LETTERE – Libro III – LETTRES -LIVRE III
1545
Traduction – Texte Bilingue
LITTERATURE ITALIENNE
Letteratura Italiana
TRADUCTION JACKY LAVAUZELLE
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Novembre 1545
Tiziano – Le Titien
Vers 1548 circa 1548
Frick Collection New York
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Notes
La lettre de L’Arétin est écrite en 1545, alors que l’œuvre de Michel-Ange, le Jugement Dernier, est terminé depuis quatre ans. Il attaque sa liberté de création dans un lieu sacré. Michel-Ange est critiqué non pour ses dons artistiques, « perfettion di pittura », mais pour ne pas avoir conçu une iconographie avec des poses plus retenues, nous ne sommes pas dans un bordel, « il postribolo« .
L’Arétin parle de La Nanna. Il s’agit d’un personnage de ses Ragionamenti où une prostituée raconte ses expériences argumentant à la mode des dialogues platoniciens. Les Ragionamenti sont publiés en 1534. Nous trouvons notamment le fameux Dialogue entre la Nanna et la Pippa : Dialogo nel quale la Nanna insegna a la Pippa. [« Eccovi là i Salmi, eccovi la Istoria di Cristo, eccovi le Comedie, eccovi il Dialogo, eccovi i volumi divoti e allegri, secondo i subietti; e ho partorito ogni opera quasi in un dì… »]
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Lettera al grande Michelangelo Buonarroti
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Lettre au grand Michel-Ange Buonarroti
Le Jugement Dernier – Il Giudizio Universale
Fresque de Michel-Ange Buonarroti
Affresco di Michelangelo di Lodovico Buonarroti
La Chapelle Sixtine – Cappella Sistina
Le Vatican – Città del Vaticano,
1535-1541
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Signor mio.
Mon Seigneur
Nel rivedere lo schizzo intiero di tutto il vostro dì del Giudicio, ho fornito di conoscere la illustre gratia di Rafaello ne la grata bellezza de la inventione.
Lors de ma dernière vision générale de votre Jugement, j’ai retrouvé l’illustre grâce de Raphaël dans la beauté de l’invention.
Intanto io, come battezzato, mi vergogno de la licentia, sì illecita a lo spirito, che havete preso ne lo isprimere i concetti u’ si risolve il fine al quale aspira ogni senso de la veracissima credenza nostra.
Cependant, comme baptisé, j’ai honte de la licence, si illicite à l’esprit, que vous avez prise dans l’expression des aspirations de notre vraie foi.
Adunque quel Michelagnolo stupendo in la fama, quel Michelagnolo notabile in la prudentia, quel Michelagnolo ammiranno nei costumi ha voluto mostrare a le genti non meno impietà di irreligione che perfettion di pittura?
Pourquoi donc ce Michel-Ange merveilleux en pleine gloire, ce Michel-Ange apprécié pour sa prudence, pourquoi ce Michel-Ange admiré a-t-il voulu montrer au moins autant d’impiété en religion que de perfection en peinture ?
È possibile che voi, che per essere divino non degnate il consortio degli huomini, haviate ciò fatto nel maggior tempio di Dio?
Et est-il possible que vous, être divin dédaignant la compagnie humaine, ayez commis cette chose dans le temple de Dieu ?
sopra il primo altare di Giesù?
De plus, au-dessus du premier autel de Jésus ?
ne la più gran capella del mondo, dove i gran Cardini de la Chiesa, dove i Sacerdoti reverendi, dove il Vicario di Christo con cerimonie catholiche, con ordini sacri e con orationi divine confessano, contemplano et adorano il suo corpo, il suo sangue e la sua carne?
Dans cette la plus grande chapelle du monde, où les grands Cardinaux de l’Eglise, où les prêtres vénérables, où le Vicaire du Christ lors des cérémonies catholiques, avec les ordres sacrés et prières divines, confessent, contemplent et adorent Son corps, Son sang et Sa chair ?
Se non fusse cosa nefanda lo introdurre de la similitudine, mi vanterei di bontade nel trattato de la Nanna, proponendo il savio mio avedimento a la indiscreta vostra conscienza, avengaché io in materia lasciva et impudica non pure uso parole avertite e costumate, ma favello con detti irreprensibili e casti;
S’il n’y avait pas quelque chose d’infâme dans la similitude, je vanterais les qualités de mon traité de la Nanna, afin de mettre en regard mes sages manières à votre indiscrète conscience, utilisant des mots de circonstance et acceptable à une situation lascive et impudique mais je m’appuis sur une tonalité irréprochable et pure ;
et voi nel suggetto di sì alta historia mostrate gli angeli e i santi, questi senza veruna terrena honestà, e quegli privi d’ogni celeste ornamento.
et vous qui, pour un sujet où vous montrez les anges et les saints, n’offrez à nos yeux aucune décence terrestre, sans même aucun ornement céleste.
Ecco, i Gentili ne lo iscolpire, non dico Diana vestita, ma nel formare Venere ignuda, le fanno ricoprire con la mano le parti che non si scoprono;
Ici, les Gentils, qui ne sont pas vêtus en Diane mais en Vénus nue, positionnent leurs mains sur les attributs à ne pas découvrir ;
et chi pur è christiano, per più stimare l’arte che la fede, tiene per reale ispettacolo tanto il decoro non osservato nei martiri e ne le vergini, quanto il gesto del rapito per i membri genitali, che anco serrarebbe gli occhi il postribolo, per non mirarlo.
et un chrétien, qui estime l’art plus que la foi, reste le spectateur d’un véritable décorum où se montrent les martyrs et les vierges, avec le geste d’un damné retenu par ses membres génitaux, scène que, même dans un bordel, nos yeux ne pourraient regarder en face.
In un bagno delitioso, non in un choro supremo si conveniva il far vostro!
Dans une délicieuse salle de bain peut-être, mais pas dans un chœur suprême, votre œuvre à merveille conviendrait !
Onde saria men vitio che voi non credeste, che, in tal modo credendo, iscemare la credenza in altrui.
Il me semble préférable de ne pas croire que de croire en méprisant la croyance des autres.
Ma sino a qui la eccellenza di sì temerarie maraviglie non ne rimane impunita, poiché il miracolo di loro istesse è morte de la vostra laude.
Mais jusqu’ici l’excellence des merveilles téméraires ne reste pas impunie, car dans le miracle se meurt votre louange.
Sì che risuscitatele il nome col fare di fiamme di fuoco le vergogne dei dannati, et quelle dei beati di raggi di sole, o imitate la modestia fiorentina, la quale sotto alcune foglie auree sotterra quelle del suo bel colosso;
Oui, ressuscitez votre gloire en jetant dans les flammes la honte damnés, et en inondant des rayons du soleil les bienheureux, ou imitez la modestie florentine qui, sous quelques feuilles d’or, cache les attributs de leur magnifique colosse ;
et pure è posto in piazza publica et non in luogo sacrato.
qui pourtant se place sur la place publique et non dans un lieu consacré.
Hor così ve lo perdoni Iddio, come non ragiono ciò per isdegno ch’io habbi circa le cose desiderate;
Que Dieu vous le pardonne, car je ne parle pas dans l’indignation de ne pas avoir trouvé ce que je désirais ;
perché il sodisfare al quanto vi obligaste mandarmi deveva essere procurato da voi con ogni sollecitudine, da che in cotale atto acquetavate la invidia, che vuole che non vi possin disporre se non Gherardi et Tomai.
car satisfaire ce que vous vous étiez obligé à m’envoyer devait être réalisé avec toute la diligence possible, afin que l’on ne puisse pas dire que les Gherardo et les Tomasso disposaient de vous.
Ma se il thesoro lasciatovi da Giulio acciò si collocassero le sue reliquie nel vaso dei vostri intagli non è stato bastante a far che gli osserviate la promessa, che posso però isperar io?
Mais si le trésor laissé par Jules II pour que ses reliques reposent dans le sépulcre de votre sculpture ne suffit pas à vos yeux à tenir votre promesse, que puis-je donc espérer ?
Benché non la ingratitudine, non l’avaritia di voi, pittor magno, ma la gratia et il merito del Pastor massimo è di ciò cagione;
Bien que l’ingratitude, bien que l’avarice, peintre magnifique, et la grâce et le mérite du souverain Pasteur ne soient pas ici en question ;
avengaché Iddio vuole che la eterna fama di lui viva in semplice fattura di deposito in l’essere di se stesso, et non in altiera machina di sepoltura in vertù del vostro stile.
car Dieu veut que Sa gloire éternelle vive dans une facture simple et non dans une hautaine sépulture de votre style.
In questo mezzo il mancar voi del debito vi si attribuisce per furto.
Cela signifie que manquer son devoir revient à réaliser un vol.
Ma con ciò sia che le nostre anime han più bisogno de lo affetto de la devotione che de la vivacità del disegno, inspiri Iddio la Santità di Paolo come inspirò la Beatitudine di Gregorio, il quale volse imprima disornar Roma de le superbe statue degli idoli che torre, bontà loro, la riverentia a l’humili imagini dei santi.
Mais comme nos âmes ont plus besoin de l’affection pour la dévotion que de la vivacité dans le dessin, Dieu inspire Sa Sainteté Paul comme il inspira le Bienheureux Grégoire en lui faisant enlever les ornements des superbes statues des idoles de Rome, avant de comprendre que cela nuisait au respect que l’on devait aux images des saints.
In ultimo, se vi fuste consigliato, nel comporre e l’Universo e l’Abisso e ‘l Paradiso, con la gloria, con l’honore et con lo spavento abbozzatovi da la istruttione, da lo essempio e da la scienza de la lettera che di mio legge il secolo, ardisco dire che non pure la natura e ciascuna benigna influenza non si pentirieno del datovi intelletto sì chiaro, che hoggi in vertù suprema favvi simolacro de la maraviglia, ma la providentia di chi regge il tutto terrebbe cura di opera cotale, sin che si servasse il proprio ordine in governar gli emisperi.
Enfin, si vous vous étiez fait conseillé pour cette composition et sur l’Univers, et l’Abîme et le Paradis, avec gloire, honneur, et terreur par l’exemple et la science de la lettre que de moi l’on connaît, j’ose dire que la nature et ses influences n’auraient pas entravé la si claire intelligence qui vous pare aujourd’hui, ainsi que la providence qui soutiendrait l’ouvrage, puisqu’elle assure la gouvernement des hémisphères.
Di novembre, in Vinetia, MDLXV.Servitore l’Aretino.
Novembre 1645 – Venise – Votre serviteur l’Arétin
Hor ch’io mi sono un poco isfogato la colera contro la crudeltà vostra usa a la mia divotione, et che mi pare havervi fatto vedere che, se voi siate divino, io non so’ d’acqua, stracciate questa, che anch’io l’ho fatta in pezzi, et risolvetevi pur ch’io son tale che anco i Re et gli Imperadori rispondano a le mie lettere.
P.S. Depuis que j’ai calmé ma colère contre la cruauté de votre réponse à ma dévotion, et vous avoir dit que, si vous êtes divin, moi, je ne suis pas d’eau, alors, déchirez cette missive en morceaux comme je l’ai fait, je suis ainsi fait que les rois et les empereurs répondent à mes lettres.
Al gran Michelagnolo Buonarroti. A Roma.
Au grand Michel-Ange Buonarroti. A Rome
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LETTRES DE L’ARETIN
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