GIOVANNI PASCOLI Il Gelsomino Notturno LE JASMIN DANS LA NUIT

Giovanni Pascoli

Traduction – Texte Bilingue
Poesia e traduzione

LITTERATURE ITALIENNE

Letteratura Italiana

GIOVANNI PASCOLI
1855-1912

Giovanni Pascoli artgitato poesie poesia

Traduction Jacky Lavauzelle

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Il gelsomino notturno
Le Jasmin dans la Nuit
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 E s’aprono i fiori notturni,
Et les fleurs nocturnes s’ouvrent,
nell’ora che penso ai miei cari.
Alors qu’à mes proches je pense.
Sono apparse in mezzo ai viburni
Au cœur des viornes viennent d’apparaître
le farfalle crepuscolari.
Les papillons crépusculaires.




Da un pezzo si tacquero i gridi:
Alors, les cris se taisent :
là sola una casa bisbiglia.
Seule, une maison murmure.
 Sotto l’ali dormono i nidi,
Sous les ailes les nids s’endorment,
  come gli occhi sotto le ciglia.
comme sous les cils les yeux.
Dai calici aperti si esala
Des calices ouverts s’ouvre
l’odore di fragole rosse.
Une fragrance de fraises rouges.
 Splende un lume là nella sala.
Une lumière dans la salle flamboie.
Nasce l’erba sopra le fosse.
Sur les tombes l’herbe croît.
 Un’ape tardiva sussurra
Bourdonne une abeille attardée
trovando già prese le celle.
Devant sa plante accaparée.
La Chioccetta per l’aia azzurra
La mère protectrice par l’air azuré
va col suo pigolio di stelle.
Glisse dans une myriade d’étoiles.
Per tutta la notte s’esala
Toute la nuit s’exhale
l’odore che passa col vento.
L’odeur qui se répand par le vent.
Passa il lume su per la scala;
La lumière s’engage dans l’escalier ;
brilla al primo piano: s’è spento…
Au premier étage, elle resplendit, puis s’évanouit…




È l’alba: si chiudono i petali
C’est l’aube. Les pétales s’occultent
un poco gualciti; si cova,
Un peu froissés ; se couve,
dentro l’urna molle e segreta,
Dans une molle urne secrète,
 non so che felicità nuova.
Je ne sais quel nouveau bonheur.

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GIOVANNI PASCOLI
par
PAUL HAZARD
en 1912

« Il aimera toute la nature« 

Cet art très objectif est tout pénétré de sentiment. Ce pourrait être la haine de la nature marâtre, qui met au inonde les créatures pour les torturer, si nous ne nous rappelions ici la bonté essentielle de Pascoli : il ne se lasse jamais d’exprimer sa douleur, parce qu’il ne l’oublie jamais : mais de sa souffrance, plutôt qu’à la légitimité de la révolte, il conclut à la nécessité du pardon. Désirer la vengeance, blasphémer ou maudire, ne serait-ce pas perpétuer le mal sur la terre, et prendre rang parmi les coupables ? Ayant éprouvé qu’il y a dans la vie un insondable mystère, ils doivent se serrer les uns contre les autres, ceux que le même mystère angoisse ; ils doivent se chérir et s’entr’aider, pour prendre leur revanche contre le sort. La pitié, la tendresse, la douceur, voilà donc les sentimens qui pénétreront les vers du poète, et qui, partant des hommes, aboutiront aux choses. Parmi les hommes, il s’intéressera d’abord aux victimes, aux orphelins, aux malades ; puis aux humbles, aux pauvres, aux misérables ; puis encore, aux simples et aux primitifs. Pareillement, il aimera les arbres qui frémissent au vent, les fleurs qui tremblent sur leur tige, et la faiblesse gracieuse des oiseaux : comme saint François d’Assise, puisqu’on a dit de lui qu’il était un Virgile chrétien, ou un saint François païen ; comme ce Paolo Uccollo dont il a écrit la touchante histoire. Il aimera toute la nature : soit qu’il aperçoive en elle des symboles, et veuille voir des berceaux dans les nids ; soit qu’il manifeste une reconnaissance émerveillée pour les tableaux de beauté qu’elle lui présente ; soit qu’il l’associe aux hommes dans la lutte contre le mystère qui l’enveloppe elle-même, il finit par la considérer comme une mère très douce, qui nous berce encore à l’heure où nous nous endormons. « Ah ! laissons-la faire, car elle sait ce qu’elle fait, et elle nous aime !… » Ce sentiment-là, il nous le communique sans prétendre nous l’imposer. En effet, cet artiste épris d’exactitude, connaissant la valeur de la précision, en connaît aussi les limites. Il sait qu’au-delà du terme où l’analyse peut atteindre, il y a les forces presque inconscientes qu’il faut laisser agir par elles-mêmes après les avoir mises en mouvement. Il possède la pudeur rare qui consiste à ne pas vouloir tout dire ; à faire crédit à la sensibilité du lecteur ; à se taire lorsqu’il a provoqué le rêve, afin de ne le point troubler.
Giovanni Pascoli
Paul Hazard
Revue des Deux Mondes Tome 10-  1912




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Il gelsomino notturno



Traduction Jacky Lavauzelle
artgitato
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