POEMES DE SHELLEY – SHELLEY’S POEMS

LITTERATURE ANGLAISE

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PERCY BYSSHE SHELLEY
4 August 1792 – 8 July 1822
4 août 1792 – 8 jullet 1822

 

 

Traduction – Translation

TRADUCTION JACKY LAVAUZELLE

French and English text
texte bilingue français-anglais

 


LES POEMES
DE PERCY BYSSHE SHELLEY
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Shelley’s poems
POEMS
POEMES

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ODE TO THE WEST WIND
ODE AU VENT D’OUEST

I
O, wild West Wind, thou breath of Autumn’s being
Insoumis Vent d’Ouest

O, wild West Wind, thou breath of Autumn’s being,
O, insoumis Vent d’Ouest, souffle de l’être de l’Automne,
 
Thou, from whose unseen presence the leaves dead
Toi, présence invisible dispersant les feuilles mortes

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II
Thou on whose Stream
Les Branches entremêlées du Ciel et de la Terre

Thou on whose stream, ‘mid the steep sky’s commotion,
 Toi dont le courant, dans les hauteurs du ciel agité,
Loose clouds like earth’s decaying leaves are shed,
 Se joue des nuages comme des feuilles pourries gisant sur la terre,

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III
Thou who didst waken from his summer dreams
Les Impassibles ondes des courants cristallins

Thou who didst waken from his summer dreams
Toi qui as réveillé de ses rêves estivaux
  
The blue Mediterranean, where he lay,
La Méditerranée indigo, allongée

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IV
If I were a dead leaf
Les épines de la vie

If I were a dead leaf thou mightest bear;
Si j’étais une feuille morte que tu puisses transporter ;
If I were a swift cloud to fly with thee;
Si j’étais un véloce nuage et que je vole à tes côtés ;

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V
The trumpet of a prophecy
La Trompette d’une prophétie

Make me thy lyre, even as the forest is:
Que je sois ta lyre à l’instar de la forêt :
What if my leaves are falling like its own!
Même si mes feuilles doivent tomber comme les siennes !

 

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POESIE DE SHELLEY

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SHELLEY UNE ANOMALIE INTELLECTUELLE

Shelley est encore un proscrit de la société anglaise, si l’on peut appeler proscrit un homme dont le cœur et l’esprit semblaient n’avoir pas de patrie. Shelley est une véritable anomalie intellectuelle, un phénomène aussi curieux de l’infatuation de l’esprit que l’est Byron de l’infatuation du cœur. À voir ce visage enfantin et rougissant comme celui d’une jeune fille, ces grands yeux limpides et rêveurs, ce corps frêle enfermé dans une veste noire trop étroite, il n’était point aisé de reconnaître au premier abord l’homme en guerre ouverte avec toute la société et avec toutes les idées de l’Angleterre. Cette nature si délicate en apparence, si vigoureuse en réalité, allait exercer cependant sur la nature plus souple de Byron une influence puissante, qui devait aussi plus tard dominer la poésie contemporaine de l’Angleterre.
Né en 1792, quatre ans après Byron, Shelley n’avait pas eu de jeunesse. Il vécut et mourut isolé. Comme tous les esprits absolus, il commença par repousser avant de dominer. Il appartenait à une famille ancienne et considérée, et devait être un jour baronet d’Angleterre. On le mit au collège d’Eton ; mais la liberté presque excessive des écoles anglaises était encore une contrainte pour cette âme aventureuse. Au lieu de suivre les cours, il travaillait solitairement, ne frayait point avec ses camarades, dont il était détesté, et s’enfermait des journées entières dans un laboratoire de chimie, où il faillit un jour sauter avec tous ses appareils. Il passa de l’enfance à la jeunesse, d’Eton à Oxford, sans assouplirent aucune façon cette humeur indépendante. Il avait seize ans quand il publia le livre qu’il avait intitulé modestement la Nécessité de l’athéisme. Ce fut un scandale inouï dans la docte université. Sans se laisser troubler par l’orage qui gronde sur sa tête, Shelley adresse poliment son ouvrage à tous les évêques d’Angleterre, et quand il est appelé pour être censuré auprès des chefs de University Collège, il leur propose tranquillement d’argumenter contre eux en faveur de sa thèse. On ne pouvait guère espérer de ramener un esprit de cette trempe. L’exclusion fut prononcée, et de ce jour commença pour Shelley une vie errante qui ne devait se terminer qu’avec la mort. On se demande avec un étonnement douloureux quelles sont les bornes de la présomption humaine, si un écolier de seize ans peut se figurer de bonne foi qu’il a résolu à lui seul le problème de notre destinée. La même audace réfléchie l’entraîna bientôt dans les liens d’un mariage inégal, à la suite duquel il fut renié par tous les siens et déshérité par son père. Puis le scandale vint s’ajouter au scandale. Une union si imprudente (les époux avaient à eux deux trente-deux ans) devait avoir les conséquences les plus malheureuses. Shelley se sépara violemment de sa femme, qui mourut plus tard de douleur dans son abandon. Cette âme errante ne pouvait cependant rester sans attache ici-bas. Un nouveau mariage l’unit à miss Mary Wolstoncraft Godwin, fille d’un père et d’une mère également célèbres dans la littérature de leur pays. Il fallut cependant de pressantes sollicitations pour l’engager à donner à cette union une consécration civile et religieuse. Avec bien d’autres idées excentriques, Shelley avait devancé l’auteur de Jacques dans ses libres opinions sur le mariage. Il erra longtemps de lieu en lieu, fort gêné dans ses moyens d’existence. Il alla se jeter au milieu de l’insurrection irlandaise pour pacifier les partis, qu’il haranguait éloquemment dans des discours et des brochures, se replaçant ainsi sur le terrain naturel du génie anglais, la politique.
Comment s’amalgamèrent dans un pareil esprit les éléments nécessaires de toute poésie, c’est ce qu’il est difficile de comprendre. Certes, s’il suffisait de vastes conceptions pour ouvrir les ailes de la poésie, jamais sujets plus grands que ceux auxquels s’attaqua Shelley ne tentèrent le génie d’un poète. Sans parler de la Révolte d’Islam, où le poète athée développait par une heureuse contradiction le dogme de la perfectibilité humaine, un autre poème, la Reine Mab, embrassait dans une fantaisie aérienne toutes les questions qui intéressent la destinée, humaine, et le char brillant de la reine des fées poursuivait son voyage fantastique en traînant péniblement de lourdes citations empruntées à d’Holbach et à La Mettrie. Prométhée déchaîné ne semblait-il pas l’inspiration naturelle de ce génie révolté, parcelle d’esprit divin égarée dans un corps ? Mais la philosophie n’est point la poésie. La poésie, c’est l’homme tout entier dans l’infinie variété de ses sentiments et de ses affections. Quiconque en cherche le principe dans l’abstraction risquera fort de n’être ni philosophe ni poète. Toute la philosophie d’Hamlet, toute sa folie est née d’une passion : elle est humaine, et c’est pour cela qu’elle nous émeut. Shelley était poète cependant, il l’était trop peut-être, car les images s’entassent et se pressent dans la trame de ses vers, au point d’intercepter l’air et la lumière. Chaque mot y semble ciselé à part, poli comme la pierre dure d’une marqueterie, tant il a sa valeur, sa force et sa couleur propres. La poésie de Shelley ressemble à ces idoles orientales, ensevelies sous les diamants : elle frappe et n’émeut pas ; elle reste dans le souvenir comme une vision brillante, mais fantastique, qui s’évanouit au réveil.
Les plus difficiles parmi les critiques anglais font pourtant grâce à la tragédie des Cenci, dans laquelle Shelley essaya de faire vibrer des cordes plus humaines. Et cependant les Cenci sont une tragédie d’enfant écrite avec la plume d’un homme. Le vêtement brillant dont il l’a revêtue ne peut dissimuler la nudité des sentiments. Les méchants y grincent des dents comme le démon dans les contes de nourrice, ou bien ils font des plaisanteries qui font dresser les cheveux sur la tête, de sorte que les bons ne peuvent que pousser des exclamations d’horreur fort justifiées par le tissu d’abominations qui se déroule sous leurs yeux. Béatrice Cenci, toute pure et vaillante qu’elle est, n’a point et ne peut avoir de paroles pour exprimer la honte de sa flétrissure, elle ne trouve son éloquence que devant ses bourreaux. Où sont ces contrastes d’horreur et de poésie, ces élans de la conscience bourrelée de remords, ces alternatives de bons et de mauvais instincts qui nous émeuvent jusque sur les forfaits de Macbeth ? Pour peindre la nature humaine, il faut sentir comme tous les hommes et les observer. Shelley avait l’âme aussi solitaire que l’esprit ; son imagination était naturellement fantastique, non pas de cette fantaisie brillante qui n’est que l’exubérance de la vie, de cette fantaisie de Shakespeare que Coleridge a comparée au sifflement d’une badine agitée dans l’air par un joyeux et vigoureux garçon un beau matin de printemps, mais de cette fantaisie qui naît et s’éteint dans le vide, et ne s’aventure que dans les régions inexplorées. L’intelligence nette et sensée de l’Angleterre a mis longtemps à comprendre Shelley, et tel l’imite aujourd’hui qui aurait peut-être de la peine à l’expliquer.
Tel est l’étrange talent dont l’influence développa tout un côté nouveau dans le génie de Byron. Byron n’admirait cependant de tous les vers de Shelley qu’un fragment terne et insignifiant ; mais il subit la domination de son esprit. Un grand charme l’attira d’abord vers Shelley. Shelley avait pour lui la plus précieuse des qualités sociales, une absence complète de préoccupation personnelle. Il n’y avait rien à graver sur le marbre lisse et poli de son âme. Byron se laissa prendre tout doucement à cette facile bonhomie. M. Trelawny n’hésite point à déclarer que Shelley était le plus aimant et le plus sensible des hommes ; mais j’ai peine à croire à une sensibilité sur laquelle la douleur vient s’émousser sans laisser ni trace ni blessure. Renié par les siens, banni de son pays, Shelley n’avait point l’ombre d’amertume contre personne. C’est qu’en réalité il n’était guère plus occupé des autres que de lui-même. C’était un pur esprit égaré dans un corps. Il faisait mieux que mépriser la guenille que son esprit avait revêtue ici-bas, il n’y pensait pas. Il était un parfait modèle de l’ataraxie stoïcienne. Un pareil caractère était et devait être d’une parfaite égalité. Comme on l’a dit de Napoléon,
Sans haine et sans amour, il vivait pour penser….

Edmond de Guerle
Byron, Shelley et la Littérature anglaise, d’après les Souvenirs des derniers Jours, de E.-J. Trelawny
Revue des Deux Mondes
Deuxième période
Tome 19
1859

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