glorieux, s’enflamment, Den lauten Markt mag Momus unterhalten, Le marché bruyant peut divertir Momos, Ein edler Sinn liebt edlere Gestalten. Un esprit noble aime les figures nobles.
Wollt ihr in meinen Kasten sehn?
Voulez-vous voir ma boîte ? Des Lebens Spiel, die Welt im Kleinen,
Le jeu de la vie, le monde en miniature, Gleich soll sie eurem Aug’ erscheinen;
Aussitôt apparaîtrà vos yeux ; Nur müßt ihr nicht zu nahe stehn,
Mais vous ne devez pas être trop près, Ihr müßt sie bei der Liebe Kerzen
Vous devez les apprécier avec des bougies de l’amour Und nur bei Amors Fackel sehn.
Et seulement avec le flambeau de Cupidon.
Schaut her! Nie wird die Bühne leer:
Regardez ici ! La scène n’est jamais vide: Dort bringen sie das Kind getragen,
Là ! ils apportent l’enfant, Der Knabe hüpft, der Jüngling stürmt einher,
Le garçon sautille déjà, le jeune homme s’agite, Es kämpft der Mann, und Alles will er wagen.
L’homme se bat, et qui ose tout.
Ein Jeglicher versucht sein Glück,
Chacun tente sa chance, Doch schmal nur ist die Bahn zum Rennen;
Mais seul le chemin est étroit ; Der Wagen rollt, die Achsen brennen,
Le char roule, les essieux brûlent, Der Held dringt kühn voran, der Schwächling bleibt zurück,
Le héros avance hardiment, le faible reste en retrait, Der Stolze fällt mit lächerlichem Falle,
Le fier tombe dans un piège ridicule, Der Kluge überholt sie alle.
Le malin les dépasse tous.
Die Frauen seht ihr an den Schranken stehn,
Vous voyez les femmes debout aux barrières, Mit holdem Blick, mit schönen Händen
Avec un beau regard, avec de belles mains Den Dank dem Sieger auszuspenden.
Congratuler le gagnant.
**********
Das Spiel des Lebens
Le Jeu de la Vie
POEME DE FRIEDRICH von SCHILLER
Drei Worte hört man, bedeutungsschwer,
Trois mots fondamentaux s’entendent Im Munde der Guten und Besten;
Dans la bouche du bon et du meilleur d’entre nous ; Sie schallen vergeblich, ihr Klang ist leer,
Ils sonnent en vain, leur son est vide, Sie können nicht helfen und trösten.
Ils ne peuvent ni aider ni réconforter. Verscherzt ist dem Menschen des Lebens Frucht,
Il est perdu, le fruit de la vie de l’homme, Solang er die Schatten zu haschen sucht.
Tant qu’il essaie de chasser les ombres.
Solang er glaubt an die Goldene Zeit,
Illusion du droit ! Tant qu’il croit en l’âge d’or, Wo das Rechte, das Gute wird siegen, –
Là où le droit prévaudra, là où le bien l’emportera, Das Rechte, das Gute führt ewig Streit,
Le droit, le bien, mène un éternel combat, Nie wird der Feind ihm erliegen,
Jamais l’ennemi ne succombera, Und erstickst du ihn nicht in den Lüften frei,
S’il n’est pas étouffé dans les airs, Stets wächst ihm die Kraft auf der Erde neu.
Il reprendra de nouvelles forces sur terre.
Solang er glaubt, daß das buhlende Glück
Illusion de la fortune ! Tant qu’il croit avoir la fortune Sich dem Edeln vereinigen werde –
Pour rejoindre les nobles cœurs – Dem Schlechten folgt es mit Liebesblick,
Les mauvais, la suivent avec un regard d’envie, Nicht dem Guten gehöret die Erde.
La terre n’appartient pas au bien ! Er ist ein Fremdling, er wandert aus
Il est étranger, il migre Und suchet ein unvergänglich Haus.
Et cherche une maison éternelle.
Solang er glaubt, daß dem irdschen Verstand
Illusion de la vérité ! Tant il croit qu’à l’esprit sur terre Die Wahrheit je wird erscheinen,
La vérité apparaîtra et régnera, pourtant, Ihren Schleier hebt keine sterbliche Hand,
Son voile ne sera levé par aucune main mortelle ; Wir können nur raten und meinen.
Nous pouvons seulement que deviner et déblatérer. Du kerkerst den Geist in ein tönend Wort,
Tu noies l’esprit dans un mot qui résonne, Doch der freie wandelt im Sturme fort.
Mais la pensée libre continue d’errer dans la tempête.
Drum, edle Seele, entreiß dich dem Wahn
Alors, noble âme, échappe à l’illusion Und den himmlischen Glauben bewahre!
Et garde ta foi céleste! Was kein Ohr vernahm, was die Augen nicht sahn,
Ce qu’aucune oreille n’entend, ce qu’aucun œil ne voit, Es ist dennoch, das Schöne, das Wahre!
C’est encore, le beau, le vrai ! Es ist nicht draußen, da sucht es der Tor,
Ce n’est pas dehors que tu le trouveras. Es ist in dir, du bringst es ewig hervor.
C’est en toi, tu le portes en toi pour toujours !
*****************************
Die Worte des Wahns
Les Mots de l’Illusion
POEME DE FRIEDRICH von SCHILLER
Drei Worte nenn ich euch, inhaltschwer,
Trois mots ! Je vous parlerai de trois mots si intenses et profonds ; Sie gehen von Munde zu Munde,
Ils vont de bouche en bouche, Doch stammen sie nicht von außen her,
Mais ils ne viennent pas de l’extérieur, Das Herz nur gibt davon Kunde,
Le cœur seulement nous les livre ; Dem Menschen ist aller Wert geraubt,
L’homme perd toute valeur Wenn er nicht mehr an die drei Worte glaubt.
S’il ne croit plus à ces trois mots.
Der Mensch ist frei geschaffen, ist frei,
L’homme est créé libre et libre il est, Und würd er in Ketten geboren,
Même s’il naît sous le joug, Laßt euch nicht irren des Pöbels Geschrei,
Ne vous laissez pas berner par la foule qui crie, Nicht den Mißbrauch rasender Toren,
Pas les propos incohérents d’imbéciles enragés, Vor dem Sklaven, wenn er die Kette bricht,
Autant devant l’esclave, quand il brise la chaîne, Vor dem freien Menschen erzittert nicht.
Que devant l’homme libre, ne tremblez pas !
Und die Tugend, sie ist kein leerer Schall,
Et la vertu, ce n’est pas un son vide, Der Mensch kann sie üben im Leben,
L’homme peut la pratiquer dans la vie, Und sollt er auch straucheln überall,
Et devrait-il trébucher aussi partout, Er kann nach der göttlichen streben,
Il peut aspirer au divin, Und was kein Verstand der Verständigen sieht,
Et ce que ne comprend pas l’homme intelligent, Das übet in Einfalt ein kindlich Gemüt.
En termes simples un esprit enfantin le saisit.
Und ein Gott ist, ein heiliger Wille lebt,
Il existe un Dieu, une sainte volonté qui vit, Wie auch der menschliche wanke,
Quand l’homme vacille, Hoch über der Zeit und dem Raume webt
Plus haut que le temps et l’espace Lebendig der höchste Gedanke,
Vit la plus haute pensée, Und ob alles in ewigem Wechsel kreist,
Et si tout tourne dans un perpétuel changement, Es beharret im Wechsel ein ruhiger Geist.
Il existe en son cœur un esprit calme et serein.
Die drei Worte bewahret euch, inhaltschwer,
Ces trois mots, gardez-les ! Si intenses et profonds, Sie pflanzet von Munde zu Munde,
Qu’ils partent de bouche en bouche, Und stammen sie gleich nicht von außen her,
Ils ne viennent pas de l’extérieur, Euer Innres gibt davon Kunde,
Ils émanent de l’intérieur ; Dem Menschen ist nimmer sein Wert geraubt,
L’homme ne sera jamais privé de sa valeur, So lang er noch an die drei Worte glaubt.
Tant qu’il croira encore à ces trois mots.
****
Die Worte des Glaubens
Les Mots de la Foi
POEME DE FRIEDRICH von SCHILLER
Es reden und träumen die Menschen viel
Les gens parlent et rêvent toujours von bessern künftigen Tagen;
à des jours meilleurs ; nach einem glücklichen, goldenen Ziel
vers un but heureux et glorieux sieht man sie rennen und jagen.
vous les voyez courir et courir encore. Die Welt wird alt und wird wieder jung,
Le monde vieillit et rajeunit, doch der Mensch hofft immer Verbesserung.
mais l’homme espère toujours des jours plus beaux.
Die Hoffnung führt ihn ins Leben ein,
L’espérance l’accompagne toute sa vie : sie umflattert den fröhlichen Knaben, elle s’agite autour du garçon joyeux, den Jüngling locket ihr Zauberschein,
le jeune homme, lui, est attiré par sa magie, sie wird mit dem Greis nicht begraben;
enfin, elle ne sera pas enterrée avec le vieil homme ; denn beschließt er im Grabe den müden Lauf,
car, dans la tombe, il termine son parcours fatigué, noch am Grabe pflanzt er – die Hoffnung auf.
toujours sur la tombe, il plante… l’espérance.
Es ist kein leerer, schmeichelnder Wahn,
Ce n’est pas une illusion vide et flatteuse, erzeugt im Gehirne des Toren,
générée dans le cerveau de l’insensé, im Herzen kündet es laut sich an:
dans le cœur puissamment nous entendons une voix : zu was Besserm sind wir geboren.
Nous sommes nés pour quelque chose de mieux ! Und was die innere Stimme spricht,
Et ce que dit la voix intérieure das täuscht die hoffende Seele nicht.
ne trompe pas l’âme qui espère.
Vor seinem Löwengarten,
Devant le jardin aux lions, Das Kampfspiel zu erwarten,
Où ils vont combattre Saß König Franz,
Est assis le Roi Franz, Und um ihn die Großen der Krone,
Et autour de lui les grands de la couronne, Und rings auf hohem Balkone
Et sur les hauts balcons Die Damen in schönem Kranz.
Les dames formant une belle couronne.
Und wie er winkt mit dem Finger,
Le Roi agite son doigt, Auf tut sich der weite Zwinger,
Devant ce grand chenil, Und hinein mit bedächtigem Schritt
Et alors, avec un pas volontaire, Ein Löwe tritt,
Un lion avance avec prestige, Und sieht sich stumm
Et regarde tranquillement Rings um,
Tout autour de lui, Mit langem Gähnen,
Dans un long bâillement, Und schüttelt die Mähnen,
Il secoue sa crinière, Und streckt die Glieder,
Etend ses membres, Und legt sich nieder.
Et se couche.
Und der König winkt wieder,
Et le Roi fait un nouveau signe, Da öffnet sich behend
Alors, s’ouvre rapidement Ein zweites Tor,
Une deuxième porte, Daraus rennt
Rapide Mit wildem Sprunge
Dans un puissant saut sauvage Ein Tiger hervor,
Un tigre, Wie der den Löwen erschaut,
Voyant le lion, Brüllt er laut,
Se met à rugir puissamment, Schlägt mit dem Schweif
Fouettant avec la queue Einen furchtbaren Reif,
Ouvre sa gueule Und recket die Zunge,
Et étire sa langue, Und im Kreise scheu
Fait un cercle Umgeht er den Leu
Contourne le lion Grimmig schnurrend;
Sombrement rugit ; Drauf streckt er sich murrend
Et va se coucher Zur Seite nieder.
Sur son côté.
Und der König winkt wieder,
Et le roi fait un nouveau signe, Da speit das doppelt geöffnete Haus
Une porte laisse alors sortir Zwei Leoparden auf einmal aus,
Deux léopards à la fois, Die stürzen mit mutiger Kampfbegier
Qui s’élancent comme pour un combat courageux Auf das Tigertier,
Sur notre tigre, Das packt sie mit seinen grimmigen Tatzen,
Qui lui les attrape avec ses fortes griffes, Und der Leu mit Gebrüll
Et le lion dans un long rugissement Richtet sich auf, da wird’s still,
Se redresse, là tout se calme, Und herum im Kreis,
Et autour en cercle, Von Mordsucht heiß,
Dans cette odeur de sang, Lagern die greulichen Katzen.
Se posent les deux léopards.
Da fällt von des Altans Rand
Alors tombe du bord du balcon Ein Handschuh von schöner Hand
Un gant tenu par une belle main Zwischen den Tiger und den Leun
Entre le tigre et le lion Mitten hinein.
En plein milieu.
Und zu Ritter Delorges spottenderweis
Et moqueuse, au chevalier de Lorges Wendet sich Fräulein Kunigund:
Se tourne Dame Cunégonde : « Herr Ritter, ist Eure Lieb so heiß, « Monsieur le Chevalier, si votre amour est si ardent, Wie Ihr mir’s schwört zu jeder Stund, Comme vous me le clamez à chaque instant, Ei, so hebt mir den Handschuh auf. » Aller récupérer mon gant. »
Und der Ritter in schnellem Lauf
Et le chevalier dans une course rapide Steigt hinab in den furchtbarn Zwinger
Descend au cœur du terrible chenil Mit festem Schritte,
D’un pas ferme, Und aus der Ungeheuer Mitte
Au milieu des monstres Nimmt er den Handschuh mit keckem Finger.
Il relève le gant d’un doigt audacieux.
Und mit Erstaunen und mit Grauen
Dans un étonnement et dans un effroi Sehen’s die Ritter und Edelfrauen,
Les chevaliers et les nobles dames le regardent Und gelassen bringt er den Handschuh zurück.
Qui revient calmement, rendre le gant. Da schallt ihm sein Lob aus jedem Munde,
Sa louange parcourt toutes les bouches, Aber mit zärtlichem Liebesblick –
Elle lui souffle un amour tendre – Er verheißt ihm sein nahes Glück –
Et lui promet un bonheur parfait – Empfängt ihn Fräulein Kunigunde.
La dame Cunégonde. Und er wirft ihr den Handschuh ins Gesicht:
Mais lui jette le gant au visage : « Den Dank, Dame, begehr ich nicht » « Merci, madame, tel n’est pas mon désir ! » Und verläßt sie zur selben Stunde.
Et la quitte sur le champ.
Freude, schöner Götterfunken, Joie,belleétincelledes dieux, Tochter aus Elisium, Fille d’Elysée, Wir betreten feuertrunken Nous entronsivres avec le feu
La poésie lyrique est l’une des joies les plus pures, et l’une des gloires littéraires les plus brillantes du peuple allemand. On n’a point vu se développer dans ce vaste pays d’Allemagne certains rameaux de la pensée humaine qui, dans d’autres contrées, ont porté tant de fleurs précieuses et tant de fruits vivifiants. L’Allemagne n’a point eu de Molière, point de Walter Scott ni de La Fontaine, et le drame, qui, dans les derniers temps, lui a donné une si grande illustration, le drame n’est apparu sur la scène allemande avec une réelle originalité et un véritable éclat, qu’après une longue suite d’obscurs tâtonnements, de froids essais, de fades imitations. Sa rapide durée, sa subite décadence, prouvent qu’il n’était point issu du génie de la nation allemande, mais de la pensée puissante de quelques hommes. Ce drame commence à Lessing et finit à Goethe. Après la mort de Schiller, après le silence de l’immortel auteur de Faust, les théâtres d’Allemagne sont retombés dans leur viduité première ; les œuvres de Werner, de Mullner, de Grillparzer ; les trop nombreuses productions de Raupach et le brillant début de M. Munch-Bellinghausen, ne lui ont donné qu’une lueur fugitive. Le désordre est entré dans les rangs de ces écrivains dramatiques que deux bannières illustres ralliaient, il y a vingt ans, autour d’un sentiment de création originale, d’une grande idée d’art. Dans leur vague incertitude, dans leurs désirs flottants et leur impuissance, ils en sont réduits maintenant à chercher une substance étrangère, à prendre, qui de-ci, qui de-là, une comédie du Théâtre-Français, un vaudeville de Boulevard, qu’ils revêtent de langues germaniques, et conduisent à la lisière sur le théâtre de Vienne ou de Berlin.
Mais depuis les plus anciens temps, l’Allemagne, avec sa nature tendre, rêveuse, idéale, a senti s’éveiller en elle le sentiment mélodieux de la poésie lyrique. Les vieux guerriers chantaient en allant au combat ; les Minnesinger ont répandu à travers les sombres mœurs du moyen âge les trésors de l’inspiration la plus suave, et les délicieux accents d’une pensée d’amour unie à la religion par un lien mystique. Les Meistersanger conservaient la même inspiration, et ils n’en altérèrent le charme primitif qu’en se trompant eux-mêmes sur certains effets de style et certains raffinements de forme. C’est par la poésie lyrique que la première école silésienne se signala au XVIIe siècle ; c’est par la poésie lyrique que Bürger, Holly et leurs jeunes amis de Goettingue ramenèrent les beaux esprits de leur temps à une tendance littéraire plus juste, à un langage plus simple et plus vrai. Enfin, c’est par la poésie lyrique que les principaux écrivains de l’époque actuelle, Novalis, Uhland, Ruckert, se sont fait une renommée qui de l’Allemagne s’est promptement répandue dans les autres contrées. À travers les tempêtes qui ont agité l’Europe, les événements politiques qui en ont changé la face, au milieu des questions vitales dont le monde poursuivait chaque jour la solution, l’Allemagne est apparue comme le scalde scandinave, qui ne pouvait en prenant l’épée abandonner sa harpe. Elle n’a pas cessé un instant de rêver, et pas un instant de chanter. Klopstock saluait par une ode l’aurore de notre révolution, et Théodore Korner, après avoir suivi tout le jour son escadron de chasseurs sur le champ de bataille, composait le soir au bivouac la chanson du lendemain. Il faut avoir visité les diverses contrées de l’Allemagne, pour savoir tout ce qu’il y a là d’instinct musical et de sentiment lyrique. Dès qu’on a passé la frontière, il semble qu’on entre dans une région fabuleuse où les hommes gazouillent et chantent comme des oiseaux. L’ouvrier chante en s’en allant le sac sur l’épaule, de ville en ville, gagner ses titres de maîtrise ; l’étudiant chante en cheminant sur la route de son Université ; l’humble famille bourgeoise qui, le dimanche, va se reposer des fatigues de la semaine sous le feuillage d’un Lustgarten, ne rentre guère dans sa demeure sans entonner aussi quelque chanson d’Uhland mise en musique par Strauss ; et dans les salons du grand monde, on serait bien étonné de passer une soirée sans cahiers de musique et sans piano. Il y a en Allemagne des chants pour toutes les fêtes et toutes les circonstances solennelles de la vie, pour toutes les classes de la société, toutes les corporations, tous les métiers, et chaque jour en augmente encore le nombre. Là, pas un site pittoresque qui n’ait été célébré plusieurs fois par les poëtes, pas une ruine des bords du Danube qui n’ait sa légende populaire, pas un château de la Thuringe, des bords du Rhin, de la Silésie, dont le nom ne se retrouve dans plusieurs recueils littéraires, dont l’histoire, réelle ou fictive, n’ait été racontée dans mainte et mainte strophe.
Ces chants de l’Allemagne n’ont point en général la vive et émouvante gaieté de ceux de la France, ni le caractère humoristique de ceux de l’Angleterre. Il en est peu qui n’allient à l’élan le plus joyeux une réflexion philosophique, une pensée religieuse. On y trouve d’ailleurs, même dans les plus vulgaires, un indice de vague rêverie, un sentiment de la nature qui ne se révèlent point dans les nôtres. L’ouvrier allemand ne se contente point de célébrer en vers plus ou moins corrects l’amour et le vin, il chante souvent avec une douce et naïve mélancolie la verdure des champs, la fraîcheur des bois ; et il y a telles de ces chansons d’artisan, de ces Burschenlieds qui retentissent chaque jour dans les plus obscurs cabarets et que l’on pourrait citer comme de petites odes harmonieuses, et remarquables par une pensée exquise.
Il est clair cependant que dans cette quantité de poésies lyriques qui inondent l’Allemagne, il y a un nombre infini de chansonnettes qui ne peuvent être considérées que comme des motifs de composition musicale, ou comme la pâle expression d’une pensée banale. C’est à la critique à chercher, au milieu de tant de productions, ce qui mérite d’être conservé et classé parmi les véritables œuvres d’art. Dans ces œuvres choisies, on distinguera les poésies lyriques de Schiller. L’homme de génie a mis là les qualités que l’on aime à retrouver dans ses drames, sa tendresse de cœur, ses grandes idées sociales, sa philosophie religieuse. Quand il n’aurait point écrit Marie Stuart, Guillaume Tell, Wallenstein, son petit volume d’élégies, de ballades, suffirait pour lui assurer une belle place parmi les poëtes de notre époque. Nous avons publié, en tête de la traduction de son théâtre, une notice biographique qui nous dispense de revenir sur les divers incidents de la vie de ce grand écrivain. Nous essaierons ici de rechercher les premières traces de ses compositions lyriques, et d’indiquer les différentes phases que sa pensée a suivies, le cercle qu’elle a parcouru, jusqu’à ce qu’elle arrivât à sa dernière manifestation, à son dernier développement, interrompu, brisé par une mort prématurée.
…
Xavier Marmier
Préface
Poésies de Schiller
Charpentier
*
LITTERATURE ALLEMANDE Poèmes de Friedrich Schiller
« Sieh, wie sie durcheinander in kühnen Schlangen sich winden, Vois comme, dans de serpentines vagues, ils se vrillent , Wie mit geflügeltem Schritt schweben auf schlüpfrigem Plan.
Comme volent ces pas ailés qui sur le sol glissent. Seh’ ich flüchtige Schatten von ihren Leibern geschieden?
Des ombres fugaces de leurs corps sortent-elles ? Ist es Elysiums Hain, der den Erstaunten umfängt?
Où sont-ce des esprits qui les enveloppent de leurs ailes ? Wie, vom Zephyr gewiegt, der leichte Rauch durch die Luft schwimmt,
Comme, secouée par le Zéphyr, la fumée légère dans l’air se répand, Wie sich leise der Kahn schaukelt auf silberner Flut,
Avec la douceur du bateau qui se balance sur une mer d’argent, Hüpft der gelehrige Fuß auf des Takts melodischen Wellen,
Le pied docile saute sur les ondes mélodieuses de la cadence, Säuselndes Saitengetön hebt den ätherischen Leib. »
Le son de cordes grésillant soulève ces corps éthérés qui dansent. Keinen drängend, von keinem gedrängt, mit besonnener Eile,
Poussé par une étrange et puissante force, Schlüpft ein liebliches Paar dort durch des Tanzes Gewühl.
Un charmant couple ouvre son chemin à travers la danse. Vor ihm her entsteht seine Bahn, die hinter ihm schwindet,
Cette nouvelle voie disparaît aussitôt derrière eux, Leis wie durch magische Hand öfnet und schließt sich der Weg.
Comme par magie, le chemin s’ouvre devant eux puis se referme. Sieh! jetzt verliert es der suchende Blick. Verwirrt durcheinander
Vois ! maintenant nous l’avons perdu ! Dans cette confusion Stürzt der zierliche Bau dieser beweglichen Welt.
Gracieusement se déplace ce mystérieux fluide merveilleux. Nein, dort schwebt es frohlockend herauf. Der Knoten entwirrt sich,
Non ! il flotte et se réjouit. Le nœud se défait, Nur mit verändertem Reiz stellt sich die Ordnung mir dar.
Muni d’un nouveau charme, il se présente. Ewig zerstört und ewig erzeugt sich die drehende Schöpfung,
Éternellement détruit et éternellement créé, cette création tournoyante Und ein stilles Gesetz lenkt der Verwandlungen Spiel.
Et une loi silencieuse dirigent le doux jeu des métamorphoses. Sprich, wie geschiehts, daß rastlos bewegt die Bildungen schwanken,
Dis ! comment se fait-il que, continuellement renouvelées, dans ce mouvant tableau, Und die Regel doch bleibt, wenn die Gestalten auch fliehn?
La règle reste la même alors que la forme se délite ? Daß mit Herrscherkühnheit einher der einzelne wandelt,
Pourquoi chaque individu réalise ses prouesses, Keiner ihm sklavisch weicht, keiner entgegen ihm stürmt?
Comment personne n’est asservi, personne ne s’oppose à lui ? Willst du es wissen? Es ist des Wohllauts mächtige Gottheit,
Veux-tu le savoir ? C’est la divine puissance de l’harmonie ! Die zum geselligen Tanz ordnet den tobenden Sprung,
C’est elle qui donne à la danse la magie de transformer de tels soubresauts, Die, der Nemesis gleich, an des Rhythmus goldenem Zügel
Qui, comme Némésis, au rythme de ses rênes d’or Lenkt die brausende Lust, und die gesetzlose zähmt.
Guide le rugissant plaisir et apaise sa vigueur. Und der Wohllaut der großen Natur umrauscht dich vergebens?
Et le son du grand univers, pour toi, n’est-il donc rien ? Nicht der begeisternde Takt, den alle Wesen dir schlagen?
N’es-tu pas saisis par la cadence que tous ces êtres te marquent ? Nicht der wirbelnde Tanz, der durch den ewigen Raum
N’entends-tu pas la danse tourbillonnante qui traverse l’éternel espace ? Leuchtende Sonnen wälzt in künstlich schlängelnden Bahnen?
Ne vois-tu donc pas les astres brillants qui partent sur de sinueuses pistes ? Handelnd fliehst du das Maaß, das du im Spiele doch ehrst?
Pourquoi alors fuir la mesure que tu respectes dans le jeu ?
MUSEU DO CHIADO
Museu de Arte Contemporânea do Chiado
Photo Jacky Lavauzelle
exposição em Lisboa
**
Dançarino
LE DANSEUR
Tomás Costa
1888
Au Musée du Chiado
de Lisbonne
**
« Sieh, wie sie durcheinander in kühnen Schlangen sich winden, Voyez comme, dans de serpentines vagues, ils se vrillent , Wie mit geflügeltem Schritt schweben auf schlüpfrigem Plan.
Comme volent ces pas ailés qui sur le sol glissent. Seh’ ich flüchtige Schatten von ihren Leibern geschieden?
Des ombres fugaces de leurs corps sortent-elles ? Ist es Elysiums Hain, der den Erstaunten umfängt?
Ou sont-ce des esprits qui les enveloppent de leurs ailes ? Wie, vom Zephyr gewiegt, der leichte Rauch durch die Luft schwimmt,
Comme, secouée par le Zéphyr, la fumée légère dans l’air se répand, Wie sich leise der Kahn schaukelt auf silberner Flut,
Avec la douceur du bateau qui se balance sur une mer d’argent, Hüpft der gelehrige Fuß auf des Takts melodischen Wellen,
Le pied docile saute sur les ondes mélodieuses de la cadence, Säuselndes Saitengetön hebt den ätherischen Leib. »
Le son de cordes grésillant soulève ces corps éthérés qui dansent. Der Tanz
La Danse Friedrich von Schiller
(Trad. allemand J. Lavauzelle)
« Veja como, em serpentinas vagas, eles torcem, Como estes passos alados voam neste chão. Sombras fugazes de seus corpos saem? Ou são espíritos que os envolvem com suas asas? Como, abalada pelo Zephyr, a fumaça do ar se espalha, Com a doçura do barco balançando em um mar de prata, O pé dócil salta nas ondas melodiosas de cadência, O som de cordas chiando eleva esses corpos etéreos que dançam. »
(Traduction J Lavauzelle)
******
Discípulo de Soares dos Reis, Falguière e Antonin Mercier,Marques de Oliveira
Escola de Belas-Artes do Porto
3ª medalha na Exposição Universal de 1889
2ª medalha na Exposição Universal de 1900.
1ª medalha em escultura na Sociedade de Belas-Artes
2ª medalha na Exposição de Barcelona.
**
Disciple de Soares dos Reis, Falguière et Antonin Mercier, Marques de Oliveira
École des Beaux-Arts de Porto
3ème médaille à l’Exposition Universelle de 1889
2ème médaille à l’Exposition Universelle de 1900.
1ère médaille en sculpture à la Société des Beaux-Arts
2ème médaille à l’exposition de Barcelone.