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LE PROLOGUE DU PROPHETE : KHALIL GIBRAN

Le Prologue du Prophète
KHALIL GIBRAN
Littérature Libanaise
Lebanese literature
le-prophete-khalil-gibran-fred-holland-day-1898Photographie de Fred Holland Day
1898





جبران خليل جبران
Gibran Khalil Gibran
1883–1931
le-prophete-khalil-gibran-the-prophete-n

 

 

THE PROPHET
LE PROLOGUE DU PROPHETE
1923




Traduction Jacky Lavauzelle

1
Prologue
The Coming of the Ship
L’arrivée du bateau

prologue-du-prophete-khalil-gibran-artgitato-vassily-kandinsky-1926-plusieurs-cercles-several-circles

Vassily Kandinsky
Plusieurs cercles – Several Circles – 1926

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Le Prologue du Prophète

Almustafa, the chosen and the beloved, who was a dawn onto his own day, had waited twelve years in the city of Orphalese for his ship that was to return and bear him back to the isle of his birth.
Almustafa, l’élu, le bien-aimé, qui était à l’aube de cette journée particulière, avait attendu douze ans dans la ville d’Orphalese son navire qui devait le porter sur l’île où il naquit.

And in the twelfth year, on the seventh day of Ielool, the month of reaping, he climbed the hill without the city walls and looked seaward; and he beheld the ship coming with the mist.
Et la douzième année, le septième jour d’Ielool, le mois des récoltes, il grimpa la colline hors des murs de la ville et regarda vers la mer ; et il vit le navire qui arrivait avec la brume.

Then the gates of his heart were flung open, and his joy flew far over the sea. And he closed his eyes and prayed in the silences of his soul.
Puis les portes de son cœur s’ouvrirent totalement, et sa joie vola loin sur la mer. Il ferma ensuite les yeux et pria dans les silences de son âme.

But he descended the hill, a sadness came upon him, and he thought in his heart:
Mais quand il descendit la colline, une tristesse vint à lui, et il pensa dans son cœur :

How shall I go in peace and without sorrow? Nay, not without a wound in the spirit shall I leave this city.




Comment irai-je en paix et sans douleur ? Non, sans une blessure dans mon esprit, je ne quitterai pas cette ville.

Long were the days of pain I have spent within its walls, and long were the nights of aloneness; and who can depart from his pain and his aloneness without regret?
Qu’ils étaient longs les jours de douleur que j’ai passés dans ses murs, et longues les nuits de solitude ; et qui, qui peut écarter de sa douleur et de sa solitude sans regret ?

Too many fragments of the spirit have I scattered in these streets, and too many are the children of my longing that walk naked among these hills, and I cannot withdraw from them without a burden and an ache.
Trop de fragments de l’esprit se sont dispersés dans ces rues, et trop nombreux sont les enfants de mon désir qui marchent nus parmi ces collines, et je ne peux pas ainsi les en retirer sans que cela devienne un fardeau et une douleur.

It is not a garment I cast off this day, but a skin that I tear with my own hands.
Ce n’est pas un vêtement que je retire ce jour, mais bien une peau que je déchire de mes propres mains.

Nor is it a thought I leave behind me, but a heart made sweet with hunger and with thirst.
Ni une pensée que je laisse derrière moi, mais un cœur attendri par la faim et par la soif.

Yet I cannot tarry longer.
Pourtant, je ne peux pas rester plus longtemps.

The sea that calls all things unto her calls me, and I must embark.
La mer qui appelle toutes choses à elle me réclame, et je dois embarquer.

For to stay, though the hours burn in the night, is to freeze and crystallize and be bound in a mould.
Rester à travers ces heures qui brûlent dans la nuit, reviendrait à se congeler et à se cristalliser et se rouler dans un moule.

Fain would I take with me all that is here. But how shall I?
Je voudrais bien prendre avec moi tout ce qui est ici. Mais comment faire ?

A voice cannot carry the tongue and the lips that give it wings. Alone must it seek the ether.
Une voix ne peut porter la langue et les lèvres qui lui donnent des ailes. Seule, elle atteindra l’éther.

And alone and without his nest shall the eagle fly across the sun.
Et seul et sans son nid, l’aigle volera à travers le soleil.

Now when he reached the foot of the hill, he turned again towards the sea, and he saw his ship approaching the harbour, and upon her prow the mariners, the men of his own land.
Maintenant, alors qu’il atteignit le pied de la colline, il se retourna à nouveau vers la mer, et il vit son navire approchant du port, et sur sa proue les marins, les hommes de sa propre terre.

And his soul cried out to them, and he said:
Et son âme cria vers eux, et il  dit:







Sons of my ancient mother, you riders of the tides,
Fils de mon ancienne mère, vous survolez les marées,

How often have you sailed in my dreams. And now you come in my awakening, which is my deeper dream.
Combien de fois avez-vous navigué dans mes rêves. Et maintenant vous pénétrez dans mon éveil, qui est mon rêve le plus profond.

Ready am I to go, and my eagerness with sails full set awaits the wind.
Prêt je le suis à partir, et mon impatience a sorti ses voiles qui attendent dans le vent.

Only another breath will I breathe in this still air, only another loving look cast backward,
Une dernière inspiration de cet air calme et serein, un dernier regard aimant derrière moi,

Then I shall stand among you, a seafarer among seafarers.
Alors je serai parmi vous, un marin parmi les marins.

And you, vast sea, sleepless mother,
Et toi, vaste mer, mère éveillée,

Who alone are peace and freedom to the river and the stream,
Qui seule offre paix et liberté à la rivière et au ruisseau,

Only another winding will this stream make, only another murmur in this glade,
Ce ruisseau dessinera une autre sinuosité, un autre murmure dans cette clairière,

And then shall I come to you, a boundless drop to a boundless ocean.
Et puis je viendrai à toi, une chute sans limite dans un océan sans bornes.

And as he walked he saw from afar men and women leaving their fields and their vineyards and hastening towards the city gates.
Et en marchant, il vit au loin des hommes et des femmes quittant leurs champs et leurs vignes et se hâtant vers les portes de la ville.

And he heard their voices calling his name, and shouting from the field to field telling one another of the coming of the ship.
Et il entendit leurs voix qui l’appelaient, et qui criaient, de champ en champ, pour annoncer la venue du navire.

And he said to himself:
Et il se dit :

Shall the day of parting be the day of gathering?
Le jour de la séparation sera-t-il le jour de la collecte ?

And shall it be said that my eve was in truth my dawn?
Et mon crépuscule sera-t-il en vérité mon aurore ?

And what shall I give unto him who has left his plough in midfurrow, or to him who has stopped the wheel of his winepress?
Et que dois-je donc donner à celui qui a laissé sa charrue au milieu du sillon, ou à celui qui a arrêté la roue de son pressoir ?

Shall my heart become a tree heavy-laden with fruit that I may gather and give unto them?
Mon cœur doit-il devenir un arbre lourdement chargé de fruits, que je puisse les cueillir et leur donner ?

And shall my desires flow like a fountain that I may fill their cups?
Et mes désirs doivent-ils couler comme une fontaine, que je puisse verser dans leurs coupes ?

Am I a harp that the hand of the mighty may touch me, or a flute that his breath may pass through me?
Suis-je une harpe que la main du puissant puisse me toucher, ou une flûte que son souffle puisse passer à travers moi ?

A seeker of silences am I, and what treasure have I found in silences that I may dispense with confidence?
Suis-je un chercheur de silences, et quel trésor ai-je trouvé dans les silences que je puisse dispenser avec confiance ?

If this is my day of harvest, in what fields have I sowed the seed, and in what unrembered seasons?
Si ceci est mon jour de récolte, dans quels domaines ai-je semé la graine, et dans quelles saisons oubliées ?

If this indeed be the hour in which I lift up my lantern, it is not my flame that shall burn therein.
Si cette heure est réellement celle où je lève ma lanterne, ce n’est pas ma flamme qui doit y brûler.

Empty and dark shall I raise my lantern,
Vide et sombre, je soulèverai ma lanterne,

And the guardian of the night shall fill it with oil and he shall light it also.
Et le gardien de la nuit devra la remplir avec de l’huile et il l’allumera aussi.

These things he said in words. But much in his heart remained unsaid. For he himself could not speak his deeper secret.
Ces choses furent dites en paroles. Mais beaucoup resta son cœur. Car il ne pouvait pas faire parler son secret le plus profond.

And when he entered into the city all the people came to meet him, and they were crying out to him as with one voice.
Et quand il entra dans la ville, tout le peuple vint à sa rencontre, et ils criaient vers lui comme d’une seule voix.

And the elders of the city stood forth and said:
Et les anciens de la cité s’avancèrent et dirent :

Go not yet away from us.
Ne pars pas encore !

A noontide have you been in our twilight, and your youth has given us dreams to dream.
Vous étiez une lumière dans notre crépuscule, et votre jeunesse nous a donné des rêves à rêver.

No stranger are you among us, nor a guest, but our son and our dearly beloved.
Parmi nous, vous n’êtes pas un étranger, pas plus un invité, mais notre fils et notre bien-aimé.

Suffer not yet our eyes to hunger for your face.
Que nos yeux n’aient pas faim pour votre visage.

And the priests and the priestesses said unto him:
Et les prêtres et les prêtresses lui dirent :

Let not the waves of the sea separate us now, and the years you have spent in our midst become a memory.
Ne laissez pas les vagues de la mer nous séparer maintenant, et les années que vous avez passées avec nous devenir un souvenir.

You have walked among us a spirit, and your shadow has been a light upon our faces.
Comme un esprit, vous marchiez parmi nous, et votre ombre a été une lumière sur nos visages.

Much have we loved you. But speechless was our love, and with veils has it been veiled.
Nous vous avons adoré. Mais sans voix était notre amour, voilé de voiles.

Yet now it cries aloud unto you, and would stand revealed before you.
Mais maintenant, il crie vers vous, et il veut se révéler devant vous.

And ever has it been that love knows not its own depth until the hour of separation.
Et l’amour ne connaît sa propre profondeur qu’à l’heure de la séparation.

And others came also and entreated him.
Et d’autres vinrent ausi, et le prièrent.

But he answered them not. He only bent his head; and those who stood near saw tears falling upon his breast.
Mais il ne leur répondit pas. Il baissa la tête, seulement ; et ceux qui se tenait à ses côtés, virent des larmes tomber sur sa poitrine.

And he and the people proceeded towards the great square before the temple.
Et lui et le peuple se dirigèrent vers la grande place devant le temple.

And there came out of the sanctuary a woman whose name was Almitra. And she was a seeress.
Et sortit alors du sanctuaire une femme qui se nommait Almitra. C’était une voyante.

And he looked upon her with exceeding tenderness, for it was she who had first sought and believed in him when he had been but a day in their city.
Et il la regarda avec immense tendresse, car c’était elle qui l’avait d’abord cherché et qui avait cru en lui dès le premier jour dans leur ville.

And she hailed him, saying:
Et elle le salua et dit :

Prophet of God, in quest for the uttermost, long have you searched the distances for your ship.
Prophète de Dieu, en quête d’absolu, longtemps tu as attendu ton vaisseau.

And now your ship has come, and you must needs go.
Et maintenant ton navire est arrivé, et tu dois partir.

Deep is your longing for the land of your memories and the dwelling place of your greater desires; and our love would not bind you nor our needs hold you.
Profonde est ton envie de cette terre de tes souvenirs et de la demeure de tes plus grands désirs ; et notre amour ne te liera pas, ni nos besoins.

Yet this we ask ere you leave us, that you speak to us and give us of your truth.
Pourtant, ce que nous te demandons c’est de nous parler et nous livrer ta vérité.

And we will give it unto our children, and they unto their children, and it shall not perish.
Et nous la donnerons à nos enfants, et eux la donneront à leurs enfants, et ainsi cette vérité ne périra jamais.

In your aloneness you have watched with our days, and in your wakefulness you have listened to the weeping and the laughter of our sleep.
Dans ta solitude, tu as veillé sur nos jours, et dans ton éveil, tu as écouté les pleurs et les rires dans notre sommeil.

Now therefore disclose us to ourselves, and tell us all that has been shown you of that which is between birth and death.
Maintenant, révèle-nous à nous-mêmes, et dis-nous tout ce qui a t’a été montré de ce qui est entre la naissance et la mort.

And he answered,
Et il répondit :

People of Orphalese, of what can I speak save of that which is even now moving within your souls?
Peuple d’Orphalese, de quoi parler sinon de ce qui, aujourd’hui, est en mouvement au sein de vos âmes ?

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Le Prologue du Prophète

Œuvre de FERNANDO PESSOA Poésie & Prose – Poesia e Prosa

Oeuvre de Fernando Pessoa

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Traduction – Texte Bilingue
tradução – texto bilíngüe

Traduction Jacky Lavauzelle


LITTERATURE PORTUGAISE
POESIE PORTUGAISE

Literatura Português

FERNANDO PESSOA
1888-1935
Fernando Pesso Literatura Português Poesia e Prosa Poésie et Prose Artgitato

 

Œuvre de FERNANDO PESSOA
Poesia e Prosa
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Poésie & Prose
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A Fernando Pessoa
1915
A Fernando Pessoa Alvaro de Campos 1915 Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française

(Depois de ler seu drama estático « O marinheiro » em « Orfeu I »)
(Après la lecture de votre drame statique « Sailor » dans « Orphée I »)

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ADIAMENTO
AJOURNEMENT
 (ÁLVARO DE CAMPOS – 1928)

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Ah, Um Soneto
Ah, un Sonnet
Fernando Pessoa Ah un sonnet Ah um soneto Artgitato Traduction Française

Meu coração é um almirante louco
Mon cœur est un amiral fou

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Análise
Analyse

analise poema de Fernando Pessoa Analyse Poème de Fernando Pesso Artgitato

Tão ABSTRATA é a idéia do teu ser
Si ABSTRAITE est l’idée de ton être

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Apontamento
Note
1929
Apontamento Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française Note
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As caricaturas de Almada Negreiros 
Les caricatures d’Almada Negreiros
1932
Les Caricatures d'Almada Negreiros AS CARICATURAS DE ALMADA NEGREIROS Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française

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Autopsicografia
Autopsychographie

Autopsicografia FERNANDO PESSOA Autopsychographie Artgitato

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Aviso por causa da moral
Avertissement à cause de la morale
1923
AVISO POR CAUSA DA MORAL Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française
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Balança de Minerva
LA BALANCE DE MINERVE
1913

Destina-se esta secção à crítica dos maus livros e especialmente à crítica daqueles maus livros que toda a gente considera bons.
Cette section est destinée à la critique des mauvais livres et surtout la critique de ces mauvais livres que tout le monde apprécie.

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Álvaro de Campos
 Carta dirigida à revista Contemporânea
Lettre à la Revue Contemporânea
17 Outubro 1922
 17 octobre 1922

Venho escrever-lhe para o felicitar pela sua «Contemporânea» para lhe dizer que não tenho escrito nada e para por alguns embargos ao artigo do Fernando Pessoa.
Je vous écris ici pour vous féliciter de votre « Contemporânea », pour vous dire que je ne l’ai pas écrit et pour revenir sur l’article de Fernando Pessoa.

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Crónicas da Vida Que Passa

Crónica da Vida Que Passa
Chronique de la Vie qui passe
15 de Abril 1915 – 15 avril 1915

Sur la Trahison et le Traître

Na Rússia — ao contrário do que se tem dito — continuam as perseguições políticas.
En Russie – contrairement à ce qui a été dit – les persécutions politiques continuent.
Acaba de ser enforcado, por traidor, o coronel russo Miasoyedoff.
Le colonel russe Miasoyedoff vient d’être pendu pour trahison.

Crónica da Vida Que Passa
Chronique de la Vie qui passe
21 de Abril 1915 – 21 avril 1915

O proletariado organiza-se.
Le prolétariat s’organise.
Inaugurou-se há dias, em Lisboa, a Associação de Classe dos Monárquicos.
Il a inauguré il y a quelques jours, à Lisbonne, l’Association de Classe de Monarchistes.

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 Escripto num livro abandonado em viagem
Ecrit dans un livre abandonné en voyage
1928
Escripto num livro abandonado em viagem 1928 Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française
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Álvaro de Campos
Gazetilha
La célébrité des fous
1929

 Dos Lloyd Georges da Babilônia
Des Lloyd George de Babylone
Não reza a história nada…
L’histoire n’a rien conservé

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Lisbon revisited
1923
Lisbon revisited 1923 Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française

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Mar Português
Mer Portugaise

Mar Português Mer Portugaise Fernando Pessoa Artgitato

Ó mar salgado, quanto do teu sal
Ô mer salée, combien de ton sel

São lágrimas de Portugal!
Vient des larmes du Portugal !








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O Caso mental português 
 Le Cas mental portugais
1932
Le cas mental portugais O CASO MENTAL PORTUGUÊS Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française

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O GUARDADOR DE REBANHOS
LE GARDEUR DE TROUPEAUX
Alberto Caeiro
1925

Fernando Pessoa Poème XXIV -Le Gardien de Troupeaux - O GUARDADOR DE REBANHOS Artgitato

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O Homem de Porlock
L’HOMME DE PORLOCK 
1934

A história marginal da literatura regista, como curiosidade, a maneira como foi composto o escrito o Kubla Kan de Coleridge.
L’histoire marginale de la littérature note comme une curiosité la manière dont fut rédigé le  Kubla Khan de Samuel Taylor Coleridge.

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O Livro do Desassossego
Le Livre de l’intranquillité
IV

E do alto da majestade de todos os sonhos, ajudante de guarda-livros na cidade de Lisboa.
Et du haut de la majesté de tous les rêves, moi, aide-comptable à Lisbonne.

Fernado Pessoa Le Livre de l'Intranquillité Artgitato O Livro do Desassossego

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LETTRE DE FERNANDO PESSOA
A MARIO DE SA-CARNEIRO
CARTA A MÁRIO DE SÁ-CARNEIRO
14 MARS 1916 – 14 DE MARÇO DE 1916

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O PENÚLTIMO POEMA
L’AVANT DERNIER POEME
ALBERTO CAEIRO
1922

Também sei fazer conjecturas.
Je sais aussi faire des conjectures.
Há em cada coisa aquilo que ela é que a anima.
Il y a dans chaque chose tout ce qu’elle est et qui l’anime.

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Opiário
Fumerie 
1914
Opiário Fumerie Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française
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O que é a metafisica ?



Qu’est-ce que la métaphysique
1924
O QUE É A METAFÍSICA Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française

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Os dos Castelos
Les Châteaux
1828

os dos castellos poema de fernando pessoa les châteaux poème de Fernando Pessoa Artgitato








A Europa jaz, posta nos cotovelos:
L’Europe a posé ses coudes

De Oriente a Ocidente jaz, fitando,
De l’Est à l’Ouest, elle est là, fixant

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Poemas Inconjuntos
Poèmes Désassemblés
(1913-1915)
Alberto Caeiro

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Quero acabar entre rosas
Je veux finir entre les roses
1932
Quero acabar entre rosas Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française Je veux finir entre les roses

Quero acabar entre rosas, porque as amei na infância.
Je veux finir entre les roses, parce je les aimais dans mon enfance.

**

Soneto Já Antigo
Sonnet déjà ancien
1922
Soneto Já Antigo Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française Sonnet déjà antique

**
Tabacaria
La Bureau de tabac
1928
Fernando Pessoa Tabacaria Bureau de Tabac Artgitato Traduction Française
**
Tenho Tanto Sentimento
J’ai tant de sentiment
Tenho Tanto Sentimento J'ai tant de sentiment Fernando Pessoa Artgitato

Tenho tanto sentimento
J’ai tant de sentiment

  Que é frequente persuadir-me
Que fréquemment je me persuade
De que sou sentimental,
Que je suis sentimental,




**
Trapo
Loque
1931
Trapo Fernando Pessoa Loque Artgitato Traduction Française
**

Três Canções Mortas
Trois Chansons Mortes
1923

 **
Um Grande Português 
Un grand
Portugais
1926
Um grande português Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française Un grand Portugais Manuel Peres Vigario




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LE ROI DENIS Ier
D. DINIS

publié dans Mensagem (1934

Na noite escreve um seu Cantar de Amigo
La nuit, il écrivait ses Chansons d’Amis,
O plantador de naus a haver,
Le planteur de navires en devenir,

Cave at evening, Joseph Wright, 1774, Smith College Museum of Art, Northampton, Massachusetts

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Œuvre de Fernando Pessoa


 

 



 

Jiří Marek – Sochu Lišky Bystroušky – Statue de la Petite Renarde Rusée – Příhody lišky Bystroušky

TCHEQUIE
Česká republika
捷克共和国
République tchèque
BRNO

—-
Sculptures Tchèques
Jiří Marek

16.1.1914 Velké Meziříčí – 16.2.1993 Brno

——

 

 

Photo Jacky Lavauzelle

*

 


Sochu Lišky Bystroušky
Statue de la Petite Renarde Rusée
1993

Jiří Marek
Sculpteur – sochař



Janáčkovo náměstí

Příhody lišky Bystroušky
La Petite Renarde Rusée
Opéra de Leoš Janáček
1921 et 1923
Création le 6 novembre 1924 à Brno

Leoš Janáček
3 juillet 1854 à Hukvaldy – 12 août 1928 Ostrava
3. července 1854 – 12. srpna 1928
Leoš_Janáček

Jiří Marek Sochu Lišky BystrouškyStatue de la Petite Renarde Rusée 1993 Brno Artgitato (1) Jiří Marek Sochu Lišky BystrouškyStatue de la Petite Renarde Rusée 1993 Brno Artgitato (2) Jiří Marek Sochu Lišky BystrouškyStatue de la Petite Renarde Rusée 1993 Brno Artgitato (3) Jiří Marek Sochu Lišky BystrouškyStatue de la Petite Renarde Rusée 1993 Brno Artgitato (4) Jiří Marek Sochu Lišky BystrouškyStatue de la Petite Renarde Rusée 1993 Brno Artgitato (5)

 

Le Château d’eau de Jan Kotěra – Vodárenská věž Jana Kotěry – Třeboň – Wittingau – Тржебонь – 特热邦 – トレボン

TCHEQUIE
Česká republika
捷克共和国
Чехия
Třeboň
Wittingau – Тржебонь
特热邦 -トレボン
République tchèque
Jan Kotěra

——

 

 

Photo Jacky Lavauzelle

*

 


Třeboň – Jan Kotěra

TCHEQUIE
Česká republika
捷克共和国
Чехия
Třeboň
Wittingau – Тржебонь
特热邦 -トレボン
République tchèque

——

 

 

Photo Jacky Lavauzelle

*

 


Třeboň
Wittingau – Тржебонь
特热邦 – トレボン

Jan Kotěra
Le Château d’eau de Jan Kotěra

Vodárenská věž Jana Kotěry

Le Chateau d'eau de Jan Kotera Voderanska vez Jana Kotery Trebon Artgitato (1)

Jan Kotěra Le Chateau d'eau de Jan Kotera Voderanska vez Jana Kotery Trebon Artgitato (2)

Jan Kotěra

Le Chateau d'eau de Jan Kotera Voderanska vez Jana Kotery Trebon Artgitato (3) Jan Kotěra

Le Chateau d'eau de Jan Kotera Voderanska vez Jana Kotery Trebon Artgitato (4)

 Jan Kotěra
18/12/1871 – 17/04/1923
architecte austro-hongrois
Czech architect
professeur d’architecture moderne tchèque
české moderní architektury profesora Jana Kotěry
Jan_Kotera_1914_Bufka

MONUMENT A FERDOWSÎ – MONUMENTO A FERDOUSI – VILLA BORGHESE

ROME – ROMA
Monumento a Petar II Petrovic Niegoš
Ferdowsî – ferdowsi
LA VILLA BORGHESE

Armoirie de Rome

 Photos  Jacky Lavauzelle

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Flag_of_Lazio


La Villa Borghèse
Villa Borghèse

Abū-l-Qāsim Manṣūr ibn Ḥasan al-Ṭūṣī
أبو القاسم منصور بن حسن طوسی
Ferdowsî
Monumento a Ferdousi
940- vers 1020

Poète Persan

VIE DE FIRDOUSI
Abou’l Kasim Firdousi

ornementation de Paul Zenker
Le Livre de Feridoun et de Minoutchehr
Traduction par Jules Mohl
H. Piazza – L’édition d’art, 1923 (pp. XIII-XXVII).

« ABOU’LKASIM MANSOUR, appelé Firdousi, naquit à Schadab, bourg des environs de Thous. Aucun auteur ne mentionne l’année de sa naissance, mais les passages du Livre des Rois où le poëte parle de son âge portent à croire qu’il serait né en 329 de l’hégire.
Son père s’appelait Maulana Ahmed, fils de Maulana Fakhr-eddin al-Firdousi : il était d’une famille de Dihkans et propriétaire d’une terre située sur le bord d’un canal dérivé de la rivière de Thous. Il donna à son fils une éducation savante, car Firdousi était non seulement assez versé dans la langue arabe pour que ses poésies arabes excitassent l’admiration des beaux esprits de la cour de Bagdad, mais encore il savait le pehlewi, langue dont la connaissance dans les provinces orientales de la Perse était dès lors fort rare.
On sait peu de chose sur l’enfance du poëte, si ce n’est qu’il avait des habitudes studieuses et retirées ; son plus grand plaisir était de s’asseoir sur le bord d’un canal d’irrigation qui passait devant la maison de son père. Or, souvent la digue qui était établie dans la rivière de Thous pour faire affluer Veau dans le canal, et qui n’était bâtie qu’en fascines et en terre, était emportée par les grandes eaux, de sorte que le canal demeurait à sec : l’enfant se désolait et ne cessait de souhaiter que la digue fût construite en pierre et en mortier, se doutant peu que ce souhait influerait puissamment sur sa destinée et, grâce à lui, pourrait s’accomplir, mais seulement après sa mort.
À part cela, on ne sait rien de la vie de Firdousi jusqu’à son âge mûr, si ce n’est qu’il se maria, sans doute avant l’âge de vingt-huit ans, car il perdit son fils unique âgé de trente-sept ans, lorsqu’il était lui-même dans sa soixante-cinquième année. »

MONUMENT A FERDOWSÎ - MONUMENTO A FERDOVSI - VILLA BORGHESE artgitato Rome Roma 1

VIE DE FIRDOUSI
Abou’l Kasim Firdousi
ornementation de Paul Zenker
Le Livre de Feridoun et de Minoutchehr
Traduction par Jules Mohl
H. Piazza – L’édition d’art, 1923 (pp. XIII-XXVII)

« Il commença son grand travail à l’âge de trente-six ans. Il travaillait au commencement en secret, parce qu’il cherchait un patron à qui il pût dédier son ouvrage et qui fût en état de le récompenser. Mais lorsqu’on sut, dans la ville de Thous, de quoi il s’occupait, tout le monde voulut entendre les parties du poème qu’il avait déjà composées. Abou-Mansour, le gouverneur de la province, lui demanda de les réciter en sa présence, les admira et pourvut dès ce moment à tous les besoins du poêle, ce qui paraît indiquer que son patrimoine était ou épuisé ou insignifiant. Firdousi se montra reconnaissant des bienfaits qu’il avait reçus d’Abou-Mansour : il les a rappelés dans sa préface, écrite après la mort de son protecteur. On ne sait pas exactement quelles sont les parties du livre qu’il a mises en vers pendant cette époque de sa vie, car il ne paraît pas avoir suivi l’ordre chronologique dans son travail ; mais un des derniers épisodes qu’il doit avoir composés à Thous est sans doute l’histoire de Siawusch qu’il termina dans la cinquante-huitième année de sa vie. C’est l’année même où Mahmoud succéda à son père (387 de l’hégire) ; mais le poëte ne le connaissait pas encore car il ne prononce pas le nom de Mahmoud à cette occasion.« 

MONUMENT A FERDOWSÎ - MONUMENTO A FERDOVSI - VILLA BORGHESE artgitato Rome Roma 2

VIE DE FIRDOUSI
Abou’l Kasim Firdousi
ornementation de Paul Zenker
Le Livre de Feridoun et de Minoutchehr
Traduction par Jules Mohl
H. Piazza – L’édition d’art, 1923 (pp. XIII-XXVII)

C’était l’époque brillante de sa vie : il avait conquis la faveur du prince le plus magnifique de son temps, tous les matériaux que Mahmoud avait réunis étaient à sa disposition, et le moyen de réaliser le rêve de toute sa vie, l’achèvement de sa grande entreprise, se trouvait entre ses mains. Ce fut pour lui une véritable ivresse de bonheur dont on trouve l’écho dans Véloge de Mahmoud placé dans F introduction du Livre des Rois. Le sultan lui remit le Seïr-al-Molouk et lui fit préparer un appartement attenant au palais et qui avait une porte de communication avec son jardin privé. Les murs de son appartement furent couverts de peintures représentant des armes de toute espèce, des chevaux, des éléphants, des dromadaires et des tigres, des portraits de rois et de héros. Il avait en outre pourvu à ce que personne ne put interrompre le poëte dans son travail, en défendant la porte à tout le monde, à l’exception de son ami Ayaz et d’un esclave chargé du service domestique. Protecteur éclairé, il professait pour lui une admiration passionnée et se plaisait à dire qu’il avait souvent entendu ces mêmes histoires, mais que la poésie de Firdousi les rendait comme neuves et qu’elle inspirait aux auditeurs de l’éloquence, de la bravoure et de la pitié.
Les épisodes du poëme avaient été lus au roi à mesure que le conteur les achevait, et la récitation en était accompagnée de musique et de danse. On trouve dans un des plus anciens manuscrits du Livre des Rois un dessin intéressant qui représente Firdousi déclamant des vers devant le sultan. Le poëte est assis sur un coussin et devant lui est placé son manuscrit sur une espèce de pupitre. En face de lui se tiennent des musiciens qui raccompagnent et des danseuses qui, se conformant au rythme de la musique, s’inclinent à droite et à gauche.
Mahmoud ordonna à Khodjah Hasan Meïmendi de payer au poêle mille pièces d’or pour chaque millier de distiques ; mais Firdousi demanda à ne recevoir qu’à la fin du poëme la somme totale qui lui serait due, dans Vintention d’accumuler un capital suffisant pour pouvoir bâtir la digue dont il avait tant désiré la construction dans son enfance.
Il était alors dans la première vogue de la faveur, et ne pensait pas qu’elle put changer, ne soupçonnant pas les haines de toute espèce dont il allait être l’objet. Le bienveillant accueil que lui avaient réservé les personnes les plus considérables de la cour n’avait point tardé, en effet, à exciter la jalousie de Hasan Meïmendi qui bientôt commença à refuser au poëte tout ce qu’il demandait, en sorte qu’il était réduit à se plaindre de manquer de pain, alors qu’il consacrait tout son temps au travail ordonné par le sultan. Il semble avoir eu à lutter presque continuellement contre le besoin ; ses plaintes sur la vie qu’il menait à la cour sont des plus amères.
Cependant sa gloire s’étendait rapidement ; à peine un épisode de son poëme était-il achevé que des copies s’en répandaient dans toute la Perse, et les plus généreux parmi les princes qui les recevaient, envoyaient en retour des présents à Fauteur. Mais ces ressources accidentelles ne l’enrichissaient pas, car comptant sur la promesse de Mahmoud il dépensait à mesure et n’amassait point. Quelques-uns de ces témoignages de sympathie fournirent même un nouvel aliment aux haines auxquelles il était exposé. Ainsi une copie de l’épisode de Rustem et d’Isfendiar ayant été apportée à Rustem, fils de Fakhr-al-daulet le Dilémite, celui-ci donna au porteur cinq cents pièces d’or et envoya le double de cette somme au poëte, l’invitant en outre à venir chez lui où il lui promettait la plus gracieuse réception. Hasan Meïmendi ne manqua pas de faire à Firdousi un crime d’avoir accepté cette faveur d’un prince dont Mahmoud était l’ennemi politique et religieux.
De leur côté, poètes et scribes, jaloux de Firdousi, discutaient, dans les assemblées du sultan, le mérite de son œuvre, allant jusqu’à prétendre qu’il était entièrement dû à l’intérêt des sources, et nullement à son talent poétique. Ses amis le défendaient, et, après une de ces discussions, le sultan et ses familiers convinrent de lui donner un épisode qu’il mettrait en vers le jour même, de façon à ce qu’on pût voir, par la comparaison de sa composition avec l’original, ce qui appartenait au mérite de l’exécution. On choisit l’histoire du combat de Rustem avec Aschkebous Keschani. Firdousi rédigea, le jour même, sa version poétique, telle qu’on la trouve dans le Livre des Rois, la lut devant le sultan, et excita l’étonnement et l’admiration de tous.
Au milieu de ces ennuis, de ces embarras et de ces afflictions, auxquelles la mort de son fils joignit une cuisante douleur, Firdousi passa à peu près douze ans à la cour et y acheva son ouvrage. Il le fit présenter à Mahmoud par Ayaz et le souverain ordonna à Hasan Meïmendi d’envoyer au poète autant d’or qu’un éléphant en pourrait porter ; mais Hasan persuada à son maître que c’était trop de générosité et qu’une charge d’argent suffirait. Il fit mettre soixante mille direms d’argent dans des sacs et les fil porter à Firdousi par Ayaz. Le poêle était, dans ce moment, dans son bain; quand il en sortit, ne doutant pas que ce fut de l’or, il reçut le présent avec grande joie ; mais s’étant aperçu de son erreur, il entra dans une violente colère et dit à Ayaz que ce n’était pas là ce que le roi avait ordonné de faire ; Ayaz lui conta tout ce qui s’était passé entre Mahmoud et Hasan. Firdousi lui donna alors vingt mille pièces et autant au baigneur ; puis il prit chez un marchand qui se tenait à la porte du bain un verre de fouka (espèce de bière), le but et le paya avec les vingt mille pièces qui lui restaient, en disant à Ayaz de retourner chez le sultan et de lui dire que ce n’était pas pour gagner de l’argent et de l’or qu’il s’était donné tant de peine.
Ayaz rapporta les paroles du poëte à Mahmoud qui reprocha à Hasan de lui avoir fait commettre une injustice. Hasan répondit que tout présent du roi, que ce fut une pièce d’argent ou cent mille, devait être également bien reçu ; et que s’il donnait une poignée de poussière, on devrait la placer sur ses yeux comme un collyre. Il réussit à détourner sur Firdousi la colère du sultan, de sorte que Mahmoud déclara que le lendemain matin il ferait jeter le poëte sous les pieds des éléphants.
Le condamné fut tôt informé de ce qui était advenu et il passa la nuit dans l’anxiété. Le lendemain matin il se rendit dans le jardin particulier que Mahmoud devait traverser pour se rendre à un pavillon où il avait l’habitude de faire ses ablutions : là, il se jeta aux pieds du prince, déclarant que ses ennemis l’avaient calomnié et qu’il avait manqué de respect au sultan en refusant son présent. Il réussit à apaiser la colère royale, mais ne pardonnant pas au sultan la manière dont il avait été traité, il se détermina sur-le-champ à quitter Ghaznin. Rentré chez lui, il prit les brouillons de quelques milliers de vers qui n’étaient pas encore copiés et les jeta au feu; puis, s’étant rendu à la grande mosquée de Ghaznin, il écrivit sur le mur, à l’endroit où son ancien protecteur avait l’habitude de se placer, les deux distiques suivants :
« La cour fortunée de Mahmoud, roi de Zaboulistan, est comme une mer. Quelle mer ! on n’en voit pas le rivage. Quand j’y plongeais sans y trouver de perles, c’était la faute de mon étoile et non celle de la mer. »
Ensuite il donna à Ayaz un papier scellé, le pria de le remettre au sultan après un délai de vingt jours, l’embrassa et partit, un bâton à la main et couvert d’un manteau de derwisch. Vingt jours après, Ayaz remit la lettre qui lui avait été confiée au sultan qui, au lieu du placet qu’il pensait y trouver, lut une satire cinglante dont il fut longtemps parlé.
Mahmoud entra en fureur à cette lecture et envoya des hommes à pied et à cheval à la poursuite du fugitif, en promettant cinquante mille dinars à celui qui le ramènerait ; mais celui-ci avait une trop grande avance et F on ne réussit pas à le rejoindre.
Il s’était d’abord dirigé vers le Mazenderan, province qui était alors sous l’autorité de Kabous, prince du Djordan, il commença à y corriger le Livre des Rois et y composa en plus une pièce de vers en l’honneur de Kabous qui, sollicité par le poëte de l’autoriser à lui présenter son ouvrage, avait promis de pourvoir à tous ses besoins. Mais, ayant appris dans quelles conditions son hôte avait quitté Ghaznin, le prince se trouva fort embarrassé. Les considérations politiques l’emportèrent dans son esprit : il fit au poëte un magnifique présent mais le pria de choisir un autre séjour.
Firdousi se rendit à Baghdad. Il n’y connaissait personne et resta quelques jours dans la solitude jusqu’à ce qu’un marchand lui offrit sa maison, le consolant et lui faisant espérer du repos puisqu’il était arrivé « à l’ombre du maître des croyants. » Le vizir ou khalife, que connaissait ce marchand, s’intéressa au poëte errant, le recueillit chez lui et conta son histoire au khalife Kader-billah. Celui-ci, à son tour, voulut voir Firdousi qui lui remit un poëme en mille distiques en son honneur. Le Khalife le traita avec beaucoup de bonté, quoiqu’il trouvât mal qu’un croyant eût composé un ouvrage en l’honneur des anciens rois de Perse et des adorateurs du feu. Le coupable, pour faire oublier sa faute, se crut obligé d’écrire un nouveau poëme sur un thème emprunté au Koran ; il choisit Iousouf et Zouleïkha, et eut bientôt achevé ce nouvel ouvrage qui contenait neuf mille distiques en persan, composés dans le même mètre que le Livre des Rois.
Mahmoud avait cependant reçu la nouvelle de l’accueil fait au poëte à Baghdad. Il adressa au khalife une lettre menaçante pour demander que le fugitif lui fût livré. Cette demande décida probablement Firdousi à partir pour Ahivaz, capitale de la province d’Irak-Adjemi, et il dédia au gouverneur de cette province son poëme de Iousouf et Zouleïkha. De là, il se rendit dans le Kouhistan, dont le gouverneur, Nasir-Lek, lui était très dévoué. Nasir-Lek alla solennellement à sa rencontre et le reçut très gracieusement. Le voyageur lui confia qu’il allait écrire un livre pour éterniser le souvenir de son sort et de l’injustice du sultan ; mais Nasir, qui était ami de Mahmoud, l’en dissuada ; il lui donna cent mille pièces d’’argent en le conjurant de ne plus écrire, ni parler ou faire parler contre le sultan. Firdousi finit par lui livrer ce qu’il avait déjà rédigé, en lui permettant de le détruire, et composa une pièce de vers dans laquelle il déclara que son intention avait été de flétrir le nom, de ses ennemis, mais qu’il y renonçait sur la demande de son protecteur, et qu’il remettait son sort entre les mains de Dieu. Nasir-Lek adressa alors une lettre à Mahmoud dans laquelle il lui reprocha ses torts envers le poète disgracié, justifiant ainsi la satire que lui avaient inspiré les indignités qu’il avait subies.
Le messager qui portait cette lettre à Ghaznin y serait arrivé le jour même où, le sultan venait de lire, sur le mur de la mosquée, les deux distiques que Firdousi y avait écrits avant son départ. Mahmoud, déjà ébranlé par ces vers, le fut encore davantage par le message de Nasir-Lek. Les amis que le poëte avait laissés à Ghaznin saisirent cette occasion pour représenter au sultan tout le tort qu’il se faisait par cette persécution, dont ses ennemis ne manque- raient pas de se servir pour flétrir sa mémoire. Ils parvinrent à provoquer une telle colère du maître contre Hasan Meïmendi qu’incontinent il condamna à mort le courtisan qui avait abusé de sa bonne foi.
Firdousi, soit qu’il eût appris le changement des sentiments du sultan à son égard, soit que, bravant les risques qu’il courait, il eût voulu revoir son pays natal, avait regagné Thous. Mais, un jour, en passant par le bazar, il rencontra un enfant qui chantait les vers suivants de sa satire :
« Si le père du roi avait été un roi, son fils aurait mis sur ma tête une couronne d’or. »
Le vieillard en fut saisi, poussa un cri et s’évanouit. On le rapporta dans sa maison où il mourut, l’an 411 de l’hégire ; il était âgé de quatre-vingt-trois ans, et avait depuis onze ans achevé son ouvrage.
On l’enterra dans un jardin ; mais Abou’lkasim Gonrgani, principal scheikh de Thous, refusa de lire les prières sur sa tombe, en alléguant que le poëte avait abandonné la bonne voie et consacré son temps à parler des mécréants et des adorateurs du feu. La nuit suivante, il eut pourtant un rêve dans lequel il vit Firdousi au Paradis, vêtu d^une robe verte et portant sur la tête une couronne d’émeraudes. Il en demanda la raison à l’ange Rithwan et l’ange lui récita un tétrastique du Livre des Rois qui avait fait admettre le poëte. Après son réveil, le scheikh se rendit sur sa tombe et y prononça les prières.

Krišjāņa Barona – Chansons folkloriques lettonnes – Latvju dainas – Krišjānis Barons

Krišjāņa Barona
Krišjānis Barons
1835-1923
chansons folkloriques lettonnes

Kataloga veidā


(kā šķirstot grāmatu)

Le père des daïnas

P 331

 

Catalogue
(Livre à feuilleter)

Traduction Jacky Lavauzelle


I
Par dziesmām un dziedāšanu (8512 )
à chanter

LD4  (n°4/8512)
Dievs dod man tà nomirt,
Dieu aide moi à mourir
 
 Kà nomira tēvs, māmiņa:
Comme est mort mon père, ma mère :
Dziedot man tēvs nomira,
Moi mon père est mort en chantant,
 Dziedot mira māmuliņa.
En chantant ma mère est morte .

*

LD 115 (n°115-0/8512)
Labak dziedu, ne kà raudu,
Chantez mieux, pas comme si vous pleuriez,
Lai raud mana ļauna diena,
Les cris gardez-les pour les mauvais jours,
 Lai raud mana ļauna diena
Les cris gardez-les pour les mauvais jours,
Aizkrāsnêi guledama.
Jetez-les dans le poêle.

*

LD1080 (n°1080-0/8512)
Jaunas sievas, ko gaidat?
Nouvelles épouses, qu’attendez-vous ?
Puškojieti pirtas jumtu;
Préparez votre toit ;
Tà Dieviņis jūs puškos
Vous recevrez en bouquet
 Ar dēliemi, ar meitàm.
Des fils et des filles.

*

LD3902 (n°3902-0/8512)
Māmiņai daudz bērniņu,
La mère a eu de nombreux bébés,
 Ne visiem viena laime:
Le bonheur ne sera pas pour tous :
Cits nes zeltu, sudrabiņu,
Un autre sera plein d’or et d’argent,
Cits staigaja raudadams.
Un autre marchera en pleurant.

*

LD 26763
Gara diena bez saulites,
Si long dure un jour sans soleil
Vēl garaka bez maizites;
Plus encore sans nos petits pains ;
 Gara diena bez māmiņas,
Si long dure un jour sans mère
Vēl garaka bez tautieša.
Plus encore sans compagne.

*
LD27327-0
Burbulaiņa upe tek
Coule la rivière
 No kalniņa lejiņâ;
De la colline à la vallée ;
 Tà aiztek mans mūžiņis
Coule ma vie
  Dziļâ kapa aliņâ.
Vers une tombe profonde.

*

LD27904-0
Ai, naudiņa, naudas māte,
O, petite pièce donnée par ma mère,
Nekrīt’ ceļa maliņâ;
Ne t’égare pas sur la route ;
Krīt’ vadziņas galiņâ,
Retombe si tu veux dans la tranchée du champ
Lai saņem arajiņš.
Du paysan.

*

Viens gans nomira,
Un berger est mort
  Citi gani raudāja,
Les autres bergers pleurent,
  Cūka raka kapu
Tous creusent une tombe
  Augstā kalnā.
Dans la haute montagne.

*********************
Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO
*********************
Krišjānis Barons

Le Brave soldat Chvéïk Chapitre I Traduction Française Jaroslav Hašek Dobrý voják Švejk

LITTERATURE TCHEQUE
Česká literatura

Jaroslav Hašek
1883-1923

Dobrý voják Švejk
Le Brave Soldat Chvéïk
1921-1923

Jaroslav Hašek Dobrý voják Švejk Le Brave Soldat Chvéïk Chapitre 1Traduction Artgitato

Osudy dobrého vojáka
Švejka za světové války
Jaroslava Haška

 

1. kapitola
Chapitre 1
Zasáhnutí dobrého vojáka ŠŠvejka do světové války
Intervention du Brave Soldat Chvéïk dans la Grande Guerre

„ »Tak nám zabili Ferdinanda, »“ řekla posluhovaèka panu ŠŠvejkovi, který opustiv před léty vojenskou služžbu, kdyžž byl definitivně prohlᚹen vojenskou lékařskou komisí za blba, žživil se prodejem psů, oššklivých nečistokrevných oblud, kterým padělal rodokmeny.
« Ils ont tué notre Ferdinand ! »  déclara  la logeuse de Chvéïk, qui, il y a des années, avait arrêté son service militaire, après avoir été
déclaré profondément demeuré par la commission médicale, et qui, désormais, gagnait sa vie en vendant des chiens,  bâtards monstrueux, dont il en sortait des pedigrees.

 Kromě tohoto zaměstnání byl stižžen revmatismem a mazal si právě kolena opodeldokem.
En dehors de cette occupation, il soignait aussi les rhumatismes et, justement, à ce moment-là, il massait les genoux avec du baume d’opodeldoch [à base de savon, d’ammoniaque, de camphre et d’alcool].

„Kterýho Ferdinanda, paní Müllerová?“ otázal se ŠŠvejk,nepřestávaje si masírovat kolena, « „já znám dva Ferdinandy.
« Quels Ferdinand, Mme Müller ? » demanda  Chveïk, en massant ses genoux, « J’en connais deux Ferdinand ! »
Jednoho, ten je sluhou u drogisty Průšši a vypil mu tam jednou omylem láhev nějakého mazání na vlasy, a potom znám ješště Ferdinanda Kokoššku, co sbírá ty psí hovínka.  »
L’un est le commis du droguiste Prousha chimiste, c’est celui qui a bu par erreur une lotion capillaire. Et puis il y a l’autre, le Ferdinand Kokoska, celui qui enlève les crottes de chien.
Vobou není žžádná šškoda.“
Si c’est l’un de ces deux gars-là, il n’y a pas grand dommage ! »

« Ale, milostpane, pana arcivévodu Ferdinanda, toho z Konopišště, toho tlustýho, nábožžnýho. »
« Oh non, monsieur ! C’est Ferdinand, l’archiduc , celui du château de Konopiště [à Benešov, à quelques kilomètres au sud-est de Prague] Vous voyez bien ! »

« „Ježžíššmarjá,“ vykřikl ŠŠvejk, „to je dobrý. A kde se mu to, panu arcivévodovi, stalo?“ »
« Jésus Marie ! » s’écria Chvéïk, « mais où est-ce donc arrivé à l’archiduc ?« 

 « Práskli ho v Sarajevu, milostpane, z revolveru, vědí. Jel tam s tou svou arcikněžnou v automobilu » 
«Ils l’ont assassiné à Sarajevo, monsieur, avec un revolver, vous voyez ! Il y était avec son archiduchesse en voiture »
« Tak se podívejme, paní Müllerová, v automobilu.  »
« 
Voyons, Mme Müller, dans une voiture ? »
Jó, takovej pán si to mùže dovolit, a ani si nepomyslí, jak taková jízda automobilem mùže nešt’astně skončit.
Ouais, un monsieur comme lui peut se le permettre, mais il n’a jamais imaginé qu’il pouvait finir ainsi.
A v Sarajevu k tomu, to je v Bosně, paní Müllerová.
Et à Sarajevo, par dessus le marché. C’est en Bosnie, Madame Müller !

To udìlali asi Turci.
C’est probablement un fait des Turcs.
My holt jsme jim tu Bosnu a Hercegovinu neměli brát.
Vous savez, nous avons pris la Bosnie et l’Herzégovine. Nous aurions dû  nous abstenir de les prendre.
Tak vida, paní Müllerová.

Vous voyez, madame Müller.
On je tedy pan arcivévoda už na pravdì boží.
 L’archiduc est donc déjà en route vers la vérité de Dieu.
Trápil se dlouho? »
A-t-il souffert longtemps ? « 

« Pan arcivévoda byl hned hotovej, milostpane.
«Monsieur l’archiduc est maintenant mort, monsieur.
To vědí, že s revolverem nejsou žádný hračky.

Vous voyez, les revolvers ne sont pas seulement des jouets.
Nedávno taky si hrál jeden pán u nás v Nuslích s revolverem a postřílel celou rodinu i domovníka, kterej se šel podívat, kdo to tam střílí ve třetím poschodí »
Récemment,  un monsieur jouait ici à Nusle avec un revolver et a liquidé toute la famille, avec le gardien, qui venait voir ce qui provoquait ce boucan au troisième étage « 

  « Někerej revolver, paní Müllerová, vám nedá ránu, kdybyste se zbláznili. 
J’ai vu des revolvers, Mme Müller, qui ne partent pas.
Takovejch systémù je moc.
Le système s’est enraillé.

Ale na pana arcivévodu si koupili jisté nìco lepšího, a taky bych se chtěl vsadit, paní Müllerová, že ten člověk, co mu to udělal, se na to pěkně voblík.
Mais pour Son Altesse Impériale il faut acheter certainement  quelque chose de mieux, et je pourrais parier, Mme Müller, que l’homme qui lui a fait ça, s’est habillé en conséquence.
To vědí, střílet pana arcivévodu, to je moc těžká práce.
Vous savez, tirez sur l’archiduc, c’est un travail très dur.
To není, jako když pytlák střílí hajnýho.

Ce n’est pas comme un braconnier qui tire sur un garde-chasse.
Tady jde vo to, jak se k němu dostat, na takovýho pána nesmíte jít v nìjakých hadrech.

La question est de savoir comment l’atteindre comme ça,  monsieur ne doit pas se promener comme n’importe qui.
To musíte jít v cylindru, aby vás nesebral dřív policajt. »   
Il faut se mettre le cylindre, sinon la police ne tarde pas à vous mettre le grappin dessus. »

« Vono prej jich bylo víc, milostpane » 
« Pensez ! monsieur ! Ils se sont mis à plusieurs. »

« To se samo sebou rozumí, paní Müllerová, » řekl Švejk, konče masírování kolen, « kdybyste chtěla zabít pana arcivévodu, nebo císaře pána, tak byste se jistě s někým poradila.
« C’est tout à fait raisonnable, Mme Müller« , dit Chvéïk, finissant de masser ses genoux,  » Si vous voulez tuer l’archiduc ou sa Majesté l’Empereur, vous auriez certainement besoin de conseils. »
Víc lidí má víc rozumu.
Plus on est nombreux plus on réfléchit.
Ten poradí to, ten vono, a pak se dílo podaří, jak je to v tej naší hymně.
Celui-ci vous conseille ceci, cet autre cela et ainsi l’ouvrage se fait comme le chante notre hymne national.
Hlavní věcí je vyčíhat na ten moment, až takovej pán jede kolem.
La principale chose dans cette affaire est de choisir le moment opportun.
Jako, jestli se pamatujou na toho pana Lucheniho, co probod naši nebožku Alžbětu tím pilníkem.
Voyez, vous vous rappelez de ce monsieur Luigi Lucheni l’assassin de notre impératrice Sissi.

***
TRADUCTION Jacky Lavauzelle
ARTGITATO

 

Le Brave Soldat Chvéïk – Avant-Propos -Traduction Française (Dobrý voják Švejk) de Jaroslav Hašek

LITTERATURE TCHEQUE
Česká literatura

Jaroslav Hašek
1883-1923

Dobrý voják Švejk
Le Brave Soldat Chvéïk
1921-1923

Osudy dobrého vojáka
Švejka za světové války
Jaroslava Haška

ÚVOD Jaroslav Hašek Le Brave Soldat Chvéïk Avant-Propos Traduction Artgitato

 

ÚVOD
AVANT-PROPOS

Veliká doba žžádá velké lidi.
Les grands moments exigent des gens formidables.
Jsou nepoznaní hrdinové, skromní,bez slávy a historie Napoleona.
Il y a ces inconnus, des héros sans prétention, sans la notoriété et l’histoire de Napoléon.
Rozbor jejich povahy zastínil by i slávu Alexandra Macedonského.
Pourtant, l’analyse de leur caractère pourrait occulter la gloire-même d’Alexandre.
Dnes můžžete potkat v pražžských ulicích oššumělého mužže, který sám ani neví, co vlastně znamená v historii nové velké doby. Aujourd’hui, vous pouvez rencontrer dans les rues de Prague un homme débraillé qui ne sait même pas lui-même ce qu’il signifie dans l’histoire de la grande époque nouvelle.
Jde skromné svou cestou, neobtěžuje nikoho, a není t龞 obt잾o ván žžurnalisty kteří by ho prosili o interview.
Il suit son chemin humblement, sans déranger personne, sans que ses œuvres ne soient mentionnées par les journalistes qui ne  lui demandent aucune interview.
Kdybyste se ho otázali, jak se jmenuje, odpověděl by vám prostince a skromně: „Já jsem ŠŠvejk . . .“
Si vous lui demandiez quel était son nom, il vous répondait avec simplicité enfantine et avec modestie  : « Je suis Chvéïk … »

A tento tichý skromný oššumělý mužž jest opravdu ten starý dobrý voják ŠŠvejk, hrdinný, statečný, který kdysi za Rakouska
byl v ústech vššech občanů Českého království a jehožž sláva
nezapadne ani v republice.
Et cet homme tranquille et sans prétention n’est en effet que le vieux brave soldat Chvéïk,  héroïque, courageux ; homme dont le nom, sous l’Autriche, était dans toutes les bouches des citoyens du royaume de Bohème et dont la célébrité ne se faiblira pas non plus dans notre nouvelle République.

Mám velice rád toho dobrého vojáka sŠvejka, a podávaje jeho osudy za světové války jsem přesvìdčen, žže vy vššichni budete
sympatizovat s tím skromným, nepoznaným hrdinou.
J’aime vraiment beaucoup ce bon soldat Chvéïk, et en vous contant son sort pendant la Grande Guerreje sais que toutes les sympathies seront avec ce modeste héros méconnu. 
On nezapálil chrám bohyně v Efesu, jako to udělal ten hlupák Hérostrates, aby se dostal do novin a šškolních čítanek.
Il n’a pas, lui, avec sa torche, mis le feu au Temple de la Déesse Artémis à Ephèse, comme l’a fait Erostrate, cet idiot, pour entrer dans les journaux et la postérité.

A to stačí.
Et cela suffit.

AUTOR
L’AUTEUR

1923

****

Francouzský Překlad
TRADUCTION Française Jacky Lavauzelle
ARTGITATO

LISBON REVISITED 1923 Fernando PESSOA Traduction Française

LITTERATURE PORTUGAISE
Literatura Português
Poésie Portugaise- poesia português
FERNANDO PESSOA
1888-1935

 

Álvaro de Campos
(Heterónimo de Fernando Pessoa
Hétéronyme de Pessoa)

**

Lisbon revisited 1923 Fernando Pessoa Artgitato Traduction Française

LISBON REVISITED 1923

**

Não : não quero nada.
Non, je ne veux rien.
Já disse que não quero nada.
Je vous ai dit que je ne veux rien.

*
Não me venham com conclusões!
N’en venez pas aux conclusions!
A única conclusão é morrer.
La seule conclusion c’est mourir.
Não me falem em moral!
Ne me parlez pas de morale !
Tirem-me daqui a metafísica! 
Ne me parlez pas de métaphysique !
Não me apregoem sistemas completos,
não me enfileirem conquistas 

Ne me noyez pas de
systèmes complets,
 ne me rabâchez pas les conquêtes
 Das ciências (das ciências, Deus meu, das ciências!) — 
  de la science (de la science, mon Dieu ! De la science !)
Das ciências, das artes, da civilização moderna! 
De la science
, de l’art, de la civilisation moderne!

*

Que mal fiz eu aos deuses todos?
Quel mal ai-je fait aux dieux ?

*

Se têm a verdade, guardem-na!
Si vous avez la vérité, gardez-là !

*

Sou um técnico, mas tenho técnica só dentro da técnica.
Je suis un technicien, mais je n’ai de la technique
que dans la technique.
 Fora disso sou doido, com todo o direito a sê-lo.
En dehors, je suis fou, avec le droit de l’être.
Com todo o direito a sê-lo, ouviram?
Avec le droit de l’être, vous entendez?

*

Não me macem, por amor de Deus!
Ne me dérangez pas, pour l’amour de Dieu!

*

Queriam-me casado, fútil, quotidiano e tributável?
Ils voulaient me marier, futile, quotidien et imposable ?
Queriam-me o contrário disto, o contrário de qualquer coisa?
Ils me voulaient le contraire de ça, à l’opposé de quelque chose?
Se eu fosse outra pessoa, fazia-lhes, a todos, a vontade.
Si je devais être un autre, je le ferais, à tous, suivant votre volonté.
Assim, como sou, tenham paciência!
Donc, comme je suis, soyez patient !
Vão para o diabo sem mim,
Allez au diable sans moi,
Ou deixem-me ir sozinho para o diabo!
Ou laissez-moi aller seul au diable !
Para que havemos de ir juntos?
Pourquoi y aller ensemble ?

*

Não me peguem no braço!
Ne me prenez pas le bras !
Não gosto que me peguem no braço. Quero ser sozinho.
Je n’aime pas que l’on me prenne mon bras. Je veux être seul.
Já disse que sou sozinho!
Je l’ai dit que je sois seul !
 Ah, que maçada quererem que eu seja da companhia!
Oh, quel ennui que je serve de compagnie !

*

Ó céu azul — o mesmo da minha infância —
O ciel bleu le même que dans mon enfance
Eterna verdade vazia e perfeita!
La vérité éternelle vide et parfaite !
 Ó macio Tejo ancestral e mudo,
Oh doux Tage  ancestral et muet,
Pequena verdade onde o céu se reflete!
Petite vérité où le ciel se reflète!
 Ó mágoa revisitada, Lisboa de outrora de hoje!
O blessure revisitée, de Lisbonne d’autrefois, d’aujourd’hui!
 Nada me dais, nada me tirais, nada sois que eu me sinta.
Vous ne me donnez rien, vous ne m’en prendrez pas plus, vous n’êtes rien que je puisse ressentir !

*

Deixem-me em paz! Não tardo, que eu nunca tardo…
Laissez-moi tranquille! Pas tard, jamais je ne tarde
 E enquanto tarda o Abismo e o Silêncio quero estar sozinho!
Et tandis que tardent l’Abîme et le Silence, je souhaite rester seul !

*****
Traduction Jacky Lavauzelle
ARTGITATO

Régis GIGNOUX : L’APPEL DU CLOWN (1923 au Théâtre du Grand Guignol)

Régis GIGNOUX
L’APPEL DU CLOWN
(Théâtre du Grand Guignol – le 23 mars 1923)

Régis Gignoux L'appel du clown 1923

 

 

 

 

 

 

BIM-BOUM-BEM-BAM-BOM-BÂOOOOOOOOO !!!!!!!

 L’Appel de la forêt, The Call of the Wild, le livre de Jack London sort en 1903 ; le livre suit les pattes du chien Buck qui finira par revenir vers une meute dans le Yukon et devenir enfin un mâle dominant. Notre mâle dominant se nomme Punch (M Gobet) et il attire la Dame (Jane Ader) dans L’Appel du clown, la pièce de théâtre en un acte jouait pour la première fois à Paris en 1923. Le Yukon glacial devient le Théâtre du Grand Guignol.

 

Gignoux L'appel du clown

Comme le loup dans sa forêt du nord-Canada, Punch lance un cri bestial et sauvage.  Ce cri peut enflammer un cœur désespéré. Un moment de fascination extrême et c’est tout le mondequi  bascule. Ce n’est pas son talent, son physique de clown, ses instruments, «-Non, c’est au moment où la salle éclate de rire, se tord en tire-bouchon que j’ai vu votre amoureuse, toute pâle, l’œil fixe, la narine dilatée, les lèvres tremblantes…au moment où vous reculez du piano, comme poursuivi par une bête, et où vous faites « bim-bem-bim-bâo » !  Je ne sais pas faire…ça commence par un cri de chien à la patte cassée, puis c’est un barrissement d’éléphant, un carillon d’amygdales, et votre voix finit en borborygme… »Bim-bem-boum-be-bi »…(Il tousse) Non…Je ne sais pas faire… (Le Monsieur) – Bim-boum-bem-bam-bom-bâooo ! (Punch) – Merveilleux ! Vous savez, vous ! Vous faites ça à volonté, sans effort…Je vous envie…Parce que j’ai essayé …Oui, monsieur…Elle a voulu que j’essaie…elle a exigé…Tout un après-midi, j’ai cherché, j’ai travaillé, j’ai gargouillé. Vous riez ! …Je vous comprends…Résultat : je me suis déchiré la gorge, avec inflammation de la glotte. (Le Monsieur) » (Scène 1)

Ce Bim-boum-bem-bam-bom-bâoo, c’est l’inexplicable, l’incompréhensible. Le trou noir de l’intelligence. Ce rien qui fait perdre tous les moyens. Cet appel de la forêt. Ce retour de l’animalité. L’appel du loup pour que la meute se forme et que les couples s’accouplent. Ce moment d’étrangeté qui accapare le réel et le domine, le soumet. Le Monsieur pose la question à Punch, le clown : «  Mais, entre nous, pourquoi est-ce bim-bada-boum qui l’a ravie, qui l’a affolée, qui l’a appelée ? Elle oublie tout, elle méconnaît tout pour répondre, à cet appel d’un inconnu, d’un rigolo, l’appel du clown…Comprenez-vous cette attraction, ce mystère, ce symbole ? » (Le Monsieur, Scène 1)

Régis Gignoux théâtre du Grand Guignol

Régis Gignoux se réfère au plus célèbre des clowns, Grock, le clown suisse, qui, dès 1922 fait sa tournée en France à L’Empire. Il utilise pour habiller Punch la même grande veste et le pantalon trop large qu’utilisait parfois Grock dans ses spectacles. Comme lui, il est reconnu et parcourt le monde entier. Il ne peut proposer à le Dame amoureuse qu’un rendez-vous dans plusieurs mois, plusieurs années. A la femme dans l’attente, il lui répond que, au mieux, il aura son premier jour de libre en 1926, trois ans plus tard : «  « Regarde ! …Encore huit jours ici, puis l’Angleterre, Londres, Manchester, Liverpool, matinée et soirée tous les jours…Oh ! la ! la ! …Après Copenhague, Stockholm…Christiania, pays pas gais, mais le change est bon…puis l’Amérique : que des chemins de fer, mais rien à faire dans le Pulmann à cause des nègres. Donc, 1923, 1924, on n’en parle pas ; 1925, toujours là-bas ; 1926, Paris du 4 au 7 janvier… » (Punch, scène 4)

Le clown Grock en 1903

Il arrivera à faire pleurer la Dame et de cette vie qu’elle imaginait merveilleuse et trépidante, à force de la rendre terne, routinière et usante : « – Le thé ! Cochonnerie ! Ça coupe l’appétit. Et je dîne de bonne heure. Faut que j’aie digéré avant mes quarante minute de bastringue…Alors bifteck, légumes verts, compote et une vieille bouteille d’Evian…C’est triste le succès. Il nous prive de tout. Je ne peux pas risquer d’être malade. Dans nos métiers, la vogue dure entre cinq et dix ans. Si tu n’as pas fait ta pelote, tu finis malheureux dans les boîtes. Alors, tu comprends, pas de blagues avec le travail, comme je disais au Monsieur ! » (Punch, scène 4)

A force de noirceur, la Dame retrouvera son homme, toujours là, à attendre, « Elle a eu une grande déception…Elle a fait un mauvais voyage…Heureusement que vous l’attendiez à la gare… » (Punch, scène 5) Et c’est dans les bras de son homme qu’elle repartira. Et Punch partira dans un « Bim-boum-bem-bam-bom-bâoo !. »  tonitruant. La belle est désormais vaccinée.

La notoriété de l’artiste, les feux de la rampe en attirent plus d’une dans les raies des lumières des  projecteurs. Mais l’aventure n’est pas où l’on croit : « Voici cet « envers du music-hall » cher à Madame Colette. M Régis Gignoux, lui aussi, oppose la réalité à la façade trompeuse. Mais il ne montre pas d’humbles détresses sous le sourire fardé, ni la mélancolie de la vie errante parmi les chambres d’hôtel solitaires et sans feu. Son clown qui a tourné la tête d’une jeune femme romanesque, est un gentleman méticuleux, soucieux de sa forme et de son hygiène et de son confort, qui tient registre de ses déplacements plusieurs années à l’avance et administre son art en parfait commerçant. La bohème, c’est bon pour la littérature : M Régis Gignoux, plus véridique, nous donne une leçon de bourgeoisie dans une loge de pitre. » (Robert de Beauplan, La Petite illustration n°158 du 18 août 1923)

 

L'appel du Clown 1923

Bien au contraire, Punch sait qu’il a tous les pouvoirs sur ce cœur ensorcelé. Il peut agir à sa guise. Mais il a vu le mari, malheureux et profondément amoureux dans sa loge. Il se doit, depuis le début, de démythifier son personnage. Elle ne le voit pas lui, mais elle voit une icône, un cri. Il la reconduit sur le bon quai de la gare. Il sait qu’il ne pourra que la rendre malheureusement et qu’elle l’aime pour de mauvaises raisons. Le clown a du cœur. Comme dans Tour est bien qui finit bien, de William Shakespeare, à la comtesse qui dit au clown qu’il restera un faquin calomniateur, celui-ci répondra  :  « Je suis un prophète, Madame, et c’est par le chemin le plus court que la vérité doit être dite. » (Acte I, scène 3)

Jacky Lavauzelle