************************** Traduction Russe Jacky Lavauzelle Жаки Лавозель ARTGITATO
Французский перевод текстов на русском языке
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Je viens d’indiquer la double valeur des écrits de Pouchkine : l’auteur de Poltava a renouvelé, comme prosateur, la langue russe, en même temps qu’il ouvrait à ses contemporains, comme poète, des sources nouvelles d’inspiration. On sait aussi quel accueil la Russie a fait à cet interprète de la pensée nationale. Quant à l’Europe, il faut le dire, elle est restée trop indifférente au rôle que Pouchkine a joué dans son pays. La France surtout n’a eu longtemps qu’une idée vague de ce grand mouvement littéraire commencé et dirigé par un seul homme. Ici même cependant, une étude biographique sur Pouchkine avait déjà indiqué l’importance de ses travaux. Pendant longtemps, on a pu s’étonner qu’une plume française ne cherchât point à le traduire. Aujourd’hui cette tâche a été abordée ; mais peut-on la regarder comme remplie ? L’auteur de la traduction française de Pouchkine qui vient d’être publiée n’a point paru se douter des difficultés que présentait un pareil travail. Il y avait là des écueils et des obstacles qui imposaient au traducteur un redoublement d’efforts. L’art de traduire, surtout lorsqu’il s’applique à la poésie, suppose une sorte d’initiation qui ne s’achète qu’au prix de veilles laborieuses. Les vulgaires esprits seuls peuvent s’imaginer qu’il suffit, pour traduire un poète, de rendre ses vers dans un autre idiome, sans s’inquiéter d’ailleurs de la physionomie, du mouvement, des nuances infinies de la pensée, des mille finesses du style. Or, ce ne sont point-là des choses qui aient leur vocabulaire écrit et ce sont pourtant des choses qu’il faut traduire, ou du moins indiquer : elles demandent une intelligence vive et délicate pour les saisir, une plume habile et souple pour les rendre. Pour transporter d’ailleurs dans son propre idiome les richesses d’une langue étrangère, il y a une première condition à remplir ; est-il besoin de la rappeler ? C’est la connaissance parfaite de la langue dont on veut révéler à son pays les richesses littéraires. Qu’on y songe, l’idiome russe est le plus difficile des idiomes européens, il est difficile même pour les Russes qui n’en ont pas fait l’objet d’une étude sérieuse. C’est une langue dont le sens positif varie à l’infini et dont le sens poétique varie encore davantage : langue souple et rude, abondante et imagée, dont l’origine, les accidents, l’esprit, l’allure, les procédés, n’offrent aucune analogie avec nos langues d’Occident. Le traducteur français des œuvres de Pouchkine a échoué pour n’avoir point compris les exigences de sa tâche. Il importe qu’on ne l’oublie pas, une traduction de ce poète exige une connaissance intime et approfondie, non-seulement de la grammaire et du vocabulaire russes, mais des finesses et des bizarreries de la langue ; elle exige aussi un long commerce avec ce génie si original, si en dehors de toute tradition européenne. Tant que cette double condition n’aura pas été remplie, notre pays, nous le disons à regret, ne connaîtra qu’imparfaitement la valeur et l’originalité du poète russe.
Pouchkine et le mouvement littéraire en Russie depuis 40 ans
Charles de Saint-Julien
Revue des Deux Mondes Œuvres choisies de Pouchkine, traduites par M. H. Dupont
T.20 18
Estatua Statue 雕像 статуя 彫像
Giuseppe Verdi
Lourdes Umerez Arregi (1955)
Dentro del Parque de Doña
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Estatua Statue 雕像 статуя 彫像
John Adams deuxième président des États-Unis ( – )
segundo presidente de los Estados Unidos
Ameriketako Estatu Batuetako bigarren presidentea
Lourdes Umerez Arregi (1955)
« Les faits sont têtus; quels que soient nos souhaits, nos inclinations ou les voeux de nos passions, ils ne peuvent changer l’état de fait et la preuve »
John Adams
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Estatua Statue 雕像 статуя 彫像
Jesús María Loroño Elguezabal
1929 2008
Larrabetzu, 1929 – Bilbo, 2008
Musicien – Músico – Musikari
Elisa – 教堂 -教会 – церковь
Iglesia del Sagrado Corazón
L’Église du Sacré Cœur
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Elisa – 教堂 – 教会 – церковь
Iglesia de San Antón
Église de saint Antoine
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Photos de Rues
Bilbao
Septembre 2016
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BILBAO
dans la Première Encyclopédie
BILBAO, (Géog.) ville capitale & port de la Biscaye, à l’embouchure du Nervio qui s’y jette dans l’Océan, appellé en cet endroit mer de Biscaye. Il s’y fait un très-grand commerce. Long. 14. 30. lat. 43. 23.
Diderot L’Encyclopédie, 1re édition Texte établi par D’Alembert Diderot, 1751 Tome 2, p. 249
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BILBAO
dans le dictionnaire de 1771
BILBAO. Ville d’Espagne, dans la Biscaie, dont elle est capitale. Bilbaum. Quelques-uns la prennent pour la Floriobriga de Ptolomée. D’autres disent qu’elle ne fut fondée qu’en 1500 par Dom Diego Lopes de Haro. Elle est à l’embouchure de la rivière de Nerio, ou d’Ibaycaval ; & son port, qui est des meilleurs d’Espagne, est celui que les Anciens appeloient amanus portus.
Jésuites et imprimeurs de Trévoux Dictionnaire universel françois et latin 6e édition – 1771 Tome 1, p. 902
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BILBAO et le Pays Basque
en 1877
J’arrivai à Bilbao dans les derniers jours de juin ; la chaleur commençait à devenir désagréable. Depuis plus de deux mois déjà je parcourais les campagnes de l’intérieur ; d’autre part, la côte cantabrique m’était recommandée comme le but d’excursion le plus charmant du monde. Ma résolution fut bientôt prise, et, sans même me donner le temps de visiter la ville, je me dirigeai vers le nord. J’allais à pied, l’unique manière profitable de voyager, de bonnes cartes dans les poches, car mon intention n’était pas de suivre toujours les chemins tracés. C’est ainsi que, dans le courant de la première journée, non loin de la petite ville de Munguia, j’aperçus, entourées d’épaisses futaies de chênes et de châtaigniers, les ruines du château de Butron. Vers le milieu du XIIIe siècle, à la suite d’une discussion futile qui s’était élevée pendant une cérémonie religieuse, la guerre civile éclata dans le pays basque, et toute la noblesse se partagea en deux camps : gamboinos et oñecinos. Comme les guelfes et les gibelins, ils arborèrent des couleurs, les uns le noir, les autres le blanc, et désormais il n’y eut plus de réunion publique, quel qu’en fût l’objet, fête, noce ou enterrement, qui ne servît de prétexte à des conflits où le sang coulait à flots. Vainement les rois de Castille, avec l’aide des corregidors et des villes, voulurent-ils intervenir ; vainement don Enrique IV donna-t-il l’ordre de démanteler tous les châteaux-forts du pays avec défense de les relever en pierres de taille à partir du premier étage ; vainement les plus dangereux des perturbateurs furent-ils saisis et déportés à l’autre bout de la Péninsule dans des villes voisines des Mores, où ils pouvaient satisfaire à loisir leurs instincts batailleurs : ces guerres, suite ininterrompue de sacs, d’incendies, de massacres, durèrent, jusqu’à la fin du XVe siècle, et il fallut la forte main d’Isabelle la Catholique pour y mettre un terme. Les Gomez de Butron étaient les principaux chefs du parti oñecino. Leur repaire s’élevait sur une hauteur escarpée, à proximité de la rivière de Plencia, dont les eaux, par un tunnel habilement creusé sous la montagne, alimentaient les fossés du donjon. Rabaissé comme tous les autres, sur l’ordre, du roi de Castille, le château de Butron a depuis longtemps perdu ses hôtes seigneuriaux : de vrais arbres, poussés au hasard dans l’épaisseur des murs, disjoignent lentement les pierres sous l’effort de leurs racines, et les paysans voisins s’y viennent fournir de moellons comme dans une carrière ; un pauvre cultivateur occupe un coin du premier étage avec sa famille, l’immense salle du bas lui sert à loger ses bestiaux. Le brave homme avait voulu me faire lui-même l’honneur de ses ruines, et il me racontait à sa façon les terribles événemens dont elles avaient été les témoins. Il est une tour, la mieux conservée, dominant à droite un ravin profond ; un jour, serré de près par ses deux mortels ennemis, les seigneurs de Villela et de Avendaño, le châtelain de Butron avait dû se retirer dans sa forteresse ; le siège traînait en longueur et la garnison, à bout de vivres, allait être forcée de se rendre, quand un écuyer, apparaissant entre les créneaux de la tour, imagina de jeter par petites poignées aux pigeons et aux volatiles qui picoraient dans le ravin les dernières mesures de blé qui restaient. A cette vue, le découragement s’empara des assiègeans : de vive force le château était imprenable ; croyant que ses défenseurs avaient des provisions en abondance, ils se décidèrent à lever le blocus. De fait, la tour et le ravin sont encore là ; mais quoi, l’histoire ancienne ne cite-t-elle pas mille ruses analogues, celle des Romains entre autres qui, assiégés dans le Capitole et réduits aux dernières extrémités, jetèrent, pour tromper les Gaulois, des pains de froment par-dessus les murs ? Assurément mon homme ne connaissait même de nom ni les Romains ni Tite-Live. Par quel prodige le même récit se retrouvait-il à une pareille distance, et qui expliquera jamais cette diffusion des fables et des légendes qui établit entre les esprits des époques et des races les plus diverses une sorte de parenté ?
…
Après tant de vieilles cités, toutes couvertes encore de la poudre du passé, je fus heureux de retrouver dans Bilbao une ville vraiment moderne par son aspect, par son animation, par ses édifices. Quoique fondée, elle aussi, vers la fin du XIIIe siècle, elle a subi une série de transformations qui ont modifié complètement son caractère primitif, et sauf le vieux pont de pierre à trois arches inégales et l’église voisine de San-Antonio-Abad qui composent ensemble les armes de la cité, ou bien encore la basilique gothique de Santiago qui existait bien avant elle, on aurait peine à y relever un monument de quelque valeur. Aussi bien Bilbao peut s’en passer. Ses rues nettes et bien tracées, pavées en cailloux, forment l’éventail et remplissent tout l’espace compris par la courbe que suit la rive droite du Nervion. Cette disposition heureuse la met de tous côtés en rapport avec le fleuve qui est navigable jusqu’au Puente Viejo, c’est-à-dire jusqu’à l’extrémité méridionale de la ville. Le port proprement dit s’étend de ce point au môle de Portugalete, sur une longueur de plus de 11 kilomètres ; de très bonne heure, il avait acquis une importance considérable, et de grands travaux furent faits pour l’améliorer. Tout d’abord, au XVIe siècle, un système de digues est construit aux frais de la casa de contratacion ou chambre de commerce de Bilbao. Plus tard, en 1712, on met à exécution le gigantesque et coûteux projet de canalisation du cours du Nervion. Malheureusement les travaux n’ont pas été poursuivis depuis avec la méthode ou l’énergie nécessaire. La passe va s’obstruant chaque jour, et les navires de fort tonnage sont obligés de s’arrêter en avant de Portugalete. Néanmoins le port est fort animé ; en 1872, le chiffre des navires, tant nationaux qu’étrangers, a été de 2,419 à l’entrée et de 2,369 à là sortie ; pour sa part, Bilbao, avec une population qui n’atteint pas 20,000 âmes, compte près de 900 bâtimens inscrits, sans parler des menues barques. Les quais, que longent de magnifiques allées d’arbres, s’étendant à perte de vue, sont encombrés de fûts, de sacs et de ballots. Pour voiturer les marchandises, les gens du pays se servent communément d’une sorte de traîneau tiré par une paire de bœufs et composé de deux madriers parallèles que relient entre eux de courtes traverses : on l’appelle narria ; mais, comme le frottement du bois sur le pavé risquerait de l’enflammer, un petit baril, placé sur le devant de la machine, laisse tomber goutte à goutte l’eau dont il est rempli et qui sans cesse humecte les madriers. Les femmes, elles aussi, prennent part aux travaux du port : il semble même que les plus rudes leur soient réservés ; les unes, dans de grands paniers, transportent le charbon ou le minerai, les autres, coiffées d’un vaste chapeau de paille, une grosse corde passée en travers des reins, remorquent péniblement les bateaux. Vers le soir, à mesure que s’apaise le mouvement du port, commence une agitation d’un nouveau genre ; les promenades avoisinantes, celle de l’Arenal surtout, si ombreuse et si vaste, sont littéralement envahies par des bandes tapageuses de petites filles et de petits garçons. Que d’enfans ! Je ne me souviens pas d’en avoir jamais tant vu. Dans certaines provinces de l’intérieur, à Tolède par exemple, la vieille cité impériale, fauve amas de décombres d’où la vie semble bannie pour toujours, j’avais cherché en vain cette gaîté que répand dans les rues et sur les promenades la sortie des écoles ; les familles y sont stériles, les maisons sans enfans. Ici au contraire c’est une fécondité, une exubérance de sève qui vous jette dans les jambes à chaque pas une envolée de lutins frais et roses : tout ce petit monde crie, court, saute, se poursuit, tombe et se relève ; les rondes se forment, et les parties de paume s’organisent sous les yeux des parens, heureux de cette joie. En raison même de sa position au centre d’une petite plaine dominée de trois côtés par de hautes montagnes, Bilbao en temps de guerre se trouve toujours exposée. Du mois de juin 1835 au mois de décembre 1836, assiégée à trois reprises par les armées du prétendant Carlos V, elle repoussa toutes les attaques avec un héroïsme qui lui valut du gouvernement de la reine Isabelle le titre de très noble, très loyale et invincible cité. De nos jours, les carlistes eussent gagné à sa possession, en même temps qu’une capitale de premier ordre et une base solide d’opérations, une garantie devenue nécessaire pour leurs emprunts à l’étranger. Le 29 décembre 1873, on sut à Bilbao que le passage du fleuve venait d’être coupé à quelque distance avec les chaînes d’un chemin de fer aérien qui servait naguère au transport du minerai ; depuis plusieurs mois déjà, la circulation était interrompue sur la voie ferrée. Sans perdre de temps, les carlistes ouvrirent un feu très vif sur Portugalete, qui, coupé lui-même de ses communications avec la mer, dut capituler ; deux détachemens de troupes, postés en observation entre Portugalete et Bilbao, eurent le même sort : le siège allait sérieusement commencer. Les fortifications, mises en état dès le début de l’été, consistaient en trois forts détachés et huit batteries : tous ces ouvrages étaient par malheur beaucoup trop proches de la place ; la garnison se composait de deux régimens de ligne et d’un petit nombre de soldats des autres armes, plus 400 hommes choisis de garde forale ; les bourgeois de la ville formèrent un bataillon de milice qui, comme il arrive en pareil cas, ne tarda pas à jouer dans la défense le rôle le plus important. Du reste, toute la population, dévouée de longue date aux idées libérales, était décidée à une énergique résistance. Une première tentative faite, par Moriones pour débloquer la place du côté de la mer avait misérablement échoué. Pendant ce temps, les carlistes élevaient au-dessus de la ville leurs batteries de bombardement. Leurs principaux chefs étaient Andechaga et le marquis de Valdespina : l’un vieillard convaincu, austère, vétéran de l’ancienne guerre, devenu impitoyable avec l’âge, l’autre, bien connu à Bilbao, où il avait habité longtemps, honnête lui aussi, énergique, mais tête faible, et joignant à une surdité devenue légendaire une déplorable exaltation d’esprit. Le bombardement commença le 21 février et se poursuivit près d’un mois et demi avec une extrême vigueur. Non contens de cribler la ville de bombes et d’obus, les assiègeans entretenaient autour d’elle une fusillade ininterrompue. Les libéraux répondaient de leur mieux : successivement ils avaient appris, de la bouche même de leurs adversaires, que Moriones, accouru de nouveau, avait été arrêté le 25 février devant San-Pedro-Abanto, puis qu’un mois après, jour pour jour, dans cette même vallée de Somorrostro, le maréchal Serrano, à son tour, avait éprouvé un cruel échec ; les provisions s’épuisaient, on en était réduit au pain de fèves et à la viande de cheval : les cartouches mêmes allaient manquer. C’est alors qu’un messager du dehors, trompant la surveillance de l’assiégeant, parvint à s’introduire dans la place : il apportait l’annonce d’une prochaine délivrance, et en effet le maréchal Concha, avec une armée de 20,000 hommes, en grande partie composée de gardes civils et de carabiniers, se préparait à prendre à revers par Valmaseda la gauche des ennemis, tandis que Serrano immobilisait leur centre et leur droite. L’opération réussit presque sans combat, et, pour n’être pas coupés dans leur ligne de retraite, pendant la nuit du 1er mai, après avoir jusqu’au dernier moment fait feu de toutes leurs batteries, les carlistes se décidèrent à lever le siège. Le même jour, les deux généraux libérateurs faisaient ; leur entrée dans la ville : ce triomphe coïncidait avec une des fêtes nationales les plus populaires de l’Espagne, celle du Dos de mayo ; l’enthousiasme fut immense dans le pays.
J’avais fait la connaissance à Bilbao d’un des hommes les plus distingués et les plus instruits de la ville. Imprimeur de son état, don Juan Delmas avait compris le métier à la façon des grands travailleurs du XVIe siècle, les Alde, les Estienne, Il était fou d’antiquités, ami de tous les arts, très curieux surtout des choses de son pays, sur lequel il avait réuni des documens fort précieux qu’il se proposait de mettre en œuvre. Il avait même publié déjà un Guide pittoresque de la Vizcaye, livre intéressant et fort bien écrit. Après trente ans de persévérance et d’efforts, sa fortune faite, il allait se retirer des affaires quand la guerre civile était venue renverser l’édifice laborieusement élevé de toute sa vie. Dès le premier jour, il m’avait témoigné une confiance dont je ne saurais lui être trop reconnaissant, et comme je l’interrogeais : « C’est une douloureuse histoire que vous me demandez là, dit-il, hésitant à s’engager sur la pente de ses souvenirs. J’ai dans ma jeunesse vécu à Paris ; je suivais les cours de la Sorbonne, précisément avec Valdespina, un peu plus âgé que moi ; nous étions tous deux des auditeurs assidus de M. Villemain ; en même temps j’étudiais dans les ateliers de vos peintres les plus connus. Plus tard je voyageai beaucoup pour mes affaires, je visitai la plus grande partie de l’Europe, mais, toujours fidèle aux beaux-arts et à l’amour du sol natal ; je pus réunir ainsi, dans les Flandres principalement, outre une collection complète d’œuvres des maîtres de l’école espagnole, une foule de livres et d’objets intéressant l’histoire de l’Espagne ou du pays basque. Avec cela, mon commerce prospérait, l’âge et la fortune m’étaient venus à la fois ; je résolus de me faire construire un château ; est-ce bien pour moi qu’il faut dire ? Moi-même j’en dessinai le plan ; toutes mes collections y trouvaient place dans des salles aménagées, ornées, ajourées tout exprès. Ici les bijoux et les médailles, plus loin les aquarelles et les dessins ; ailleurs encore les tableaux. Bien des musées eussent fait triste figure à côté du mien ; mais ma bibliothèque était mon plus beau joyau ; pensez donc : 6,000 volumes, tous rares et longuement cherchés ; là-dessus 142 incunables ; les Décrétates de Venise, avec la date de 1477, sorties des presses de Jenson ; les 53 chroniques d’Espagne, imprimées en lettres gothiques à deux couleurs par Juan del Cano, à Médina del Campo, sur l’ordre de la grande Isabelle ; le Très heureux voyage du roi Philippe II dans les terres basses d’Allemagne, par le père Estrella ; le récit de l’expédition d’El Cano, par un de ses compagnons, volume écrit en espagnol et imprimé à La Rochelle en 1507. Combien d’autres encore ! Puis un grand nombre de manuscrits inédits : le Livre de Lope Garcia de Salazar, la Chronique de la maison de Vizcaye, par Padilla, une Chronique du Guipuzcoa, par le bachelier Zaldivia… Mon rêve était de me retirer définitivement du commerce, d’aller jouir en paix de mes trésors ; je m’étais promis de publier plus de trente volumes de documens curieux sur le Señorio, avec des notes de ma main auxquelles j’avais travaillé toute ma vie ; c’eût été mon œuvre à moi, un hommage rendu à mes concitoyens, en même temps qu’une marque durable de mon passage ici-bas. En attendant, j’étais heureux, je ne me connaissais que des amis : on se disputait bien un peu entre antiquaires sur quelque point douteux d’histoire, sur une étymologie, sur un mot, mais cela si courtoisement, et toujours à la plus grande gloire de la nationalité euskarienne !
Revue des Deux Mondes tome 22 1877 L. Louis-Lande Trois mois de voyage dans le pays basque
Anton Pavlovitch Tchekhov Антон Павлович Чехов
1860-1904
Россиитеатр
Théâtre Russe
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Les Méfaits du Tabac
О вреде табака
Scène monologue en un acte Сцена-монолог в одном действи
3/3
Действующее лицо
Acteur (un seul personnage)
Иван Иванович Нюхин, муж своей жены, содержательницы музыкальной школы и женского пансиона.
Ivan Ivanitch Nioukin, le mari de la directrice d’école de musique et d’un pensionnat de jeunes filles.
(Приближается к рампе.) (En s’approchant de la rampe.) Дочерей моей жены можно видеть по большим праздникам у тетки их Натальи Семеновны, той самой, которая страдает ревматизмом и ходит в этаком желтом платье с черными пятнышками, точно вся осыпана тараканами. lesfillesde ma femme, on peut les voir, les jours des grandesvacances ,chezleur tanteNathalieSemenovna, celle qui souffrede rhumatismes, et qui a une robe isabelle avec des taches noires, comme une pluie de cafards. Там подают и закуски. Elles servent là-bas des collations. А когда там не бывает моей жены, то можно и это… Et quandil n’y a pasma femme, il est même possible… (Щелкает себя по шее.) (il mime quelqu’un qui boit) Надо вам заметить, пьянею я от одной рюмки, и от этого становится хорошо на душе и в то же время так грустно, что и высказать не могу;
Je dois vous faire remarquer que je me saoule dès le premier verre, et que cela me fait du bien à l’âme et, en même temps, j’ai une si grande tristesse… que je n’arrive pas l’exprimer ; вспоминаются почему-то молодые годы, и хочется почему-то бежать, ах если бы вы знали, как хочется! J’ai alors en tête, pour je ne sais quelles raisons, mes jeunes années, et je cherche à m’échapper, en quelque sorte, oh ! si vous saviez comme je le veux ardemment ! (С увлечением.) (Avec enthousiasme.) Бежать, бросить всё и бежать без оглядки…
Courir, tout laisser tomber et s’enfuir sans regarder en arrière … куда?
pour aller où ? Всё равно куда…
Ça n’a pas beaucoup d’importance… лишь бы бежать от этой дрянной, пошлой, дешевенькой жизни, превратившей меня в старого, жалкого дурака, старого, жалкого идиота, бежать от этой глупой, мелкой, злой, злой, злой скряги, от моей жены, которая мучила меня тридцать три года, бежать от музыки, от кухни, от жениных денег, от всех этих пустяков и пошлостей…
juste fuir cette médiocrité, cette vulgarité, une vie de misère, qui a fait de moi un vieux fou malheureux, un vieil idiot pathétique, fuir cette stupide, méchante, avare femme, qui m’a tourmenté trente-trois ans, fuir la musique, fuir la cuisine, fuir l’argent de ma femme et toutes ces futilités et ces banalités … и остановиться где-нибудь далеко-далеко в поле и стоять деревом, столбом, огородным пугалом, под широким небом, и глядеть всю ночь, как над тобой стоит тихий, ясный месяц, и забыть, забыть… et de rester loin,quelque part,loin, très loindans une campagne etêtre comme un arbre, un poteau, unépouvantail de potager, sous le grand ciel, et regardertoute la nuit ce ciel, être calme, sous la lune lumineuseet oublier, oublier … О, как бы я хотел ничего не помнить!.. Oh, comme j’aimerai tout oublier !.. Как бы я хотел сорвать с себя этот подлый, старый фрачишко, в котором я тридцать лет назад венчался… Comme je voudraisarracherces viles vieilles frusques dans lesquelles,il y a trenteans, je me suis marié… (срывает с себя фрак) (il arrache son costume) в котором постоянно читаю лекции с благотворительною целью… avec lesquelles je fais mes conférencesen permanencepour la charité… Вот тебе! Tiens, voilà ! (Топчет фрак.) (En piétinant son costume.) Вот тебе! Voilà pour toi ! Стар я, беден, жалок, как эта самая жилетка с ее поношенной, облезлой спиной… Je suis vieux, pauvre, misérable, comme cegiletusé, minable … (Показывает спину.) (Il montre son dos.) Не нужно мне ничего!
Rien, je n’ai besoin de rien ! Я выше и чище этого, я был когда-то молод, умен, учился в университете, мечтал, считал себя человеком… Jesuis plus grandque tout ça …jadis, j’étais jeune, intelligent, j’étudiais à l’université, jadis, je rêvais, je pensais comme un homme… Теперь не нужно мне ничего! Maintenant, je n’ai besoin de rien ! Ничего бы, кроме покоя… Rien que du repos, que l’on me laisse reposeren paix…! (Поглядев в сторону, быстро надевает фрак.) (Il regarde ailleurs, rapidement il se rhabille.) Однако за кулисами стоит жена… Je vois dans les coulisses ma femme… Пришла и ждет меня там… Elle vient d’arriver et m’attend là-bas … (Смотрит на часы.) (Il regarde sa montre.) Уже прошло время… C’est le moment de conclure… Если спросит она, то пожалуйста, прошу вас, скажите ей, что лекция была… Sielle demande, s’il vous plaît, je vous en prie, dites-lui bien que laconférence s’est bien déroulée… что чучело, то есть я, держал себя с достоинством. et que l’épouvantail, c’est-à-dire moi, … que je me suis comportéavec dignité. (Смотрит в сторону, откашливается.) (Il regardede côté etse racle lagorge.) Она смотрит сюда… Elle regardeici … (Возвысив голос.) (en élevant la voix.) Исходя из того положения, что табак заключает в себе страшный яд, о котором я только что говорил, курить ни в каком случае не следует, и я позволю себе, некоторым образом, надеяться, что эта моя лекция Basé sur le principeque le tabaccontient un terrible poison, dont jeviens de parler, on ne devrait en aucun cas fumer, et j’espère, d’une certaine façon,… je souhaite que cetteconférence «о вреде табака» « sur les méfaits du tabac » принесет свою пользу. aura été profitable à tous. Я все сказал. J’en ai terminé.
Dixi et animam levavi!
(Кланяется и величественно уходит.) (Il salue l’assemblée et majestueusementsort.)