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WHEN WILT THOU TEACH THE PEOPLE DH Lawrence Texte et Traduction

WHEN WILT THOU TEACH THE PEOPLE DH LAWRENCE
LITTERATURE ANGLAISE -English Literature – English poetry

David Herbert Lawrence
1885-1930 

When wilt thou teach the people D


WHEN WILT THOU TEACH THE PEOPLE… ?
Quand vas-tu enseigner au peuple … ?

When wilt thou teach the people,
Quand vas-tu enseigner au peuple,
  God of justice, to save themselves – ?
Dieu de justice, à se sauver lui-même…?
They have been saved so often
Il a été sauvé si souvent
and sold.
et vendu.

O God of justice, send no more saviours
O Dieu de justice, n’envoie plus de sauveurs
of the people!
au peuple !

When a saviour has saved a people
Quand un sauveur a sauvé un peuple
they find he has sold them to his father.
ils comprennent qu’ils sont vendus à son père.
They say : We are saved, but we are starving.
Ils disent : « Nous sommes sauvés, mais nous sommes affamés. »
He says : The sooner will you eat imaginary cake in the mansions of my father.
Il dit : « Le plus tôt vous mangerez du gâteau imaginaire dans les demeures de mon père ».
They says : Can’t we have a loaf of common bread ?
Ils disent : « Ne pouvons-nous avoir une miche de pain ordinaire ?« 
He says : No, you must go to heaven, and eat the most marvellous cake.-
Il dit : « Non, vous devez d’abord aller au ciel, et ensuite manger le plus merveilleux des cakes … »

Or Napoleon says: Since I have saved you from the
ci-devants,
Ou Napoléon dit : « Depuis que je vous ai sauvé des ci-devant,
  you are my property, be prepared to die for me, and to
to work for me. –
vous êtes ma propriété, vous êtes prêts à mourir pour moi, et
à travailler pour moi… »

Or later republicans say: You are saved,
Ou plus tard les républicains ont dit : « Vous êtes sauvés,
therefore you are our savings, our capital
par conséquent, vous êtes nos économies, notre capital
 with which we shall do big business. –
avec quoi nous ferons de grandes entreprises… »

Or Lenin says : You are saved, but tou are saved wholesale.
Ou Lénine dit : « Vous êtes sauvé, mais tous êtes sauvés en gros.
You are no longer men, that is bourgeois ;
Vous n’êtes plus des hommes, ce qui est bourgeois ;
you are items in the soviet state,
vous êtes des éléments de l’Etat soviétique,
and each item will get its ration,
et chaque élément aura sa ration,
but it is the soviet state alone which counts
mais c’est le seul Etat soviétique qui compte
the items are of small importance,
les éléments sont de peu d’importance,
the state having saved them all.-
l’Etat les ayant tous sauvés… »

And so it goes on, with the saving of the people.
Et cela continue, avec le salut des personnes.
God of justice, when wilt thou teach them to save
themselves?
Dieu de justice, quand vas-tu leur apprendre à se sauver
eux-mêmes ?

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Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO
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LA FILLE D’AFFAIRES de J.H. Rosny Aîné – UNE FEMME DANS LE VENT DE LA FINANCE

 J.-H. ROSNY Aîné
La Fille d’affaires

 Une Femme dans
le vent de la finance

Bienvenue dans le monde des affaires !

On y trouve de l’argent, des faillites, des rires et des pleurs.

« Le monde redoutable des affaires » dépasse en intensité tout ce que vous trouverez dans le plus terrible des films d’action. Oubliez la puissance nocturne d’un Lovecraft et plongeons –nous dans les arcanes de ce monde terrifiant. C’est J.-H Rosny Aîné qui nous y entraîne. Comme dans sa Guerre du Feu, nous pénétrons dans un univers hostile. Tenons-nous bien la main.

UN MONDE DE REQUINS !
PLUS TERRIBLE QUE LA GUERRE DU FEU !

Les plus sensibles, s’abstenir. Ce monde de requins déchiquète tout sur son passage. Après ce paragraphe, vous ne pourrez plus revenir en arrière. Sinon, mal préparé, vous serez seul contre cette multitude de prédateurs affamés, sans morale.

Vous traverserez en un temps record ce monde hostile d’une violence inouïe et apprendrez en quelques minutes ce que les professionnels apprennent pendant des années. Nous allons comprimer le temps. Des années vont devenir des secondes. Et, comme dans Lovecraft, mais nous n’y sommes pas, le temps n’aura plus vraiment d’importance. Nous sortons de notre dimension de terriens, pour atterrir sur celle des affairistes et des vendeurs en tous genres.

LES PLUS HABILES SE FONT PINCER !

Un aperçu de la terrifiante odyssée : voilà comment le père de Denise réagit quand il apprend que celle-ci veut se lancer dans le monde des affaires. « Mais, malheureuse, comment saurais-tu ce que sont les affaires ! Il faut des années et des années pour y voir un peu clair…et les plus habiles se font pincer…Une jeune fille ! Personne ne te prendra au sérieux… », « Pendant plusieurs minutes, il plongea dans un tel chaos qu’il lui fut impossible de proférer une parole. Puis, sa fureur s’affaissa d’un bloc. »

Suivons Denise et essayons d’être habile parmi les plus habiles…

JE VEUX DES AFFAIRES !
MON ROYAUME POUR UNE AFFAIRE !

Tous crient : à moi, l’argent ! À moi, les affaires ! Une course s’engage contre la montre. De l’argent avant toute chose, et pour cela préfère la vitesse, sans psychologie inutile. C’est la bousculade indescriptible. Le départ est lancé. Gare aux retardataires !  « Allons au but…Je voudrais faire des affaires. » lance Denise devant son père décontenancé. S’imagine-t-elle un seul instant où elle met les pieds. Son père, lui, sait où elle s’embarque et que le trajet ne sera pas de tout repos ; lui, qui au bord de la faillite se démène comme un forçat.

NOUS NE SOMMES PLUS MYTHOLOGIQUES

Début du XXème. Un nouveau siècle commence et les statues des anciens tombent. Lechat (Les Affaires sont les affaires d’Octave Mirbeau) finit de liquider ce qui reste de l’ancienne noblesse. Il soumet le vicomte et s’amuse à l’humilier en public, il savoure la déconfiture financière et le démantèlement de son voisin le duc avec délectation.  Denise de Rocheverne, l’héroïne de La Fille d’affaires de J.-H Rosny Aîné, précise à la question « Qui donc n’est pas mythologique ? », « nous ne le sommes plus, fit-elle froidement. »

LE TEMPS COÛTE CHER. IL N’A MÊME JAMAIS COÛTE AUSSI CHER

Ce changement dans le siècle est spectaculaire. Il est même foudroyant. Tout va vite et doit aller vite. « Le temps coûte cher ! Il n’a même jamais coûté aussi cher » appuie M Goulard, le conseiller du vicomte Guillaume de Rocheverne. Tout paraît trop lent. Ils le savent la richesse vient à celui qui se positionne le mieux, qui prend le premier les meilleurs paris. « Vous vous imaginez que vous allez faire fortune comme si vous jouiez à la roulette. Cela arrive…tout arrive…Mais il faut un tel concours de circonstances ! » (Pierre Goulard à Denise)

JE VEUX QU’ELLE SOIT RICHE… RICHEEEEEE!

Le temps ne va pas assez vite, il faut le dépasser. Ils crient tous, ensemble : nous voulons être les plus riches. « Voyant alors Denise pensive et lumineuse, il se dit : «  « je veux qu’elle soit riche…riche ! » …depuis huit ans, il essayait de rétablir, par des « affaires », une fortune que ses passions avaient écornée. Malgré la guerre, les spéculations avaient été pires que les femmes. »

L’action. Le futur. Il y a Denise qui symbolise les affaires, l’énergie, la détermination, « elle lui tendit la main en le regardant bien en face »,  la vitesse, la beauté, « il demeura un moment rêveur, encore sous le charme des grands yeux hardis »,  la surprise, l’anticipation, la nouveauté. C’est un rouleau compresseur qui envoûte et déstabilise ; « maintenant qu’elle était partie, la surprise reprenait plus forte et il ne comprenait guère qu’il eût cédé à la volonté de cette jeune créature. »

TU ES SEMBLABLE A CES HOMMES
QUI PARTAIENT SUR UNE CARAVELLE

La réflexion. Le passé. Il y a Arsène de Jurandot, son oncle, le scientifique. C’est le temps long, la réflexion, les hypothèses, confirmer ses résultats, ne pas s’affoler. Arsène, passe « sa vieillesse à collectionner les coléoptères dont il avait d’innombrables cadavres ».

Denise a choisi son mode d’action. Il lui faut donc agir. Mais comment ? Quand la jeunesse apporte aussi son manque de connaissance et d’expérience. Il faut donc se jeter. D’abord se pro-jeter.  Et de ces projets, ne pas hésiter à se lancer, comme lors des grandes découvertes sur le Nouveau Monde. « Tu es semblable à ces hommes qui partaient sur une caravelle, vers les terres inconnues…Ils ne savaient pas très bien où ils allaient ; leur destin les traînait et gonflait leurs voiles autant que le vent du large… » (Arsène à Denise)

IL Y A TANT DE VOIES NOUVELLES …

Denise l’a bien compris. Il faut prendre le temps dès ses premiers rebonds et anticiper. Elle ne doit même pas attendre et monter au filet, comme dans une partie de tennis. Et la première anticipation passe par l’émancipation. Devenir libre pour librement investir. « Je vous assure, reprit doucement la jeune fille, que l’émancipation serait très utile au développement de mon caractère et de mon activité …je voudrais aussi pouvoir me livrer à certaines occupations sans sentir aucune contrainte. » Il faut lâcher le fauve dans l’arène de la finance. Gare aux brebis égarées. « Je veux tâcher de me libérer, ma mère…il y a maintenant toute espèce de voies nouvelles. »

UN MONDE DE COMBINAISONS
ET D’ALGORITHMES

Le monde n’a plus que faire de l’irrationnel. Il faut du concret et du sens. Et surtout le feu sacré pour supporter cette accélération dans le temps. « Il (Jacques Vérone) l’écoutait avec une surprise croissante, presque scandalisé par l’énergie de la jeune fille, attristé par sa logique.» De multiples possibilités, un choix de produits de plus en plus conséquent, nos affairistes se transforment en logisticiens et en mathématiciens : « à travers des combinaisons nombreuses, les mêmes calculs revenaient, obstinément, et, coup sur coup, Rocheverne avala trois petits verres. » Des nombres à profusion, des océans de chiffres à analyser. Celui qui les comprendra deviendra immensément riche. Pour le moment, Rocheverne semble s’y noyer. « Alors un grand dédain souleva sa poitrine ; il se sentit la force de dominer la fortune ; il entrevit les flots de cette richesse qui devaient lui permettre de se gausser même de Pierre Goulard. »

Il faut savoir démêler le bon du gâteux, l’opportunité à la mauvaise affaire. Tout se dit, ainsi que son contraire. L’argent vient vite et part aussi très vite. Notre Lechat dans les Affaires sont les affaires n’avait-il pas déjà encaissé deux faillites. Pas mieux pour les Rocheverne : « elle continuait à songer aux embuches qui menacent les faibles créatures. La ruine du père, presque certaine, pouvait finir par un drame lamentable. »

JE VOIS TOUS LES JOURS DES IMPRUDENTS QUI S’EMBOURBENT

Et après l’euphorie de l’enrichissement rapide, arrive le temps des désillusions. Les pertes s’entassent. Les dégâts sont importants. Il reste peu d’élus. « Vous croyez qu’il est facile de faire des affaires…et peut-être auriez-vous eu raison, il y a un ou deux ans. Mais les temps sont passés. Les affaires sont redevenues difficiles et périlleuses. Je vois tous les jours des imprudents qui s’embourbent…Les ruines vont devenir fréquentes, les succès rares…Méfiez-vous, mademoiselle ! » Avertit Pierre Goulard.

C’EST L’ENFER MA FILLE !

Pour réussir, il faut savoir être vorace. Comment être vorace et  accepter cette violence ? Il faut faire sauter le verrou. En fait, la vie ne se résume-t-elle pas à ingérer, avaler encore et  encore du vivant. Notre machine ne peut survivre qu’à cette condition. Sinon, c’est mourir. C’est Arsène, l’oncle scientifique qui le lui apprend. « C’est l’enfer, ma fille ! Songe à ce que toi, délicieuse fille des hommes, tu manges de chair dans une année, à tout ce qui meurt pour que tes petites dents broient des côtelettes, des biftecks, des blancs de volaille…Songe à ce qu’on extermine de bœufs, de moutons, de poules, de chevreuils, de lièvres, de perdrix, de bécasses pour tes semblables …à ce que les bêtes carnivores massacrent dans la forêt…Ma petite fille, chacun de nos gestes mène à un meurtre. Qu’y faire ? C’est hideux et inévitable, et je rabâche en te le répétant ! »

ELLE PRESENTAIT UNE ÂME MALLEABLE ET SOUMISE

Pour réussir, il faut aussi s’assembler avec ses semblables.  Le choix des collaborateurs est donc de toute première importance. Le choix du partenaire financier est à cette condition. Ainsi  que celui du partenaire dans la vie intime. Mais dans la ressemblance nécessaire, la force doit prévaloir au chef. Les autres sont de la même étoffe. Mais d’une étoffe qui rehaussera le prestige du décideur. De la soumission est donc attendue. Le chef doit rester le chef et ne pas risquer se faire déposséder ou découronner un jour. Le plus important reste que les élus demeurent loyaux, indéfectiblement. « Dans la lumière pâlissante, il fut séduisant, enveloppé de vêtements délicats, la peau aussi fine que celle de Denise, les yeux ardents et ombrageux d’une bête de race Elle pressentait une âme malléable, fidèle et soumise qui, selon les influences, devait se corrompre ou s’épurer. Son destin dépendait des autres. Sous un chef héroïque, il serait un soldat sans reproche…une ambiance loyale le ferait loyal».

LA SPECULATION COMME UN PIS-ALLER

Il faut alors résister aux adversités. Avoir un tempérament hors du commun. Relativiser les échecs et les jours fastes. Réguler son tempérament. Le choix des affaires demeurent pour l’essentiel une prise de risques avec une multitude d’aléas. « La vie de Denise subit une crise fatale…Cependant, bonne joueuse, elle ne dépassait pas une température moyenne d’exaltation ou de dépression. » Pour résister à la violence des chocs, autant avoir la sagesse de commencer dans des eaux moins furibondes. Il faut savoir choisir son terrain de jeu. Il vaut mieux être le roi des navigateurs sur le lac de Genève, qu’un noyé écervelé dans le grand bain des océans déchaînés. « Au fond, elle considérait la spéculation pure comme un pis-aller, le seul moyen pour elle de tenter la fortune. Sa vocation véritable, à ce qu’elle imaginait, était le grand négoce, où la stabilité et l’aléa se balancent, où l’organisation est essentielle. »

DANS LES SOUBRESAUTS DE LA BOURSE

Mais la base reste la connaissance des marchés. Avoir l’information afin d’être décisif. Comprendre les chiffres et les faire parler avec une recherche personnelle et des algorithmes décisifs. Il faut donc plonger dans les données. « Cependant, elle travaillait, si cela peut se dénommer un travail ; elle étudiait avec persévérance des périodiques commerciaux, elle analysait les soubresauts des cours et, chaque fois qu’elle le pouvait, elle consultait Goudard ».

ELLE PASSAIT DANS LE MONDE COMME UNE OMBRE

Il ne faut bien entendu se disperser. Il faut se concentrer sur un but et s’y tenir. Oublier tout ce qui peut nous divertir. Comme dans la tempête déchaînée ou perdu dans la forêt, il faut savoir garder un cap et continuer, toujours tout droit. « Dans cette période, elle se désintéressait de tous les actes et de tous les vœux qui ne se rattachaient pas à ses projets. Jacques Vérone se perdait dans une brume ; elle passait dans le monde comme une ombre ».  Les affaires sont chronophages, il n’y a pas de temps pour les futilités. « Denise, qui n’aimait pas la poésie, et encore moins les poètes, n’avait guère écouté. »

Savoir écouter, se concentrer sur son cap. Sans oublier l’essentiel à tous les moments. Mais le plus important de tout : Il faut posséder du bon sens. « Ah ! Vous avez une volonté effrayante… – J’ai tout au plus un peu de bon sens ! »

Mais, malgré tous ces conseils, rappelez-vous une dernière chose :
  « il y a toujours du jeu dans les affaires et que la veine est canaille. »

Jacky Lavauzelle

SAMSON (Maurice Tourneur) Le Lion et le Miel

Maurice TOURNEUR
SAMSON (1936)
Tourneur Samson Harru Baur Artgitato
LE LION
&
LE MIEL

Dans le monde du business, nous avions la force animale, les lions affamés, deux poids-lourds aux affaires, deux hommes puissants, Raimu, dans Ces Messieurs de la Santé de Pierre Colombier en 1934, et Charles Vanel dans les Affaires sont les affaires de Jean Dréville, en 1942.  Nous avons, en 1936, dans le Samson de Jacques Tourneur, Harry Baur le magnifique (Jacques Brachart). Celui-ci devrait boxer dans la catégorie des super-lourds. Mais nous sommes avec des professionnels où cette catégorie n’existe pas. La question ne se pose donc pas. Ce sont trois magnas de la finance, trois génies des affaires, trois extra-terrestres du business.
Nous sommes cependant plus en empathie immédiate avec le roublard Jules Taffard  (Raimu) qu’avec notre Jacques Brachart (Harry Baur) ou notre Isidore Lechat, le plus intransigeant et cynique des trois.

Brachart est notre Samson. Sa force ne lui vient pas de sa chevelure, mais de son argent. Il est intouchable, craint et donc respecté. Au journal qui veut le faire chanter, il a une solution simple, directe : en devenir le principal actionnaire et virer comme un malpropre son directeur. On ne joue pas avec Brachart. Il n’en a ni le temps ni l’envie.

LE LION ET LE MIEL

Les trois films se ressemblent. Nos personnages un peu  aussi. Au premier abord seulement. La même scène d’introduction dans Samson et dans Ces Messieurs de la Santé : la Bourse de Paris, la ruche financière, où nos abeilles butinent au jour le jour. Au centre, la Reine, le tableau noir où nos chiffres défilent aux cris des boursicoteurs surexcités.  En 1942, le décor change et nous nous retrouvons dans les locaux d’un grand journal où Isidore Lechat règne en maître absolu. La presse vient de prendre son essor et savoure pleinement sa puissance.

Le lion et le miel. Le fort et le doux. Comme notre Samson qui après avoir tué le lion retrouvera les abeilles à son second passage Ce sont elles qui lui donneront l’idée de la célèbre énigme: « de celui qui mange est issu ce qui se mange, et du fort est issu le doux. »

L’AFFOLEMENT, COMME TOUT LE MONDE !

Revenons pour le moment, à nos lions dominants.

Le temps reste à la base de toutes les affaires, les petites comme les grandes. Le jugement doit être éclairé et rapide comme l’éclair. Bref, lumineux. Les deux ennemis du jugement : la mauvaise information et l’affolement. Pour faire baisser intentionnellement une valeur, le conseil de Brachart à la question « Quelle attitude devrais-je prendre ? », la réponse est la suivante : «  l’affolement, comme tout le monde ! »

Mais les rocs ont tous leur fragilité, à l’exception de Lechat. Les montagnes s’affolent aussi. Le tremblement de terre de Brachart s’appelle Anne-Marie d’Andeline (Gaby Morlay), rencontrée devant l’un des premiers photomatons. A ce moment-là, la statue du Commandeur va s’effriter.

Anne-Marie n’aime pas Brachart et réalise un mariage de raison  poussée par sa mère, issue d’une famille noble, désormais désargentée en grande difficulté financière. Le parti de Brachart est donc inespéré ; il n’y a pas à hésiter. Il faut livrer la biche aux dents du lion qui tourne autour de sa proie. Samson a trouvé sa Dalila et il sait que rien ne lui résiste longtemps. Une Dalila qui va aussi le trahir, comme dans le mythe. Le résultat sera le même : il sera rasé symboliquement, complétement ruiné. A la différence que notre Brachart le fera consciemment, incapable de voir sa belle lui échapper. Sa fortune est un obstacle, ruinons-nous en ruinant l’amant bellâtre.  

QUAND LE LION DEVORE SON LIONCEAU

Brachart est conscient en effet, dès le commencement, de faire un mariage de raison. Il compte sur  la durée. Il sait que ce temps de l’amour ne se maîtrise pas. Il est follement amoureux. Il joue alors l’homme distant devant Anne-Marie, franche, elle, sur la profondeur épsilonesque de ses sentiments. L’originalité, vient que dans ce monde des affaires totalement pourri, ou l’argent est roi, moteur de chaque chose, chaque respiration, notre financier va mettre toute sa fortune en jeu pour ruiner Jérôme Le Govain (André Luguet), l’amant à la belle figure, aux cheveux parfaitement huilés, jeune lionceau dans l’arène de la finance qu’il venait d’enrichir précédemment par des conseils avisés sur les cuivres africains.  

ATTENTION AU LION BLESSE !

En se dénudant, se dépouillant, il va faire vaciller, enfin,  le cœur de notre Anne-Marie. L’être, froid, se révèle un être de passion, de feu, fougueux à l’extrême. Comme Samson à Gaza, Brachart n’est pas encore mort. Loin de s’enfuir vers Londres, il retrouve sa dulcinée éplorée et  bras dessus, bras dessous décide de revenir vers Paris. Il ne faut en effet jamais vendre la peau du lion avant de l’avoir tué !

Le vieux lion est devenu abeille. Il a trouvé sa reine. La lune de miel va pouvoir commencer !

 

Jacky Lavauzelle